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ASSOIFFÉ-1957-
Réalisation : Guru DUTT
Prise de vues : V.K. MURTHY
Musique : Sachin Dev BURMAN
Produit par Guru DUTT
Distributeur : Films sans Frontières
Résumé
Le jeune poète Vijay (magnifiquement interprété par le réalisateur Guru Dutt lui-même) est fort malheureux, voire profondément désespéré de ne pouvoir faire éditer nulle part ses nombreux écrits souvent rejetés à cause de ses fougueux diatribes contre la misère, le chômage et la corruption. Une grande partie de ses poèmes et autres ghazals ont été inspirés par son amour malheureux pour la belle Meena, rencontrée sur les bancs de l'université et qui préféra l'aisance matérielle, la notoriété sociétale et une confortable sécurité existentielle, procurées par son mariage avec le méprisable Ghost, directeur d'un important journal local. Rejeté par ses deux frères le considérant comme un être parasitaire et paresseux, qui n'ont pas hésité à vendre son cahier à poésies, au prix du vieux papier, c'est-à-dire à peine une demi-roupie, à un vague chiffonnier des environs, le pauvre Vijay est de temps à autre hébergé par un certain Shyam, un prétendu ami plutôt opportuniste et veule, sinon pensionnaire nocturne et solitaire d'un vieux banc public en face du fleuve. Une nuit, il entend un de ses poèmes chanté par une douce voix féminine, celle de l'émouvante Gulabo, une prostituée de la cité qui a racheté les précieux manuscrits au revendeur de paperasses en tous genres. Suivant de près ses pas, il se fera méprendre sur ses intentions et ne pourra récupérer ses écrits que quelques jours plus tard, dans une taverne où la jeune femme l'aidera à payer son repas. Convoqué par le sournois Gosh qui soupçonne effectivement la liaison passée de son épouse avec notre prosateur, Vijay est engagé dans le journal du fourbe personnage qui tentera de l'humilier cruellement, lors d'une soirée privée, en présence de moult poètes reconnus, en lui faisant accomplir le service. Après le décès de sa mère, définitivement répudié par ses odieux frangins, il boira un soir plus qu'il n'en faut chez son copain Shyam, se retrouvant déambulant dans les rues nocturnes et dans un geste de compassion, donner son veston à un pauvre hère grelottant de froid qui, quelques instants plus tard, sera écrasé par un convoi ferroviaire, un pied coincé dans un aiguillage. Dès le lendemain, on conclut rapidement au suicide de Vijay, de part la présence de son vêtement et de quelques écrits personnels dans les poches. Croyant à sa mort brutale, Gulabo s'en vient faire éditer ses poèmes, en payant grassement avec ses bijoux Ghosh, heureux de l'aubaine. Un phénoménal succès littéraire s'en suit, méconnu de notre poète qui git prostré, choqué, mutique, sur un lit d'hôpital, jusqu'au jour où une infirmière lui lit par hasard un de ses poèmes édités.
Critiques et Commentaires
Critique de Jean-Claude pour Cinéfiches
Note Cinéfiches : 19/20
Un flamboyant mélodrame d'un sombre pessimisme ambiant, stigmatisant avec force et fougue certaines détresses et fêlures de la société indienne, pourtant libérée du carcan colonialiste, qui s'enfonce dans une profonde amertume générée par maintes désillusions économiques, politiques et sociales. Une magnifique scénographie musicale, agrémentée d'une extraordinaire fluidité de la caméra, quelques fréquents et somptueux enchaînements de travellings avant et arrière, entre lyrisme exacerbé et diffuse sensualité et une très belle composition de la lumière, en permanence et en suffocation émotionnelles, font de cette oeuvre limpide et puissante, un des plus grands chefs-d'oeuvre hindi. Sans oublier le plaisir réitéré de retrouver à chaque nouveau film du réalisateur, le succulent comique déhanché et grimaçant du grand Johnny Walker, interprétant ici le rôle d'un désopilant masseur du cuir chevelu, seul ami véritable, dans la tourmente et le rejet, du tourmenté poète Vijay.
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Critique/Commentaire
Critiques - Commentaires Public
Note : 17/20
Indispensable de se projeter dans l'Inde des années cinquante après avoir intégré la mort d'overdose du réalisateur en 1964... L'atmosphère traversée de chansonnettes chaloupées met à rude épreuve la fibre féministe... Heureusement, se devine en arrière-plan un épris d'absolu, d'une lucidité sidérante... Sirupeuses mélopées indiennes, oeillades de souris dansant devant l'icône masculine seule décisionnaire. Il faut accepter ce décor pour en venir au point capital, les poètes hors normes, ces parias occupés à dire ce qui doit être tu. Point fort : la virtuosité du chef opérateur... Point faible : l'aspect larmoyant rattrapé par la pertinence du discours. Jamais de complaisance pour l'esprit moutonnier ! Sous les dehors sucrés, il s'agit d'un traitement au vitriol de la cupidité, de la versatilité humaine, d'office majoritaire au nom des intérêts du moment, avec cette manie de vénérer les morts en gommant les vivants insoumis à la pensée des plus forts (gros écho en 2009 !...). Symbole de la fontaine sans eau, saisissant gros-plan d'un Jésus en Croix sur la première page de "Life" lu par une "traîtresse" ayant muté vers le milieu qui rapporte ! Hymne aux écrivains piétinés, aux escrocs, aux faux-frères, aux mères mésestimées, à la condition féminine séculaire... L'exil pour espérer respirer un peu ?... Audacieux paradoxe que la sincérité d'écrivain (assuré du chômage de son vivant !) face au plus vieux métier du monde qu'est la prostitution des femmes sous la coupe masculine (offrant gîte et couvert !)... Le récit gagne en intensité sur la fin, surtout bien lire les paroles des chansons afin d'en mesurer la portée intemporelle et universelle... Au total, une absence de concessions qui force l'admiration !
Bibliographie
Dvd
En supplément : - Préface de Charles Tesson ZYK - A la recherche de Guru Dutt (1ère partie) ZYK - Dédicace : "en souvenir affectueux de Gyan Mukherjee"