Critique(s)/Commentaire(s) de L.Ventriloque

Voir ses 50 films notés

Page 10 sur 18 (900 critiques au total)

  • UNA PALABRA TUYA (2008)
    Note : 15/20
    Dommage que l'on navigue sans arrêt entre macchabées et vie de m... ! Car c'est joliment démontré, interprété, profond, expliqué par le recours au flash-back régulier, classique quoi. Mais alors, ça vous borde bien serré ! Ce que c'est que de voir ces deux copines tout le temps "à rebours", rivées qu'elles sont à leur enfance, avec des carences affectives les rendant esclaves, au lieu d'envoyer valser les convenances pour se prendre en main... On rit grâce à la vieille mama qui fout le camp et aussi à ce prêtre au bon visage lumineux... Mais sinon c'est du gros traditionnel, vénération aux morts plus qu'aux vivants, élément mâle présenté comme le seul existant sur la terre, dans un microcosme où on quitte poubelles et balais pour tourner en rond sous le regard des autres, cette communauté décidant pour tous. Une histoire qui emprisonne le spectateur dans la vieille rengaine qu'une femme étiquetée "jolie sans plus" doit s'assouplir, sinon disgrâce... Peuh !
  • PERFECT LIFE (2008)
    Note : 13/20
    Tout de suite, il saute aux yeux que les trois acteurs principaux sont capables, par leur présence à l'écran, de créer une intensité dramatique, raison pour laquelle les mouches volent dans la salle, un éclat narratif ou un télescopage confirmant l'impression favorable vont venir... Cette jeune à l'allure décidée qu'incarne Yao Qianyn observe, veut savoir et aider, la tête sur les épaules, ne s'en laisse pas conter. Ce drôle d'homme d'affaires boîteux : ambigu mais toutefois bon bougre, de la bonhomie et de l'humour, même après s'être fait abîmer le portrait (Cheng Taishen), un peu d'amour flotte, intéressant... Quant à cette jeune mère en instance de divorce (Jenny Tse), elle reste sensible aux mirages, va-t-elle à nouveau se faire broyer ?... Filmée dans une pénombre qui séduit et intrigue, toute cette belle présentation se délite au profit d'une vision rationaliste de la Chine actuelle (et la place forte qu'est devenue Hong-Kong), des allers-retours où il faut jongler de plus en plus serré pour survivre. Mondialisation et traditions, ces dernières très ancrées (on ne le sait que trop bien !) : stupeur alors, quand la délurée jeune fille du début se change au bout de cinq ans en épouse coincée dans son mariage avec un rondouillard possédant magasin, business. Du coup, tout le reste passe à la trappe... Des deux autres personnages du début, l'un se retrouve aux oubliettes et l'autre noyée dans la masse des gens tous occupés à se débattre avec le système... Trois trajectoires bien cadenassées. Possible de déduire que "seul l'exil" ?... Car frilosité ou manque d'imagination plombent ce film au démarrage accrocheur... Vraiment dommage, d'autant plus que c'est bien filmé !
  • ETRANGERES (2003)
    Note : 16/20
    Qu'elles viennent des pays de l'Est, du fin fond de l'Orient, d'Amérique Latine ou préfèrent se réclamer "d'Afrique", ces immigrantes légales en Espagne de 2001 à 2003 défilent... Présentation discrète puis sérum de vérité... Ne pas se méprendre : fardées ou portant voile, elles décèlent du machisme et de l'obscurantisme là où on est réputé les combattre... D'autres, déçues en entrant, se rattrapent, telle cette jeune Polonaise ravie du changement, au diable ses compatriotes... Des rencontres collectives ont lieu entre déracinés pour parler, quand la police ne vient pas interdire de vendre sa production familiale... Aucun trafic louche de mentionné dans ce documentaire. Si certaines cumulent trois métiers, en voici une qui placarde "Flor de Canela" sur son restaurant, son rêve enfin réalisé (le milieu d'origine est aisé dans bien des cas). Rarement dans l'ombre d'un homme, elles pleurent de laisser leurs petits au loin mais s'occupent des enfants d'autrui à la place... Les repas, la messe, la musique rassemblent et mélangent les genres... Patientes pour se fondre dans la population et contourner la bureaucratie (visa maternel suivi de plusieurs années pour le visa de son bébé pourtant né en Espagne)... Mais les portraits brossés par Helena Taberna de ces conquérantes semblent encore "soft" comparés à l'immigration clandestine venue s'y rajouter avec toujours plus de trafics louches : un véritable dilemme pour le gouvernement Zapatero, encore plus depuis la récession économique. .
  • LE MARCHÉ DE LA FAIM (2006)
    Note : 18/20
    Voilà un documentaire pour réduire "la politique de l'autruche" (= se fourrer la tête dans le sable en comptant sur la Providence). C'est inquiétant, mais j'y verrai un avantage global, une mise en garde nécessaire : le titre est "WE feed the world", il s'agit de nous-mêmes, les populations de ce globe, notamment celles qui peuvent encore se payer une place de cinéma...Voulons-nous continuer à servir de hochets à des stéréotypes comme "Monsieur Nestlé" ou prendre notre destin à bras-le-corps pendant qu'il en est encore temps ? Comment ? Cette suite d'infos offre juste à se creuser le ciboulot à ceux qui, pour l'heure, ont encore la faculté de penser, de consommer aveuglément ou avec ne serait-ce qu'un soupçon de discernement. D'autres documentaires, plus saignants, devraient suivre, pour bien enfoncer le clou... et je m'en réjouis.
  • LE BAL DE LA VICTOIRE (2009)
    Note : 19/20
    Vue panoramique de la Cordillère enneigée... Un visage de jeune fille en gros plan, le ciel, et de nouveau la chaîne montagneuse... Les grands espaces ainsi balayés, les plans rapprochés font immédiatement penser aux westerns, aux épopées du cinéma chinois, russe aussi, en plus familier, quelque chose du cinéma argentin récent. A la tête de l'entreprise, se devine un artiste archi-cultivé, aux dons inépuisables. Il crée la complicité immédiate des films d'ordinaire dédiés à la jeunesse. Fluidité, plans raffinés, un regard de peintre, une oreille de musicien... On embarque sur ce cheval aux chaussettes bleues qui ouvre toutes les perspectives... Ravis mais inquiets juste ce qu'il faut, suivons le bien nommé "Angel" entiché de sa danseuse, deux écorchés vifs prêts à tout... Pour autant, on respire mieux quand l'expérience faite homme, décrite en parallèle, se joint au duo, le regard lumineux de ce rescapé des geôles ajoutent le scepticisme indispensable. Des clins d'oeil au spectateur, une sentimentalité comme celle du cinéma muet. La dictature chilienne en prend pour son grade tandis qu'en arrière-plan se dessinent les couples chahutés d'aujourd'hui, la génération d'enfants robots, avec des numéros de danse qui laissent pantois... 2h07 de projection d'où on émerge plein de forces nouvelles ! .
  • ODETTE TOULEMONDE (2006)
    Note : 16/20
    Ce petit divertissement n'a qu'une parenté restreinte avec l'esthétique mais creux "Amélie Poulain", loin d'être ces cartes postales alignées : entre autres, on y apprend comment venir à bout d'un oeil au beurre noir, enfin, d'une porte, et que si femme n'accepte pas qu'homme "renifle", qu'elle prenne un chien ! J'ai beaucoup ri, Catherine Frot, aussi réaliste que candide (elle semble une "Yoyo" qui se referait une santé en Belgique, au point qu'une bande dessinée pourrait commencer à partir de ce film)... Bref, ça suggère le cinéma francophone du temps de Bourvil, Gabin, Pauline Carton, Raimu... Quant "une bonne histoire" consistait à mettre en situation des comédiens dont le public raffole en le tenant en haleine par de bons dialogues et quelques surprises. Très agréable moment donc pour ceux qui s'en contentent, et facette étonnante de la part de Schmitt l'écrivain... Bluette, futur film télé du dimanche soir repassé chaque année ? C'est tout ce que je lui souhaite.
