Critique(s)/Commentaire(s) de L.Ventriloque

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Page 17 sur 18 (900 critiques au total)

  • LE DIABLE PROBABLEMENT (1976)
    Note : 13/20
    Rien que pour s'instruire sur la lucidité des écologistes d'antan, ça vaut le coup de se pencher sur le regard Bresson concernant l'inconscience des puissants du monde... Je trouve le fond palpitant dans sa lucidité désespérée, et on était encore qu'en 1976, mais tout est relatif, hein ?... Attention, il s'agit d'un jeune homme et non d'une jeune fille malgré ses allures androgynes, des comme lui, aussi désabusés, aussi enfant gâté aussi d'une certaine manière, il en pullulait dans les seventies sous nos latitudes ... La forme du film est d'une austérité, d'un académisme, cette diction monocorde, ces trucs d'intello sérieux, on a envie de les pincer... Intéressants travers humains, cette compensation à vouloir glisser vers le néant... Au point où on est rendu côté environnement en 2009, par moments démange une folle envie de déclarer que le courage serait peut-être de vivre "vaille que vaille" comme le chantait si bien Barbara dans son "mal de vivre", oui, après tout, puisqu'il s'avère si difficile de convaincre ceux qui se disent "après moi le déluge" ! Le fait est que les peuples en réelle souffrance de tous les jours bataillent pour leur survie sans autant d'états d'âme, qui font un peu flemmard... Rien à redire côté technique en revanche, des fulgurances, on en apprend de belles et on peut mesurer encore un coup à quel point "la terre encaisse" ! Les plans fixes dans la pénombre peuvent être accélérés sans que cela nuise, surtout ne pas décrocher d'ici le dénouement, des images tellement noyées de gris qu'il est permis de demeurer dubitatif quant à la victime !
  • ASSOIFFÉ (1957)
    Note : 17/20
    Indispensable de se projeter dans l'Inde des années cinquante après avoir intégré la mort d'overdose du réalisateur en 1964... L'atmosphère traversée de chansonnettes chaloupées met à rude épreuve la fibre féministe... Heureusement, se devine en arrière-plan un épris d'absolu, d'une lucidité sidérante... Sirupeuses mélopées indiennes, oeillades de souris dansant devant l'icône masculine seule décisionnaire. Il faut accepter ce décor pour en venir au point capital, les poètes hors normes, ces parias occupés à dire ce qui doit être tu. Point fort : la virtuosité du chef opérateur... Point faible : l'aspect larmoyant rattrapé par la pertinence du discours. Jamais de complaisance pour l'esprit moutonnier ! Sous les dehors sucrés, il s'agit d'un traitement au vitriol de la cupidité, de la versatilité humaine, d'office majoritaire au nom des intérêts du moment, avec cette manie de vénérer les morts en gommant les vivants insoumis à la pensée des plus forts (gros écho en 2009 !...). Symbole de la fontaine sans eau, saisissant gros-plan d'un Jésus en Croix sur la première page de "Life" lu par une "traîtresse" ayant muté vers le milieu qui rapporte ! Hymne aux écrivains piétinés, aux escrocs, aux faux-frères, aux mères mésestimées, à la condition féminine séculaire... L'exil pour espérer respirer un peu ?... Audacieux paradoxe que la sincérité d'écrivain (assuré du chômage de son vivant !) face au plus vieux métier du monde qu'est la prostitution des femmes sous la coupe masculine (offrant gîte et couvert !)... Le récit gagne en intensité sur la fin, surtout bien lire les paroles des chansons afin d'en mesurer la portée intemporelle et universelle... Au total, une absence de concessions qui force l'admiration !
  • PALE RIDER (1985)
    Note : 16/20
    Des galopades, un petit chien paniqué, la terreur sur les visages, la tension du film qui vous saisit et ne saurait vous lâcher... Facture classique, c'est justement ça qui accroche, pas besoin de gros effets spéciaux avec une bonne histoire, en v.o., c'est un excellent divertissement sur dvd. Clint Eastwood s'approprie ici le mythe initialisé par Sergio Leone, "le bon", mais avec la discrète ironie qui le caractérise. C'est bien le seul des rescapés du western spaghetti à pouvoir se permettre des prolongations. Cavalier miracle en attente posé sur le paysage ou réduit à un chapeau posé par terre... Sourire du spectateur au début de "l'apparition" : encore possible d'adhérer ou est-ce que l'égo du cinéaste va transpirer et reléguer ce mythe du vertueux insaisissable au rayon Jeunesse ?... Mais voici que point l'inquiétude pour ce voyageur déboulant dans le génocide local, trop beau qu'il arrive à ses fins, va se faire avoir... Fripouilles éliminées, population terrifiée, femmes (devant et derrière l'écran) rien moins que tétanisées... Eastwood est ici pasteur, l'être impossible à posséder, il doit rejoindre les drogues dont il faut vite se sevrer. Hymne à la séduction naturelle, à l'intensité de communication, à la responsabilité des personnes une fois le minimum de protection recouvré. En arrière-plan, on sent une équipe choisie avec minutie et dirigée en toute autonomie de A à Z par Eastwood... Chaque plan, chaque dialogue, sèment de la profondeur et mettent le nez dans les ravages du profit, d'actualité à toutes les époques, en 2008 aussi... Pour ceux qui aiment l'action émaillée de suspense, pour celles qui raffolent d'un romantisme de fait plus que de bla-bla. Faussement racoleur sur la forme, attachant sur le fond. L'équivalent d'un message biblique de la part d'un homme libre, et au talent qui ne lasse pas de surprendre !
  • FRENCH-CANCAN (1955)
    Note : 19/20
    Mis à part quelques aspects qui font un peu antiques en 2012, c'est un hymne à la liberté individuelle, un petit chef d'oeuvre d'orchestration générale, ces grappes autour des portes, ce directeur en coulisses qui bat la mesure... Délicieux toujours plus, si l'on prend le temps de découvrir les coulisses du tournage, le témoignage a posteriori de Françoise Arnoul encore sous le charme de l'épreuve, de quoi mesurer l'intensité des situations que Renoir tissait, d'approcher la traversée du désert que fut le scénario avant d'aboutir... L'amusement général de l'équipe sous le travail minutieux se perçoit dans le film, ainsi que les tiraillements du réalisateur bigame de retour des Etats-Unis où il se sentait à l'étroit. On nage en pleine parenté entre le peintre Auguste et son fils désormais enrichi des connaissances acquises dans le sanctuaire hollywoodien. Tout le meilleur de la comédie musicale est ici remouliné à grands renforts de piments made in France. Aucune gauloiserie cependant. Jamais vulgaire et cependant drôlement audacieux pour les fifties... A retenir la dernière séquence, à l'arrière ses chapeaux lancés, au premier plan les grands écarts du plancher à quelques genoux conciliants, un travail colossal pour une magnifique liesse, et des plus contagieuses !
  • MILLIARDAIRE D'UN JOUR (1961)
    Note : 16/20
    Grand classique inspiré des sujets préférés du cinéma muet, les écarts de classe utilisés comme terreau des liens communautaires, l'enfant dupé par héroïsme maternel. Des acteurs de talent comme Glenn Ford et Bette Davis viennent préciser les bons sentiments à la base de l'entreprise hautement périlleuse. C'est agréable à suivre du fait de la virtuosité du filmage. Impossible d'en garder un souvenir impérissable cependant. La raison en est le trépidant "French Cancan" de Renoir regardé par hasard la veille en dvd (film et bonus) dont les scènes de comédie musicale qu'on jurerait puisées ici, passées à la moulinette et fortement pimentées n'ont de cesse de remonter à la mémoire.
  • GERTRUD (1964)
    Note : 18/20
    Les valeurs d'absolu incarnées par l'élément féminin peuvent se lire de plusieurs façons dans ce dernier film de Dreyer, longtemps tabou, hué ou boudé à sa sortie, à l'exception de quelques voix élevées en sa faveur. C'est statique mais pas trop, froid, et pourtant ça accroche. En 2015, sous des dehors empesés, des images vaporeuses, on dirait une caricature du romantisme nordique. Bonne société scandinave avec maîtres et serviteurs bien à leur place, robes longues, personnages s'évitant du regard de peur que... Et pourtant le spectateur patient va finir par accepter d'y trouver un sens grâce à la tentation qui fait tergiverser. Les couples établis et les institutions devraient toujours se hérisser. Peuvent aimer, les soignants, enseignants, célibataires de naissance, vrais mystiques dans monastères et couvents, ceux et celles "qui aimeraient croire" et ne croient plus que fugacement.
