Critique(s)/Commentaire(s) de L.Ventriloque

Voir ses 50 films notés

Page 8 sur 18 (900 critiques au total)

  • KEANE (2004)
    Note : 19/20
    Visionné le dvd (v.o.) en octobre 2007. Pour ma part, je n'ai pu y voir un psychotique, un homme qui se serait inventé une fillette disparue. C'est un type fou de douleur, il en a tous les stigmates. Pour avoir moi-même failli perdre ainsi un être cher, il me semble que si la situation se prolonge, arriver à déjanter ainsi fait partie du processus de révolte contre le sort. Pendant longtemps, j'hésitai à voir ce film, de peur d'avoir mal, justement. Mais au contraire, si on reste rivé à ce père déboussolé d'un bout à l'autre, la petite Kira, par l'adultisme dont elle fait preuve, et sans perdre de son charme enfantin, vient mettre un sérieux baume sur tout ça... Une caméra penchée à hauteur d'homme sur la fillette, bouleversante scène où le drame va jusqu'à se rejouer afin que le deuil se fasse. Des émotions amplifiées par le talent exceptionnel du tandem, la mère comme avant tout "une intendante". Et dire que ces disparitions d'une seconde à l'autre existent, le plus terrifiant réside bien dans ce constat que nous pouvons tous faire, bien davantage que dans les excès de cet homme meurtri ! A voir en urgence, pour la compensation que cette histoire offre face à un drame, que trop fréquent.
  • LE PÈRE DE MES ENFANTS (2009)
    Note : 16/20
    . La bande-son de départ donne l'envie de swinguer dans Paris ensoleillé et de "filer" cet homme, notre homme... Un genre de BHL producteur de films, souple, élégant, toujours pendu à son double portable, j'ai ça à faire et encore ça... Patron affable, roublard seulement faute d'autre alternative, mais bon père, bon mari, bon copain, adepte de la qualité de vie, les week-ends en famille au vert, on échange en jouant, en nageant, on s'écoute (malgré l'ado qui s'émancipe). Hyperactivité en semaine, comme quantité de businessmen croisés, exposés, ils ont opté pour des attitudes mécaniques : sauf que celui-ci ne vocifère pas, à bout de nerfs il encaisse toujours, une sieste et soudain la réalité professionnelle, matérielle, prend le dessus... J'ai trouvé l'ensemble brillantissime, inclus les moments précédant le choc et son impact dans l'entourage : et après plouf, l'impression d'avoir changé de film, terne, poussif... La promenade féminine sur la rive dans un sens, puis l'autre s'avérait prometteuse du dernier volet, c'est elle que je vais retenir, ainsi que la prouesse d'acteurs inconnus au charme infini. .
  • OXHIDE II (2009)
    Note : 16/20
    Vu au 32ème Festival des 3 Continents nantais (2010). Il faut avoir dormi tout son soûl pour "attaquer" ce long-métrage statique. Pas indispensable d'avoir vu le premier intitulé "Oxhide" pour comprendre. La scène se passe sur et sous une lourde table en bois autour de laquelle tous traînent les pieds : comme nous à entrer dans leur intimité (le résumé mentionne les chats qui auraient pu adoucir l'ensemble, l'un mordille mais ils restent hors champ). Travail du cuir par le menu puis préparation de raviolis viande et ciboulette, tout cela en temps réel avec des moments lancinants, d'autres plus subtils, entre raillerie à l'encontre des vieillards idiots de méticulosité et abêtissement généralisé du monde d'aujourd'hui (la règle graduée pour couper tous les quatre millimètres...). La réalisatrice (29 ans) s'est réservé le rôle d'empotée de service, dieu qu'elle s'amuse... Dommage que la caméra fixée au ras de la table fasse album réservé à la famille. Néanmoins, une fois rodé, même en s'endormant quelques secondes par ci par là, possible de trouver son compte chez ces héritiers de Confucius pas si froids que pressentis... Ils incarnent les métiers menacés de disparition, ouvrent l'étude des manies humaines, en particulier la friction inter-générationnelle, ici autour de la cuisine, cette familière exclamation de la jeune fille : "du gras, au secours !"
  • LE DERNIER VOYAGE DU JUGE FENG (2006)
    Note : 17/20
    Profitez-en avant que ce petit bijou (en v.o. sinon aucune allure) soit retiré de l'affiche ! Il est lourd d'enseignement quant au respect des lois, arrangées selon les circonstances, mais en tous cas, on juge ici, avec les moyens du bord, le souci d'avoir la paix, un peu comme des parents le feraient d'enfants chahuteurs. C'est en plein vent comme dans le film malien "Bamako", avec des péripéties un rien déconcertantes, toujours entre archaïsme local et ce qu'on devine de récente importation occidentale (jeans sous la robe de mariée, par exemple, découverte de l'existence des voitures à la télé). Le démarrage est un peu déboussolant, mais le conflit entre le vieux juge et le jeune étudiant meuble largement, avec cette greffière toujours très digne et qu'on jurerait l'épouse et la mère... Dialogue croustillant, somptueuses images de la région, angoisse permanente des chemins sans balises, porcelet renifleur et cheval fugueur, ça se passe là-bas très loin au bout du monde, là où on ne sait rien des violences de la civilisation pour cause de difficultés d'accès : une parenthèse insolite, que vous auriez tort de louper.