  • DE L'AUTRE CÔTÉ (2007)
    Note : 15/20
    Pâlichonne, cette image du fils attendant face à la mer dans un silence à couper au couteau... Après le flamboyant "Head on" (dont j'avais trouvé les deux acteurs principaux archi-crédibles, très attachants), j'avoue rester sur ma faim... La fulgurante emballée lesbienne de ce film, trop partie de rien et juste bien jouée sans plus, n'a rien à voir avec le suspense hétérosexuel suivi de l'apothéose du précédent. Ici, c'est davantage la mère survivante, jouée par Hanna Schygulla, qui va rester gravée en mémoire, sa sagesse d'ancienne éprise de l'Inde y est pour beaucoup... Le point fort résiderait dans les allusions politiques : la question européenne, la revendication d'égalité des citoyens, avec insistance sur l'éducation pour tous, voilà bien ce que tout Européen moyen peut intégrer, du fait de la mondialisation qui conduit au travail de sape de ces droits élémentaires pour les moins nantis, dont les rangs grossissent... Manquerait quand même le distinguo entre Kurdes et Turcs pour avoir une vue complète, (et peut-être aussi le point de vue d'habitants de Turquie sur ce film ?...). Les allers-retours abondent entre Brême et Istambul, parfois on ne sait plus très bien où on est car intrigués par la tournure des événements... C'est toutefois difficile de saisir l'enjeu véritable, tout est effleuré, approximatif, on devine dans sa globalité, plus qu'on ne cerne dans le détail, que la toile de fond est l'amour de la Turquie pour elle-même. Avec volonté de fraternité appuyée (ce fils voulant payer les études d'Ayten pour racheter la faute paternelle, la mère sortie de ses larmes sans même une crise de rage contre celle qui a causé la perte filiale, aide et pardon au premier plan...). Ce que le cinéaste vit aussi lui-même dans son tiraillement entre Allemagne et Turquie, et qu'il illustre dans une trilogie dont "Head on" est le premier volet, "l'amour", celui-ci étant "la mort"... Et pour finir, tous ces cabossés se mettraient ou essaieraient de se mettre ensemble... Alors là, j'avoue avoir eu du mal à croire en la durée de pareil aménagement vu le peu de passion ambiante (principal reproche que je continue à faire au film), toutefois, je mets une bonne note car la générosité reste louable en l'occurrence.
  • BONHEUR PARFAIT (2009)
    Note : 16/20
    Lors d'un attentat en milieu scolaire, à quinze ans, elle passait par là et son cerveau reptilien décide qu'elle ne prendra pas ses jambes à son cou (moment gigantesque du film !)... Aucun détail sur l'Organisation ETA : on devine bien qu'au pays basque, c'est un poids de tous les instants... Avec la machine policière, relayée par les médias locaux, tous deux prompts à sonder ces jeunes étudiants suspectés d'office, des boucs-émissaires tout trouvés de toute façon, du chiffre, du chiffre... Une douce lycéenne, pianiste par projection parentale à l'âge où on rêve aussi d'émancipation, se fait prendre en photo par surprise, l'occasion d'aléas qu'elle n'avait pas imaginés une seconde.... Bien plus tard, elle vivra une deuxième secousse au hasard d'une lecture de presse gratuite le temps d'un jogging. Les deux traumatismes vont pousser l'intrigue vers une rencontre trait d'union... Bien mené, sans misérabilisme (de la mesure en milieu scolaire, on sent la prise de position du cinéaste, il analyse les différentes facettes de chaque situation). Un ensemble qui laisse chacun dans l'expectative... Consolation, ce piano toujours enchanteur, comme en survol des divisions humaines. .
  • HORS JEU (2006)
    Note : 18/20
    Surtout courez voir ce film étonnant, que vous aimiez le foot ou pas. Pour nous autres occidentaux, l'interdiction de stade aux filles laisse ahuri, mais de façon sous-jacente, ici, ce grand match est le point de ralliement des sexes : une certaine tendresse plane entre ces flics hommes arrêtant leurs "frangines", un genre de marivaudage s'instaure, ils ont du mal à sévir, elles semblent à moitié les narguer dans leur rôle de garde-chiourme, seul un papa égaré ramène un semblant de protocole. Peuple paternaliste, fier, dur au mal, mais qui sait aussi faire exploser sa joie pour peu qu'on lui en laisse l'occasion !
  • MICHOU D'AUBER (2005)
    Note : 16/20
    Hommage à ces gosses déménagés et ré-emménagés de par le monde, une tendance encore actuelle et qui pourrait bien s'amplifier ! C'est inspiré d'un fait vécu, et ça se termine en queue de poisson, une fin logique, ça me démange de dire "dommage" en même temps... Joliment tourné (un quotidien bon enfant mais où l'instinct de destruction couve toujours prêt), ponctué par les doctes discours télévisés de notre Général... Certes, Depardieu pèse une tonne quand il siffle directement au goulot et qu'il casse tout... Le petit décoloré fait un peu baigneur en plastique quand il sort de dessous la table... Quant à la mère de remplacement Nathalie Baye, charmante, active à son foyer mais jamais soumise à son ogre de mari (excellent Mathieu Amalric en pourvoyeur d'oxygène), elle serre le coeur : point fort de cette histoire : la fin touchante. Et aussi le fait d'afficher en ce printemps 2007 mais par un chemin détourné, la tendance humaine première mais qu'on peut combattre, qui est de rejeter celui qui est trop différent de soi. Souhaitons que les écoles l'expliquent et le projettent largement !
  • CARTE DES SONS DE TOKYO (2009)
    Note : 15/20
    Découvert dans le cadre du cycle espagnol nantais 2010, ce petit dernier d'Isabel Coixet : elle a certes fait mieux dans la progression d'intrigue. On est davantage chez Wong Kar Wai ou Sofia Coppola côté ambiance. C'est infiniment sophistiqué, plein d'exotisme, avec des bruits de petite souris qui gratte, on se demande si on rêve ou si cet ingénieur du son s'amuse avec nos nerfs... Des minutes torrides entre Sergi Lopez et Yuriko Kikuchi. Du bon vin. Des signes annonçant que ça va se gâter malgré le pistolet non utilisé... J'ai failli m'endormir sous ces décors somptueux mais statiques. De cette réalisatrice, on attend l'habituel couperet, d'habitude c'est plus étoffé avant d'y arriver, marre de languir dans son Tokyo mythique avec ces tiraillements... Ciel, ça se précipite soudain, et là stupeur que cette fin digne des tragédies antiques et qui rachète la totalité de ce qu'on a vu ! .
  • LA MACHINE A PEINDRE DES NUAGES (2009)
    Note : 15/20
    Cycle espagnol nantais 2010 : une réalisation 2009 sur la fin du franquisme. On est en 1974 à Bilbao. Pour une région réputée industrielle, moche au possible, la photo fait des prouesses : elle garde du début à la fin un voile chocolaté, comme si on avait des lunettes de soleil marron rosé, vraiment très agréable. Franche camaraderie générale, mais le ton monte par moments, la misère matérielle est frôlée de justesse, c'est plutôt expressif, vachard aussi (le fonctionnaire zélé hémiplégique, le secret salarial...), chaque étape franchie se conclut par un trait dessiné ou peint et puis arrive ce drame, sans lequel tous les protagonistes n'auraient pas autant mûri !... Romantisme très judéo-chrétien (cette extase méridionale devant les tourtereaux), ennui au travail, bonnes tables, excès de boisson, sang chaud et partage d'automobile... Dommage que le milieu du film subisse une telle baisse de régime par rapport au début et à l'issue ! .
  • LES SENTIMENTS (2003)
    Note : 14/20
    Assommante chorale, non qu'elle soit mal filmée, mais elle casse les oreilles ! Autre bémol, le côté excessivement nunuche d'Isabelle Carré, l'ingénuité trop insistante, on n'a qu'une hâte c'est qu'elle redescende de son cocotier vite fait. Un peu de ce surjeu aussi chez Nathalie Baye, l'épouse très classe qui boit chez elle en dansant comme une folle après avoir tiré les rideaux (drôle d'idée de la faire se trémousser telle une pauvre ado sortie de ses gonds)... La réalisatrice Noémie Nvovsky a des choix musicaux et des outrances pour ses actrices qui peuvent faire hérisser le poil féminin. En découvrant le film, on peste ! Au diable ces parasites qui font patiner l'action plus qu'ils ne la servent ! Beaucoup mieux goûté l'ensemble à la deuxième lecture donc, sur dvd, zapping de tout ce qui porte sur les nerfs. De très bons moments pleins de tension, avant de déboucher sur la question cruciale : comment faire le moins de dégâts quand quelqu'un d'autre que sa douce moitié s'installe dans votre périmètre et vous tape dans l'oeil ? Melvil Poupaud fait merveille par sa discrétion, sa capacité à tempérer. Bacri au contraire, fend le coeur ici du fait qu'il passe d'homme ranimé à ni plus ni moins forçat.
