Critique(s)/Commentaire(s) de L.Ventriloque

Voir ses 50 films notés

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  • LA CAGE AUX ROSSIGNOLS (1944)
    Note : 16/20
    Réussi à m'accrocher à ce dvd de 2004. Malgré la mauvaise presse ayant entouré son remake "Les Choristes"... Paradoxal que les deux films y soient vantés, celui de Jean Dréville et sa remise au goût du jour par Christophe Barratier, ce dernier présent dans les bonus, notamment dans une interview avec le "Laugier", le petit blond à la voix d'or transformé en sexagénaire tout aussi attachant car peu sensible aux hommages appuyés, ce qui l'aurait conduit à tuer dans l'oeuf une trajectoire cinématographique pourtant prometteuse. Ce film, certes un peu poussiéreux dans son approche, est précieux pour sa mise en avant de l'éducation. Plaisir de retrouver la délectable "Nuit de Rameau", tube de l'époque des Petits Chanteurs à la Croix de Bois, voix fraîches et jeunes novices excellemment dirigés. Une entreprise colossale dans un contexte de fin de guerre corsé puisqu'avant de clore le film, Noël-Noël se volatilisait, on le crut mort... Intéressant à connaître aussi pour entrevoir, à travers le mariage à grande volée de cloches, cette ruée vers la procréation de nos parents dans le religieux "croissez-multipliez", c'est-à-dire l'enfance sous l'occupation allemande et l'âge adulte sans reprendre souffle. Cette "Cage aux rossignols" prévaut sans façon sur "Les Choristes" du fait que la seconde version fait un peu "plagiat" et ouvre sur une amertume regrettable. .
  • VIVRE VITE (1980)
    Note : 17/20
    Projeté au 21ème festival espagnol de Nantes 2011 avec accueil chaleureux de Carlos Saura (respirant la santé faite homme !), ce film méconnu et qui semble depuis 1981 avoir pourtant inspiré moult réalisateurs du fait d'une actualité transgressive toujours plus exploitable. Qu'importe si on a fait mieux techniquement, parfois en y ajoutant une dimension d'humour noir et du sexe bien brut (je pense au britannique "Rebels without a clue" de 2007 entre autres...), on dispose d'un repère : les beaux yeux de la jeune barmaid. Ils allument suffisamment pour qu'on ait envie de tout savoir sur sa trajectoire de petite frappe convertie. Cela va crescendo en audaces et en frayeurs mais jamais choquant car plein de cette mansuétude du "il faut que jeunesse se passe" encore de mise dans les eighties. On sent "le filtre Saura", autre chose qu'une poubelle de violence déversée par des amateurs de petite guerre laissant croire que virtuel et réel ont fusionné !
  • TROUS DE MEMOIRE (1984)
    Note : 16/20
    On met du temps à entrer dans ce huis-clos d'un homme provoquant la rencontre après quatre ans d'une ancienne dulcinée. Attente de l'homme. De dos, longuement au bord de l'eau dans la verdure, par temps frais mais radieux, à... huit heures du matin ! Il souhaiterait retrouver un souvenir, une chanson. La jeune femme d'abord s'inquiète. Pour vite réaffûter ses armes, le partenaire remettant vite le couvert de "la tendre guerre" : les voilà partis dans un jeu d'écolier, avec papier et crayon, comme s'il leur fallait un échauffement avant d'en venir à plus de réalité. Fort heureusement, le spectateur récolte en chemin un peu de grain à moudre... Paul Vecchiali et Françoise Lebrun (tous deux en pleine improvisation dans les faits !) font monter le suspense, au mépris de l'étroitesse du cadre dû au manque de moyens, la liberté d'expression d'abord ! Soit, malgré un regrettable académisme, ça finit par accrocher ! Pour qui a pu connaître des situations ressemblantes, c'est même un parfait état des lieux des impasses. Amertume de la déconnexion. Désarroi face à l'individu qui vous échappe, inconfort qu'on sait pourtant doublé d'une délivrance. Destabilisant de toute façon. Je me suis dit qu'ils allaient au final se ménager pour avoir été aussi intimes avant. Cancer, vacuum, des mots assassins... Travail de mémoire, affabulation... Qu'importe puisque le corps parle sans qu'on le lui demande ! .
  • LA HUITIÈME FEMME DE BARBE-BLEUE (1938)
    Note : 19/20
    Quand on songe à la sinistre époque précédant la deuxième guerre mondiale, possible de mesurer le courage qu'il fallait pour oser la comédie à partir d'un pyjama dont l'homme veut le haut et une femme comme volant à son secours dans le magasin... le bas. Sobriété obligatoire du jeu de scène masculin pour que la situation jamais ne bascule dans la grossièreté. Quel délice de frôler le scabreux en se gardant d'y succomber ! En plus des rôles titres très bien tenus, des échanges verbaux délectables avec leur intrusion de français par ci par là et de ce couple tombant soudain à la renverse, j'ai particulièrement raffolé de la hiérarchie du magasin, irrésistible maintien du bonhomme qui va posément alerter la haute direction. C'est ciselé au millimètre près et pas une seconde on ne sent le travail que tout cela a demandé à l'équipe en coulisses et sur le plateau tellement c'est ludique, une bonne humeur à laquelle se référer quand les thèmes et le traitement du cinéma contemporain fatiguent.
  • UN LINCEUL N'A PAS DE POCHES (1974)
    Note : 16/20
    C'est un réel plaisir de suivre des monstres sacrés comme Francis Blanche, Michel Serrault, Jean-Pierre Marielle, Galabru, Longsdale, etc. Les seventies en France sont bien retranscrites avec cette sexualité présentée du seul côté mâle dans la manière de ressentir, le donjuanisme qui fait pour le héros tomber ces dames (à grands renforts de Sylvia Kristel, stéréotype du "phallocrate" patenté), d'un bout à l'autre de l'échelle sociale, avec l'inévitable dame de coeur, celle "qui n'a pas que ses fesses" à offrir. Balbutiements de l'IVG aussi en ce temps-là... Reconnaissons que ça b... dans tous les coins, une formule gaillarde passée de mode ! Du côté de la presse, un décorticage en règle par ce grand ado qu'était encore Mocky, le mythe de LA vérité,l'idéalisme estudiantin gavé d'égalité des classes ! Des histoires de gros sous et de moeurs presque uniquement. Abstraction totale de la presse échappant au pouvoir par son indépendance : quid d'une exception comme "Le Canard Enchaîné" datant de septembre 1915 dans sa forme déjà acerbe et encore plus pimentée dès le début des années soixante-dix ?... A l'actif de ce tumultueux Mocky de plus de deux heures, hormis les acteurs tous à leur affaire : des fulgurances, de bons mots, une photo soignée et le tube international à la trompette et à la flûte de pan (résultat d'une cassette glissée par des amateurs dans la boîte aux lettres du cinéaste et qui lui permit de financer d'autres films). S'il faut comparer cette sombre mésaventure avec le sort actuel des journalistes toujours plus phagocytés par le pouvoir en 2009, disons qu'il reste de farouches indépendants, sans oublier cette incroyable brèche qu'est Internet pour l'expression générale !
  • QUERELLE (1982)
    Note : 16/20
    Indispensable de se pencher sur la trajectoire de Jean Genet pour pouvoir supporter le sordide global (enfant de l'assistance publique au parcours heurté faute de repères fiables, l'écriture lui permit de renaître). D'autant que Fassbinder n'épargne rien de la complexité de "Querelle de Brest", en martelant bien d'entrée de jeu (voix-off) que les marins flirtent avec la mort. Il est souvent fait allusion aussi (un peu trop ?) au "calibre qui vous situe son homme". Nombreux éclairs pornographiques, pour arriver à une scène très crue, amenée comme une torture mais qui se solde par un bonheur fugace. Car le plaisir doit être douleur ici, le couteau prenant la relève du sexe. Très frustrant pour les spectatrices : Lysiane, épouse de l'aubergiste (Jeanne Moreau), facile et fatale en apparence, sert l'homosexualité de son mari joueur, trafiquant, un drôle de tandem ! Atmosphère sulfureuse, musique rampante, Querelle trouve enfin plus fort que lui, une douceur bienvenue... De belles lumières jaune orangé, parfois écarlates. Tout tourne d'un décor à l'autre, comme au théâtre, une fois le bordel, l'autre fois le bateau, avec une caméra qui balaie large, comme un mirador. Le dénouement, en rétablissant l'équilibre qui manquait, laisse deviner un peu de bonheur durable, ouf !