  • SANTIAGO 73 POST MORTEM (2010)
    Note : 14/20
    Découvert au Festival des Trois Continents nantais 2010. L'image est beige rosée, parfois belle, parfois fade... Le degré de tension monte avec ce plan séquence de la douche tandis que ça castagne, que ça gémit de l'autre côté de la rue : Santiago du Chili lors du Coup d'Etat de 1973 contre Allende avant la dictature de Pinochet. C'est une simulation des violences arbitraires car le cinéaste n'a pas lui-même vécu ces horreurs. Il faut lire entre les lignes (manqueraient quelques explications sur l'écran, trois fois rien et ça ferait tout de suite moins nébuleux). On saisit bien les "descentes" chez certains habitants, le personnel de l'hôpital se voit sommé d'obtempérer, le fonctionnaire des pompes funèbres entasse pêle-mêle des morts qui tombent de son chariot tout en remettant sur pattes un caniche blanc rescapé d'en face... Une scène de révolte féminine tout à fait remarquable réveille de la gestion mécanique hospitalière... Dommage qu'ils soient si glauques les personnages du cinéaste Pablo Larrain. La voisine qui cherche à sauver sa peau, les couteaux à dissection d'autopsies.. A quel moment le cerveau finit-il par déjanter ? Des portes, en voici une entrebaîllée : la voisine qui trouvait faux le chat n'osant pas regarder celui qui lui donne à manger est là avec le petit chien (qui va où on le met) et un quidam plutôt jeune... A la manière du Mexicain Enrique Rivero dans "Parque Via"(également distingué à Nantes en 2008) on assiste alors à un de ces coups de sang !
  • EN EAUX TROUBLES (2008)
    Note : 16/20
    Somptueuse avalanche sonore et visuelle autour d'une disparition : "l'expiation", terme employé par l'avenante pasteure, l'inverse d'une grenouille de bénitier avec ses affolantes tenues d'été. On va jouer "Bridge over troubled water" dans cette église offrant de rebondir à un organiste engagé à force de talent et de charme... Manqueraient juste quelques retours en images sur Jan-Thomas enfant ou quelque chose précisant cette pulsion d'enlèvement (à deux) d'un innocent dormant dans sa poussette : le jeune homme confie qu'il a été déboussolé par la mort de sa propre mère à l'adolescence, mais silence complet sur le complice de ce jour maudit, évaporé du film... On s'acclimate bien volontiers à la vraie blondeur et aux vrais yeux couleur d'eau nordiques en revanche. Grande qualité picturale, des mouvements amples de la rivière aux intérieurs, tous les jaunes orange au bistre et comme voilés, jusqu'à cette blancheur extrême, ces pieds sur les draps au petit matin... Aucune ambiance réfrigérante prolongée (les films nordiques "Festen", "Mifune Dogme III", le bijou de cruauté "Open Hearts" distillent aussi cette chaleur picturale par rapport aux drames traités). La souffrance se communique sans entrave aucune par l'orgue de cette église du bonheur, qu'on rêverait tous de fréquenter. Passé et présent s'enchevêtrent en constants allers-retours un peu longuets, les craintes de la mère du disparu, le suspect qui dépasse sa terreur d'enfant abandonné sont dans la balance... Traumatismes bien décortiqués. Invitation à cogiter sur la durée des peines par rapport à la responsabilité sur toute la ligne. Rappel que nous sommes tous faillibles. .
  • LE BEL ÂGE (2009)
    Note : 17/20
    Avec sa petite frimousse aux yeux asymétriques, elle renvoie chacun à la complexité ado, le voeu d'être un petit animal sauvage qui prend et laisse au gré de ses intérêts. Trop lourd de vivre sous le toit de son grand-père suite au décès de maman, quand on sait qu'ils ne se parlaient plus, autoritaire le vieux... Et puis, horreur que cette blonde créature (Johanna ter Steege) lui prodigue des soins équivoques ! Ah, qu'il s'avise de monter l'escalier, vite je fonce sous le lit... Grand retour cinématographique de Michel Piccoli, ici superbe entre son devoir d'éduquer et de chérir, face à cette sauvageonne (Pauline Etienne), elle mise sur la natation afin d'avoir un but personnel (Eric Caravaca en maître-nageur, on dirait qu'il a fait ça toute sa vie)... Premiers émois d'une toute jeune gazelle et dernières palpitations d'un vieillard parfois guilleret (le numéro de danse chanté aurait gagné à être prolongé !) : l'évitement est tentant afin que les joutes s'espacent, elles seront fort bien rendues par des images duelles, une partie éclairée, l'autre dans l'ombre. La natation permettra au petit coeur de battre à nouveau suite à un décisif malaise... Le télescopage se ferait désirer (au goût d'un septuagénaire dans la salle !)... Enfin, à la faveur d'une égratignure nocturne, on parle d'une certaine balle depuis la dernière guerre dans un poumon... Très agréable surprise de cette fin d'année 2009 ! .
  • LE DERNIER VOYAGE DE TANYA (2010)
    Note : 17/20
    Après ce flash pour situer les personnages, faisons confiance aux deux passereaux transportés dans leur cage en voiture, suivons ces deux taciturnes devant et, allongée à l'arrière, le cadavre d'une bienheureuse qui semble dormir : la route est longue... S'assoupir légèrement (pas trop) n'aura que très peu d' incidence. Surtout ne pas quitter la salle ! Car une seconde tranche de vie commence à partir du feu. Il crépite au bord de l'eau, des bruants sautillent sur les branches dénudées. Jouez violons, et vlan, l'alliance à la flotte ! Etrange "tristesse mêlée de gaité", les traditions finnoises ont une curieuse logique... Tant pis pour eux, quelques spectateurs lassés sont partis et voilà que ça déménage : glissant avec la grâce du cygne de la droite, ce garçon en bateau. Un écran banc laissant croire à une panne... Mais non, si l'on en juge par ces deux mini-silhouettes tout en haut à droite... Comme souvent dans ce genre de quête initiatique slave, le dénouement tient sur la toute dernière phase... Le romancier et scénariste Denis Osokin brille une nouvelle fois aux côtés d'Alekseï Fedorchenko (44 ans), un audacieux qu'on aurait tort de prendre pour un freluquet même s'il fait dire à un veuf que les femmes sont des fleuves.