  • LA VIE EST BELLE (1946)
    Note : 16/20
    Il s'agit bien de la version originale de "LA VIE EST BELLE" (A wonderful life) de Frank CAPRA datant de 1946, à ne pas confondre avec le film de BENIGNI plus récent et qui a le même titre. Ici, ça se passe aux Etats-Unis juste après la dernière guerre et le message s'adresse à tous les déprimés, alcooliques, prostituées, et autres crève-la-faim, afin de leur redonner goût à la vie. Astres scintillants bavards, qui font songer au facétieux Woody Allen... Décors hollywoodiens impressionnants, effets de neige nouveau style... L'eau froide y est primordiale, le héros y tombe petit et en restera sourd jusqu'à ce que son ange-gardien vienne le sauver d'un autre plongeon, toujours en eau glacée. Entretemps, il aura dansé avec sa dulcinée (une perle), toute la noce se jetant allègrement dans la piscine... Large place faite aux enfants, à la détresse passagère qu'il faut bien dépasser. Je déplore que le personnage principal petit (futur macho aux yeux bruns) ressemble aussi peu à l'adulte, James Stewart aux yeux clairs. Mais sinon, en v.o., c'est délicieux de bout en bout (salle du Cinématographe nantais pleine un samedi à 18 heures 30). On a tout le loisir de s'imaginer disparu, avantages et inconvénients défilent, relativisant nos ennuis financiers qui massacrent tout le reste. Le business d'après-guerre ressemble à s'y méprendre à celui de 2008 (même rouerie, mêmes éliminations), raison de plus pour vous déplacer en salle si possible ou pour vous procurer le dvd.
  • LA BAIE DES ANGES (1963)
    Note : 19/20
    19,5/20 : Fascinante intrusion dans l'enfer du jeu d'argent. Un morceau de roi que ce film restauré (surtout pour les spectateurs l'ayant vu un peu jeunes). Risquer son va-tout comme on dépose un vêtement au vestiaire avant d'aller danser. Etre là rivé, réjoui, ou effondré l'air crâne pour composer, supplier après avoir rejoué des gains faramineux. Des conduites à risques qui décuplent la sensation d'être vivant. Si visuellement on est à la fête en noir et blanc entre Paris et la Côte d'Azur, sur l'aspect sonore, on croirait une comédie musicale sans en être une. Les dialogues sont fluides, le couple livré par rafales. Beaucoup de sensorialité. La concierge de l'hôtel, les rudes galets de la plage, les valises, on a l'impression de s'y frotter. Tout cela ramenant au cliquetis de la roulette, non pas sec, mécanique, mais crépitement léger, sonnerie grêle, murmure cristallin. Les réalités glissent sur gens et choses, le couple fait partie de l'alchimie, laissant sur le bord de la route la camaraderie du départ. Les deux grands fauves prévisibles se reconnaissent. Blondeur de croqueuse patentée contre carrure de jeune coq. Au négatif, on pourra trouver poussiéreuse l'autorité paternelle à l'heure des réseaux sociaux prolongeant l'adolescence (et encore la suite enseigne que le papa veuf est plus bourru que tyrannique). Des talons hauts chancelants, un bras qui accepte qu'on s'y suspende... Jacques Demy enveloppe Claude Mann et Jeanne Moreau d'une tendresse obligeant à se questionner sur les vertiges qui font se croire en apesanteur. A l'heure ultralibérale, "Jackie et Jean" mériteraient statuettes dans tous les casinos du monde !
  • L'INSOUMISE (1938)
    Note : 18/20
    Ce film peut avantageusement remplacer "Autant en emporte le vent" pour les allergiques à ses longueurs et à son expression féminine gnangnan. D'autant que la beauté juvénile de Bette Davis montre déjà des yeux à fleur de tête, vulnérables par rapport à sa bouche serrée de psycho-rigide. Ni sympathique, ni antipathique la demoiselle masquant ses sentiments. Justement on sent que sa rude familiarité avec ses serviteurs (pleins de bonhomie et comme par hasard noirs !) vit ses dernières heures. Place au monde adulte blanc dont les codes rassurent. A l'entrée de l'écuyère en retard parmi les corsetés qui l'attendent, malaise. Attention, Sudistes et Nordistes s'étripent, il n'est de place que pour les contacts rugueux, tout est duel, l'humour aussi. Alors, haro sur cette robe couleur sang parmi les corolles blanches (ne manque que le technicolor pour intensifier le froid du bal) ! Les paroles jurent avec les attitudes. Au lieu de dire non, le partenaire fait semblant d'obtempérer, incapable qu'il est de trouver une parade riante (Henry Fonda, la beauté coincée du stéréotype affairiste). Une future femme de banquier ne peut s'amuser à éconduire pour le piment d'un retour... Belle étude de société conventionnelle, là où le naturel chez l'adulte est d'office ligoté. Si les populations se placent au plus offrant au stade de la radicalisation politique, les épidémies, elles, forcent à parquer les malades et à préserver les autres, l'occasion de choisir son camp ! Etude de moeurs finement traitée, avec cette allégresse à l'image et au son pour surprendre le spectateur sans jamais tout dire.
  • ARSENIC ET VIEILLES DENTELLES (1944)
    Note : 15/20
    Revu en décembre 2007 cette comédie de Capra en dvd. Toujours très divertissant malgré les toiles d'araignée ou peut-être même en raison d'elles ? Juste un peu longuet par moments, je pense par exemple à la scène prolongée de Mortimer attaché sur la chaise dans d'interminables contorsions. Pour le reste, d'entrée de jeu, ces deux tantes angéliques, surtout celle qui trottine en balançant ses généreuses rondeurs d'une pièce à l'autre, laissent deviner qu'au moins un cadavre sera découvert, Agatha Christie oblige. En attendant, Cary Grant et sa blonde épouse vont traverser mille épreuves dans cette maison de fous, où un chauffeur de taxi stationne en perpétuelle attente. Très vite, on adhère au délire ambiant, comme de vieux habitués toujours bien reçus répugnant à tout sens moral. Que Mortimer convole en justes noces ou pas, il est débrouillard... En fait, une seule question taraude : ces deux vieilles dames si craquantes vont-elles prendre perpète ?
  • PLEIN SOLEIL (1959)
    Note : 14/20
    Musique stridente, présentation qui sent le formica, dialogues populistes, l'introduction de cette adaptation d'un roman de Patricia Highsmith méritait mieux. Version restaurée, concentré des sixties... Hélas, les ficelles sont tellement épaisses que seul importe qui des faux frères va être le plus malin. L'occasion de retrouver Alain Delon jeune, ses pupilles bleues, son allure crâne. Sans doute pas le meilleur rôle pour Maurice Ronet dont le sourire trop carnassier vient buter sur Marge (Marie Laforêt et son regard légendaire plusieurs fois en très gros plan). A bord d'un voilier, une jeune femme tiraillée et deux mâles à l'âge où on se croit sans limites. L'intérêt croît avec le couteau et le saucisson. Après c'est une escalade meurtrière qui lasserait sans les éléments anecdotiques souvent amenés en de grands mouvements de caméra. De brefs arrêts sur les autochtones, de savoureuses apparitions d'Elvire Popesco permettent de rester éveillé. Gadgets et manies propres aux années soixante font sourire. Les mocassins blancs à semelle ultra-fine, les 45 tours vinyle étalés pêle-mêle près du pick-up dont "le bras" s'arrêtait tout seul..., on sortait en laissant son poulet rôtir tranquillement au four... L'Italie ne manque pas de charme, mais la forme peut commencer à peser en dernière partie. Plein Soleil, pleins feux aussi, surexposition du jeune premier... Ripley accroche d'abord, peut fasciner au moment de sa volte-face. Ensuite, tel que filmé, ça frôle le défilé de mode, les influences étasuniennes (ce tape-à-l'oeil teinté de cynisme qui reprend du service en ce début de 21ème siècle). Delon sous toutes les coutures fait penser aux mannequins contemporains utilisés pour les produits de luxe. Heureusement nous avons eu "Le Samouraï" sept ans plus tard !