  • PERFORMANCE (1970)
    Note : 10/20
    C'est là qu'on réalise les bons côtés du temps qui passe ! Mick Jagger le dit lui-même aujourd'hui à Cannes à l'occasion de la sortie d'un film concernant les Rolling Stones : "nous étions beaux et stupides"... Tout ce foutoir de l'époque ramené des oubliettes, scénario hermétique, histoire abracadabrante, dialogues vides de sens et un rien "destroy"... Bêrk bêrk bêrk ! En fait, j'y allais surtout par curiosité, ayant ouï-dire d'un parfum de soufre autour de ce film. Alors pourquoi pas retrouver le personnage d'Anita Pallenberg aux côtés de Mick Jagger au faîte de sa gloire : d'abord, les deux se font sacrément attendre, perdus qu'on est dans un déluge de violence peinturlurée en rouge, et ensuite... les stars s'amènent pour jouer leur propre rôle, ici la bisexualité et l'oisiveté du matin au soir et... Un ensemble de très mauvais goût, "has been" au possible et tristissime ! Mais ce délire retrace bien les simplifications sociales des sixties, frime, recherche de sensations inédites, hommes dénaturés et femmes déjantées, soit près du lit ou dans la baignoire (cette philosophie est née de l'engouement général pour la musique anglo-saxonne, on filmait aussi les Beatles à grimacer devant les cameramen dans des scénarios sans queue ni tête, on allait voir ces films juste pour retrouver nos idoles). Une hallucination perpétuelle en réflexe à des décennies de rigidité éducative, comme ce "Performance" aujourd'hui bête à hurler ! J'aime bien mieux les Rolling Stones sur disque ou filmés (même chenus !) en concert par Scorsese.
  • LES MOISSONS DU CIEL (1978)
    Note : 19/20
    Merveilleux moment passé avec cette réédition en numérique d'un excellent cru de la fin des sixties... Et qui traite de l'Amérique de 1916 où il fallait se démener d'un Etat à l'autre pour manger à sa faim... Frère et soeur, ils ne le sont sans doute pas, Terrence Malick préfère toutefois entretenir le flou... Pour faire voyager ses spectateurs sous toutes sortes d'angles qui surprennent, des moissonneuses et des trains, mille brassées des jours durant sans heures supplémentaires possibles... De l'action, une belle dame, quelques joutes qui lui sont liées, des volatiles narquois, et ces champs de blé hauts et d'une blondeur comme on n'en fait plus... Ce n'est jamais trop rude, on assiste à un fin parallèle entre la rage de sortir du malheur et la décontraction du possédant, ici un juste, un romantique... La montée de la jalousie rentrée, c'est comme le feu... L'empreinte de la période "peace and love états-unienne" se devine, le féminin s'adaptait aux mâles présents sans se poser de questions. Une oeuvre à rebondissements très "nature" (constamment splendide à l'image, avec juste une petite faiblesse de musique au générique de fin) devrait trouver son écho à notre époque d'économie et d'environnement perturbés. Pour tous et sans modération !
  • GRIBOUILLE (1937)
    Note : 17/20
    Il n'y a guère que le "je ne sais pas" d'un peu faiblard dans les dialogues de ce classique où rayonne Michèle Morgan à ses débuts, visage fatal, silhouette de femme bien faite, face à Raimu le débonnaire, un marchand de vélos sans histoire, intériorisé (par bonheur délesté des poussées théâtrales qui le rendirent un peu cabot par la suite). Embourbé pourtant entre paternalisme et dérapage viril. C'est toujours équivoque, assez culotté au plan des moeurs pour un film d'entre-deux guerres... L'intrigue de départ tient parfaitement la route, renforcée par deux prétendants et la jalousie de madame. Tous à leur façon perdent le nord... Le spectateur aussi, qui se surprend à devenir sceptique concernant cette angélique créature, trop renversante pour ne pas avoir été envoyée par le diable ! L'ambiguïté est à son comble vers l'issue des plus scabreuses... et qui réussit pourtant à convaincre de son bien-fondé.
  • LES PETITES DU QUAI AUX FLEURS (1943)
    Note : 14/20
    L'entrée en matière et l'issue se tiennent malgré la confusion qui s'invite au bout d'un quart d'heure. On compatit totalement avec ce père sans compagne obligé de se coltiner les frasques de ses quatre filles dont une, amoureuse du prétendant de sa soeur, veut se supprimer. Or, ce valeureux père constitue la prestation la plus attachante du lot, charmant, on l'excuse d'avance quel que soit son comportement (impayable quand il pousse la chansonnette !), on voudrait le déplacer dans un film qui en dirait plus et mieux. Il y a bien Bernard Blier en sauveur désintéressé, la juvénile Danièle Delorme si vive, si naturelle, le distingué Gérard Philipe si beau, si grave, des présences indéniables sauf qu'elles tournent à vide... On oublie vite les autres têtes d'affiche, hélas desservies par des échanges bavards, des situations trop peu reliées entre elles... Un tournage à Paris avec scénario au synopsis prometteur probablement gâchés par quelque calamité due à la guerre (sortie officielle en 1944).
  • VOYAGE EN ITALIE (1953)
    Note : 16/20
    Plus gris que noir et blanc. Tout y est en version italienne des années Cinquante sur le couple, un homme et une femme liés par le mariage mais avec une légère patine. La voiture (à deux ou Madame toute seule) est l'habitacle de tous les secrets, excellent pour préparer les parades, ronchonner... Pour lui, l'Italie est l'occasion d'une halte dans le business. Pour elle, interrompre ses devoirs d'épouse traditionnelle. Qu'il est bon de quitter la grisaille anglaise quelque temps au prétexte d'une maison à vendre, l'occasion de rencontrer quelques connaissances, de l'air, le temps de prendre du champ par rapport aux habitudes. L'attachement est là. L'agacement aussi. Le besoin de masquer tout cela par la présence d'autrui. Le voyage révèle deux rapaces se livrant à l'aventure individuelle permettant de dresser un bilan. Telles les ruines de Pompéi (le tandem Rossellini/Bergman battait de l'aile lors de la réalisation du film), toutes les astuces du couple se déploient : ah, s'offrir le petit vertige qui resserre le lien !
  • ILS ETAIENT NEUF CÉLIBATAIRES (1939)
    Note : 17/20
    A l'heure où l'immigration devient un casse-tête mondial, le fait d'imaginer l'obligation au mariage pour rester dans le pays d'accueil a dû être périlleux lors de la fabrication du film. Malgré l'audace, le procédé ouvre plus que jamais la porte à réflexion si l'on considère les différentes classes sociales d'un pays. Délectable va et vient à l'image entre neuf femmes de profils divers bien que plutôt mieux loties que leurs neuf partenaires potentiels, soudés mais irrémédiablement chenus. Le regard acéré de Sacha Guitry sur les travers humains de tous temps.
  • L'INCOMPRIS (1966)
    Note : 18/20
    Revu en v.o. en 2008, avec toujours autant d'émotion. Qui mieux que Comencini a su mettre en oeuvre l'alchimie nécessaire pour que le public parvienne à s'identifier aux remous intérieurs de ses personnages ?... On est à la fois le parent fracassé, qui va, dans un grand sursaut d'orgueil, créer un secret de famille trop lourd, et ces petits pleins de fraîcheur devinant, chacun à leur rythme. Certes une épreuve pour l'adulte, d'annoncer une mort, trouver les mots, ne pas perdre les pédales... L'entrée en matière, cette voiture noire à grande vitesse, filmée toute resserrée jusqu'à ce qu'elle déboule dans la grande demeure où les serviteurs gardent les yeux baissés, angoisse... Les deux petits frères arrivent à leur tour, le père maladroit s'empresse auprès de l'aîné (scène mémorable d'agacement mutuel), en confiant le plus jeune aux femmes de service... Seul l'oncle Will apportera véritablement un semblant d'oxygène. Toujours entre le rire et les larmes à cause des frasques successives, et la constante maladresse paternelle, le spectateur est inquiet, mais se dit que ça devrait s'arranger, parce que l'ensemble est truffé de gags, une nurse allant jusqu'à rendre son tablier... C'est traité avec une grâce trompeuse, on se dit qu'il y a un Bon Dieu pour ces deux frères...Un film qui révèle la grande solitude enfantine et fait voler en éclats le protocole familial.