  • IL DIVO (2008)
    Note : 14/20
    Cette virée dans les coulisses politiques italiennes actuelles me laisse partagée à cause de son traitement à grandes louchées qu'on a à peine le temps d'ingurgiter. On se doute bien qu'à l'ère berlusconienne, la perversion du pouvoir est à son paroxysme, en Italie juste un peu plus qu'ailleurs de par l'officielle Mafia. Ici, le personnage d'Andreotti est presqu'une marionnette avec ses oreilles en anse d'amphore, d'un comique funèbre au bout de ses monologues (le pire étant que le vrai est vivant et en fonction !)... Certes beaucoup de mérite à dévoiler les complots dans les hautes sphères, des fulgurances ici, mais c'est vite fatigant sous cette forme, comme le sont ces perpétuels "déconneurs" qui vous obligent à leur sens de l'humour (sans vous demander le vôtre), et sinon vous n'avez pas d'humour. Dans le genre hautement réaliste de la rouerie humaine, moyennement raffolé de "Gomorra" à cause de l'outrance aussi : deux oeuvres indiscutablement courageuses !... Mais je reste plutôt adepte de "Romanzo Criminale", non pour un parti pris d'un bord ou de l'autre de l'échiquier politique, mais parce que c'est romancé afin que ça reste supportable, encore plus quand c'est aussi contemporain !
  • PIANOMANIA, A LA RECHERCHE DU SON PARFAIT (2009)
    Note : 15/20
    Découvert à Nantes dans le cadre du Cycle allemand Univerciné de novembre 2010. Voilà un film qui repose des longs métrages en série, l'attention peut se relâcher mais on ne dort pas : balade sans à-coups sur et dans les instruments, notamment des "Steinway" somptueux comme des parquets cirés. On s'immisce dans les touches feutrées, au coeur des marteaux. Une invitation à comparer les sonorités après intervention du mage et tant pis si notre oreille saisit mal l'infime différence d'un son à l'autre... La démonstration possède quelques fulgurances dans un ensemble fluide comme les interludes télévisés d'antan, en tous cas pour qui n'est ni accordeur de pianos ni pianiste. Je répugne à en dire du mal pour autant, à part regretter que les pièces musicales soient toujours de l'ultra-court, jamais une suite de mini-concerts. Que du classique bien sage, une seule scène ébouriffante, mais quoi, quelques secondes, alors que le jazz, entrevu le temps d'une respiration, aurait ouvert d'infinies perspectives. Point le but ici... Ni de songer écologie (tous ces arbres abattus !), encore moins ivoire de pachydermes... Convenons que c'est beau comme milieu, convivial. Gloire aux musiciens et aux fabricants de ces merveilles que sont les pianos. Sans oublier le travail des réalisateurs pour "rendre" le son dans les salles de cinéma. La personnalité de l'accordeur fait tout le prix du film. Bon pianiste, cela s'entend. Equivalent d'un horloger dans l'art d'amortir, vissons, redévissons... Sollicité à outrance mais sans jamais se départir de son sourire de spécialiste, il fait plaisir à voir.
  • FROZEN RIVER (2008)
    Note : 16/20
    Il flotte une grande tendresse sous-jacente dans ce film grelottant, catalogué "thriller" plus par le fait de cette rivière gelée à franchir, que par les sueurs froides habituelles, et ce malgré la présence d'une arme à feu. Quel bled ingrat au solstice d'hiver, seul rayon de soleil dans ces contrées, les petits humains ! L'actrice principale porte tout le film avec son désir d'un Noël convenable malgré la fuite paternelle, consommer est ici crucial (possible quand même de se poser la question du choix de ce compagnon accro aux jeux d'argent, car tout oscille autour de la possession matérielle, ne vivent plus que pour consommer)... La jeune Indienne dans sa caravane porte sur les nerfs un bon bout de temps, on est loin des clichés angélistes sur les réserves d'antan... A déplorer, quelques longueurs toutefois... Le discours inviterait, de prime abord, à s'arranger des dégâts collatéraux d'une mondialisation du tout économique, du style "si ce n'est pas toi qui claque c'est moi"... Fort heureusement, c'est racheté par un sursaut de générosité universel, qui fait qu'on adhère ensuite à la démonstration ! Sera palpitant en dvd !
  • HUACHO (2009)
    Note : 16/20
    Petite perle projetée au Festival des 3 Continents 2009 dans le cadre de l'Aide nantaise "Produire au Sud" : une famille dans la campagne chilienne le temps d'une coupure d'électricité. Soudée entre rudesse et tendresse, c'est comme si on était invité à leur lever, leurs repas, leur coucher. Très jolie lumière sur les personnages, un petit charme parcourt l'ensemble qu'on jurerait un documentaire. Braves gens dépossédés qui ont encore de quoi subsister tant que des ponts demeurent avec l'extérieur les grignotant toujours plus... On suit avec intérêt chacun dans son emploi du temps. Le garçon à l'école et sa mère employée de maison, très complices, doivent se démener. On comprend le réveil laborieux du jeune lycéen, cette main sur l'épaule du citadin réticent fait mal, comme ce coup de barre dans les transports... Ecart grandissant entre très haute société et crève-la-faim ! Quelques passages longuets auraient pu subir des coupes, les jeux vidéo, les cheminements presque en temps réel... Toutefois, les fromages faits maison de la grand-mère et leur vente avec ses copines en bordure de route, après quelques secondes de frayeur, valent qu'on s'y attarde, tout comme la sieste du papy radoteur ! .