  • LES MAUDITS (1946)
    Note : 19/20
    19,5/20 : En visionnant en 2014 cette mutinerie reléguée aux abysses comme poussière sous un tapis, on mesure l'effet des engouements collectifs. Ainsi, de La Nouvelle Vague, imposée comme référence, et qui écarta toute oeuvre suspectée "trop classique. Il semblerait pourtant que René Clément, gommé comme un gêneur has been (reconnu outre-Atlantique surtout, et par des pointures comme Hitchcock à ce qu'on dit) aurait fait aussi bien, sinon mieux, que "Jeux Interdits" (1952) ou "La Bataille du Rail" (1946). Les Maudits, film méconnu, et pourtant ciselé, haletant, truffé de prouesses techniques encore maintenant, où filmer en studio des séquences aussi proches du réel serait manie d'évaporé, outre la ruine ! Le cinéaste aurait raffolé de navigation, rattrapant sa routine conjugale penché sur les mécaniques compliquées, facilement identifié à ses jeunes acteurs masculins, plutôt sec avec ses actrices. Le spectateur cherche de l'air dans l'étau, ce bateau camouflé sous des mètres de fond qui remonte quand ça lui chante... La mutinerie qui l'accompagne combine l'enfermement d'un groupe humain et la "bonne histoire". Pour qui aime rembobiner les séquences les plus spectaculaires, encore plus quand elles s'inscrivent dans un scénario millimétré, avec des destinées individuelles qui désarçonnent. Incisif regard, parti pris en creux. Echo avec notre époque de surexcitation permanente, René Clément semble dire d'outre-tombe, "voyez le processus, un cynisme crescendo jusqu'au cataclysme et puis"... Sorti salles 1946/1947 ou, en tous temps l'après-folie collective, toutes cartouches grillées. Sans que ce soit nihiliste, désespéré, à se f... une balle ! A l'inverse de quelques critiques déplorant le ton monocorde des personnages, je trouve qu'il se justifie car tous les cerveaux, pro-nazis ou pas, reviennent de l'horreur véritable.
  • HONKYTONK MAN (1983)
    Note : 18/20
    Vu en 2007 à la télé sur Arte, hélas en version française, une chance que les chansons country soient, sauf une, en version originale. Clint Eastwood et son fiston se dépassent dans leur lien personnel à travers ce périple. Le petit se façonne grâce aux travers du grand, à priori peu recommandable... Fascinant "Oncle Red", certes rude mais qui ouvre une grande fenêtre sur le monde extérieur, dans ce qu'il a de savoureux et de dangereux. On retrouve aussi la hantise de la corde au cou féminine, chère à Eastwood et qui peut donner le fou rire à tous les couples revenant de loin. Dialogues bourrés d'ironie et de fatalisme. Ensemble excellentissime, tant au plan visuel que sonore, un seul reproche, peut-être un peu lent à se dérouler... Pertinent concernant les variantes éducatives : oui, on peut pousser en étant rudoyé, dès lors qu'on a intégré, de la part de l'adulte, une faille affective supportable. Inversement des rôles...qui donne deux réjouissants portraits complices et protecteurs, avec un lot de jolies transgressions (scènes des poules échappées de la voiture, libération loufdingue de prisonniers). Tout ce bouillonnement alerte également sur la précarité de nos existences.
  • LES ARPENTEURS (1972)
    Note : 15/20
    Suisse et créé au début des seventies : on le devine par l'échange de casquette des deux hommes, et ces deux galipettes pour un panier de légumes dans un intérieur jamais visité : quiétude locale, on vit proche de la nature dans ce village, au rythme des saisons, juste un brin de musique, le temps passe tout seul, la mère toute proche ne se mêle pas des moeurs filiales. Des écarts, baragouiner en mangeant, pousser une gueulante, la Suisse bon teint de cette période-là, où on s'emm... Un académisme parfois pesant malgré la poésie ambiante. Il y a une forme d'application froide (comme chez Rohmer) que la pirouette de fin veut atténuer, les femmes qui se donnent peuvent se reprendre et être ainsi solidaires. C'était aussi dans l'air de cette époque-là où les aventures masculines se succédaient sans trop d'état d'âme.
  • SOUDAIN L'ÉTÉ DERNIER (1959)
    Note : 16/20
    L'atmosphère est assez oppressante, c'est tarabiscoté cette lobotomie remise au lendemain, on prévoit une issue apocalyptique, bref, "ça sent" Tennessee Williams dans toute sa complexité, encore plus du fait de la présence non moins tourmentée de Montgomery Clift comme acteur (ce sont pourtant deux femmes qui déjantent !). Outre la patiente analyse du beau Docteur, après la projection, ce qui reste hanter est ce symbole terrifiant des tortues aux îles Galapagos. Acteurs bien dirigés, contraste permanent entre vie et mort grâce au jeu de la caméra qui monte et descend, comme Katarine Hepburn, magistrale dans son ascenseur... Liz Taylor dans tous ses états, incroyable dans la crise finale, suite à ce rapport trouble avec son cousin. A ce propos, mieux vaut avoir en tête l'homosexualité de l'auteur de la pièce pour en comprendre le dénouement.
  • POUR QUI SONNE LE GLAS (1943)
    Note : 16/20
    Visionné le dvd en v.o. en juin 2007 : somptueux sur le plan de l'image grâce au jeu entre ombre et lumière empruntés aux bons westerns ! Vite, on devine le sort du héros par les lignes de la main, sans trop savoir... C'est très long, avec des détails sur les tortures infligées d'un camp à l'autre, et ces retours de manivelle du satané Pablo, personnage déroutant mais nécessaire. Ils sont tous pittoresques, ces montagnards... Toutefois, c'est Pilar, maîtresse-femme, qui force le respect. Enfin, on se demande bien si l'Américain va finir par s'occuper du pont... Nous sommes gâtés côté intrigue : le couple Cooper/Bergman est divinement bien assorti et fait fondre dès la première mise en présence (physiques intemporels) dans un dialogue d'affamés qui se retiennent, avec cette menace qui plane. On sent la patte d'Hemingway derrière tout ça, surtout dans les toutes dernières minutes, cette manière de planter là le spectateur abasourdi.
  • LE GRAND ALIBI (1950)
    Note : 19/20
    Un bon vieux Hitchcock visionné en v.o. : assaisonné, grinçant (ces deux mains qui se joignent sur la robe fatidique !), en trompe-l'oeil dès la première seconde. Pur régal de bout en bout, à retenir, cette scène du papa et de sa fille qui se confient leur suspicion pendant que l'intéressé roupille assis sous leurs nez..., curieux signal de mise entre parenthèses. Cette fausse nunuche du style Mireille Mathieu, agace... Mais vite on comprend qu'elle est idéale en contrepoint de la divine Dietrich (particulièrement envoûtante par le physique et la voix, vénérée pour elle-même en tant que telle, elle s'amuse follement dans ce rôle d'actrice). Sauf qu'on commence à se demander laquelle des deux femmes sera sacrifiée. Le flic est de plus en plus sympa. Le jeune homme pour qui on a eu peur, commence à nous courir... Et c'est là toute la finesse du maître du suspense, qui, après quelques longueurs d'un raffinement exquis faisant bouillonner les sangs, envoie sa chute, elle surprend mais on s'y fait très vite !
  • JE VEUX VIVRE ! (1958)
    Note : 19/20
    Vue en v.o. sous-titrée en mars 2007 : une histoire fort déroutante si l'on s'en réfère au titre ! Techniquement, du haut de gamme en noir et blanc, dérangeant au possible quant à la démarche, un suspense au cordeau sans une goutte de sang... Machination, bombe à retardement qui ne cesse d'être retardée... L'inquiétude croît plus l'action se précise, mais on est rivé à l'écran, le souffle court, et on se dit qu'on ne va tout de même pas... Parce qu'on ne peut croire à ce qui se passe en définitive pour cette femme, ni à ce public qui l'entoure... Sobre, réaliste Ô combien, tout juste ce qu'il faut d'émotion en pareille situation, ce film est des milliers de fois plus percutant que l'horrible "Dancer in the dark" qui fit tant de fracas à sa sortie ! A voir, vous en resterez sur le c... !