  • STILL LIFE (2006)
    Note : 15/20
    J'ai largement préféré "The World" de Jia Zhang Ke, je m'y étais amusée, parce qu'il est moins pénible (grâce aux musiques sirupeuses et aux pirouettes animées qui interfèrent), et tout aussi dénonciateur d'un système qui n'a plus d'âme. Ici, hormis l'ambiance panoramique des prises de vues, l'alternance du moderne et du décrépit, on baîlle un peu, que va-t-il arriver au bout de tout ça ?... Le fait que le héros, qui a une bonne tête et ne se laisse pas impressionner par l'adversité, surplombe le barrage à plusieurs reprises, laisse pantois, puisque ce qui prévaut, c'est le poids de la chaleur, avec ce boulot bête et usant auquel il va être convié. Long, appuyé, oh que ça ne rigole pas... Deux images se veulent poétiques : la tour qui s'envole et le funambule... Elles relativisent ces portraits de travailleurs qui peuvent tout juste boire, manger, fumer à tour de bras, autant de moments de convivialité de pris. Aucune philosophie ne sous-tend quoi que ce soit, la seule loi de la jungle (est-ce dû la jeunesse de ce réalisateur de 36 ans ?). Enfin, le fait de bosser ensemble, à la fin, laisse supposer qu'au moins l'amitié soit possible, question de survie. L'homme et la femme qui cherchent chacun leur repère familial dans le même coin, sans jamais se rencontrer, illustrent bien la déshumanisation ambiante. Il est dit aussi qu'on achète les femmes, dont certaines sont également jugées valeureuses... Barrage maudit, empoisonné, constructions méritant de la dynamite pour qu'on bâtisse autre chose. L'ensemble reste tout de même très instructif. Du sordide, esthétiquement filmé.
  • RIPARO (2007)
    Note : 18/20
    Découvert ce sidérant film en v.o. italienne à Nantes dans cadre Cinépride : par son alchimie à se dévider tranquillement, il prend en tenaille de façon comparable à "Respiro" ou "Libero", autres joyaux italiens récents : le sujet en est l'IMMIGRATION sous tous ses angles, et en dépit des idées toutes faites qu'on puisse entretenir de quelque bord qu'on se situe... Résultat, j'étais d'une manière au début du film et puis, bien baladée sans m'en apercevoir, j'ai presque viré de bord ! Avec la toujours excellente méridionale Maria de Medeiros face à la fille de l'est non moins sublime Antonia Liskova. Point n'est besoin d'être homosexuel(le), aucune scène dérangeante pour les hétéros. Intercalé entre les deux monstresses, le jeune Mounir Ouadi vous tanne avec ses questions qu'en principe nul n'ose étaler... Dialogues d'un infini toupet, charme et distinction, fond de cruauté des temps que nous vivons, attention vous qui partez en vacances à bien vérifier vos bagages avant les frontières... Un regard délicat, loin de la bien pensance affichée, voilà une équipe de virtuoses qui mériteraient beaucoup plus de reconnaissance médiatique ! En dvd, idéal pour les soirées philosophiques entre amis de longue date ouverts mais bourrés... de contradictions.
  • ILS MOURRONT TOUS SAUF MOI (2008)
    Note : 18/20
    Banlieue moscovite d'aujourd'hui. Logements gris alignés, la classe moyenne née de Poutine. Du mieux (par rapport aux années noires Eltsine), malgré le chômage d'un père ne lâchant pas sa fille d'une semelle : à manger sur la table, l'ado habillée comme elle le souhaite, qui a sa chambre, va au collège, copie les façons occidentales, liberté d'action, amitié sacralisée... Cette toute jeune cinéaste de 25 ans en 2009, insiste sur cette frénésie de sortir qui vous prend un beau jour comme un réveil-matin ravageur. Encore plus quand on s'estime séquestrée à quinze ans. Aubaine donc que cette boum organisée par l'école (stupeur, en effet, qu'il n'y ait aucune sauterie mixte l'un chez l'autre au stade de leur développement !). Les spectateurs(trices) marqués(ées) par ce cap peuvent revivre la soudaine allergie aux parents, eux-mêmes virant de la panique à la franche ulcération (on jurerait que l'adolescence féminine vient de naître en Russie...). Des tensions et des coups, comme dans bien des banlieues de par le monde, avec cette lubie féminine : être enlevée par le coq de barbarie du coin, s'en remettre à l'autre sexe, complètement idéalisé. Certes, des particularismes russes (dureté, obstination, si nécessaire rouerie...). Caméra nerveuse d'une échaudée brûlant de raconter telle quelle sa dégringolade de l'étagère, à une époque où se scarifier est proche de remplacer les mots... De vrais gnons, de vraies chutes pour les acteurs et actrices, on surfe à des années lumière de Mademoiselle Âge Tendre !
  • MOTHER (2009)
    Note : 16/20
    Actrice principale qu'on sent ravie de réaliser autre chose qu'un rôle de mère classique à la télé. Sa personnalité porte le film. Le fiston est surtout simplet, d'office protégé par sa génitrice (ils dorment ensemble pour avoir moins froid), une dame sexuellement saine mais qui a quelque chose à se reprocher. Extrême pauvreté, corruption des pouvoirs en place : cynisme, misère, délinquance : un veuvage et peu de moyens, voilà qui oblige à l'héroïsme, une chance encore qu'il y ait l'acupuncture pour pouvoir se régénérer. En parallèle, la prostitution de retour sur le devant de la scène se filme désormais au téléphone portable... Joon Ho Bong fait visiter son pays fracassé en créant une tension tant par les cadrages très étudiés que par la hardiesse à montrer in-extremis la face cachée des événements. Il rend somptueux les aspects les plus laids, la bande-son n'étant pas en reste (splendide scène des funérailles, ces femmes se ruant sur la mère du présumé coupable !). Mais j'aurais préféré découvrir ce film de 2h10 en dvd car je l'aurais visionné en deux temps pour en apprécier "les derniers tiroirs" scénaristiques, ces derniers débarquant alors qu'on croit rester dans le flou... D'une seule traite ainsi en salle, et malgré la beauté de l'ensemble, le récit m'a semblé interminable (ai failli m'endormir). Dommage, pour une oeuvre aussi bien emberlificotée ! .
  • ENTRE ADULTES (2006)
    Note : 13/20
    Ce déballage, aux antipodes du fascinant "Je ne suis pas là pour être aimé", consiste en un défilé de couples avec une petite ritournelle de boîte à musique entre chaque, le spectateur, devenant voyeur de duos à moitié branchés ou débranchés et qui se racontent des salades. C'est une caméra résolument machiste dans le choix des situations et dans les déductions(mais tout est bien ficelé sur le plan technique et les acteurs amateurs jouent à merveille). Donc, haro sur les stéréotypes homme et femme, ce qui les a toujours séparés : la façon d'appréhender le sexe et les sentiments, le premier les différencie facilement, pour la seconde, c'est autrement plus complexe.Peu séduisants ces acteurs aux fusibles qui lâchent, j'avoue que ça aide (le recruteur et sa candidate, en particulier, atteignent des sommets). Une suite plus réjouissante s'imposerait à cette intrusion forcée, afin que les couples encore complices évitent le retour au célibat.
  • LA PERTE (2009)
    Note : 18/20
    Découvert au festival du cinéma espagnol nantais 2010. Les médias préfèrent traiter d'une seule partie du monde, on pense donc que l'Argentine est un modèle pour se remettre du malheur, que ses électeurs votent majoritairement pour des régimes politiques fascistes, à moins d'admettre un genre de secret-défense made in USA... Quoi qu'il en soit, utile de se rappeler les argentines "purges" dignes de l'ancienne URSS... Survivre grâce au droit d'asile quand on est nié sur le sol ancestral... D'éminents scientifiques, chirurgiens, sociologues, écrivains, exilés ou plus ou moins de retour au pays, racontent l'interdiction de s'opposer (des années 1955 à 1978 environ). Cet effroyable Coup d'Etat Militaire de 1976 qui permit à de tout-puissants psychopathes de s'acharner sur la population : du jour au lendemain, se trouver congédié de toute activité, la mise à l'écart de son travail, les divisions créées dans les populations par la terreur, seule porte de sortie (sans trop tarder) l'exil pour espérer se refaire... Certains, enlevés brutalement par des hommes en civil, ont enduré la torture à petit feu, souhaité la mort. D'autres dénoncent la disparition des leurs, dont beaucoup d'enfants, simplement parce qu'ils étaient de la famille d'une cible... Fuite des cerveaux, impression de sentir "le sol se dérober sous ses pieds". Et la peur qu'un jour ça recommence... Un documentaire plein d'enseignement sur la tentation de supprimer le trop différent de soi. .
  • MOLIERE (2006)
    Note : 8/20
    Encore une oeuvre bien troussée sur le plan technique, la faiblesse est dans le scénario, avec ces sorties qui tombent à plat sur des situations peu convaincantes. Le Grand Homme doit se retourner dans sa tombe tellement cet hommage est vain ! Car l'idée de reprendre des extraits de son oeuvre sous forme libre est bonne, mais un rien scabreuse : résultat une grosse farce ! J'avoue y être allée par curiosité, beaucoup pour les comédiens, or, à peine sur l'écran, ils sont massacrés ! Après bien des rallonges pour masquer la vacuité des propos, la séance où Duris et Luchini jouent interminablement "au cheval" m'a achevée. Allez-y seulement si vous collectionnez tout ce qui a trait à Molière.