  • BARRIERE (2010)
    Note : 17/20
    Découvert au Cycle allemand Univerciné Nantes de novembre 2010. On est intrigué par ce bébé qui pleure comme s'il avait des dons de voyance. Brève présentation des neuf acteurs (dont trois seulement seront retenus) dans leurs répétitions :"Hamlet", une oeuvre grandiose... Déjà, l'hébergement jure par rapport à la qualité requise. Les neuf collègues doivent s'allier un metteur en scène caractériel quoique réceptif à leurs particularismes (attachant Matthias Habich) et contourner l'étrangeté du vraiment très jeune projectionniste... Sauve qui peut, l'une veut refaire sa valise... Réflexion faite, chacun jouera des coudes, en se ménageant des récréations diverses, parfois jusqu'au délire suraigu... Le spectateur est gâté côté photo, un noir et blanc pur, lumineux, chatoyant (Visages en plans rapprochés, esthétisme des corps dont la plastique parfaite de Klara Manzel !). Du sordide interfère, ce couple de Bidochons avec bébé (souvent en larmes lui aussi). Il faut attendre les derniers plans, Ophélie entre réalité et mythe, pour apprécier le scénario, bien boutiqué finalement. Sans être frontal comme Dennis Gansel dans "La Vague", Andreas Kleinert décrit avec beaucoup de subtilité comment un concours de circonstances peut privilégier l'instinct de conservation de l'individu par rapport à toute autre chose et sans état d'âme particulier.
  • LA DOMINATION MASCULINE (2009)
    Note : 16/20
    Les mâles dominent les sociétés, la loi des gros bras... On part du zizi jugé trop court par son propriétaire dont l'identité s'affirmerait davantage avec une rallonge... Eric Zemmour amalgame force et violence virile, d'ailleurs, les femmes disent qu'elles veulent un costaud, protecteur, bravache, qui gagne plus qu'elles, tout est mis en place pour "le revers" à cette situation... C'est une énième démonstration que les rôles dévolus à chacun des sexes seraient prémâchés dès le berceau, pas un mot sur la polyandrie des coins reculés, ni "des femmes qui portent la culotte" sans que leur homme en fasse une jaunisse, ni des couples globalement équilibrés en forces, fou ce que le courant majoritaire des sociétés ultralibérales va dans le sens du film... Le regard, très argumenté canadien, recentre son propos sur une fusillade à Montréal de 14 jeunes polytechniciennes : le silence, le peu de protestations qui s'ensuivirent, valent ici pour du machisme, des féministes étant allées beaucoup trop loin (meurtres prémédités, mais on apprend pourtant qu'il s'agissait d'un déséquilibré mental ayant retourné l'arme contre lui pour finir)... Nul doute que la masculinisation renforcée découle de la paupérisation. Soit l'un des dégâts collatéraux de la Mondialisation... Que les progrès sociétaux accomplis, parfois en dix ou vingt ans génèrent leur contraire, la technologie toujours plus ignorante des moeurs... Très américain du nord comme déferlante internationale... Série de femmes battues par leur compagnon (impasse totale sur les agressions féminines hors de ce cadre). Nous voici aux créatures de rêve caressant des bolides : elles ont mal aux pieds en talons aiguilles et, si ça se trouve, de la peine à boucler le mois : quant aux galopins en costard les prenant par la taille, charmante représentation esclavagiste, bof... Silence sur l'adultère véritable, devenue impardonnable si on lit la presse people états-unienne... L'aspiration de tous et qui conduirait à répéter les impasses séculaires, vraiment ? Ou plutôt le malheur d'accouplements irréfléchis, de solitaires mal assumés ? Les témoignages comptent, mais pointent les plus "timbrés", les plus excessifs, les plus caricaturés d'entre nous (pas loin de "Barbie" et "Ken" par moments).... Je trouve qu'ils appellent des angles supplémentaires dans d'autres milieux, d'autres civilisations, pour faire le tour de la question cruciale du film concernant les femmes : "s'il y a retour du machisme, qu'est-ce-qu'on nous a fait et qu'est-ce-qu'on s'est fait aussi ?" !  .
  • L'ETREINTE DU FLEUVE (2010)
    Note : 18/20
    A décroché la Montgolfière d'Or au 32ème Festival des Trois Continents Nantais (2010). Cela part d'un brouillard qui serait déménagé d'un conte nordique en Amérique Latine. Dans une brume bleutée, on devine des offrandes au monstre, un rite donnant l'occasion au cadreur de s'attarder sur la végétation à fleur d'eau. Seul petit défaut peut-être, la lenteur à en venir au fait... Sinon,c'est complètement envoûtant, l'espace de quelques secondes, on jurerait une aquarelle. Une atmosphère voisine de "L'Oncle Boonmee" mais à des fins différentes : "Magdalena", fleuve traversant la Colombie du Sud au Nord, autorise les populations à circuler et même pêcher entre les turbulences. Il se chuchote qu'un ferry se déleste de curieux poids, rien que d'en parler, les femmes sont prises de panique... Pas de police. On survit grâce à l'imagination collective. Depuis 2002. Et même des décennies en arrière au dire de personnalités lasses des affres de dictatures successives...Le réalisateur Nicolas Rincon Gille traduit le malaise en un documentaire éblouissant Il est à la fois journaliste, peintre, sociologue. Les spectateurs sont particulièrement ménagés dans son récit. Il s'agit d'horreur bien réelle, mais toujours amortie et sans pour autant sonner faux. Devrait rester en tête cette petite lumière clignotant sur l'eau noire.