  • LA FIÈVRE DANS LE SANG (1961)
    Note : 19/20
    Admirablement interprété, et sans une ride même en 2007 ! Certes, il y a ce puritanisme américain des années 30, et ce krach boursier. Tout concourt à "être raisonnable" sur les grandes lignes. Pas question qu'un désir physique mal géré vienne déshonorer les familles (aucune contraception, on n'en parlait même pas...). D'un côté : ce père qui projette sa réussite sur son fiston, et cette mère omniprésente, plus ventre que femme. De l'autre, ce jeune couple, frais, sexy en diable, qui devient très attachant du fait de sa lutte pour s'extraire de la passion plutôt que de la consommer. Ramené en arrière, même s'il se morigène quelque peu, le spectateur adulte revenu de pas mal d'impasses, se surprend à ranimer ses propres amours adolescentes, chères vieilles étincelles !
  • LA PARTY (1968)
    Note : 15/20
    Une partie de rigolade qui va crescendo, (en version anglaise sous-titrée autrement risque de déception) les jours où vous n'avez rien de précis au programme et l'envie que le temps s'étire, pour cause de grosse flemme, tout simplement : la première scène tranche avec la suite, on ne s'attend pas à ce parachutage dans un intérieur luxueux. Belle description de l'hurluberlu parmi des invités de bon ton et qui s'emm... tous très ferme. Une situation qui se retourne (en remettant le spectateur d'aplomb). J'ai trouvé Peter Sellers en Hindou paumé encore plus émouvant de nos jours en 2007 par rapport aux sixties, sans doute à cause du relent d'ostracisme flottant comme une arme bactériologique dans l'air à force de brassages inconsidérés. Ce film reste réservé aux adeptes du comique de situation par paliers, il faut poireauter parfois longtemps pour arriver à l'outrance attendue, mais ça peut être délicieux quand on a du temps à tuer.
  • LA BETE HUMAINE (1938)
    Note : 17/20
    Encore en juillet 2007, on part plus que jamais juché soi-même à cent à l'heure sur "La Lison", un tortillard suggérant les vieux trains à compartiments, ceux d'avant Corail et TGV d'aujourd'hui, autant de voyageurs alignés, parfois avec d'assommants portables. Quel plaisir de revoir cette bonne gueule de Gabin planqué derrière ses lunettes comme un bandit ! Idem pour la complicité bourrue qu'il a avec Pecqueux, leur train-train professionnel, sur fond musical plein de fureur et de suie. Une bien belle histoire. Rien d'obsolète, j'ai ressenti une nostalgie, j'aurais aimé connaître l'industrialisation à ses débuts, où au moins suer au boulot avait un sens bien établi. Les passages sentimentaux exacerbés, du fait du désir de fusionner avec l'autre, semblent bien intemporels. Fragilité du désir poussé dans ses retranchements, cette envie de neutraliser la proie. Jean Renoir a extrait du bouquin de Zola ce qui fait perdre les pédales à l'individu. Ici, la locomotive, alliée à la peur des sanctions, pourrait à elle seule tempérer les ardeurs, alors pourquoi ?... Enfin, délicatesse suprême par rapport à maintenant où on ne sait plus, cette justification d'un "mauvais sang" par des générations d'alcooliques !
  • ON PURGE BÉBÉ (1931)
    Note : 12/20
    Les acteurs s'amusent bien, dans ce sketch de 1931 filmé par Renoir, lui-même inspiré par Feydeau. Humour au premier degré, situations souvent "téléphonées". Heureusement, en arrière-plan, on perçoit les piques à l'intention de la prétendue bonne société. Car enfin, au vingt et unième siècle, tant que l'eau reste abordable, que les ch... sèches n'en ont pas égalé le confort, les chasses d'eau balaient l'innommable, en abolissant les pots de chambre, aussi incassables pussent-ils être. Tout ça fait un rien préhistorique. Du mal à suivre cette bourgeoise Bobonne en bigoudis trimballant son seau comme un sac à main dans le bureau de son époux. Ou alors en bande dessinée aux côtés d'un personnage comme Carmen Cru peut-être ?
  • LE CRIME DE MONSIEUR LANGE (1936)
    Note : 17/20
    Une caricature du patronat "d'avant-guerre", ici une sorte de Don Juan détenteur absolu du gagne-pain de la communauté, manipulant son monde, en particulier abusant ses employées sans pilule contraceptive... Dehors affables, mais une vraie fripouille. Au passage, égratignure de la sacro-sainte soutane, Renoir ose gratter là où ça démange ! On sent la déferlante de 1936 dans les débats autour de la coopérative, certes le travail reprend toute sa noblesse s'il est géré en commun pour peu qu'on ait une certaine philosophie, je pense à la grossesse de la jeune fille. Beaucoup d'énergie, ça pulse, de la Traction Avant au bon vieux train d'antan, et d'escaliers en corridors... Une merveille surtout en 2007, au moment ou le Code du Travail (droits actuels restants hérités du Front Populaire de 1936) risque sa peau au profit d'un capitalisme cette fois poussé jusqu'au grotesque...Renoir, après mille rebondissements familiers pour resserrer l'intrigue du couple central, illustre le tournant de 1936 par deux événements parallèles (avec une caméra qui n'en finit pas de tournoyer entre un immeuble et une cour, mais on est comme aimanté à la suivre) : la première scène rend hilare, ce vieux type ivre-mort qui chante et ne sait plus où il est... Second tableau, au milieu de ce capharnaüm, un couteau sera sorti par un individu plutôt sobre... Et tout cela s'encastre bien, en quelques secondes, la suggestion d'une vie meilleure.
  • LE PARADIS DES MAUVAIS GARÇONS (1952)
    Note : 15/20
    Vu en v.o. sur dvd en février 2007. Chassé-croisé de trois personnages issus de la même culture et qui essaient de se refaire une santé en terrain étranger, plus "miné" que prévu. Ce film aurait changé de main en cours de tournage, au prix de bien des tensions (d'abord Josef von Sternberg, puis Nicholas Ray), on ne peut pas affirmer que cela se perçoit. Daté de 1952, de facture classique, c'est plaisant à suivre, bien ficelé même, les acteurs jouent bien et il y a quelques scènes de séduction assez croustillantes du fait de l'énigmatique présence Mitchum. A voir et à revoir.
  • LE DESERT ROUGE (1964)
    Note : 16/20
    On a vraiment l'impression de sentir le soufre ou autres joyeusetés dès les premières images, floues et habitées d'une musique qui vrille les nerfs. A voir de préférence en v.o. italienne même si le langage réside plus dans les regards et les attitudes. On est en 1964, le monde industriel bouleverse les paysages : les hommes travaillent ou font grève, et leurs compagnes sont mères au foyer pour la plupart. Antonioni, pour son premier film en couleurs, dépeint cet univers futuriste à grand renfort de peinture sur le décor, l'emblème étant ce jaune citron qui crachote... Giuliana en est restée au paradis perdu de son enfance, cette plage rose où elle se baignait. Rien à voir avec cet univers futuriste où elle se promène pourtant avec son petit garçon, peu de temps après un traumatisme, et juste avant la rencontre d'un autre homme que son mari... Monica Vitti captivante, toujours entre demande et fuite affective... Un film bizarre, un peu trop lent, où l'on n'a pas d'explication à tout, mais qui accroche par son pari de "rendre le moche esthétique" et qui en dit long sur les atermoiements féminins et les fantasmes masculins !
  • L'HOMME AU CRÂNE RASÉ (1965)
    Note : 18/20
    Fran... et Govert : autant dire le jour et la nuit. Film belge en v.o. flamande vu en mars 2007. Tiré d'un livre, belge lui aussi. Très belles prises de vue en noir et blanc, une économie de mots, des scènes déroutantes, qui font parfois craindre que le sordide prenne le pas : le visage statique qui murmure, les yeux clos, le coiffeur, l'autopsie (suggérée seulement)... La caméra traque d'un bout à l'autre, et en ayant l'air de ne pas y toucher, le personnage principal, Miereveld, sorte de petit fonctionnaire distrait, dans un genre de délire interne qu'on affuble, d'habitude, aux ados ou aux évaporés, pas à un type "normal". En tous cas, cette obsession d'un prof comme absent à lui-même dans son intérieur familial stupéfie. On découvre son monologue, avec cette idolâtrie "dans le vide"... Austérité et loufoquerie alternent, nous voici à l'intérieur du personnage, insidieusement, il finit par réveiller notre moi indicible. Le rêve est présenté ici comme ultime recours pour que le quotidien puisse garder sa place. Long peut-être, surtout l'entrée en matière, mais c'est un voyage unique en son genre !