  • DE L'INFLUENCE DES RAYONS GAMMA SUR LE COMPORTEMENT DES MARGUERITES (1972)
    Note : 15/20
    Le titre du film pourrait bien décourager en 2008 à sa re-sortie en v.o. : tarabiscoté, va-t-on revisiter la période d'enc... de mouches des seventies ?... Curieux que l'annonce du décès tout récent de Paul Newman réhabilite ses propres films, tous situés à cent lieues de la stature de playboy du bon côté de la barrière américaine qu'il persistait à incarner dans les mémoires. Ici inspiré d'un livre : j'ai eu des mouvements de recul dans les portraits présentés tellement ils sont peu complaisants. Humour cruel, flirt avec le sordide, la musique de Maurice Jarre ajoutant sa part de malaise, on a peur pour les êtres vivants près de cette drôle de perruquée... L'épouse du réalisateur (Joanne Woodwards), s'amusait visiblement comme une folle à épater son homme, ce dernier croyant toujours qu'elle n'y arriverait pas : l'emmerdeuse faite femme lui va comme un gant ! Mais elle finit par incommoder à se tirer toujours d'affaire, sans trop de dégâts. Mère mortifère, si dure à regarder en face... Fort heureusement, Matilda (propre fille du couple Newman/Woodwards à la ville)qui vit dans son monde préservé du pire, vient rassurer de sa voix cosmique, désormais sépulcrale ! Les scientifiques, les poètes inclus les "barrés", les écologistes, devraient raffoler. Pour ma part, cette curieuse alchimie de Paul Newman rejoindrait les oeuvres ardues mais profondes, à voir au moins deux fois pour en accepter la face aride.
  • DELIVRANCE (1971)
    Note : 16/20
    Peut-être quelques faiblesses techniques en 2009, des redites de canoë dans les rapides par exemple (plusieurs fois les mêmes images ?). Quand même, un film encore marquant, à l'atmosphère repérable sans confusion possible avec quoi que ce soit d'autre, suspense que ce pincement d'une corde de banjo ah ah !... Un somptueux duo d'inspiration blue-grass qui redéroule illico la pellicule : de braves gars partis pour s'aérer quelques jours, saine dépense physique loin des contraintes professionnelles. L'assaut dans la forêt après le lancement des kayaks avec leurs passagers plein d'allégresse (j'avais 20 ans quand le film est sorti en salles) fait qu'on ne se promène plus pareil dans les bois juste après ce film ! Terreur de ces scènes qu'on n'imaginait pas ! Une avalanche de rebondissements, à la limite du supportable, comment faire son affaire d'une traque loin de la civilisation, le truc intense... D'autant plus réussi que l'équipée se compose de stéréotypes trompeurs (Burt Reynolds!) tous révélés dans cette descente endiablée du Saint-Laurent où on claque des dents presque non-stop... Un film haletant si on a évité la syncope de la première demi-heure, mais attention, si c'est souvent inconfortable sur le plan psychique, c'est palpitant comme déroulement, pas pire qu'on bon film d'horreur ! .
  • LE MAITRE DU LOGIS (1925)
    Note : 19/20
    Ne jamais sous-estimer l'utilité d'une vieille nounou au domicile conjugal, dit ce film qui va avoir un siècle bientôt, Considérer qu'elles sont des trésors, pour l'intendance ou l'éducation des enfants, l'anti burn-out du pilier féminin, les antennes pour les épouses changées en esclaves sans s'en apercevoir. Désarroi ou approbation des plus jeunes, complicités plutôt que rivalités; voilà ce qui est cultivé ici, on se sent petite souris des intérieurs en crise dans une économie à la ramasse. Muet et pourtant diablement expressif surtout dans la potion à rebours ! Un film qui laisse mère et belle-mère jouer leur partition. A souhaiter que "le master" se tienne à carreau ensuite, sinon seconde balade en fiacre moins sûre ;-). Les deux anciennes sont des veuves dont la tâche aurait pu être plus rude si la gent masculine avait eu droit d'accès !
  • UN SI DOUX VISAGE (1952)
    Note : 18/20
    Revu ce chef-d'oeuvre en 2008 grâce au dvd, version originale, zéro défaut, à condition d'accepter une noirceur absolue. A vous dégoûter des virées en décapotable.On se demande quels trésors d'ingéniosité ont été déployés pour obtenir cette petite trouvaille technique, détails mécaniques à l'appui, qui pourraient inspirer les malfrats. Robert Mitchum campe ici un gros ours indécis,finaud à ses heures, mais apte à se laisser fléchir, disons plus par distraction que par conviction. Jean Simmons joue une riche femme-enfant mal remise d'une mort passée, rivée à l'image paternelle, on lui donnerait "le bon dieu sans confession" ne serait-ce l'empreinte vaguement ténébreuse qu'elle laisse. D'un bout à l'autre, c'est absolument délectable, juste après le charme de la rencontre, l'inquiétude prend le dessus, jusqu'à la culbute déjà bien remuante... Et on pense avoir eu son compte d'émotions. D'autant plus que, selon une rumeur, le couple Mitchum/Simmons aurait souffert de l'irascible caractère d'Otto Preminger, cette giffle assénée pour de vrai, point trop n'en faut... Le spectateur sent que la demoiselle court à sa perte, voilà ce que c'est que de comploter sans filet. D'autres somptueuses images en noir et blanc défilent, avec ces gros-plans sur l'ange déchu et la face du séducteur faisant sa valise... Toujours aussi époustouflant, et pas prêt de prendre la poussière !
  • PORTE DES LILAS (1957)
    Note : 14/20
    J'ai bien accroché à l'ambiance générale, mais très moyennement aimé ces dialogues inspirés du roman de René Fallet, écrivain souvent noyé dans l'incorrigible idéalisme des piliers de bars voulant refaire le monde. En revanche, le décor est une petite oeuvre d'art, que ce soit la maisonnette (dont la cave avec cette petite fenêtre annonçant les visites) ou le café et ses habitués. Cela tourne et vire au dehors, c'est bien filmé et on est tenu en haleine par des lenteurs suivies de coups de théâtre appelant une conclusion qui tarde... Le plus palpitant : à partir du pistolet dans la main de la jeune femme. Je trouve que Pierre Brasseur manque de crédibilité dans l'admiration qu'il voue à un scélérat dénué de la séduction nécessaire, fort heureusement, il se rattrape lors du suspense des dernières secondes, pendant lesquelles on ne sait pas qui est resté sur le carreau... Plaisir de retrouver Raymond Bussières pince-sans-rire toujours à sa place, Dany Carrel en jeune femme au minois d'enfant, tiraillée entre romanesque et émancipation. L'intrus ne lasse pas d'agacer à force de volte-face, mais on ne peut être de son côté cependant. En définitive, la vedette revient à Georges Brassens, l'ours à la guitare, campé dans son propre rôle d'auteur-compositeur, "L'Artiste", le terme, comme sacralisé, sera répété jusqu'à plus soif. Intime de Fallet, il incarnait déjà une valeur sûre à l'époque.
  • L'ETOILE DU NORD (1982)
    Note : 16/20
    Pour être sûr de ne pas en perdre une miette, autant visionner le dvd en deux étapes : savourer les deux monstres qu'étaient Noiret et Signoret se donnant la réplique n'a pas de prix aujourd'hui en 2009... Outre sentir l'Egypte déferler dans cette belge pension de famille, l'intérêt réside dans le trouble grandissant de "Mme Baron" face à "Monsieur Edouard" : on est partagé, il y a bien cette bague, mais enfin ce voyageur débonnaire ne peut tout de même pas... Entre nous, cette blonde sirène (Fanny Cottençon) irait jusqu'où pour des histoires de popotin ?... Dommage que ça traîne un peu en longueur pour qu'il y ait enfin une chute, bien dans le style de l'écrivain Simenon... Dialogues signés Grisolia, Granier-Deferre et Aurenche, ce dernier par à-coups au dire du cinéaste dans le bonus car le fin dialoguiste Aurenche aimait se faire désirer). L'interview du réalisateur mentionne aussi "la patte" de Bertrand Tavernier pour la séquence Ile de Ré). Film d'atmosphère certes de facture classique, techniquement de haute voltige avec flash-back sortant de l'action comme d'un chapeau, musique céleste. Ne manquerait que l'opium qui déboule de l'écran... Ceux qui éprouvent des engouements tacites mais bien réels seront à leur affaire.  .