  • FEMMES DU CAIRE (2009)
    Note : 14/20
    Déroutant "Prix du Public" au Festival des 3 Continents nantais 2009. Yousry Nasrallah possède l'élégance picturale (beaucoup de raffinement dans le genre Almodovar en oriental). Il sait susciter une atmosphère intrigante, enchaîner avec un déroulement heurté, un peu tordu, sans fluidité entre les plans. Beau, lent, des à-coups, un brin de "la pompe" de nos romans-photo d'antan ? Le réalisateur de "L'Aquarium" traverse d'étranges remous avant d'en venir aux faits... Plusieurs situations sociales enfin se dessinent : au centre, une émission télé modifiée pour ménager les susceptibilités masculines... Des démonstrations de qualité inégale, je pense aux longueurs de cet épisode "les trois soeurs" ... Les fans gloussent, d'office séduits, quelques récalcitrants quittent la salle, mon voisin de siège alterne réveil et ronflements... C'est une parodie, mais il faut quand même raffoler du linge sale "people", affectionner les révélations intimes du petit écran populiste (genre TF1 chez nous), ces modernes Scheherazade parlant au micro "pour rester en vie". Archaïsmes égyptiens transcendés en arrière-plan : le fond est magistral, jamais encore une présentatrice télé n'était allée aussi loin dans "la réalité" ! Relevé une erreur de traduction en sous-titre, des femmes "oppressées" au lieu d'opprimées (sous-titrage anglais "oppressed", légère différence). On a plaisir a suivre l'actrice principale, une vraie mécanique qui ne perd jamais le nord sous ses allures de mignonne au service du public. Plus femme de tête qu'il n'y paraît, elle réserve une surprise de taille à la fin, dommage qu'il ait fallu autant de salamalecs pour y arriver ! .
  • À LA DÉRIVE (2009)
    Note : 15/20
    Chuyên Bui Thak, cinéaste viet-namien ménage quelques temps forts qui rachètent le ronron apparent, d'une rare violence intime. Bien amorcé pour ensuite se diluer quelque peu. Ces braves gens sont-ils donc cadenassés dans leur terreur du sexe ! Ainsi, on suppose que ce mariage arrangé n'est pas du tout consommé, simple compagnonnage d'êtres très jeunes, ou tempéraments trop mal assortis, aucun étalage surtout, sacrilège, enfin on ne divorce pas pour si peu dans cette communauté-là... La jeune sensuelle, plus mère qu'épouse, sent soudain son sang chavirer pour de bon, elle se trouve en quelque sorte livrée par une amie (intello plus mûre qu'elle, pas forcément lesbienne refoulée, elle cherche surtout matière à écrire), à un beau partenaire, du genre troublant d'emblée mais pervers si l'on en juge par le sort d'une précédente conquête... Connaître quelques émois par personne interposée, dérive comparable à cette escapade en robe tranchée au couteau pendant que "gros bébé" (le mari) à la maison s'éclate lui aussi... Mouais, ils sont pitoyables avec leur double jeu tout en sauvant les apparences. Splendides images grâce à l'éclairage des intérieurs raffinés, du pastel sur soie, ce rose buvard des rideaux d'intérieur irradiant la pièce entière fait partie des moments de grâce de ce film déconcertant... Franchement, on a mal pour eux d'être aussi coincés dans leurs traditions. Opiacé et soporifique. Une dérive méticuleuse, distinguée dans son traitement, sauf que l'amertume colle à la peau si les moeurs en sont à ce stade encore maintenant au Viet-Nam !
  • L'ENFANT DU PAYS (2002)
    Note : 16/20
    Exactement les hauts et les bas des familles dans ce qu'elles peuvent recéler de plus intime autour de la table ou en visite. Avec ici un accident qui ne cesse de miner tellement il est arrivé de façon culpabilisante. D'une facture soignée, le fouillis des scènes jetées pêle-mêle gêne un peu par son côté naturaliste flirtant avec le trivial. Toutefois, quand on fait le compte des émotions traversées par le réalisateur (le bonus du dvd y aide amplement), c'est tellement universel, bien interprété aussi, que l'adhésion l'emporte sur les petites réticences de départ.
  • BASSIDJI (2009)
    Note : 17/20
    Un documentaire bouleversant, trop peut-être, les 3 Continents Nantais ont été trop saisis par ces témoignages successifs, ils ont quand même eu tort de laisser Mehran Tamadon, cinéaste à double culture (française-iranienne) si ouvert, partir sans récompense...Ce documentaire au démarrage martial avec son drapeau vert qui claque sur cette terre jaune triste, s'humanise au bout de quelques minutes... L'ensemble est tourné avant le grand chambardement post-élections iraniennes cet été. Interminables hommages mortuaires, martyrs érigés en saints pour la postérité, slogans ancestraux intouchables, il est bon que le peuple pleure ensemble au lieu de se débaucher avec les apports extérieurs. On va même jusqu'au conte de fée tellement les prédicateurs voient le salut dans la mort (dur pour nous autres occidentaux)...Le réalisateur (présent en ouverture) semble ouvert et doux, respectueux de ses racines mais revenu des croyances qu'on endosse les yeux fermés (sa compagne est Française, il vit bien davantage en France qu'en Iran). Il offre une série de rencontres avec des sympathisants du régime conservateur, une milice faisant songer à d'autres politiques de l'extrême : tous évolués, propres sur eux, très copains même, sauf que leur sang ne fait qu'un tour à certaines questions, mettez votre voile les filles, l'homme est fragile de nature et l'Islam ne souffre aucune contradiction sur le sol islamiste. Suivez "Le Guide", lequel peut être remis en cause par "Le Conseil" s'il se trompe, ledit Conseil acceptant les changements de politique mais ouste la moindre dissidence ! On voit aussi la population vaquer à ses affaires, une décontraction permise tant qu'elle reste cadrée... J'ai souvent pensé à la petite actrice iranienne jouant dans "A propos d'Elly", interdite de séjour dans son pays pour comportement subversif !