  • BOULEVARD DU CRÉPUSCULE (1950)
    Note : 18/20
    Plus saisissant que jamais à revoir en v.o.en 2007. Irréprochable sur tous les aspects image, son et dialogues. Cela traite du passage du ciné muet au parlant à travers une actrice déchue pour les magnats de l'époque, beaucoup moins pour les "petites gens" oeuvrant au ras des acteurs. J'y ai trouvé une étonnante résonance par rapport aux coulisses du cinéma d'aujourd'hui (et à la machine du spectacle des grands circuits d'affaires en général), prompte à faire émerger des étoiles d'un jour et à les planter à la première occasion au profit de nouvelles. Et dire que l'être humain dès lors qu'il détient un tout petit pouvoir répète inlassablement le même scénario de bouffer l'autre ! Petite consolation : en l'occurrence pour une fois, c'est "la vioque" qui reste en vie.
  • LA NEIGE ÉTAIT SALE (1953)
    Note : 18/20
    Allez savoir pourquoi, toutes les femmes, toutes les mères, se sentent tenues, au départ du film, de sauver ce Franck qui n'a pas eu son content d'amour petit (comportement hideux de la mère en visite). Habile Georges Simenon, grand collectionneur de femmes, mais qui au moins les vénérait toutes, et les prostituées sans honte aucune, au contraire, considérées comme des frangines dans tous ses bouquins, des femmes à part entière par la sincérité du service qu'elles rendent aux hommes voraces, et indirectement à la société : Luis Saslavsky reproduit cette tendance de l'auteur à la lettre. Daniel Gélin incarne donc un jeune homme touchant mais trop louche pour s'y fier, on sent bien qu'il ne peut exister que dans la transgression... Passionnant à étudier comme caractère, bien expliqué, l'ensemble fort bien joué, assimilable même en 2007 (malgré le portrait de Suzy, une vierge qui a pris la poussière). L'amour idéal reste sauf, ce qui fait qu'on laisse sans regret ce Franck relever son col avant le grand froid.
  • BOY MEETS GIRL (1984)
    Note : 16/20
    Léos Carax est unique dans sa façon de présenter des scènes du quotidien comme si à la seconde suivante on était tous morts. Avec ce côté surprenant d'agrémenter une errance par une bouilloire qui siffle, une salle remplie de bébés à consoler, un retour sur ses pas pour foutre à l'eau un importun ou une paire de ciseaux équivoque. On passe du chaud au froid non-stop avec cet ange-démon, ça travaille la peau... Admirable ciseleur, qui prend son temps pour tirer le meilleur du figé. Très personnel, qui fout bien la trouille avec sa caméra scalpel, mais impossible de quitter l'écran, comment cela se fait ?... Même s'il me dérange aux entournures, il s'en dégage une magie. Son monde m'est plus proche que celui de Godard, auquel il s'apparente par la perpétuelle "énigme" de ses messages, en fait, c'est ça qui accroche, en dépit du désespoir qu'il communique sur notre société d'errants à double faciès, l'apparence, et puis l'autre, le dedans, ce labyrinthe, où il ose s'aventurer comme personne.
  • LUMIERE D'ÉTÉ (1943)
    Note : 19/20
    Ce petit chef-d'oeuvre en noir et blanc est sorti à Paris en 1943. Tourné majoritairement en studio, c'est quand même un miracle qu'il ait pu aboutir en temps de guerre, il fallait simuler au mieux ces décors dans les airs autour du barrage (ambiance de rails, du train avec sa sirène). Visionné en vidéo-cassette au casque en mars 2007. J'ai noté d'incessants petits bruits de fond qui ajoutent de la poésie aux situations, même si parfois on est à la limite de se demander s'ils sont vraiment tous voulus ?...). Il n'empêche que c'est un enchantement de bout en bout dès lors qu'on s'extrait des courants de pensée et des effets cinématographiques d'aujourd'hui. Même style d'intrigue et stéréotypes que "Pattes Blanches" sorti plus tard (et tout aussi fascinant). Toujours cette judicieuse manière d'amener le danger par la faute "d'un énergumène". Dialogues savoureux, et aussi très efficaces de Jacques Prévert. Luminosité de Madeleine Robinson jeune, face à la fragilité de Madeleine Renaud puissante puis flouée, et cet incroyable beau jeune homme intemporel. La scène de la fête, cette liesse (sans doute en réaction à la guerre) donne envie de traverser l'écran pour danser avec les acteurs. Et dire que tout commence par un charmant autocar vu de très haut en accéléré, suivi un peu plus tard de ce phare de moto qui joue à cache-cache avec le spectateur : Jean Grémillon, un peu comme Hitchcock, savait assaisonner ses cataclysmes ! A conseiller sur les chaînes télévisées du prochain gouvernement français en milieu de soirée.
  • PATTES BLANCHES (1949)
    Note : 17/20
    La campagne bretonne, des caractères bourrus et cette nature venteuse en bord de mer, tout y est pour qu'un drame éclate entre l'auberge et le château. Ambiance bon enfant au départ, trop, ce mari gâteux, et surtout cette servante voulant à tout prix être bossue, qui contraste bizarrement avec une Suzy Delair jouant de ses charmes de façon éhontée... Le plus remarquable aujourd'hui, dans ce film pas tout jeune, est l'indéniable présence de Michel Bouquet, mystérieux et charmant avec sa mèche de mauvais garçon et ce ton de voix unique, il surpasse tous les autres dans son rôle d'intrigant ! A voir plutôt deux fois qu'une.
  • NOUS AVONS GAGNÉ CE SOIR (1948)
    Note : 18/20
    Visionné le dvd en 2007. Tout est programmé en exactement 1 heure 12 grâce au bon vieux réveil d'antan, du temps réel... Un match de boxe que le héros vieillissant doit perdre, puisqu'une magouille organisée par la mafia du coin, moyennant gros sous, est incontournable. Sans se préoccuper de ce qui se trame à son insu, il a l'intuition qu'il va gagner ce match, et le spectateur le croit. Il est juste désolé en voyant la chaise que sa femme devrait occuper face au ring désespérément vide... Et si au contraire, cela décuplait sa rage de vaincre ? Loin d'être réservé aux seuls initiés, ce film est un régal de petites scènes, la boxe en tant que telle déjà, pas du tout ennuyeuse car pleine de rebondissements, et je pense surtout aux incursions de la caméra dans le public passionné, autant de portraits délicieux. L'errance de l'épouse dans le quartier, sa frêle silhouette surplombant le passage des trains dans le noir inquiète sérieusement... Tout cela est filmé dans un clair-obscur délicat et passe très vite, jusqu'au traquenard de fin, on en sort haletant.
  • BOUDU SAUVÉ DES EAUX (1932)
    Note : 19/20
    Formidable satire de la société des années Trente, regardée de travers à sa sortie et réhabilitée grâce aux mouvements contestataires qui ont suivi. On passe un délicieux moment dans ces couloirs où on se cause, joli remue-ménages dont le libraire Edouard Lestingois est à l'initiative. Il scrute à la longue-vue les bonnes gens qui passent et n'hésitera pas une seconde à sauter à l'eau, sous l'oeil admiratif des curieux. A retenir, cette scène hilarante où Boudu soulève soudain de terre son bienfaiteur que d'aucuns veulent décorer... Et aussi la philosophie des dernières images (quelle modernité de moeurs !), mais il y a mille autre choses dans ce film. Et si la liberté c'était aussi boire de l'eau plutôt que du vin, ou bien chercher une fleur difficile à cueillir, entre un costard des grands jours et de vieilles hardes... C'est à la fois plein de fiel et toujours poétique. Tout le monde est un peu un mélange des deux univers décrits, le fait est qu'on peut toujours s'identifier au libraire, une position modérée quant au degré d'acceptation de notre trouble-fête... Aimer son prochain, certes, mais qui garderait longtemps sous son toit un individu qui se croit autorisé à devenir insultant ?... En même temps, l'admirable interprétation de Michel Simon ne peut que toucher, Boudu affiche ce naturel des enfants, la réflexion adulte en prime et il ne s'embarrasse de rien, surtout pas d'illusions. En 2007, à l'heure où, faute de vouloir financer la dérive sociétale, la charité revient sur le devant de la scène, ce petit chef-d'oeuvre en révèle bien des aspects.