  • LA VAGUE (2008)
    Note : 18/20
    Oser dire qu'un retour des régimes politiques extrêmes peut encore arriver invite presque à se détourner. On peut trouver la bande-annonce exécrable... De bonnes âmes rajoutent que le prof force le trait, les étudiants sonnent faux, que mettre mondialisation et nazisme dans le même sac c'est quand même gonflé... L'avenir le dira. Ce film imagine, dans un lycée allemand une semaine de cours d'autocratie, un genre de vaccin. Ouaille !... Carte blanche à un prof "plutôt cool" (il se présente comme anarchiste !) et des jeunes, non teigneux a priori, ils aiment bien ce prof apte à les stimuler sans hypocrisie et c'est réciproque. Cours présenté comme un jeu de société : déserter d'emblée, on passe pour mauvais perdant, l'émulation joue à plein... Les élèves appliqués sont à leur affaire, quelques-uns dansent d'un pied sur l'autre... Une escalade se dessine... C'est l'âge des bandes, d'une certaine démesure qui ne demande qu'à être stimulée. Avec tout ça, voilà encore un volet de plus sur les méthodes d'éducation ! En dépit de quelques plans lancinants pour en arriver au fait parfois, au moins c'est frontal comme discours, le prof annonce la couleur à chaque séance (aucun arrêt sur signes religieux, couleur de peau, sexisme, baragouin de jeune, ça aussi ça fait du bien !). "Polizei" de circonstance, sans plus. Aspects tribal, sentimental des élèves, parallèle avec le sport de compétition. Prise au dépourvu des encadrants, ces sacrées limites qu'il faut toujours penser à poser tout de suite ! Le cinéaste va bien au-delà de l'école pour qui lit à travers les lignes cinématographiques. Il clôt son analyse par le fracas des masques qui retombent. J'en suis restée toute retournée. A "voir pour savoir" dès douze ans.
  • THE GHOST WRITER (2009)
    Note : 15/20
    . Bien fait, cadres audacieux, acteurs bien dirigés, du suspense, quelques étincelles, on suit sans peine Ewan Mc Grégor en villégiature avec vue sur mer... Et puis, je trouve que ça s'essouffle, ou alors le malaise crée trop de tension stérile... Comme dans un bon Hitchcock, l'atmosphère intrigue au départ, c'est historiquement validé, on se doute bien que pareils plans sont monnaie courante et pas, comme une presse bien-pensante le brandit un peu vite, l'apanage russe. Oui, sauf que le traitement de tout ça à travers cet "écrivain-fantôme" m'a paru infiniment glacial et lancinant côté déroulement ! Un scénario qui mise trop sur l'attente pour l'attente, une infinité de rebondissements tous présentés sur le même ton, désolée, mais je me suis ennuyée... Une histoire inspirée d'un livre. Etonnant comme le film recèle de multiples lectures : difficile par exemple, pour qui a lu "Roman" de Polanski, de nier une perceptible identification du réalisateur à son récit côté exil, traque quasi permanente. Impossible d'escamoter la plongée dans l'univers des personnalités coupées en deux entre vies privée et publique. En spectateur ouvert, autonome avec toute sa tête, pas le moins du monde en justicier comme semblent le craindre quelques professionnels empressés d'estampiller "chef-d'oeuvre" certes un grand classique mais qui, à mon goût, manque de sel !
  • JE VAIS BIEN, NE T'EN FAIS PAS (2006)
    Note : 18/20
    Déjà, j'avais apprécié "L'Equipier" du même cinéaste, et je dois dire que celui-ci m'a conduite - avec joie ! - là où je ne pensais pas aller, mais alors pas du tout ! Sacrés parents ! L'absence du jumeau auprès de sa soeur "paumée" est compensée, pour le spectateur, par un jeune homme tout à fait bien dans ce rôle, ça aide à faire face aux événements ! Un beau et grand film intimiste, à ne pas louper !
  • SALVAJES (2001)
    Note : 16/20
    Projeté au festival espagnol nantais de mars 2010. Si en 2001, ce film frôlait le grand-guignol par excès de noirceur, il passe peut-être mieux aujourd'hui que le stress est devenu une seconde nature ... Une fois la rudesse d'ensemble admise, j'ai bien aimé "le fond" en forme d'avertisseur concernant cet "autre", que les économies vacillantes exhortent à affubler de tous les maux comme si colonisation, esclavage étaient dans l'ordre des choses. Certes, des maladresses à vouloir trop appuyer le propos, je pense au documentaire final bizarrement plaqué sur la fiction, mais c'est quand même assez bien enlevé si on l'entend comme un polar (caricatural du réel)... D'autant que Carlos Molinero filme bien et a le mérite d'alerter sur ce qui peut déferler à toutes époques sans prise de conscience suffisante. Grâce à la vieillissante mais encore très attirante Marisa Paredes en infirmière et son patient machiste irrésistible, il est possible de gommer le néo-nazisme et autres dérapages d'un inconfort total.
  • PARIS - MADRID, ALLERS - RETOURS (2010)
    Note : 15/20
    Cette oeuvre d'Alain Bergala, projetée au festival de cinéma espagnol nantais de 2010, est entièrement consacrée à Victor Erice : ses expériences, sa philosophie. Le personnage dit des choses palpitantes mais, du fait d'un ton monocorde, on devient l'étudiant luttant pour rester attentif... N'empêche qu'on balaie les origines du cinéma espagnol : en particulier, cette absence paternelle qui était la règle à cause des événements (guerre civile, franquisme, exil...), et qui explique que la plupart des premiers cinéastes espagnols, même s'ils avaient connaissance des fictions étatsuniennes avec les bons qui gagnent sur les méchants, se sont davantage rapprochés du néoréalisme italien... A déplorer que l'ensemble de cette rétrospective frôle l'académisme (long passage sur "cinéma classique et cinéma moderne", ainsi que sur "la nouvelle vague française" façon intello un peu raseur... Heureusement, la photo accroche suffisamment, on guette les intermèdes, ils auraient pu être plus nombreux d'ailleurs : telle cette rencontre éclair avec Michel Piccoli et ce flash non moins splendide sur la petite Anna Torrent (héroïne de "Cria Cuervos") dans "L'esprit de la ruche"
  • LA HONTE (2009)
    Note : 17/20
    Une des fulgurances du Festival cinéma espagnol nantais mars 2010. Tout se passe pendant une coupure d'eau. Au début, l'ambiance est un peu froide, avec ce gosse bougon, un couple très inégal : une certitude, elle semble plus patiente que son mari... Débarque cette employée pour s'occuper de l'enfant, tous deux péruviens (tiens donc !)... Plus ça avance, plus la tension monte dans la maison, elle atteindra des sommets avec cette blonde reprenant le dossier d'adoption depuis le début, car il faut scruter le passé du couple pour enfin valider le dossier d'adoption... Deux malheureux qui éprouvent facilement de la honte, surtout lui, qu'un rien mortifie... Des dialogues tirés au cordeau pour un cheminement toujours plus sévère pour les intimités, bien que l'on puisse avoir du mal à croire au "méga artifice" servant l'intrigue car nul ne pourrait "bluffer" un enfant de la sorte : Rosa dans sa double fonction.
  • VILLA AMALIA (2008)
    Note : 15/20
    Un traitement minutieux et la magie Huppert bien entendu. Elle est ici peu loquace, le sourcil accentué, la chevelure en ponctuation, un visage exprimant plus une farouche détermination que la dépression, d'emblée surmontée. Privilège des musiciens qui peuvent déceler dans leurs notes qu'ils sont faux... Par ailleurs, toujours intéressant de voir une femme dire non et encore non. Qu'elle aille donc se promener, et même se perdre dans une cabane surplombant la mer, qu'elle joue à se mettre en danger histoire de renaître, son magot lui garantit gîte et couvert (d'ordinaire, ce délire vous prend autour de vingt ans)... Tout cela est bien empaqueté, fréquentes baignades, les sens se relâchent. Un ami précieux, la mère qui part peu à peu, le père déserteur lui aussi... Beaucoup de charme s'intercale dans ce lent retour sur soi-même dont on ressort partagé.
  • TROIS JOURS EN FAMILLE (2009)
    Note : 16/20
    Découvert au cycle espagnol nantais de mars 2010... La réalisatrice, à peine vingt ans, toute simple, est là devant nous dans la salle archi-comble du Katorza en ce mardi 22 mars... C'est elle qui a mijoté ce film incroyablement abouti pour une si jeune personne, et sur tous les plans ! Un style à la fois recherché et minimaliste (quelques effets empruntés au meilleur cinéma asiatique). C'est alerte, somptueux, charmant aussi, je pense à cette manière de laisser parler l'image... Un regard sans complaisance sur ces rencontres familiales à l'occasion de grands événements, quand chacun s'exprime mais que les gestes seuls révèlent. La jeune héroïne de l'histoire vit une impasse momentanée. Fausse dure tantôt amusée, tantôt révulsée, elle doit faire avec le protocole.