  • UNE PAGE FOLLE (1926)
    Note : 16/20
    Une page folle, film en noir et blanc muet japonais de 1926 au négatif retrouvé 45 ans plus tard, nécessite de nombreux arrêts sur images si l'on veut en déchiffrer l'essentiel. Il force de toute façon le respect comme le ferait un documentaire inestimable. Atmosphère inquiétante avec sa musique rajoutée, martelée comme une enflure qui se gangrène quoi qu'on fasse (musique parfois envahissante). Dès les premiers plans, saccadés, barrés de trombes d'eau, une danseuse évolue devant une boule aux formes régénérées, symbole de créativité, de fécondité, de maternité aussi... Le terrain moitié réaliste moitié onirique amène deux intervenants qui se toisent, se lâchent, se reprennent, une complicité qui fut. La jeune danseuse dans sa cellule fait diversion avec son look sorti d'un néant intemporel (elle pourrait être de 2012 !). Le clair-obscur, les obliques de cadrage, vont et viennent du bâtiment au chemin extérieur, une femme court, un chien... Si l'on se repasse la scène avec l'enfant dans les bras ensuite, deux femmes... Evident qu'un bébé est tombé à l'eau. Accident ou suicide raté de la mère incapable de plonger ou qu'on a retenu sur la berge ? Le rire de la prisonnière, sa recherche d'un minuscule objet par terre dans sa cellule (bouton ou perle ?), sa mimique punitive vers son mari de l'autre côté des barreaux, son rire fracassant de qui se ménage une revanche, restent des pistes à explorer. Tout comme la visite féminine (soeur, rivale...). Quoi qu'il en soit, il est mpossible d'oublier cet homme aux yeux pénétrants côté pile, et parfait visage de coupable cherchant à s'amender côté face... Concierge pilier des lieux comme le médecin, deux chiens féroces qui génèrent une lutte entre encadrants (scène très longue) et l'hilarité des malades. Film visionnaire d'un avenir collectif nippon lugubre ou adultère dilué dans la schizophrénie, on dirait un puzzle agaçant auquel il manque une pièce... Seule certitude, toute l'eau du ciel se vide chez ces dérangés de l'âme !
  • ANGE (1937)
    Note : 19/20
    Marlene Dietrich aux sourcils peints, bouclée, avec des lèvres assez pulpeuses, fatale quand elle ondule dans ses robes fourreaux ou qu'elle ronronne au lit entre veille et sommeil. Les deux hommes quoique différents apparaissent de charmes équivalents, l'un clair, l'autre obscur. Pour pouvoir faire ces déductions, on dispose de sauts entre Londres et Paris et d'aperçus de la vie de couple. Les diversions qu'apportent les personnages secondaires aident à déduire. C'est plus un déballage de doux pièges subtils que de franche hilarité. L'arrêt de la caméra sur la marchande de violettes et l'intrusion auprès du personnel de la cuisine précisent la tendance mais jusqu'à la dernière image, on ne sait trop... C'est comme souvent jalonné de portes immenses ouvertes, fermées, d'allusions aux péchés mignons d'une nationalité à l'autre et d'ellipses innombrables. On est baladé en dernière partie, peut-être dix minutes de trop à cause de l'effort d'observation qu'il faut fournir. Un petit défaut fort heureusement balayé par ce mouvement de dernière seconde autour de la dernière porte, incroyable de vertige et d'élégance !
  • CLAIR DE TERRE (1970)
    Note : 17/20
    Visionné le dvd (avril 2011). Un peu de maniérisme dans la forme, je pense notamment à ces rafales d'images hachées dont on use en principe pour des paroxysmes du style fin du monde. Par chance, les dialogues ou monologues accrochent et ce n'est jamais clinique même si on sent que le cinéaste se fait souvent plaisir (un peu trop ?) en présentant ses acteurs et actrices toujours filmés comme des divinités dans la lumière ou le faux-jour, par grand vent... Résultat : c'est toujours assez beau à l'image, et assez insolite aussi, pour qu'on veuille en savoir plus. Que ce soit les phrases invitant à la réflexion ou l'effroi des pertes, Guy Gilles, disparu cruellement, manque au monde pour son talent à transmettre l'angoisse existentielle. Que n'eût-il fait comme prouesses dans le cinéma d'aujourd'hui !
  • NINOTCHKA (1939)
    Note : 18/20
    Certains détails peuvent échapper parce que l'introduction, malgré le trio masculin, sorte d'ersatz des Marx Brothers made in URSS, donne envie de presser le mouvement si toutefois on oublie qu'il s'agit d'un tournage de 1939, de l'aplomb qu'il fallait pour réaliser une comédie mêlant des pays impliqués dans la seconde guerre mondiale. En tout cas, en 2011, Greta Garbo à l'affiche dans un registre inhabituel fait qu' on attend Garbo. Tout prend sens quand elle débarque, masque de garde-chiourme que dément son sex-appeal renforcé encore par l'uniforme et un perpétuel "non" à la bouche. S'intercalent quelques traits d'humour luttes de classe bien senties en plus d'un contraste du plus bel effet entre le début du déjeuner et le retournement de situation qui crée l'hilarité chère à Lubitsch, ainsi que l'inversion des rôles masculin-féminin, sa spécialité avec l'ivresse dans toute sa vérité, cette touchante fragilité humaine laissant supposer qu'il faisait boire ses comédiens et comédiennes jusqu'à être assez relâchés ! Des moments de haute qualité et quelques regrettables creux de la vague. En voulant faire languir dans la dernière ligne droite comme une gueule de bois prolongée, il s'en est fallu de peu qu'on s'endorme avant le bouquet final !
  • POUSSIÈRES DANS LE VENT (1986)
    Note : 16/20
    Film naturaliste s'il n'y flottait une brise ironique typique de ce réalisateur passé maître dans l'art de ménager quelque gag dès que le sentimentalisme s'englue... C'est familier (l'habitation filmée constamment à gauche de l'écran avec son escalier, les gosses qui piaillent un peu plus bas), nostalgique comme des photos de famille, grave comme une série de deuils. Approche de l'autonomie, ces pertes qui vous tombent dessus en dépit de toute l'affection et malgré l'instruction. Les scènes se déroulent en zone rurale taïwanaise. Le lien avec l'extérieur est le train dans le tunnel, toute cette ombre n'augure rien de folichon, ils n'ont pourtant pas été élevés dans le coton, ce garçon et cette fille copains d'enfance. Ils ont connu rudesse physique et devoirs communautaires (offrandes religieuses), leurs proches les veulent fidèles aux traditions. Tels deux pigeons fébriles au bord de leur cage, de plus en plus rarement au diapason...Chaque spectateur pourra se souvenir de ses balbutiements dans le monde des grands, les premiers boulots où on marche au radar le temps que ça arrange, ravis de claquer la porte sur des avenirs plombés, le soulagement de se rabattre sur des études longues, le premier vrai cataclysme qui fait rentrer au nid familial sans trop présumer de l'accueil... Et puis cette habitude que les filles soient vouées à vite convoler et procréer... C'est un peu étiré dans l'ensemble (1h49), riche de séquences en temps réel fort heureusement compensées par des minutes de fraîcheur comme la complicité des copains, les tirades du grand-père, ce "non" du petit.
  • LA GUERRE EST FINIE (1965)
    Note : 14/20
    Retour sur l'Histoire. Ce film avait sa raison d'être en 1965, période où les joutes politiques étaient endiablées, les partis bien définis, les hommes se réclamaient "bien à droite ou carrément communistes". La mort du dictateur Franco n'intervenant qu'en 1975, le peuple espagnol a cependant eu le temps d'être sur les rotules... On sent le témoignage de Jorge Semprun, "le permanent" (joué par Yves Montand), un militant un peu plus sceptique que les autres passeurs entre France et Péninsule Ibérique où les disparitions commencent à peser... Les compagnes encore bien "roman-fleuve" ont l'oeil qui s'allume face au séducteur en danger, grâce au cadreur qui a minimisé l'austérité ambiante par leur plastique déboulant sur l'écran au milieu de tout, comme autant d'écrins consolateurs, le guerrier traditionnel, indépendant sur bien des points, puise sa force dans l'éros ! Courageuse prise de position néanmoins d'estimer qu'à l'impossible nul n'est tenu dès lors que la terreur paralyse les populations ! D'où, faute de mieux, déjà l'idée des très jeunes de s'attaquer directement au tourisme, cette manne sous le franquisme... Instructif au plan historique, il est bon de se rappeler les ravages dictatoriaux. Pourtant, non transposable en 2008 à cause du brouillage des cartes, cette communication sur le marasme économique et financier... Ce qui frappe ici - et tient éveillé ces deux longues heures de noir et blanc ! - c'est de constater la révolution des moeurs des sixties à nos jours.