  • LA FOLLE INGENUE (1946)
    Note : 19/20
    Qui c'est ? dixit notre regretté Fernand Raynaud ... A voir en v.o. de préférence, même pour les raclements de gorge ce sera mieux... Après un entretien téléphonique, deux coups de sonnette, enfin le plombier... Déboule une apparition (Jennifer Jones), physique à mi-chemin entre l'actrice Liz Taylor jeune et la chanteuse Kate Bush). Pétillante mais efficace, elle enlève un bas, et s'installe sous l'évier de cet intérieur anglais très convenable. Les yeux grand ouverts, elle cause à ces deux hommes en maniant le marteau. Les canalisations se débouchent... Qu'est-ce à dire, surtout pour l'époque, loin d'être permissive (aube de deuxième guerre mondiale) ? Notons au passage qu'un prétendu apatride fuyant le nazisme (Charles Boyer), est intrigué plus que de raison, tandis que la jeune fille, trop sensible à l'apéritif, est expédiée à la campagne. Prétexte à une série d'égratignures de la bonne société, émaillée de citations de Shakespeare sur fond de marivaudage en zigzag. Alerte, cette Cluny Brown, pour faire tout le contraire de ce que sa nature lui dicte, il faut un minimum de bienséance garder. On retrouve là un peu de la complicité du couple souvent reprise ensuite par Hitchcock, évitements prétextes à toutes sortes de loufoqueries à offrir au spectateur, et aussi cette désinvolture des aspirants à la liberté (cette manière de jeter des vêtements par la fenêtre du train). Très jolies images euphoriques de fin, ce léger vertige féminin avec ces journalistes bienveillants (Lubitsch était cardiaque). Le tout n'a pas pris un gramme de poussière, on peut le visionner en 2007 avec délectation.
  • L'IMPORTANT C'EST D'AIMER (1974)
    Note : 17/20
    Drôle de frayeur à la première projection, à laquelle on se fait très bien en visionnant le dvd une trentaine d'années plus tard ! S'accrocher, à cause des scènes sordides, et fondre à chaque fois que la musique le demande (Nadine Chevalier et Servais qui chavirent). Le fait que Romy Schneider ait disparu depuis ajoute aussi une dimension sidérante à son interprétation, on se dit qu'elle jouait son vrai rôle de femme au stade où elle était rendue. Mais dans le film, Nadine Chevalier sait-elle que le photographe qui la trouble a financé la pièce qu'elle joue ? On peut se le demander, il a l'air d'un curieux qui se balade sur les tournages pour le plaisir de mitrailler, et comme c'est d'abord elle qui le repousse (contrairement à ce que les bandes annonces affirment), le doute est entretenu. Ensuite, c'est le jeu de la séduction des êtres usés (la parade dans le monde animal, mais de façon permanente), de peur de se perdre, mais aussi pour relancer sans cesse le désir, ce feu-follet qui pourrait bien conduire à la solitude la pire, celle par abandon. Comment concilier la reconnaissance envers un compagnon qui fut un quasi-secouriste à une époque et la nouveauté qui vous terrasse ?... Dutronc est vraiment trop exécrable dans ce rôle, donc d'office le géant sexy séduit, toutefois c'est loin d'être gagné, et Zulawski l'a bien annoncé d'entrée de jeu : attention, un amour de cette trempe-là se mérite !
  • QU'ELLE ETAIT VERTE MA VALLEE (1941)
    Note : 18/20
    Les Gallois, comme les Russes, outre leur réputation de boire sec, sont réputés chanter fort et tous en choeur, avec des variantes innombrables, et de manière incroyablement disciplinée, que ce soit pour les réjouissances ou pour oublier leur désespoir aux moments les plus forts de la guerre. Le film plante "en chantant" le décor de ce charmant coin du Pays de Galles, on croirait un théâtre orchestré en plein air. De la fraîcheur, l'accent rude du terroir (à voir en v.o. pour en goûter toutes les subtilités), des détails malicieux (exemple de ces oiseaux picorant sur la fenêtre), parce que c'est un petit garçon qui donne le ton du film. Une communauté vite attachante, où chacun joue un rôle défini, on remarquerait juste la sévérité paternelle (interdit de causer à table), la dureté patronale (peur de négocier), et puis ces diacres moyenâgeux, langues de vipère... Voici que le temps se gâte, la pauvreté et la colère, les amours, tout se détraque. De la peinture léchée, qui aurait viré à l'eau de rose, on passe au coup de grisou. Et toujours la voix-off du petit garçon devenu grand... L'Histoire répèterait les mêmes inlassables bévues à ce qu'on dit. Ainsi, ces mineurs du film aux syndicats balbutiants, licenciés car jugés du jour au lendemain "trop payés" par d'obscures puissances invitent à méditer. Au stade où nous sommes arrivés, en ce début de 21ème siècle, avec notre "mondialisation" galopante sur une planète vidée de ses énergies, quid des jugés "trop-payés", quid de la masse croissante des exploités sans protection sociale ?
  • DOUZE HOMMES EN COLÈRE (1956)
    Note : 19/20
    La version russifiée de Nikita Mikhalkov en 2007 avec sa fougue d'y avoir injecté le problème tchétchène, souffre d'une longueur qui peut porter sur les nerfs et donner envie de revoir le classique de Lumet, au scénario autrement plus concis : la tension existe pourtant dans ce splendide noir et blanc dont seule la musique serait la fausse note (on a fait mieux depuis pour illustrer le courroux...). En compagnie de personnages-types faciles à cerner, des frictions moins outrancières, pour une large part grâce au personnage central, un juste bien net (Henry Fonda) et un enragé humanisé par une photo révélatrice, auxquels le spectateur va tout de suite s'identifier. Années cinquante/soixante étatsuniennes, certes pas idylliques au plan politique (pas plus qu'aujourd'hui où la peine de mort existe toujours) mais le scandale affairiste montrait quelque accalmie... Qu'il fait bon s'évader du chaos ultralibéral en remontant le temps !
  • ACCATTONE (1961)
    Note : 16/20
    A croire que, déjà, Pasolini se sentait maudit ! Ce premier film largement autobiographique le laisserait à penser, notamment l'issue... Le réalisateur insiste sur la pauvreté mère de tous les vices et se veut aussi, par de multiples facettes, le beau gosse joué par l'acteur : certes pauvre, mauvais garçon, mais aussi irrésistible et fatal. C'est traversé de quelques éclairs de tendresse que la rudesse vient systématiquement saccager. Se décèle de manière claire l'homosexualité du cinéaste : la caméra "lèche" les muscles mâles dans les fréquents corps-à-corps, mais le baiser d'initiation à la blonde captive, lui cache le visage !). Musique stridente du début bien qu'il s'agisse d'une ritournelle de Bach (les prises de son ont progressé !). Un film plein de nihilisme et de fracas, à l'issue Ô combien prémonitoire quant à nos belles sociétés modernes... Déjà dans les sixties ! Reste cette impression d'avoir croisé les mêmes décors dans d'autres films italiens de cette époque, villes aux rues quasi-désertes, alignement de cabanes plus que de maisons en banlieues, terrains vagues.
  • FALBALAS (1944)
    Note : 17/20
    Un film commençant par la fin et qui, grâce au choix de distribution, fait d'office préférer le mari. Le couturier (Raymond Rouleau, tête à claques d'emblée) est à peu près naturel avec ses plus vieilles employées (Jeanne Fusier-Gir confondante en couturière inoxydable). Dès qu'il le peut, Philippe Clarence devient joueur, enfant gâté qui ne se refuse rien, sa collaboratrice, houspillée ou suppliée épongeant toutes ses frasques. Tomber sous le charme du jeune patron c'est monter dans un train où il faut sauter en marche. Micheline Presle aime plaire, s'autorise l'attendrissement puis se réveille (stupeur visible à l'image) dans une prise de risque calculée qui vire à l'estocade (plans très rapprochés en champ contre-champ plus parlants que les mots). Le colosse aux pieds d'argile tangue alors sans rémission... Que le tournage dans Paris sous l'Occupation ait cumulé les coupures de courant n'affecte en rien la montée de l'orage entre désir de pouvoir et refus d'être la énième au tableau de chasse. Etonnant comme semble inaltérable le milieu de la mode, les silhouettes diaphanes, les tissus luxueux, les chapeaux féminins imposants (et qui se gardent sur la tête à table !). On ouvre et ferme avec élégance beaucoup de portes dans ce drame qui fait plaisir en 2012 avec son incitation à la maturité sentimentale des deux sexes.