  • LOUP (2009)
    Note : 15/20
    Choc par rapport à d'autres productions tournées dans ces glaces ! Avoir à s'habituer à la langue française moderne parlée dans ce coin reculé (même si les acteurs se mélangent à une tribu locale en grand danger de disparition). L'accent "djeune" collant aux baskets jette un froid... Vite suivi d'indulgence (tant qu'on n'a pas connaissance du livre aussi...), car on "rentre" dans l'histoire grâce aux autres apports, et c'est un beau cadre pour le message laborieux à transmettre au jeune enfant encore proche des peluches, se sentant frère ou soeur d'un animal domestique... Petit louveteau deviendra grand, aïe... Les gigantesques moyens servant ce film (pour peu qu'on se penche sur ses secrets de tournage) ne le hissent probablement pas à la crédibilité du "Dernier Trappeur", pour tous et d'une autre trempe. N'empêche qu'on baigne dans l'observation d'animaux en décor naturel, avec cette prédation incontournable, en laissant Nicolas Vanier l'enseigner à notre place à la génération qui monte... Les parents accompagnés d'enfants à partir de 5 ou 6 ans, outre qu'ils apprécieront les péripéties, peuvent ainsi économiser une explication des plus embarrassantes.
  • STILL WALKING (2008)
    Note : 18/20
    Découvert au dernier Festival des 3 Continents nantais. Sous ses allures bon enfant, cette oeuvre japonaise de 2008 fait dans le vitriol. Le rythme serait plutôt nonchalant, on voit bien qu'on est en Asie, mais attention, c'est familier, bien que nullement complaisant... Jamais triste non plus, on rit avec ces gens qui se retrouvent, parce qu'on se voit nous, les occidentaux, nos tiraillements sont identiques, camouflés derrière les petites attentions mutuelles, un éternel aller-retour d'affection teintée d'énervement, voilà nos familles la plupart du temps. Le tout décuplé par le drame d'avoir perdu un des membres qui voulait sauver quelqu'un (pourtant une drôle de tête à claques invitée annuellement à contre-coeur) ! De cette merveille de l'intimité, on sort étrangement ragaillardi.
  • HARRAGAS (2009)
    Note : 17/20
    On peut ne pas y croire, dire "tout ça pour ça ?" comme je l'ai entendu, avancer qu'il n'y a pas matière à faire un plat du sort de hors-la-loi, bien fait pour leur g... !). Le scénario aurait devancé les réalités d'après Merzak Allouache. Ces dernières années, des milliers de morts ou reconduits case départ pour cinq ans de prison... Idéalistes, affamés de tout, bravant l'hiver rude car persuadés d'un eldorado obligatoire au bout des sacrifices. Les traits de la belle émancipée (splendide Lamia Bouskine !) en gros-plan, la fraternité à toute épreuve du narrateur avec l'élégant Nasser (classe et droiture que ce trio filmé de façon attachante), aident le spectateur à soutenir l'entreprise, cette fuite vers l'eau glacée, la mer est ici une pieuvre aux caprices infinis (et le contexte, à moins d'un cynisme ultralibéral aigu ou d'une conscience brouillée, souffre difficilement le rapprochement avec l'excellente fiction d'Hitchcock, "Lifeboat" !). Gravitent d'autres ombres autour de l'embarcation mille fois imaginée dans les cerveaux... Coquille de noix au ras des côtes espagnoles, dont GPS, téléphones portables, boussole, constituent le grincement humoristique. En creux, j'y ai trouvé : pourquoi une répression aussi impitoyable de l'Europe ? Pourquoi cette inertie des hautes sphères algériennes (ou d'autres pays voisins) ? Pourquoi cette surdité entre les puissances politiques concernées au lieu d'un accord sur des valeurs humanistes ?... Relents de colonisation embarrassants ou simple réflexe d'application de la loi du plus fort ?
  • COMBIEN TU M'AIMES ? (2005)
    Note : 17/20
    Bertrand Blier, tout particulièrement dans ce film, est bien le fils de son père, grinçant de tous ses gonds, avec ce kidnapping improbable, mais tellement bien amené... Ici, il est toujours question du désir éprouvé par l'homme (hétéro), cette perpétuelle usine à fantasmes féminins. Le gars quelconque qui va oser le grand jeu parce que ça fait un bout de temps qu'il est fasciné par une icône (Bellucci) et se dit qu'il doit se foutre à l'eau... Personnellement, j'ai bien ri, sur ces envolées d'opéra aux moments les plus truculents, ou bien cette ritournelle classique du grand Chopin qui donne une note très romantique ... Depardieu, cette baraque, a dû aussi beaucoup s'amuser, il offre là de très bons gags, seuls les vraiment très coincés devraient le bouder. Campan dans un registre inédit, et une tirade de Daroussin, grandiose, l'apport d'un revers tragique dans cette course à décrocher la timbale. Légèreté de l'excellente petite Sara Forestier, échappée de son trop habituel registre banlieusard. Peut-être une petite faiblesse dans l'hystérie de Monica Bellucci, sa façon de prononcer le mot "manteau" jette un froid, mais comme sa plastique est admirablement mise en avant, ça passe, elle est comme sacralisée, loin de l'horizontale peinturlurée à porte-jarretelles... Un ensemble caustique à souhait, on arriverait presque à admettre l'horrible sentence "toute femme (attitrée d'un compagnon) est toujours femme et aussi "un peu pute", hum !... Une boutade qui cacherait ici, au contraire, une forme de vénération doublée d'une interdépendance séculaire qui va de soi. Jolis échanges verbaux, la vulgarité passée du cinéaste semble désamorcée, le temps où il poussait un peu trop le bouchon, créant une vraie dégringolade juste après des scènes sublimes. L'ensemble reste déjanté en permanence, à ne pas trop prendre à la lettre par les spectateurs réservés. Le mérite est de laisser chacun et chacune penser au besoin instinctif de "l'autre", différent de soi, périlleux, jamais acquis mais qui change un peu de s'occuper encore et toujours de sa propre gueule !
  • CELLULE 211 (2009)
    Note : 18/20
    Hésité longtemps avant d'aller voir ce film présenté au Vingtième Festival Espagnol de Nantes (2010) car je craignais de m'infliger un excès de violences invitant à cauchemarder ensuite : à tort, c'est palpitant de bout en bout grâce à la caméra de la "régie policière" qui suit les détenus dans leurs transactions avec les autorités. Où l'on comprend le poids supplémentaire d'une organisation comme l'ETA en plus de l'ultra-libéralisme incitant encore davantage à magouiller, la loi du plus fort mariée au chiffre. Mené tambour battant, avec ce "Malamadre", sorte de minotaure des geôles face au christique futur papa qui va en voir de sévères... Double lecture si ce n'est triple, car le réalisateur nous promène par tous les angles en ne laissant deviner sa préférence qu'à la fin, sous forme de questionnement. Une issue impitoyable, un peu trop radicale (de mon point de vue) par rapport à la promesse d'ensemble.
  • LA PISTE 98 (1928)
    Note : 19/20
    Ah, l'impressionnant "Excelsior" débarquant à San Francisco sous l'ovation "Gold Klondike !" en cet août 1897, de quoi oublier le marasme économique, chômage, horizon menaçant... Les voilà tous pris de frénésie, hommages aux découvreurs et vite en route pour l'Alaska ! Allons dénicher là-bas, au loin, la solution à nos maux... L'occasion pour Clarence Brown (d'abord assistant de Maurice Tourneur puis l'un des réalisateurs les plus prolifiques de son temps), d'imaginer le quotidien de ces populations, des inconscients... Il détache quelques croustillantes figures du lot des cent mille à se lancer dans l'aventure (dont seulement quarante mille seraient revenus)... On jurerait un documentaire tant ça semble pris sur le vif. D'abord cette file humaine, mince filet de fourmis noires accrochées à la paroi de glace, une motivation... démente ! Légère ironie du cinéaste qui précise que TOUS visent les pépites, au mépris des hauts et des bas que l'existence réserve, appât du gain surhumain... Musique et bruitages font qu'on ne s'aperçoit pas que c'est du muet. Sous-titres bien explicites. Démarrage fulgurant, sans cesse émaillé de petites scènes familières, avec ces sublimes gros-plans sur l'expression, les dégaines... Chaque seconde crée son suspense. On est loin des effets faciles, c'est tourné dans un vrai froid. Véritable magie du cinéaste apte à doser la causticité et le romantisme. Pour tous, au premier chef les grands gestionnaires de 2009 et années suivantes !