  • FRAGMENTS (2009)
    Note : 18/20
    Projeté au 32ème Festival des Trois Continents Nantais (2010). La voix off de Yonathan Haimovitch a quelque chose d'un grand enfant perdu. Né en 1976, année où ses parents ont quitté la Russie pour cette zone désertique d'Israël, au ras de Gaza mais sans le religieux d'aujourd'hui (et notamment les ultra orthodoxes, selon sa présentation avant la séance). De l'eau en gouttelettes sur des vitres... Un paysage enneigé... Puis des intérieurs, les chères odeurs d'antan, couleurs et motifs d'étoffe, le chien sous le fauteuil... Visages heureux sur des photos sépia... Diapositives visionnées en plein soleil devant la fenêtre... Le 33 tours d'Albinoni... "Comme nous avons été naïfs" déclare par deux fois la plus ancienne ... Ces dames semblent échouées d'une certaine façon... La folie a emporté la plus fragile. Une veuve aux cheveux flamboyants s'avoue "contre la mort", son mari l'ayant précédée dans le trépas... Frissonne au souvenir de l'aube, quand sa mère partait s'éreinter puis jubile en pensant aux soirées autour du feu... Un vétéran se déplace à l'école pour assurer la transmission à des petites têtes encore peu soucieuses de leurs racines... Le réalisateur s'est réinventé un passé proche du sien. On se croit davantage en Russie qu'en Israël. C'est chaleureux, émouvant, trop court !
  • LA DERNIÈRE PISTE (2010)
    Note : 18/20
    Convoi restreint aux jupes traînantes et aux chapeaux ronds à oeillères, avarice de dialogues, musique faisant des signaux. On détecte les petits détails de très loin grâce au format carré (réputé plus favorable à la profondeur de champ). Sous la beauté picturale indéniable, c'est un pur western bien rude avec de la crasse sur les peaux et sur les tissus, les rivalités de pouvoirs. Premier western entièrement conçu par une femme (curieux que cela soit tu...). On est dans la lignée de "Appaloosa" et "True Grit" par la modernité de ton. Quelques outrances signant la féminité de base : face au trappeur qui dragouille, l'indien séduisant de bestialité, le droit de choisir son apprivoisement en fonction de son flair... Voici une femme qui tire sans se poser en virago une seconde ! C'est longuement statique à la manière des films de l'est mais attention aux branle-bas de combat au plus fort des tensions. Proche des films sur le désert avec l'impression de mirages successifs, la soif, et pourtant on commence par laborieusement traverser une rivière... Les images ultimes laissent leur marque, en pleine contradiction avec ce qu'a véhiculé longtemps la culture anglo-saxonne. Et pourtant tout reste ouvert !
  • THE FOURTH PORTRAIT (2010)
    Note : 19/20
    Prix du public au 32ème Festival des Trois Continents. En découvrant le jeune Xiang, on songe à tous ces gosses livrés à eux-mêmes. Petite bouille craquante bien qu'en deuil...Se fait remonter les bretelles par un vieux revanchard. Tout le monde va se retrouver dans les histoires de familles recomposées qu'un secret empoisonne pour sauver l'honneur adulte. Toutefois, il faut être aveugle pour manquer la seconde lecture à ce discours, confirmée par le réalisateur et le producteur ainsi que leur interprète, présents dans la salle du Katorza nantais (on ne peut rêver meilleurs ambassadeurs pour une promotion cinématographique, bien qu'ils n'éludent pas la réticence de leurs compatriotes à devenir amnésiques)... Ce "quatrième" portrait peut échapper tellement la double interprétation du récit occupe les méninges. C'est plaisant à suivre, tendre aussi, et pas du tout statique. Quelques mémorables étincelles, ce petit est adulte avant l'heure en gardant la spontanéité de l'enfance (la rampe d'escalier en marbre pour toboggan) et la scène en plongée sur les deux comparses aux toilettes, on a le vertige... En attendant le dvd, une excellente occasion de se pencher sur l'histoire : revoir pourquoi Taïwan (ex Formose = "La belle île"), entre Japon et Chine, a dû batailler ferme depuis toujours.
  • PEAR (2010)
    Note : 16/20
    Projeté au 32ème Festival des Trois Continents nantais (2010). Double lecture, chaque rôle figurant les différents tiraillements de la Chine d'aujourd'hui... Voici la "Maison de Joie" (!) avec sa façade de bonbonnière : au menu, télévision, provisions de bouche à volonté, plus si les travailleuses sont disponibles (l'art de doser labeur et détente...) = un bordel glamour. La jeune tenancière, proche de ses employées, materne ou rudoie. Les excès sont tolérés... Mais aucune mention de contraception ni préservatif.... Le couple dont il est question souffre, si l'on en juge par sa physionomie sous les lampes roses. Chacun s'ébroue pourtant comme il peut. Défilé de cigarettes. Rage sur ce briquet nerveusement actionné... Entre deux "siestes", on déguste les poires, ramenées de la campagne, la seule douceur véritable d'ailleurs, sauf qu'elles finissent par donner une vague nausée malgré toute la convivialité de ces estropiés du coeur. Triste visage féminin condamné à l'absurde. Longs tunnels traversés : le communisme puis l'ultralibéralisme, on est ankylosé comme ce bébé maintenu debout par sa chape de bois.
  • LOUISE-MICHEL (2008)
    Note : 13/20
    Quand rire devient douleur... J'ai eu l'impression d'un énorme gâteau empoisonné envoyé à la figure, au prétexte que l'époque est devenue irrécupérable... Hélas, je n'ai pas ri, tout juste souri. Car si cet humour-là colle à l'actu de Groland sur Canal, pour un film, je demande autre chose, des trucs plus fins peut-être ?... Le couple est peu attachant, la psychologie est à ras du sol et c'est plein de surcharges, avec cette guitare gratouillée en ponctuation, ou ce sifflement répété, on se sent forcé à l'adhésion pour la bonne cause. Mal à l'aise avec le sardonique, je me suis sentie égarée dans ce labyrinthe d'angoisse, dans une salle, vraisemblablement au même diapason, mes voisns ont à peine gloussé... C'est bien filmé malgré tout, et j'opte sans hésiter pour la dénonciation des impostures actuelles. Dommage que ce soit non-stop le style "Hara Kiri" dans ce qu'il avait de pire, c'est-à-dire "le bouchon trop gros poussé trop loin". Plutôt que de nier le bien-fondé de la démarche, il est permis de se questionner : de quoi rit-on instinctivement dans une époque précise, dans quel registre le rire stimule et quand commence-t-il à donner un vertige inquiétant ?