  • L'HONNEUR DES PRIZZI (1985)
    Note : 17/20
    Il y a presque des époques pour apprécier un film, banni ou écoeurant à sa sortie, relançant l'intérêt quelques décennies plus tard... C'est le cas de celui-ci. Il est encore soit trop gros, soit délicieusement caricatural. A rebours des romances hollywoodiennes sur fond crapuleux (Nicholson en Tex Avery dans l'approche qu'il a de sa partenaire Kathleen Turner, efficace en tueuse glamour)... Leurs oeillades style "je te tiens par la barbichette" montrent à quel point le coeur lutte avec le dressage devenu partie intégrante de l'individu. Certes le mot "polack" pour "polonais", audible en 1985, écorche l'oreille en 2012 sur le dvd sorti en version française. Sinon ce peut être un divertissement honorable, gagnant en suspense en dernière partie. A l'exception peut-être du patriarche qui en fait des tonnes, les acteurs s'amusent ferme dans leur double jeu et Jack Nicholson peut cabotiner, son rôle le demande. Récit pertinent pour relever les paliers de cynisme des extrémistes, leur logique de pragmatiques dénués de réflexion. Une belle définition du "panier de crabes"... Pour corser les affres de ces bandits de la politesse, John Houston met des gants, case affective d'abord... Résultat, on voudrait laisser une chance au couple.... A voir manoeuvrer la tribu Prizzi, monstre froid aux lentes tentacules policées, on se prend à comparer avec les mafias expéditives d'aujourd'hui, La "Camorra", pour ne citer qu'elle.
  • LA MENACE (1977)
    Note : 17/20
    Un inoubliable thriller qui peut mettre mal à l'aise les hommes détestant voir leur trajectoire entravée par "des histoires de bonnes femmes". En effet, ce type feinté, qui monte un stratagème visant à récupérer sa dulcinée après le suicide de sa régulière fait un peu mauviette... Surtout qu'Alain Corneau s'évertue à corser en égarant ses spectateurs dans des manoeuvres de joueur de légo, ce qui fait qu'on doute un bon moment : a-t-il toute sa tête cet inventif individu ? Egoïste ou à double fond ? Simple joueur et rien d'autre ?... Une histoire inoubliable par ses cascades entre poids lourds et coccinelle, un rien terroriste aussi ! Il faut voir ces camionneurs tous solidaires pour fliquer le drôle d'oiseau... J'avoue avoir craint la surenchère de morbide au début et langui un peu sur la fin... pour accepter pleinement (aidée par les suppléments explicatifs du dvd) ces dialogues de sourds. Encore en 2010 où on ne montrerait pas facilement les émois d'un commissaire coeur d'artichaut face à une pauvresse enceinte comme en 1977, le quatuor Montand-Dubois-Laure-Balmer fonctionne.
  • CLAIR DE FEMME (1978)
    Note : 15/20
    "Du sublime au ridicule...", voilà l'oscillation de cette parenthèse d'une nuit. On est mal à l'aise... D'abord l'abnégation d'une malade au bout du rouleau : elle invite son partenaire à la prolonger dans une autre femme. Puis cette Lydia de hasard annonçant avoir perdu mari et enfant dans un accident. Deux extrêmes qui amorcent un tournant dans l'ordinaire d'un gars qui jusque-là vivait sans états d'âme précis. Alors, après il y a les réalités, ces inévitables rapports de force qui sont autant de boucliers indispensables afin de conjurer le malheur. On descend dans les tréfonds de l'intimité des deux sexes, grâce et trivial en alternance, avec une séquence de jargon et des coups de fil à damner les plus saints... Ce dvd (en droit fil du roman éponyme de Gary) offre à reconsidérer le sursaut rencontré à à sa sortie et la patine qui lui bénéficia depuis la disparition de ses deux acteurs fétiches. C'est "tordu" et grandiose en même temps.
  • LA DAME AU MANTEAU D'HERMINE (1948)
    Note : 19/20
    C'est en couleurs et tout de suite accrocheur, un peu épique, toujours plaisant grâce au bon dosage de la comédie musicale et des dialogues parlés. Le manteau d'hermine laissant deviner des jambes parfaites, la sortie des tableaux comme on descend de son lit ou de son cheval, sans oublier le retour dans le cadre. Ainsi font la belle ancêtre et ses compagnons sur le mur selon les événements, le spectateur s'y acclimate sans problème, tout comme il passe de l'aïeule à sa copie conforme plus jeune et sa nuit de noces à la hussarde... On devine l'oeil malicieux de Lubitsch derrière l'agencement des intérieurs et des personnages, avec un pincement tout particulier puisqu'il mourut en début de tournage, causant l'émotion qu'on peut imaginer. Otto Preminger eut à finir le film sans le déformer ni se renier lui-même... Une réussite sur toute la ligne. Le dépaysement est total, il y a le même cadeau fait au public, c'est tellement bien fait qu'on adhère à la personnalité du colonel sans transition de la tyrannie au vague à l'âme de jouvenceau... Les deux styles combinés des cinéastes donnent une croustillante parodie mâtinée de romantisme. Un pur régal ! Jamais d'étalage de combats même si le côté chevaleresque est amplement abordé, à la place le marivaudage habituel et une scène de danse filmée avec grâce sous tous les angles possibles, à croire que tout le plateau dansait !
  • SANG POUR SANG (1984)
    Note : 17/20
    Un excellent démarrage plein de noirceur pour ce grand cru des Frères Coen de 1984. Frances Mc Dormand en fraîche épouse essayant d'échapper aux griffes d'un mari machiavélique, tente de fuir avec un homme "normal" de son entourage. C'est vrai qu'il fout la trouille, ce mari caractériel, jusqu'à l'arrivée du tueur qu'il engage, un virtuose de la photo, le genre "onctueux trompeur", ses savantes réparties laissent entendre d'autres frasques sans l'ombre d'un état d'âme. Sueurs froides dans cet intérieur éclairé sur le couple en point de mire ! D'autres raffinements, que ce soit dans les situations ou les dialogues, rendent ce film sur le fil du rasoir regardable (= ne jamais fermer les yeux d'horreur). La limite est atteinte avec les pelletées en rase campagne sous la lumière des phares. Là on pouvait tomber dans les pommes... Etrange mari plein de tics, vomissant d'effroi et son rival, sur lequel le spectateur misait, qui se retrouve zombie à force de luttes. C'est plein de raffinements à l'image (dessous de robinets vu avec les yeux d'un agonisant) et sauvé par le contraste de présence charnelle bien saine, bien avisée, que laisse pour finir (comme un petit chaperon rouge épargné)"Madame Joël Coen à la ville" !
  • UNE HEURE PRÈS DE TOI (1932)
    Note : 15/20
    Pour avoir raffolé de la version muette de ce scénario intitulée "The Marriage Circle" ou "Comédiennes" en français, je suis entrée dans le film sur la pointe des pieds. C'est divertissant, les gags y fusent, toujours ces différences de classe sociale entre maîtres et serviteurs traitées avec dérision (le noeud de cravate, voir Monsieur en collant...). L'interprétation de Maurice Chevalier à la hauteur, sa manière de s'adresser directement au spectateur un plus certain, les chansons sous forme de dialogues entre homme et femme drôles, tendres, avec les sous-entendus comme autant de clins d'oeil en direction du public. Poussiéreuses en revanche les roucoulades de violon avant chaque apparition féminine d'autant que le jeu de l'actrice féminine principale versait aussi dans un sirop un peu indigeste. Certes bien ficelé pourtant, une position clairement exprimée envers l'adultère qui rend le propos plus abouti... Las, j'ai revisionné la "Mizzy" de 1924, Florence Vidor face à Marie Prévost, Monte Blue et Adolphe Manjou aux premières loges. Tous irrésistibles de naturel dans des situations qui font contemporaines en 2012, alors que la version parlante datant de 1932 a atrocement vieilli !
  • LEOLO (1992)
    Note : 15/20
    Certains êtres portent en eux le tragique de leur destinée : Jean-Claude Lauzon a disparu avec sa compagne dans un accident d'avion en 1997 à l'âge de 44 ans... Quand on le sait, son grincement tourmenté semble nous prévenir. A mi-chemin entre tendresse et insupportable. La personnalité de l'enfant "Léolo", forcené du pot face à maman itou sur le trône : charmante scène qui se répète dans cette famille de "moitié timbrés" (sauf la valeureuse mère ?). L'ignorance crasse des peu instruits et "qui s'creusent pas"... Non qu'il soit maltraité mais Léolo est un intello réfugié dans son monde, il se dit "déjà mort"... C'est filmé avec délicatesse, beaucoup de cocasserie, l'accent québécois de la voix-off amenant sa poésie craquante... On voudrait être ce témoin qui ressasse les écrits du jeune dépressif qui a rendu les armes, mais avec plus de pogne ! Une trajectoire marquée de quelques étincelles et on descend en enfer. Une petite remontée aurait été la bienvenue en regard de la qualité d'ensemble... Pire, le tableau devient d'un goût douteux à partir des bambins autour du chat, en matière de comptine, est déclaré fêlé celui qui rit encore après cette scène "too much"... Ce film sur la cruauté enfantine s'apparente à celui d'Agnès Merlet "Le Fils du requin"
  • LA RUMEUR (1961)
    Note : 18/20
    Collège de jeunes filles pubères dans la verdure, plutôt cossu, riant, ordre et amusement bien dosés, à cent lieues d'une discipline de fer. Surgit ce délire d'une pensionnaire, genre petit nombril du monde prêt à tout... L'homosexualité dans les sixties avait un parfum de soufre chuchoté dans le creux d'une oreille avec le "oh !" scandalisé tout prêt, une "dépravation" réservée aux artistes à la rigueur... Ce thème du saphisme en milieu juvénile éducatif est toujours rarement abordé au cinéma depuis 1961 (la pédophilie s'entend plutôt d'inspiration masculine encore en 2009). Etonnant qu'après propagation de cette rumeur, comme la bonne société rapplique, qu'il est dur de douter une seconde de ces chers petits si purs... En plus du brillant tandem Audrey Hepburn / Shirley MacLaine, qui achève de troubler, on assiste à un suspense hitchcockien du meilleur effet, surenchère, volte-face, stupeur, facilité par deux autres comédiennes talentueuses, Fay Benter dans le rôle de la vieille aristo et la jeune Karen Balkin en peste patentée... Les pensées homosexuelles à elles seules finissent par mortifier ! L'image du médecin caché sous la charmille et qui voit son irrésistible marcher d'un pas léger, comme libéré, libère et oppresse en même temps... .