  • SHUTTER ISLAND (2010)
    Note : 14/20
    Horreur d'être mise dans cet état de cette façon-là... Hum, minoritaire, je le constate ! Toute la foule des rompus du genre s'extasie ! Séduite moi-même par la concertation en fonçant sur l'île par les deux stars Mark Ruffalo et Leonardo Dicaprio dans le même bateau... Et patatras, cette musique lourdingue martelant l'entrée en terre inhospitalière, ils vont vivre l'enfer au cas où on ne l'aurait pas deviné... Léger trouble dans les attitudes : l'indice qu'on aura en permanence à douter de qui est le plus fou... Et voilà que ça s'enchaîne sur cette interminable purée de poix : flashs-back en avalanche, Shoah, épouse détraquée, l'illustration de ce qui se passe dans la caboche de l'un des enquêteurs (2 heures 17 de projection en allers-retours de l'onirisme aux réalités, pas une seconde pour reprendre souffle). Epuisante recherche d'individus mythiques, tout un délire mélangé aux découvertes sur place... J'ai mal ressenti ce froid défilé d'informations du virtuose Scorsese, qui ne lésine sur aucune prouesse technique afin d'épauler ses acteurs. Il est pour la première fois secondé par la scénariste Laeta Kalogridis (action et séries télé étatsuniennes) : si je suis réservée sur la brutalité de l'ensemble, les amateurs de sensations fortes tiennent le coup, prêts pour une deuxième projection à cause de l'issue, particulièrement "soft", ils pensent avoir manqué quelques détails. Hormis les gros effets (maquillage du sang sur les jambes de la fillette sortie de l'eau par exemple !) c'est une illustration assez fidèle du livre (parcouru depuis) sauf que l'imagination, privilège du lecteur, n'y a aucune place.
  • LA FEMME SANS PIANO (2009)
    Note : 13/20
    Vu au Festival espagnol nantais de 2010 : le réalisateur, présent dans la salle, en recommandait une lecture comique. Certes, bien agréable côté image. Pour le reste, absurde jusqu'à en être éreinté. C'est "piqué" au cinéma nordique par bien des aspects, amusant au début parce qu'on est intrigué... Mais que l'on languisse indéfiniment dans l'inabouti, il y a des limites... Pas le tout de faire dans l'insolite (cette chaussure trouvée, ce laconisme facile)... Rosa de nuit, femme sans clavier sur talons hauts jusqu'à épuisement, promettait pourtant au public de vertes et de pas mûres avec ses cognacs sifflés. Or, elle accumule les mystères mais sans faire décoller le spectateur d'un iota. Les snobs crient au génie ? Certes, quelques éclairs dans les dialogues, du cocasse cousu main, mais il s'agit juste d'une déambulation pitoyable (pas très intéressante pour le spectateur) aussi bien filmée soit-elle. Musique froide, martiale, tout dans un seul style. Rien à quoi s'accrocher. Dommage pour l'actrice principale (qu'on voudrait s'attacher), mais si son escapade lui remet la cervelle en place, il manque l'essentiel à son errance, peut-être un bon coup de théâtre plutôt que ces demi-événements ?
  • CHRONIQUE D'UN SCANDALE (2006)
    Note : 13/20
    Encore un film où tous les ingrédients figurent mais où la surcharge nuit. Trop d'images en avalanche, une musique dramaturgique : que de foin sur un incident qui n'est pas si gravissime en soi, une fois le choc encaissé, les protagonistes se reprennent, pas de grossesse, pas de maladie honteuse... Autre bémol : la perte féline chez le vétérinaire est triste, mais de là à devenir cette furie qui s'acharne sur la famille constituée pour capturer sa proie,pitié ! Les deux actrices, talentueuses et complices pour pareil sujet, méritaient mieux comme situation, les seconds rôles aussi !
  • LA PRINCESSE DU NEBRASKA (2007)
    Note : 17/20
    Fichtre, suffit-il donc d'être femme, avec des angoisses de ventre, est-ce que je le garde est-ce que j'aurais à assumer seule ou avec qui, pour rentrer dans le sujet ? Car cette jeune gâtée-pourrie semble taper sur les nerfs un bon moment avec ses faux-ongles et ses airs nunuches. On peut rester là-dessus. En fait, la TRES JEUNE Sasha "décolle" en même temps que le ballon de baudruche, grand temps sinon on virait vers un remake américano-chinois d'une certaine " Sue" perdue dans l'immensité urbaine... Admirables cadrages, et jamais gratuits (bien aimé ces pieds nerveux qui arpentent), la caméra, parfois réduite à un écran de mobile, pour qu'on voie avec les yeux du personnage) traque la toute jeune demoiselle, du genre impassible, comme savent l'être les Asiatiques) ou ronchons (comme le sont facilement les ados des pays industrialisés, même invités). Les dehors de petite pétasse s'estompent, il faut décider. De plutôt évaporée, la voilà qui se prend en main, terrible ce visage de gosse tournée vers l'échographie... Précieuses infos sur la démographie inversée chinoise (plus assez de filles bientôt ?) et apports américains de modernité jamais trop kitch, ce magnifique Noir penché et soudain redressé, perplexe, la gynéco en écoute active, sans leçon de morale, comme une mère aimante. Ce cinéaste avoue implicitement qu'il a pris aussi ce que l'Amérique a de bon ! Voilà une réflexion très indirecte sur la nouvelle jeunesse chinoise en refus du passé, attirée par le piège matérialiste occidental, dépendance totale du gadget-portable, ça peut hérisser... Mais à y regarder de plus près : un coup de gomme magistral des racines, Tien An Men ignoré, Confucius aboli... Pour boucler, la jeune fille semble une boussole apprenant à chanter, elle est éclairée davantage du côté droit. Wayne Wang suggère toujours, par touches délicates, avec plusieurs lectures possibles, pour ma part, j'ai bien aimé cette suite de non-dits.
  • C.R.A.Z.Y. (2005)
    Note : 16/20
    A part quelques sous-titrages qui manquent pour les durs de la feuille - je n'ai pas saisi par exemple ce que la psy dit sur Jésus dans le désert et ça m'a gênée - c'est mené d'un bout à l'autre de main de maître, avec sensibilité, ce n'est jamais bête, et qu'est-ce-qu'on rit ! Langage cru, vocabulaire pittoresque, chansons bien posées sur les situations, je suis moi-même retournée un instant à cette époque où les disques vinyl étaient un genre de baromètre, une référence sociale, que je qualifierai presque "d'inconscience" certainement disparue à jamais ! La famille vaut son pesant de cacahuètes, le regard est réaliste quant à la fratrie cependant, bref, qu'on soit plus parent qu'enfant ou ado, plutôt homo ou hétéro, on replonge dans le labyrinthe de l'adolescence sans se faire prier ! Le constat de l'homosexualité masculine, au milieu des bondieuseries (choeurs excellents !), avec cette lutte terrible, c'est remarquable !... Quant au portrait des parents, le bonheur total, autant la mère que le père, je retiendrai cette scène particulièrement croustillante de leur conversation à deux dans l'intimité d'une salle de bains, brosses à dents en main !
  • CLARA (2008)
    Note : 15/20
    Les tempéraments artistes peuvent vraiment trouver de l'intérêt à cette histoire bien filmée, mais au traitement empesé comme rarement, au point que la musique est la seule à quoi se raccrocher... Dialogues en français souvent inaudible (mauvaise prise de son) au lieu d'une bonne version allemande avec sous-titres... Entêtement à montrer Robert dans l'ombre de son épouse et trop souvent le jeune (et beau) Brahms inhibé, excepté les plans où il occupe enfin et longuement tout l'écran, très touchant. Remarquable aussi l'impact féminin comme chef d'orchestre ou pianiste, une petite révolution ! Cette Clara (impressionnante Martina Gedeck) ambitieuse, généreuse, scotche le spectateur, beaucoup plus que son époux, ici dans sa phase la plus corrosive (Pascal Greggory). Nombreuses scènes avec les enfants, mais qui nourrissent peu l'intrigue... La réalisatrice, archi-documentée pourtant, s'est empêtrée à imaginer en situation ces trois monstres sacrés, et ce bien qu'il y ait quelques fulgurances dans le puzzle, cette vieille cuisinière très émotive par exemple... Seulement, ça traîne la patte... Les musiciens, les pianistes notamment, les mélomanes, rentreront tout naturellement dans cette fusion des sensibilités, y débusqueront la profondeur qui fascina ces trois êtres (d'autant qu'il y a d'excellentes pièces musicales), mais le grand public, sauf exception, risque de s'ennuyer ferme.