  • LITTLE WHITE LIES (2006)
    Note : 16/20
    Découvert au cycle britannique nantais "Univerciné" de décembre 2009 (où il a d'ailleurs remporté la palme !). Le spectateur est petite souris qui s'introduit dans cette famille de la classe moyenne galloise où couvent bien des conflits, dont la xénophobie de comptoir, qu'on pourrait croire banale, un mouvement d'humeur d'ivrognes occasionnels ne prêtant pas à conséquence. Le plus fort, le pilier, et d'entrée de jeu, est cette femme, épouse et mère, mais aussi psychologue, la conscience générale. Bonne jusqu'à faire abstraction d'elle-même une bonne partie du film, l'énergie faite femme, sauf qu'elle en aura un jour sa claque... Une fois habitué à la bande-son quasi constante (bien que discrète) avec ces alertes aux moments cruciaux (un cinéaste sans doute jeune pour appuyer autant, ou alors la musique évoque l'indicible par mesure de précaution ?), c'est plaisant à suivre, joliment filmé d'un bout à l'autre, mais, je le répète, l'actrice jouant "la mother" porte le film sur ses épaules, hyper attachante ! Heureusement, car si la fille laisse perplexe avec son chemin tracé d'avance, père et fils sont à claquer !  .
  • MAR ADENTRO (2004)
    Note : 17/20
    Revu en v.o. sous-titrée au 18ème Festival du Cinéma Espagnol de Nantes (mars 2007). On répugne tous à imaginer la dégradation physique sévère pour soi-même ou un de ses proches, un retour au néant semble doux en comparaison (bien dans l'air du temps en France actuellement avec ce scoop journalistique d'une malade incurable demandant qu'il soit légiféré, un genre d'autorisation avant passage à l'acte, ça remue les tripes des autorités, on est à cent lieues du Droit !). L'instant du passage sur l'autre rive ne saurait être légiféré, y participer au grand jour (et en dehors des guerres !) implique qu'on n'en pipe mot, à la rigueur, invoquer le "cas par cas"... En dehors de la souffrance décrite ou sous-entendue ici, s'ouvre cette fenêtre sur "celui d'avant l'accident", serait-ce un petit fil vital suffisant ?... Pour l'ultime vieillesse, quand les jours sont comptés, que "le corps n'est plus votre copain", admettons. Mais rien à voir comparé au calvaire d'un être encore jeune, sans autonomie depuis des années et qui réclame l'apesanteur une bonne fois pour toutes. Dans les esprits, la personne l'aidant à passer de l'autre bord oscille, quoi qu'on y fasse, entre la damnation pure et simple et la fraternité absolue, je pense à cette mère d'un jeune accidenté de la route du Nord de la France réduit à l'état de légume... Autre traitement de ce sujet qui attire et fait fuir en même temps, le film canadien "Les invasions Barbares". Mar adentro est une prouesse d'acteurs indéniable, les dialogues aussi sont de haute volée, rien d'étonnant que Javier Bardem ait été récompensé de toutes parts.
  • ALAMAR (2009)
    Note : 19/20
    En plus d'être un hymne à la nature, c'est le rappel que les très jeunes enfants souffrent en silence quand les parents se trouvent trop éloignés géographiquement l'un de l'autre... Très conscient de devoir s'en arranger, le père assure son rôle, sent qu'il doit faire vite. On le voit valser avec ce bébé né de l'amour entre elle, scientifique de Rome et lui, Mexicain, surtout sauvage des mers... Beau comme une figure mythologique, il s'appuie sur ses instincts, dépasse l'absence physique à venir (ce pacte verbal) déjoue l'agressivité (corps à corps dans la cabane). Sous le regard bienveillant du grand-père en arrière-plan avec ses belles dents blanches. Il plane une rageuse oscillation entre l'élément liquide et les femmes dans ces esprits baignés de lumière et d'embruns. Le petit Natan, d'abord circonspect, s'ouvre à la vie hors du nid : guilleret mais prudent (l'oiseau en visite et l'avertissement "le crocodile va te manger"). Miracle de la pellicule fixant à jamais un moment-clé pour ces gens en même temps que la menace. Aux dernières nouvelles, la barrière de corail dans ces parages serait touchée par "le scandale BP" ! Un coin qui nourrissait si bien son homme !
  • LES NOCES REBELLES (2008)
    Note : 18/20
    Surprise du titre français (un rien moralisateur ?) par rapport au titre original "A revolutionary road"... Satire impitoyable du couple embarqué dans le conformisme familial, ce "tue-l'amour" progressif des êtres à fort idéal affectif. Les années cinquante, et même soixante (1961, sortie du livre ayant inspiré ce film) constituent la période d'éclosion de ce sacro-saint modèle de société : difficile, dans les fifties, d'essayer de s'en extraire : père nourricier libre de ses fredaines, poids moral sur l'épouse, et surtout poids encore plus lourd sur la mère : ça s'est arrangé depuis ! Le film dessine bien le piège tendu d'avance et beaucoup moins l'usure de gens "pas assez forts", nécessitant un psy (!) pour s'accommoder de la médiocrité. Des moments exceptionnels : ce cinéaste détient l'art de tout déballer, de traquer l'hypocrisie mais toujours avec élégance (biais de ce détraqué en visite avec papa et maman)... Jubilatoire pour les célibataires endurcies (coups de gueules qui retournent les sangs !). Remarquable interprétation des héros dont on attendait la remontée à la surface de l'eau froide du "Titanic" : à peine le temps de se rincer l'oeil : Leonardo di Caprio ici macho en droit fil des traditions mais capable de s'amender, face à une Kate Winslet d'apparence lisse, plante exigeant de toujours pousser pour elle-même, si maîtresse femme dans son refus (elle est pourtant dirigée ici par son mari dans la vie) ! Feutrée plutôt que tapageuse, c'est une oeuvre qui soit replie sur sa sécurité ou réveille comme un défibrillateur !