  • MISSISSIPPI BURNING (1989)
    Note : 14/20
    Vu le dvd en octobre 2008. Un thème délicat que celui du racisme traité de manière frontale. Surtout quand il n'y a aucun fait, aucune interprétation, proposés en début de film, qui justifient cette haine raciale. C'est un pur rappel historique d'après quelques infos recueillies : résultat, ça fait un peu "fourrez-vous ça bien dans la tête puisque je vous le dis", enfin tant que la situation ne se renverse pas : le spectateur est pris en otage pour patauger dans les violences gratuites répétées sans pouvoir s'attacher à un Noir précis, si ce n'est peut-être au plus jeune. Très maladroit que ce bourrage de crâne... Mais à la décharge du cinéaste, l'attention est captée par ces deux envoyés spéciaux sur les lieux, le vieux briscard sous les ordres du jeune qui en veut - étonnant pouvoir de rameuter des hommes à son secours ! - mais sans trop se croire arrivé quand même. Ils vont apprendre à se colleter. Autre intérêt et pas des moindres : la chanteuse de gospel, d'abord entendue et enfin vue, c'est tout le peuple noir qui chante pour finir dans ce visage au milieu de l'écran !
  • L'OMBRE D'UN HOMME (1950)
    Note : 19/20
    Une bourgade peu engageante, un office dans une lugubre église, on y pénètre après avoir montré patte blanche... Pendant que le décor se plante, on s'attendrait à une oeuvre poussiéreuse sans grand intérêt s'il n'y avait le jeune Taplow, sa bouille éveillée, la bonhomie du proviseur s'adressant à ses ouailles, les rencontres équivoques sur le parvis. Une pensée plus moderne qu'il n'y paraît : la caméra "appuie" les moments importants comme un surligneur.... Supplier en amour est rarement payant... Mille peines à en vouloir à ce vieux prof soi-disant honni... Et les surprises s'enchaînent, avec des pics émotionnels très pince-sans-rire, "so british". Curieux rivaux d'une noblesse de comportement qui force l'admiration. Coquette la dame ! Le mariage peut vous envoyer loin des gondoles !... Le cadeau de l'élève peut réveiller des souvenirs pour qui a connu des enseignants sur piédestal de façade... La décision prise dans le clair-obscur de Monsieur et Madame peut sidérer comme arracher un rire... Puisse ce film magistralement conduit revenir sur grand écran pour ceux qui l'ignorent... Sinon plusieurs visionnages du dvd autorisent à en savourer les détails.
  • LES ESPIONS (1928)
    Note : 18/20
    Découvert sur Arte le lundi 26 juillet 2010 : touffu à suivre d'un seul tenant (le dvd sera idéal), on admire les effets à l'image tout en déplorant la présentation des antagonistes (aujourd'hui, on couperait quelques scènes). Lang s'amuse comme un petit fou avec cette histoire écrite par son épouse également co-scénariste, il plante le décor en peaufinant, en fignolant... Aussi est-il bienvenu ce coup de foudre comme dans la vie, suivi de l'éclat de rire de Trémaine, agent n° "326" : le réveil de ceux qui, comme moi, commençaient à baîller... Riche de détails, prometteur grâce à ses personnages contrastés, avec des documents précisant les positions des "taupes", on a tout en main. D'autres chiffres amusent, le "33133" en vrille à l'image, la voiture n° 8... Muet mais limpide, truffé d'espiègleries, le ton caustique, la musique complice, une légèreté qui n'enlève pas l'angoisse qu'on persiste à ressentir... La totalité des scènes autour du train, la fuite de gaz dans l'immeuble, le numéro du clown (morceau de roi !) tous événements de la deuxième heure, frappent les esprits à jamais en gommant la durée (2h25).
  • CORPS À COEUR (1979)
    Note : 16/20
    Vu le dvd en octobre 2008. Après ce concert à la caméra qui balaie savamment, on continue à baigner entre Fauré, les fantasmes du mécano et la tentation d'un tourbillon quelconque, qui débarque sous la forme d'une vieille pharmacienne décolorée encore avenante face à un bellâtre à l'arbalète toute prête, nul ne lui résiste. Mais c'est ce qu'elle dit pour sa défense, cette dame respectable avec pignon sur rue, qui sidère, pas froid aux yeux (l'horrible moment de studio, avec cette chansonnette hurlée est assez pénible en revanche). Le Casanova du début - on apprend qu'il incarne le jeune remplaçant du père adulé (post-mortem) par Man-man - s'effondre, méconnaissable, pour finir en syncope devant l'officine, face au marché où les gens jasent... Souvent femme varie... Soudain, l'horizon s'éclaire, embarquement pour une lune de miel d'environ trois mois, à cela une excellente raison : chic, les masques devraient tomber. Ce couple mal assorti devient proche du spectateur dans la fantaisie qu'il se paie. Mais le drame couve. L'entourage, le monde de la rue apportent une touche quotidienne parfois picaresque. On assiste à de truculents dialogues de tous les jours mélangés au vertige passionnel ! Torturé, mais quand même du grand art !
  • WELCOME IN VIENNA (1986)
    Note : 18/20
    On plonge dans la guerre sur cette dernière partie de la trilogie. Les combats occupent l'écran tout de suite et longtemps. On fuit, on se canarde, on triche, on se débrouille dans un chaos sans fin (les images de désolation, ces villes par terre, peuvent rappeller "Le pianiste" de Roman Polanski). Intervient une jolie blonde, bien campée dans sa fusion entre scène et réalité, contrepoint habile pour qu'on comprenne que le caméléon sommeille en chacun de nous, quoique à des degrés divers. L'escalade dans la folie collective atteint son apogée ici. On se noie dans l'alcool pour oublier son déni de soi-même. La jeune fille aide à cerner combien la survie post-guerre requiert d'arrangements. Ferry en deviendrait presque raide dans son refus de la compromission. Il force le respect du spectateur et pourtant devient terne. Car impossible de ne pas trouver sympathiques ces déjantés, traîtres à eux-mêmes mais si humains, si conformes aux monstres engendrés par une société à son point culminant de putréfaction. Pour autant, on restera tergiverser. Il va où finalement ce brave Ferry trop pur ?... Entendu que les guerres sévissent depuis la nuit des temps, la découverte de ces trois oeuvres d'Axel Corti permet de comprendre l'arrivée d'une guerre. Comment cela s'ébauche, les paliers qu'on ne peut ou ne veut pas voir et qui conduisent au paroxysme avec, en bout de chaîne, les séquelles qu'endossent les générations suivantes... Une sorte d'avertissement. Guerres raciales, religieuses, environnementales, toujours plus ou moins économiques.
  • DANCING MACHINE (1990)
    Note : 14/20
    Une ambiance de danse esthétique mais jouée en "surcoach" avec un Patrick Dupont qui commence un peu trop prétentieux (ça s'arrange heureusement ensuite). De très très grosses ficelles et pourtant un cadre attachant que cette petite place ronde ! Le pire est ce revirement pas du tout crédible sur les toits, ces larmes de crocodiles de notre Delon en danseur tortionnaire pour raison sentimentale (peuh !)... Malgré ces handicaps, quelques bonnes réparties, les piques de Monsieur le Divisionnaire et Brasseur par exemple. Divertissant pour les jours d'indulgence.