  • ANDER (2008)
    Note : 19/20
    Découvert au cycle espagnol nantais 2010, une petite oeuvre d'art ciselée... Contrairement à son cousin "Le roi de l'évasion" d'Alain Guiraudie avec Ludovic Berthillot et Hafsia Hersi, le film "Ander" de Roberto Caston évite "le tringlage à qui le tour entre hommes" ainsi que des relents bouseux teintés d'ésotérisme qui peuvent réjouir ou mettre mal à l'aise. Rien de tout cela ici : il existe bien dans l'entourage "une femelle" sans propriétaire précis sur laquelle s'épancher (vite cataloguée par la populace !), mais la finalité n'est pas de s'octroyer des débordements crescendo... Le personnage d'Ander émeut hommes et femmes par le choc qu'il n'a pas une seconde vu venir : au stade des concours scolaires du jet le plus performant, ça le chavire d'avoir à assumer une vérité aussi terrible. Attaché au sens moral du petit patelin, des droits, quelques débordements d'usage, mais surtout des devoirs au sein d'une famille où on ne saurait déraper au grand jour... C'est pourquoi spectateurs et spectatrices apprécient au centuple le révélateur qu'est ce jeune Péruvien, sérieux au travail et d'une patience d'ange... Assez pour contourner la matriarche, un regard pénétrant chaque oscillation autour d'elle... Avec cette soeur sur le départ, embellissant de s'être mariée... Beaucoup de verve de la part du réalisateur autour du "cas" Ander, on rit ! De plus, l'issue trouvée réjouit par sa pertinence !... Un suspense agricole palpitant, le fait d'interpeller avec douceur chacun(e) sur son ambivalence (ne serait-ce que sentimentale) n'étant pas des moindres !
  • VILLAGE PEOPLE RADIO SHOW (2007)
    Note : 10/20
    Vu en 2007 en v.o.au festival des 3 Continents nantais. Entrée en matière très prometteuse, image soignée, rengaine musicale pleine d'allégresse... ça se passe dans la forêt thaïlandaise, il fait chaud sur cette petite route, singes bondissants, végétation abondante, des enfants splendides sourient à la caméra... Un interlude se pointe souvent, ça contraste avec l'ensemble. Enfin, les bons visages burinés des ex-communistes de Malaisie, ils vont en raconter de belles... Hé bien non, ce qu'ils disent est plat, récité, l'interlude revient beaucoup trop souvent sans qu'on comprenne pourquoi, l'adultère de la radio fait penser à TF1, les images léchées commencent à faire tapisserie. Vraisemblablement, le feuilleton inspiré de Shakespeare que la radio diffuse partout n'a pas la même symbolique pour le profane que pour le Malaisien ou le Thaïlandais... J'ai recherché quelques détails par moi-même et, sauf erreur, avant l'indépendance de la Malaisie, pendant la traque aux communistes orchestrée par l'Armée britannique dont c'était l'obsession (Maleysian Emergency) de 1948 à 1960, il existait une radio... Le fond du propos demeure donc nébuleux, (qu'est-ce-que Amir Muhammad veut raconter aux occidentaux au juste, à part qu'il y avait des communistes déplacés au Sud de la Thaïlande ?). Rien de marquant n'en ressort, la petite musique de fin, la même qu'au début, fait l'effet de revenir d'une balade exotique à deux doigts d'une sieste... Le documentaire serait interdit en Malaisie. Est-ce une des raisons de son hermétisme global pour nous autres occidentaux ?... Résultat, ces "gueules" qui ont souffert garderont leurs anecdotes, grosse frustration pour le spectateur désireux de comprendre de façon détendue.
  • UN FIANCE POUR YASMINA (2008)
    Note : 15/20
    Vu au festival espagnol de Nantes 2010. La raison doit prendre le pas sur la passion de bonne heure : la jolie Marocaine Yasmina veut continuer d'étudier en Espagne, le plus simple = un mariage blanc... Le prétendant sera trouvé, qu'elle dispose enfin de papiers en règle. La réalisatrice, Irene Cardona, décrit une jeune femme encore lisse, déterminée, peu sentimentale, les traditions féminines sclérosantes ayant eu raison de sa patience. Toujours polie et sûre de ses droits, cette jeune personne semble conclure une affaire. Le couple qui l'héberge offre, en revanche, plus d'intérêt par son réalisme, ces doutes entre partenaires prenant de l'âge, quelques petites épreuves bien décrites. Large place aux secrets du monde associatif aussi. Dommage que le parcours de Yasmina reste bien dans ses rails : on finit par la trouver "intéressée" (celui-là ou un autre) ou bien désabusée avant l'heure, comme s'il suffisait de regarder dans la même direction, celle de l'état civil, et après on verra. C'est oublier les surprises que la vie réserve sur d'autres plans !
  • DÉMENCES (2006)
    Note : 18/20
    Vu en v.o. tunisienne sous-titrée au Festival 2007 des Trois Continents nantais. S'accrocher à son fauteuil pour tenir pendant les 104 minutes que dure cette pièce théâtrale adaptée au cinéma, ça chauffe !... Nul doute que la prestance de la psychiatre (Jalilia Baccar, épouse de Fadhel Jaïbi et co-réalisatrice) contribue pour une large part à soutenir certaines scènes particulièrement fracassantes, encore davantage du fait du décor, où les vides sont la règle, immenses salles dénudées, déambulations d'êtres en perdition rien de tel pour une angoisse entretenue... "Nun" ce diagnostiqué schizophrène hurle, bave, prisonnier de son imposante carcasse, qu'il apparaisse et c'est le commencement de la fin... Circonstance atténuante : sa famille, autant dire un concentré de toutes les "tares" sociales possibles, plus le fantôme paternel en arrière-plan. La troupe masculine des psys fait bloc (et ça démange de les assimiler au gouvernement tunisien actuel, façade officielle tournée vers la modernité depuis vingt ans, et dissidence interdite sous peine de représailles musclées). Madame la Psychiatre, sous sa tranquille assurance, incarnerait plutôt les opposants une fois poussés à bout. Convaincue que la parole extrait de l'individu les pires blocages. Ce "cas" la passionne. La voilà trahissant ses pairs, démissionnaire, mais investie dans les soins du monstre, qu'elle sort du bastion maudit pour des rencontres à la limite du rendez-vous galant, à moins qu'elle se positionne comme mère courage... Quelle audace, c'est effrayant, mais quelque chose dans ses éternels "pourquoi" donne espoir. Atmosphère certes agitée, parfois à la limite de la surenchère, mais prise de position à plébisciter par ces temps de répression rampante !
  • LE BRUIT DES GLAÇONS (2009)
    Note : 17/20
    Très bien "envoyé" dès les premières images. Efficacité de la mise en scène pour créer l'étau... Les dialogues comme les corps abattent de la besogne, le seau à glace prend tout son sens... Un scénario caricatural dans un univers familier : rire un bon coup si le cancer en est au stade de la petite hantise existentielle. Mais si la maladie a frappé trop fort, rire jaune probable, malaise en tous cas... J'ai un peu souffert des cris stridents. Me suis focalisée sur les rémissions, elles justifient le déballage. Alors, au bout de cette agitation fébrile toujours menée de main de maître, on est avec les deux cibles devenus des fugitifs... On meurt d'envie que les deux silhouettes rappliquant dans le lointain vers l'embarcation aillent au diable !
  • LA FEMME SANS TETE (2008)
    Note : 16/20
    Ce film très intrigant risque d'embarrasser le grand public, comme s'il manquait de codes d'accès. A moins d'avoir connu soi-même "le coup sur la tête" au propre comme au figuré ?... Avoir réchappé d'un choc violent, cette rupture soudaine, l'effroi doublé de douleur, passer du rire au pleurer, incohérence, hébétude (coma, traumatisme sévère)... Pris de panique, on s'extirpe du contexte à toute berzingue, sonné, et puis on se surprend à retourner sur ses pas. Véronica, l'accidentée dont il est question, fait partie d'une classe sociale privilégiée, elle pense avoir commis un meurtre involontaire : son entourage s'active autour de sa crainte en laissant supposer qu'il la ménage, sauf qu'on n'est jamais certain de ce qui se camoufle derrière chaque geste de ces drôles de gens à jardins secrets très comme il faut... La caméra, petite souris, focalise sur le personnage principal en espérant qu'on devinera... C'est très bien suggéré, avec des subtilités d'images, je pense à ces traces de mains bien visibles sur la vitre avant de la voiture juste après l'accident et qui me confortent dans mon interprétation... Dommage qu'à force d'équivoque de nombreux spectateurs s'égarent et détestent ça : l'un y voit une féroce satire sociale, son voisin de siège, lui, voit juste une femme qui divague... Difficile de toujours gratter derrière les images à partir de ce visage plutôt aimable, souvent servi en gros plan, blond et soudain brun... Pour public averti donc, les assommés de façon mémorable ou les intellos !