  • BOULE DE SUIF (1945)
    Note : 17/20
    Une tragi-comédie de Maupassant, admirablement retranscrite sous la plume d'Henri Jeanson. Une mise en scène et des dialogues franco-allemands toujours savoureux, pas le moins du monde défraîchis en 2008... Dans la ribambelle de "figures" qui défilent, la fraîche Micheline Presle campe gaillardement la prostituée raillée par la populace mais qui assume sans ciller sa trajectoire, la bonne fille partageuse de pique-nique quand la faim n'est plus tenable, tout comme le refus de l'ennemi voulant lui passer sur le corps. Rien de tel pour faire l'admiration de l'intellectuel présent, lequel permet une issue difficilement condamnable. Dans la galerie prussienne, à la fois glaçante et cocasse, restera gravé dans les mémoires, le Lieutenant Fifi, tortionnaire implacable que le champagne va conduire à négliger le petit détail qui tue.
  • SERENADE À TROIS (1933)
    Note : 18/20
    Déjà dans le train à compartiments du bon vieux temps, le trio est incroyablement relâché. Ils filent vers Paris, la ville de toutes les permissivités vue de l'étranger en 1932... La somnolence sans chichis, la prise de vue sur les pieds et une main, les dessins de la demoiselle, tout cela frôle l'alcôve et, comme d'habitude, la finesse du cinéaste amène la diversion indispensable. Après le mot d'ordre incroyable "no sex" entre les trois amis, se succèdent dans la gestuelle accompagnée d'ellipses attirances et remises en cause. Le tout agrémenté d'un ton léger, bien que s'y mêle la pauvreté des artistes, ces funambules que l'aristocratie rend vite corsetés. La muse passe de bras en bras, incapable de choisir et pourrait sembler délivrée par cet officiel mari la rendant à une vie convenable si le trio n'était aussi fidèle à lui-même... Et toujours l'éternel défilé de grandes portes quel que soit le milieu où la caméra balaie. Peut-être pas transcendant sur le fond. Très plaisant avec son sous-titrage bien lisible et aucune faiblesse sonore. A l'image, un beau noir et blanc restauré. Si le dialogue commence en français sur le mode léger, le french kiss de l'issue vaudra à ce film d'être censuré quelque temps par le code Hays en 1934.
  • L'ENNEMI PUBLIC (1931)
    Note : 13/20
    Un dvd visionné à la va-vite en anglais sous-titré anglais... J'avoue m'être barbée tout de suite et avoir zappé à grande vitesse grâce à la télécommande. Ce film a le mérite d'être précurseur de films noirs plus travaillés. Pétri d'action, avec un scénario frontal, il s'avère encore rivé au muet (ces mimiques à l'intention de la caméra renvoyant en 2010 au dessin animé ou à la grosse farce). Les champions, même bandits, jouissent souvent d'une reconnaissance incompréhensible. Ainsi Tom Powers, ce mauvais garçon issu de milieu pauvre séduisait les foules des années Vingt : dans ce rôle de petite frappe issue de l'immigration irlandaise, l'acteur James Cagney (gueule de gros dur, et dire qu'il fut embauché en remplacement d'un autre acteur !) : il parvient à attendrir durablement l'entourage, ils sont tous impliqués de près ou de loin dans les trafics, sauf l'un des frères (formidable plan-séquence du repas pris en commun où ce dernier se distingue). La mère en affection inoxydable, aussi servante que l'épouse, toujours à son poste malgré les projectiles... Des archétypes bien appuyés... La scène de fin, coup de fil anonyme et porte ouverte en trombe, aseptisent en relativisant le succès du monstre, pas trop tôt.
  • L'ADIEU AU DRAPEAU (1932)
    Note : 17/20
    Film qui sans renier le livre d'Hemingway part dans une direction légèrement différente. Certes la guerre rôde. Pourtant une seule vraie scène de chaos, incroyablement longue en dernière partie, le temps qu'une chaloupe se mesure aux remous liquides. Le réalisateur s'intéresse davantage au désir de survie et même de bonheur de l'individu pris en otage dans les conflits au nom du devoir. Dès le début ce qui aurait pu n'être qu'amourette devient désir de fusion tant l'ambulancier (Gary Cooper) est sensible au désarroi particulier de cette infirmière (Helen Hayes). Envoûtement garanti, une vraie poésie habite le film qui saute parfois un peu vite d'une situation à l'autre (bien que l'on comprenne). Des cadrages variés, une parfaite luminosité du noir et blanc, aucune boursouflure. Le plus militariste peut sans peine se fondre dans les populations à bout de nerf. Le couple central, dans la lumière blanche du jardin se consolide, n'en déplaise au perfide Major Rinaldi (Adolphe Menjou). Un homme et une femme suspendus au temps, surtout avant chaque séparation (scène d'union d'une tension rare, en plus que le prêtre, lui-même situé entre devoir guerrier et confession dégage la même grâce que ses tourtereaux !). L'envolée de cloches et le drapé arrondi face à la fenêtre printanière poussent peut-être un peu trop vers le pathos en 2012, quoique. La guerre peut lier et la paix séparer. C'est tout le paradoxe de cette histoire !
  • JEUX DANGEREUX (1942)
    Note : 19/20
    Découvert en dvd en juillet 2011. Un film brillant, osé pour son époque même si fabriqué en exil. Tout comme avec Chaplin dans un registre apparenté, on rit de la monstruosité nazie transposée en dialogues américains, l'accent guttural, le pas de l'oie, le fameux "Heil me" !... Et pourtant cette oeuvre si fine en même temps qu'elle arrache rire sur rire (on ne se lasserait pas d'entendre "Schulz !"), donne aussi envie de pleurer : par identification, en mesurant la souffrance rentrée d'Ernst Lubitsch avant d'avoir pu le mettre en images tout comme l'impuissance d'un peuple visé une fois le chaos installé, qui ne permet plus le libre arbitre en forçant au bipartisme, au patriotisme puis au fanatisme. Une comédie contemporaine rappelant l'éternelle négation de certains groupes humains au nom d'une seule légitimité instillée à la faveur de la misère par une poignée de fous.
  • LA DAME DE SHANGHAI (1948)
    Note : 19/20
    Découvert en dvd (juin 2011). C'est tout à fait palpitant de bout en bout. Et gonflé par rapport à la période de réalisation (tout juste après-guerre). Loin d'être une inconditionnelle de Welles d'habitude à cause de sa mégalomanie et du côté brouillon de ses histoires, j'ai été subjuguée. Sans doute grâce à l'auto-dérision constante qu'il a mis dans le rôle joué par lui-même. Le film aurait été amputé d'une bonne partie et c'est heureux vu le résultat. On est bien baladé, incapables de prendre parti, en plus que d'être émerveillé par ce qui se dévide implacablement en grinçant de délicieuse manière.
  • LE GRAND SOMMEIL (1946)
    Note : 14/20
    Vidéocassette v.o. revisitée en 2008. Et toujours rien compris. Trop fouillis. Agacée par la gratuité des répliques à l'accent américain traînant autour d'un verre, un soporifique en ce qui me concerne, à ce tarif, plus les images avancent, plus la déconnexion m'étreint... Mais enfin, comme c'est filmé avec talent, je mets une note "d'atmosphère générale" : pour le vieux paralysé dans sa serre, qui boit et fume par Marlowe interposé, les apparitions de sa première fille en mal d'amour hébétée par l'alcool, hommage à la seconde, ce charisme qui a fait ses preuves depuis. Bogard tout seul, d'office imbu, est souvent exécrable... Les pistes de l'enquête, ici sont enchevêtrées comme rarement, reste donc un étau dont il faut s'arranger. La magie du couple "Bacall/Bogart" fera date. Chat et souris en l'occurrence, ils se livrent à un verbiage exhibitionniste faute d'enjeu suffisant, j'ai peiné à suivre.