  • LE BRIGAND BIEN-AIMÉ (1957)
    Note : 15/20
    Il faudrait revoir la légende de Jesse James interprétée à d'autres époques pour mieux noter celle-ci, très années cinquante. Bertrand Tavernier défend cette version dans les suppléments au dvd, non sans son petit sourire : il rappelle que, dans la réalité, les deux frères étaient "des bouseux"... Robert Wagner "bien trop mignon" pour le rôle, fut imposé à Nicholas Ray par le producteur : Une chance, ils s'entendirent, l'acteur au séduisant physique ayant eu l'excellente idée d'intérioriser son jeu... Hormis ces enjolivures hollywoodiennes (qui froissent à l'entrée du film et dont Nicholas Ray aurait bien voulu faire l'économie), l'histoire s'avère prenante, grandiose même par moments (ces envolées à l'image, les scènes "aux petits oignons" entre les deux frères).
  • LA CAPTIVE DU DESERT (1989)
    Note : 16/20
    L'ensemble vaut surtout pour l'aspect pictural (assemblage des couleurs, petite robe rose saumon, très jolie couverture de nuit) et le fait qu'on voyage sans les inconvénients de la fournaise ! Des plans fixes, très larges, aux étonnantes couleurs, ces points minuscules se dessinant sur l'horizon et qui se rapprochent à vitesse réelle, la caravane en marche lente d'un bord à l'autre de l'écran, on situe bien les trois derniers qui nous intéressent... Bien sûr, on pense au cinéma asiatique. A noter aussi qu'on serait assez loin de ce qu'a vécu Françoise Claustre. Le cinéaste, grand reporter en Afrique, voulait transcender l'histoire de cette capture finalement très lâche, la rendre moins âpre qu'en réalité... L'interview de l'otage elle-même révèle une colère sourde pour tous ceux qui l'ont négligée avant l'avion de la délivrance... Quant à l'actrice Sandrine Bonnaire âgée de 22 ans à l'époque du tournage, elle dévoile (bonus au dvd) qu'elle a passé trois mois et demi loin des siens sans téléphone, occupée à beaucoup, mais vraiment beaucoup marcher, très peu dirigée. Avec tous ces états d'âme retransmis à l'image par Raymond Depardon. Une expérience grandiose, mais qu'elle serait incapable de renouveler... A déplorer : l'abondance de séquences vraiment très statiques, ou bien trop pauvres dans leur portée, par exemple ce chant à peine personnalisé "il était un petit navire" entonné de A à Z aux autochtones, alors qu'il existe tant de comptines moins galvaudées ! J'ai beaucoup goûté, en revanche la communication minimaliste que la captive entretient dans son rôle avec l'un des "gardes-du-corps" (ce dernier partagé entre une douceur bienveillante et la rudesse de sa mission, ces subtilités se sentent bien à l'image).
  • DÉSIR (1936)
    Note : 19/20
    Un délice de chaque instant grâce à l'ironie du réalisateur qui piste (et le spectateur itou) l'élégante Madeleine de Beaupré, redoutable prédatrice avec sa visière glamour au volant... Les mouches tombent sous son charme de croqueuse, on s'attendrait au pire mais voilà que le prince alter égo débarque. S'ensuit la complicité nécessaire au milieu de personnages secondaires tout aussi savoureux. Brumeux noir et blanc, réparties entretenant le mystère : derrière leur malice de l'ultime. Le couple est attachant, mais le ton bascule vers l'angoisse... Il ne faut pas que les enchantements s'estompent au profit de la banalité quotidienne certes, légèreté de contact, alors pourquoi ce noir en arrière-plan et qui se rapproche ?... C'est justement cette note qui fait tout le prix de l'intrigue. Car, sous le drapé et les voiles de la dame, derrière sa familiarité mondaine (scène inoubliable de "la fricassée"), se profile l'atrocité de 1936, période d'un obscurantisme total... Sourire pour ne pas s'effondrer, réagir pour faire face au cataclysme imminent. Une oeuvre visionnaire, qui fait partager clairement le pressentiment de la guerre 1939-1945 dans toute son horreur.
  • TESS (1979)
    Note : 13/20
    Projeté à Univerciné Britannique Nantes 2012. A la sortie en salles, souvenir d'une constante lutte contre le sommeil... Nul doute qu'il s'agit d'une splendeur picturale et sonore pourtant. D'une mise en scène parfaite, dans des décors et des costumes minutieusement "tricotés". Qu'en tous temps, cette trajectoire issue du livre de Thomas Hardy ressuscitera la beauté naturelle de Nastassja Kinski jeune fille, vénérée à l'époque, on boit littéralement ses traits qu'on soit homme ou femme. Toutefois, au motif que Roman Polanski a fait plus palpitant (Frantic, Chinatown entre autres), il peut y avoir un fort refus psychologique de replonger dans une histoire sordide à scénario aussi mince, même si elle ressort en restauré 2012 (à moins d'être professionnel du cinéma, traqueur des aspects techniques qui tiennent en éveil). Pour cause de durée injustifiée (3 heures !) avec fatigue et blues tenace, le dvd (aussi bien celui en circulation depuis 2008) visionné en plusieurs étapes m'apparaît une solution.
  • LE DECLIN DE L'EMPIRE AMERICAIN (1985)
    Note : 16/20
    Il semblerait qu'à notre époque puritaine et pourtant très pornographique (2008) on doive éviter de rire de soi, comme le faisaient les Canadiens et les Canadiennes de ce film américain DU NORD en 1985. Car il y a une incontestable bonne humeur globale : ces hommes préparant le gueuleton pendant que leurs dulcinées soignent leur forme en papotant du sexe opposé. Charmant inversement des rôles traditionnels ! Certes, quelques instants surjoués dans l'hilarité, ça frôle le trivial, mais est-ce si glorieux de papillonner à ce point (le cavaleur impénitent) ? Fort heureusement, ces dérapages sont compensés par les petits travers féminins, notamment le masochisme de la dame la plus à l'aise en apparence ! Le pompon : cette célibataire qui lâche le morceau afin de retrouver un semblant d'équilibre... L'ensemble reste une comédie de moeurs, vache, et pourtant plus tendre qu'il n'y paraît, par ces petites misères de part et d'autre, la rigolade, c'est ce qu'ils montrent de préférence d'eux-mêmes, pavoiser surtout. Oui, les maris ont parfois des pulsions et peu de scrupules. Oui, les compagnes permettent des fantaisies dehors, enfin tant qu'elles font partie de l'équipée, oui, elles minaudent plus qu'elles ne mettent en pratique.. Reste qu'on compatit pour celle qui a bu du petit lait pendant deux décennies : un choc à faire sa valise !
  • FEMMES (1939)
    Note : 15/20
    Dommage qu'il y ait cette ambiance de basse-cour. Très caquetant non stop, pourtant émaillé de bons mots, avec plusieurs situations hilarantes (quand ces dames se mettent une monumentale raclée). Nul mâle à l'horizon, qu'on se le dise, pas même l'ombre d'un figurant ! Ces dames sont à bout, soit lessivées, soit furieuses, la plus touchée irrécupérable pour cause d'âge et embonpoint. Outre des subtiles joutes verbales féminines entre nouvelle et ancienne, le "cas" le plus approfondi, et le rôle le mieux tenu entre tous, reste l'épouse cocufiée avec la mission de l'expliquer à sa fille ballotée entre père et mère, (la peine enfantine à l'annonce du divorce est très convaincante, elle jure merveilleusement avec la répartie de la fillette face à sa marâtre dans la baignoire)... C'est la cellule familiale de 1939 (avant-guerre), l'éloge de la sainte-famille soudée par traditions et engagement religieux, "à régulière patiente, merle blanc de retour". Depuis ce temps-là, l'image de fin, cette angélique épouse en marche bras grand ouverts vers la caméra, peut encore rassurer les plus conservateurs. Elle peut aussi faire hausser les épaules ou déclencher le rire.
  • ANTOINE ET ANTOINETTE (1946)
    Note : 16/20
    Gagner gros à la loterie en 1947 et perdre le billet, faut-il être ballot... L'occasion, pour Jacques Becker, de dépeindre les foules urbaines de l'après-guerre, marchands et consommateurs en pleine possession de leurs moyens. Des attentions les uns pour les autres, inclus travers et coups de sang. C'est de parti pris pour les petites gens. Contre le patronat rapace peu ou prou... A travers le portrait du petit couple uni entre métro et home sweet home, on sent pointer les générations futures, confort des Trente Glorieuses, la possibilité de tirer son épingle du jeu sans se ruiner en déplacements et psychotropes. Plaisant à regarder et utile pour comparer avec la période post 2000, quand trouver l'emploi pérenne devient parcours du combattant. Seul le frétillant Roland (Noël Roquevert) à l'oeil fixé sur tout jupon potentiel, semble caricature à peine exagérée des nantis contemporains.