  • 20 CIGARETTES (2010)
    Note : 17/20
    Réjouissant "Prix des Lycéens" du cycle "Univerciné Italien" à Nantes en ce soir du 20 février 2011 ! Ambiance incroyablement légère en première partie pourtant, au point qu'on se sent chloroformé pour errer dans le désert en comptant les cigarettes. Tout commence avec la pancarte "Nassiriya". Après quelques vues de l'endroit, grand sursaut dans la salle (j'ai même vérifié sur ma gauche, croyant à un impact). Non, ce ne sont pas des blagues, plutôt un puissant rappel qu'en ce moment-même et depuis déjà pas mal d'années, des "raclées" de cette ampleur arrivent aux tout fous croyant à un quelconque ange gardien. Film déroulé comme un reportage dans l'urgence (cet attentat de 2003 aurait d'ailleurs bouleversé l'Italie). On est cette main dans le sable, on pousse ces petits cris... L'écran littéralement labouré, la rage au coeur ! Reconnaissons que ce qu'on voit et entend est un peu appuyé... Mais grâce à l'alchimie générale, au ton de sincérité impossible à mettre en doute, tout se tient dans ce film coupé en deux où trouve moyen de se glisser une pointe de sensualité sans oublier la dérision des soignants habitués au pire. Le regard d'un tout jeune cinéaste terriblement attachant.
  • LE RETOUR (2003)
    Note : 18/20
    Une splendeur cinématographique, lente à se dévider la première fois qu'on la voit, le grand public est rebuté. Passionnant à redécortiquer si on a l'âme esthète. Le dvd est assorti d'un précieux moment d'interview extrait de "Tam-tam" (France Inter) avec Pascale Clark... Portrait d'un père de retour au foyer après 12 ans à faire on ne sait trop quoi (autre femme, prison, travaux forcés, métier dans la Marine russe ?...). Tension tout de suite perceptible dans la maison. Il embarque ses deux fistons pour renouer, l'un conciliant, voire admiratif, le plus petit carrément hostile (manque de souvenirs paternels, admet mal ce retour équivoque), pour aller vivre "à la dure" sur une île récupérer une cassette enfouie (on doit à nouveau supposer ce qu'on veut, en Russie, fréquent de "se débrouiller" !). Ce cinéaste reconnaît s'inspirer d'Antonioni et Tarkovski, disons qu'il en a pris le côté énigmatique et le même soin dans le traitement. Cameraman dans l'épure également... Scénario et dialogues au cordeau, un plaisir de chaque instant pour peu qu'on ait la volonté de ne pas en perdre une miette. Envoûtant, mythique, ce beau travail force le respect, chaque instant a du sens, il n'y a vraiment aucune surcharge complaisante... Si tous les photographes issus de la pub étaient aussi rigoureux, on saliverait plutôt deux fois qu'une devant le grand écran. On perçoit l'enseignement sévère, le respect du spectateur comme leitmotiv... On nage dans l'ambiguïté avec ce paternel (qu'on exècre de prime abord) se rendant touchant, jurant avec sa dureté de façade : j'en veux pour preuve ce moment où il est désemparé devant le feu... L'apprivoisement pourrait se faire après ces deux grosses crises par lesquelles les trois personnages doivent passer. A noter qu'un an jour pour jour, après le tournage, l'un des jeunes acteurs s'est noyé accidentellement (il avait 16 ans), petit détail mais qui vous attache le film une fois que vous le savez. Musique aux frontières du bruitage mais toujours fluide comme l'eau habitant l'histoire (ça ne tonitrue jamais), le son s'imbrique au drame inexorable, une atmosphère de "conte noir" mentionne le bonus... Long-métrage délectable, surtout en dvd !
  • MONICA DEL RAVAL (2008)
    Note : 16/20
    Documentaire projeté et primé au vingtième festival espagnol nantais... Très attachante entrée musicale dans les rues de Barcelone (un peu à la manière néoréaliste italienne) jusqu'à ce qu'on découvre l'incroyable physionomie, pour cause de maquillage renforcé, de la dame, un moulin à paroles... Plus de dents de devant mais le front demeuré innocent, elle témoigne d'une trajectoire de débrouille comme une autre, son gagne-pain étant aussi défendable que de servir de bonniche à la noblesse du coin... Au moins, ne peut-on lui reprocher de manquer d'authenticité et de sens du comique, le geste parfois joint à la parole... Gravitent autour de Monica beaucoup d'hommes à la trouble sexualité, dont elle semble s'arranger, infiniment maîtresse d'elle-même. Un personnage à la fois touchant et repoussant. Qui devrait laisser rêveur la gent féminine à l'heure où l'exhibition des corps peut rejoindre le glamour et qu'une députée UMP française pencherait pour la réouverture des maisons closes !
  • AFTER (2009)
    Note : 15/20
    Reparti avec un prix au festival du cinéma espagnol de Nantes 2010. Etrange salle pleine, n'applaudissant pas, trop estomaquée.... Le désarroi de ces trois quadragénaires demeurés au stade adolescent au plan affectif laisse supposer une prime jeunesse trop retenue... Le titre du film, "After", offre au moins deux lectures possibles, si on parvient à dépasser un exhibitionnisme récidivant. "Des enfants perdus" en quelque sorte, symbolisés par la chienne, un animal mal à l'aise, en fuite puis fragilisée par son accident. Bien vu également la vie de bureau où il est interdit de se relâcher mais où des libertés extraordinaires se prennent. Autre point fort, la détestation précoce du garçonnet mortifié par la double personnalité qu'il devine chez son père. Et, cerise sur le gâteau, ces trois coeurs lumineux (trois appels au secours dans leur fuite en avant ?). Tendresse, cruauté envers autrui ou soi-même dignes du bac à sable ! Fébrilité dans "les lignes" sniffées à grand bruit sur tables basses (toujours hors champ, la caméra ne descend jamais, elle se réserve la remontée, la cloison nasale à deux doigts de claquer !). Une illustration d'Espagnols lâchés comme des fauves depuis que Franco n'est plus ? Il manque à ces jeux de l'extrême un événement percutant, une quelconque morale pour emporter l'adhésion. De nombreux spectateurs, choqués, sont sortis, écoeurés du déballage. C'est un film à partager avec des sociologues, des soignants, d'anciens drogués ou familiers de grands drogués (il est impératif de comprendre l'escalade des drogues dures).
Notes de L.Ventriloque
(par valeur décroissante)
FilmNote
LA PISTE 98 (1928) 19
LE BAL DE LA VICTOIRE (2009) 19
ANDER (2008) 19
HORS JEU (2006) 18
JE VAIS BIEN, NE T'EN FAIS PAS (2006) 18
LE MARCHÉ DE LA FAIM (2006) 18
DÉMENCES (2006) 18
RIPARO (2007) 18
ILS MOURRONT TOUS SAUF MOI (2008) 18
LA VAGUE (2008) 18
STILL WALKING (2008) 18
LE RETOUR (2003) 18
LA PERTE (2009) 18
CELLULE 211 (2009) 18
COMBIEN TU M'AIMES ? (2005) 17
LA PRINCESSE DU NEBRASKA (2007) 17
LA HONTE (2009) 17
HARRAGAS (2009) 17
LE BRUIT DES GLAÇONS (2009) 17
20 CIGARETTES (2010) 17
ODETTE TOULEMONDE (2006) 16
MICHOU D'AUBER (2005) 16
LA FEMME SANS TETE (2008) 16
ETRANGERES (2003) 16
BONHEUR PARFAIT (2009) 16
MOTHER (2009) 16
SALVAJES (2001) 16
TROIS JOURS EN FAMILLE (2009) 16
C.R.A.Z.Y. (2005) 16
MONICA DEL RAVAL (2008) 16
STILL LIFE (2006) 15
DE L'AUTRE CÔTÉ (2007) 15
UNA PALABRA TUYA (2008) 15
VILLA AMALIA (2008) 15
CLARA (2008) 15
CARTE DES SONS DE TOKYO (2009) 15
LA MACHINE A PEINDRE DES NUAGES (2009) 15
THE GHOST WRITER (2009) 15
PARIS - MADRID, ALLERS - RETOURS (2010) 15
LOUP (2009) 15
UN FIANCE POUR YASMINA (2008) 15
AFTER (2009) 15
LES SENTIMENTS (2003) 14
SHUTTER ISLAND (2010) 14
ENTRE ADULTES (2006) 13
CHRONIQUE D'UN SCANDALE (2006) 13
PERFECT LIFE (2008) 13
LA FEMME SANS PIANO (2009) 13
VILLAGE PEOPLE RADIO SHOW (2007) 10
MOLIERE (2006) 8