  • FORFAITURE (1937)
    Note : 17/20
    Agréablement surprise par cette "vieillerie" en vidéocassette qui, hormis ses failles techniques indiscutables (écouteurs sur les oreilles), se laisse suivre avec plaisir, en tous cas si l'on n'a pas en tête d'autres versions de l'histoire. Les situations et surtout les dialogues, du genre percutant et concis, laissent pantois... Vision du couple quasi contemporaine, et pourtant de curieux accès tragiques s'intercalent pour cause de guerre (ce passager touché par une balle au cou !), il faut se relever dare-dare de ces traquenards quotidiens. Passage au luxe, avec ce prince facile d'accès, racé et vaguement inquiétant, belle dame en visite, tout sourire, certes "pure comme un lac de montagne", mais aussi la cible idéale de faussaires locaux... Tout pour dissuader son militaire de mari, la loyauté personnifiée. Les personnages secondaires font qu'on ne s'englue jamais dans une seule direction. Envoûtement, comme si on avait tiré sur l'opium, la brume envahit l'écran, si cela est dû au vieillissement de la pellicule, je ne saurai m'en plaindre... Un procès à rebondissements débarque au moment où on croit tout plié. J'étais attirée par la présence de l'énigmatique Jouvet à l'affiche, mais tous acteurs confondus, on passe un excellent moment, aidés par le contraste finement équilibré entre les personnages. Cette version de Marcel L'Herbier passait pour audacieuse en 1937. Elle est devenue "antique" à cause des nouveaux matériels existants, les variations de son peuvent incommoder... Mais le traitement global a encore beaucoup de fraîcheur en 2008.
  • LE GRAND COUTEAU (1955)
    Note : 18/20
    Quel film courageux ! Peut-être issu du théâtre mais vu les relations serrées qu'il traite, cet emprisonnement d'un individu par des délinquants détenant le pouvoir, l'espace réduit que la caméra balaie suffit. On a droit à des va et vient de personnages, agrémentés de montées et descentes d'escaliers quand on s'y attend le moins... Il est question d'une hésitation concernant la signature d'un contrat offrant une aisance pécuniaire mais qui engage, car corrélé à un accident passé qui assombrit le présent dès qu'on l'aborde... La puissance d'Hollywood prend les traits de Rod Steiger, blondeur péroxydée et lunettes noires, une compréhension toute prête de commercial, une doucereuse humanité comme appât de son prochain (souvent les pires salauds). L'homme se trouve toujours flanqué d'un assistant plus abject encore... On est autorisé à penser à des sbires apparentés, nombreux sont les artistes condamnés à produire des horreurs ou à jouer des inepties pour avoir signé le plus incertain... le Couple Charles et Marion Castle, (Jacq Palance, ici faillible mais incorruptible et Ida Lupino, belle voix rauque de femme du sud) n'a pas pris une ride depuis les fifties, rien n'interdit de l'imaginer face aux vicissitudes ultralibérales post 2000... Dialogues brillants, quelques vociférations dignes de patrons caractériels ou de politiques nauséabonds. Pour 1955, un bon tour joué au maccarthysme !  .
  • FAMILY LIFE (1971)
    Note : 18/20
    Description familiale anglaise de 1971 (à voir et revoir en v.o.), mais en 2007 elle continue d'embarquer, grâce à cette alchimie qui fait qu'on peut se mettre tour à tour dans la peau de Janice ou dans celle des autres personnages. De nos jours (avec réserve sur la situation économique de plus en plus préoccupante pour une foule de gens par rapport aux seventies), les parents comme il faut "lâchent" toujours aussi difficilement le dernier de leurs rejetons au foyer, cet ultime trait d'union... Et les ados, répondant aux pulsions qui les poussent hors du nid, veulent dur comme fer leur envol et en même temps se freinent, angoisse de l'inconnu... A partir de ce constat propre aux sociétés industrialisées d'occident, l'intrigue se précise, une suite de petites violences à traverser, la situation devrait rentrer dans l'ordre, le temps que jeunesse se passe, au prix de quelques bosses de part et d'autres... Que diable, grâce à cette grande soeur autonome, à ce boy-friend si naturel, il suffirait d'une bonne colère libératrice, de trouver la force... Admirablement envoyé, prises de vue des maisonnettes de banlieue bien alignées (qui reviendront dans certains films suivants), esbroufe des institutions, camouflage de la misère et aussi ébauche de pistes nouvelles en matière de soins... De la très bonne graine de Ken Loach !
  • TONI (1935)
    Note : 17/20
    En salle Art et Essai, il peut y avoir, sur le plan technique, quelques difficultés avec les premiers dialogues prononcés avec un fort accent local, mais ça ne nuit pas pour la suite... Excellent avant-goût des performances du cinéaste, qui se serait inspiré d'une situation réelle : un grand pont, des trains déversent des Italiens en France, tous remplis de l'espoir le plus fou... Mieux vaut penser à des prodiges aux trajectoires brillantes comme l'immigré Yves Montand plutôt qu'à ces trains odieux des années suivantes... Un faux air de la trilogie de Marcel Pagnol, l'atmosphère villageoise provençale sans doute, car le traitement est autrement plus réaliste. D'une part, quelques signaux d'alarme (le petit chat, et, plus tard, le bébé qui pleure) mais mélangés à ce côté bon vivant cher à Renoir (que ce soit les chansons à la guitare, ou les carrières à dynamiter, ils semblent tous s'y faire assez bien, au passage on peut aider la lavandière Josepha à traîner son "charreton" ...). Premières images donc : les immigrés arrivent et, sans transition, nous voilà 3 ans après, dans une scène de jalousie au saut du lit. La scène de la piqûre de guêpe à elle seule intrigue... Mais c'est dit sans détours, l'adultère démangerait l'homme trop redevable, il compose avec la communauté locale en attendant son heure (ce double mariage). Calculs personnels, besoin d'air, hésitation entre attachement et toquade, côté un tantinet profiteur de celui qui demande beaucoup à l'existence ? On ne sait trop et l'ennui commencerait à gagner si soudain, en très peu de plans, des ciseaux, un pistolet miniature.. Accélération inattendue du fait de l'héroïsme féminin. Retour au pont, la peinture de moeurs vire à la tragédie antique !
Notes de L.Ventriloque
(par valeur décroissante)
FilmNote
LA FIÈVRE DANS LE SANG (1961) 19
LUMIERE D'ÉTÉ (1943) 19
JE VEUX VIVRE ! (1958) 19
LE GRAND ALIBI (1950) 19
BOUDU SAUVÉ DES EAUX (1932) 19
LA FOLLE INGENUE (1946) 19
DOUZE HOMMES EN COLÈRE (1956) 19
JEUX DANGEREUX (1942) 19
LA DAME DE SHANGHAI (1948) 19
FRENCH-CANCAN (1955) 19
LA BAIE DES ANGES (1963) 19
LES MAUDITS (1946) 19
FAMILY LIFE (1971) 18
L'HOMME AU CRÂNE RASÉ (1965) 18
LA NEIGE ÉTAIT SALE (1953) 18
QU'ELLE ETAIT VERTE MA VALLEE (1941) 18
HONKYTONK MAN (1983) 18
BOULEVARD DU CRÉPUSCULE (1950) 18
NOUS AVONS GAGNÉ CE SOIR (1948) 18
LE GRAND COUTEAU (1955) 18
SERENADE À TROIS (1933) 18
L'INSOUMISE (1938) 18
GERTRUD (1964) 18
PATTES BLANCHES (1949) 17
LA BETE HUMAINE (1938) 17
LE CRIME DE MONSIEUR LANGE (1936) 17
L'IMPORTANT C'EST D'AIMER (1974) 17
BOULE DE SUIF (1945) 17
FORFAITURE (1937) 17
TONI (1935) 17
ASSOIFFÉ (1957) 17
L'ADIEU AU DRAPEAU (1932) 17
FALBALAS (1944) 17
SOUDAIN L'ÉTÉ DERNIER (1959) 16
LE DESERT ROUGE (1964) 16
POUR QUI SONNE LE GLAS (1943) 16
BOY MEETS GIRL (1984) 16
PALE RIDER (1985) 16
LA VIE EST BELLE (1946) 16
ACCATTONE (1961) 16
MILLIARDAIRE D'UN JOUR (1961) 16
LES ARPENTEURS (1972) 15
LE PARADIS DES MAUVAIS GARÇONS (1952) 15
LA PARTY (1968) 15
ARSENIC ET VIEILLES DENTELLES (1944) 15
LE GRAND SOMMEIL (1946) 14
PLEIN SOLEIL (1959) 14
LE DIABLE PROBABLEMENT (1976) 13
L'ENNEMI PUBLIC (1931) 13
ON PURGE BÉBÉ (1931) 12