  • QUE LA FÊTE COMMENCE (1974)
    Note : 18/20
    Cette production des années Giscard rappelle par sa note de modernité "Marie-Antoinette" de Sofia Coppola. Un sérieux travail de documentation Régence estampillé 1974. L'amusement de l'équipe est perceptible (film et bonus). Jean Rochefort dans ses "vêtements sacerdotaux", Noiret en Philippe d'Orléans plutôt attendrissant, Jean-Pierre Marielle en marquis aussi déchu qu'allumé, tous trois toujours bien secondés offrent quelques scènes impérissables. On sent l'envie de canarder, en restant à bonne distance, de Tavernier (le look des chirurgiens !). Du côté féminin, Marina Vlady toute jeunette rayonne en prostituée "bien tombée", tout comme Christine Pascal qui s'immortalise en petites phrases souvent caressantes. C'est l'après Louis XIV mâtinée seventies corps et âme. Gravité de situation et volonté de jouir de la chair jusqu'à s'endormir "sur le morceau" (ne vomissent jamais). Soupers à chaises renversées, chuchotements sous les nappes, une luxure à rebondissements, toujours discrète, presque distinguée. Seul le langage, valant pour la Régence et pour les seventies, peut être cru au risque de froisser certains tympans psycho-rigides. Quand la caméra fonce au plus fort de l'intime, on a un peu peur du dérapage. Ce devait être ainsi dans cette Cour-là se dit-on à part guerroyer, ils avaient du temps... Toute ressemblance avec une autre période serait sacrilège. Aux premières loges la légèreté des puissants, l'extrême pauvreté du plus grand nombre, les trafics humains... Aucune ride en 2012, si ce n'est le graphisme du générique et le son. Qu'on raffole ou qu'on s'offusque de ce pan d'histoire revisité, le voyage est plus pimenté qu'une suite de dates à apprendre pour le lendemain !
  • LES INCONNUS DANS LA MAISON (1941)
    Note : 17/20
    Sûr que si on prend l'ensemble au sérieux en 2009 (où il est de bon ton de s'indigner d'un rien en assommant ceux d'avis contraire), la tirade du Sieur Raimu, sorte d'Obélix déambulant en avocat alcoolisé arrachera des "Oh !" de réprobation... "Les anciens doivent incarner un modèle irréprochable pour que leurs gosses les respectent" ! Fort bien, personnellement, en tant que parent et en me souvenant de mes propres bévues, j'ai connu l'euphorie avec ce film. Ri plus que j'aurais cru de cette peinture de moeurs de 1942, une période où l'humour sauvait de bien des atrocités hors plateau... C'est une pétillante adaptation de l'écrivain Simenon. La voix off, à l'ancienne, fait sourire comparée aux tendances actuelles, standardisées, charme désuet de la langue française, dans les chichis comme dans le bégaiement. Côté dialogues, se glissent des expressions de ce temps-là, sans que ça fasse "toc". Décors rudimentaires mais suffisants (le passe-plat coincé !). Les personnages caricaturés rappelleraient certains films d'animation d'aujourd'hui aux décors patinés(le proc s'habillant, bretelles, gilet, veston impeccable, le chapeau de la mère amoureuse de son fiston comme une jeune fille de son galant...). Croustillantes gardes à vue, paternalistes, faire du chiffre, Sarkozy était encore dans le cosmos... Bref, pas de quoi monter au rideau si on est "djeune" avec un avenir raisonnable comme point de mire. Au contraire, des astuces pour pouvoir répliquer aux patrons abusifs ! Le fond du film pointe les erreurs parentales avant tout ! .
  • LE VERDICT (1982)
    Note : 16/20
    Entrée en matière assez lugubre, et pourtant on est saisi... Par la silhouette d'éternel jeune homme de Paul Newman. Et aussi par ses gags... Diable de Franck Galvin épaulé par son collègue, un ange de patience ( malgré les dossiers renversés de rage), on a ensuite droit à de délicieuses scènes de collyre + cette lampée de whisky au jaune d'oeuf suivie d'un rot !). Une démesure avant de se ressaisir ?... Partenaires du risque-tout à la gueule enfarinée : un hôpital privé avançant son magot anti-scandale flanqué d'une brochette d'experts... Si on les cherche, peaux de bananes garanties ! De la victime allongée dans le coma à sa soeur désespérée et son mari vite agité en passant par Laura (Charlotte Rampling), plus que fatale avec son regard de chien de traîneau et son aplomb de belle plante, la voix de l'avocat embourbée prend de l'assurance, une succession de défis réveille notre homme... A déplorer quelques redondances, il faut croire que Lumet lanterne pour que le spectateur demande grâce ?... Un grand classique qui vieillit bien parmi les films à procès, repérable entre tous par son clair obscur inspiré de la peinture italienne.  .
  • MIRAGE DE LA VIE (1959)
    Note : 17/20
    Force est de constater le mérite d'un tel film aujourd'hui en 2012 par l'intensité de ce qu'il véhicule. Il faut pourtant se faire à l'esprit hollywoodien de 1959. En tout premier lieu le sirop musical, on voit venir de loin les bons sentiments... Déjà le beau et large technicolor symbolisant le rêve matérialiste étasunien en toile de fond s'avère indiscutable. La belle blonde platine aux yeux émeraude son désir d'actrice et sa volonté de rester elle-même : il fallait ce personnage central partagé entre carrière et maternité, tiraillée mais attention, toujours bienveillante avec les serviteurs (par hasard tous noirs). Cela devient plaisant à suivre. Le développement des deux filles atteint des sommets de qualité quand elles commencent à s'afficher, chacune dans leur style, en miniatures de femmes... Des dialogues justes, des attitudes tout aussi parlantes, des décors et une bande-son qui se rattrape en dernière partie (ce gospel de Mahalia Jackson herself !). Le glamour apparent vire en cours de route au grincement même s'il reste de quoi pousser quelques soupirs si jamais on ne pleure pas. Autant que le racisme insidieux, ce film décrit le lien filial malmené pour des motifs différents chez deux mères-célibataires, un statut social régulièrement ignoré des statistiques (et pourtant de plus en plus répandu en 2012).
Notes de L.Ventriloque
(par valeur décroissante)
FilmNote
LES MOISSONS DU CIEL (1978) 19
L'OMBRE D'UN HOMME (1950) 19
DÉSIR (1936) 19
LA HUITIÈME FEMME DE BARBE-BLEUE (1938) 19
ANGE (1937) 19
LA DAME AU MANTEAU D'HERMINE (1948) 19
LE MAITRE DU LOGIS (1925) 19
L'INCOMPRIS (1966) 18
UN SI DOUX VISAGE (1952) 18
LA RUMEUR (1961) 18
LES ESPIONS (1928) 18
NINOTCHKA (1939) 18
QUE LA FÊTE COMMENCE (1974) 18
WELCOME IN VIENNA (1986) 18
SANG POUR SANG (1984) 17
LES INCONNUS DANS LA MAISON (1941) 17
LA MENACE (1977) 17
VIVRE VITE (1980) 17
CLAIR DE TERRE (1970) 17
MIRAGE DE LA VIE (1959) 17
GRIBOUILLE (1937) 17
L'HONNEUR DES PRIZZI (1985) 17
ILS ETAIENT NEUF CÉLIBATAIRES (1939) 17
VOYAGE EN ITALIE (1953) 16
CORPS À COEUR (1979) 16
LA CAPTIVE DU DESERT (1989) 16
LE DECLIN DE L'EMPIRE AMERICAIN (1985) 16
LA CAGE AUX ROSSIGNOLS (1944) 16
TROUS DE MEMOIRE (1984) 16
UN LINCEUL N'A PAS DE POCHES (1974) 16
DELIVRANCE (1971) 16
L'ETOILE DU NORD (1982) 16
LE VERDICT (1982) 16
QUERELLE (1982) 16
UNE PAGE FOLLE (1926) 16
POUSSIÈRES DANS LE VENT (1986) 16
ANTOINE ET ANTOINETTE (1946) 16
DE L'INFLUENCE DES RAYONS GAMMA SUR LE COMPORTEMENT DES MARGUERITES (1972) 15
LEOLO (1992) 15
CLAIR DE FEMME (1978) 15
LE BRIGAND BIEN-AIMÉ (1957) 15
UNE HEURE PRÈS DE TOI (1932) 15
FEMMES (1939) 15
PORTE DES LILAS (1957) 14
LA GUERRE EST FINIE (1965) 14
MISSISSIPPI BURNING (1989) 14
DANCING MACHINE (1990) 14
LES PETITES DU QUAI AUX FLEURS (1943) 14
TESS (1979) 13
PERFORMANCE (1970) 10