  • CUCHILLO DE PALO (2010)
    Note : 17/20
    Montgolfière d'Argent du 32ème Festival des 3 Continents nantais et Prix du Jury Jeune (2010). Le thème est généreux, rarement abordé de cette façon. A déplorer quelques redondances avant d'en venir au fait... La toute jeune réalisatrice (trentenaire) joue elle-même le rôle de la nièce cherchant à comprendre pourquoi l'oncle était, de son vivant, regardé de travers : ainsi, on apprend que, dans les eighties (ce n'est pas vieux !) "108" homosexuels auraient subi les sévices de la dictature paraguayenne d'Alfredo Stroessner. Le récit montre bien, que ce soit dans le tête-à-tête d'un père et sa fille ou les célébrations collectives, que l'on ne parle pas de ça, que si c'est arrivé c'est parce que c'est "contre nature" parce que "croissez multipliez"... Bref, la vérité de siècles d'obscurantisme. Un aperçu des mentalités d'Amérique Latine entre crucifix et chapelet, la difficulté pour la jeunesse qui s'est émancipée d'admettre les idées reçues générant l'exclusion... C'est déroulé avec minutie et soudain, une femme parle et nous autres spectateurs, entendons l'indicible... Renate Costa aurait dû sauter à la gorge de son père à l'écran, insupportable rabâcheur de "nul n'est prophète en son pays" !
  • UNE VIE TRANQUILLE (2010)
    Note : 18/20
    Refait à neuf dans le secret, le héros sait ce que vie normale veut dire. La chasse au sanglier et les lettres rouges "Da Rosario" sont ses points d'ancrage. Un restaurant isolé de tout, on pense à "Avant l'aube" pour l'intrigue retorse, ou à "Soul Kitchen" pour le muscle ! C'est aussi un conte noir à rembobiner en fredonnant la chanson finale "A quiet life", voix grave du mutant hors de l'armure. Quand les trois lascars débarquent à l'écran, on se demande bien lequel va écoper le plus. L'étau progressif amène à gigoter sur son siège, vraiment embarrassé...En même temps on en redemande car suspense et plaisir se mélangent. Film rude, vachard, avec des parenthèses et ellipses d'une logique qui peut heurter mais que vient compenser la grande douceur de fond : bruitages musicaux, règlements entre quatre zyeux et traque dans la pénombre, qui va trahir qui et quand... Un régal !
  • CARTOUCHES GAULOISES (2007)
    Note : 16/20
    On met du temps à bien "entrer" dans cette suite de scènes présentée de manière sobre, nul doute que ça a été vécu. Mehdi Charef déroule tranquillement son écheveau, chaque plan de souvenirs amenant son énigme. Peu à peu, le spectateur s'habitue à patienter, n'est jamais tranquille... Le jeune Ali (et surtout les acteurs adultes qui l'entourent, les enfants plus ou moins...) incarne les enfants dans les guerres, ce regard trop tôt acéré mais toujours espiègle ! Un témoignage relativement modéré, Charef a su situer l'enfant, l'adulte et le parent dans son propos, il montre mais n'accuse pas. Son film, par son côté instructif, trouverait toute sa place projeté dans nos écoles à l'appui des cours d'Histoire.
  • FAMILY PHOBIA (2009)
    Note : 18/20
    Projeté au 32ème Festival des Trois Continents Nantais pour les courageux ou très curieux de la Chine contemporaine "bas de la middle-class". En noir et blanc de qualité variable, c'est un remarquable documentaire de trois heures pour décrire une famille chinoise de 2002 à 2008. Les grands-parents sont logés correctement dans un intérieur anonyme... C'est là qu'on se rend compte à quel point la mondialisation a vite fait de rendre uniformes les grandes villes de la planète : même décor, mêmes joies, mêmes peines, même linge sale en famille qu'en France, qu'en Europe sans doute... Une caméra portée, d'escaliers en couloirs pour repérer les discordes à venir (la grand-mère débranchant l'ordi !). Caméra fixe, braquée sur les repas où on jacasse devant la télé... Et ce sas étonnant, où on va se retrancher cinq minutes... Ils se parlent tous, beaucoup, ces gens élevés à la dure. On sent les petites rivalités à la faveur d'une maladie qui vient jeter le trouble... Les crises de nerfs ramènent au théâtre asiatique tellement c'est à fleur de peau, couinements et un genou en terre pour supplier... Vieux couple au bout du rouleau, rivalités mère-fille, parfois la larme à l'oeil (le grand-père furieux que l'hôpital sélectionne les soins selon le porte-monnaie). Ils ont du mal avec les ultralibéraux... Et aussi avec le petit-fils rivé à l'ordinateur : il agace mais résiste par mille bêtises... Trop investi de la déférence due aux anciens. Cible des projections maternelles (ces énièmes allers-retours lors de son entrée au pensionnat !). Caricature de la toute jeune Chine en marche ?... 2002 à 2008 défilent sans qu'on s'en rende compte... Le jeune grandit et se normalise, les anciens s'adaptent (vélo et nombreux étages sans ascenseur !)... Gros plan sur les habitudes, les expressions des visages... Et soudain, la politique au menu entre les deux enfants les plus ouverts et leur père fan de Mao, l'assaut juvénile contre l'histoire enseignée aux foules... On ne sait si le niveau de vie a dégringolé ou remonté au contraire, mais ces gens semblent reprendre confiance au fil des changements... L'essentiel se joue sur la dernière heure, ces trois débatteurs autour de la table : l'équilibre du monde... Ah ces jeunes qui vous tiennent tête... Hu Xinyu semble jouer l'avenir de la Chine sur le conflit de génération (venu d'occident) comme si c'était l'ultime espoir de libération de ses compatriotes.
  • A MOMENT IN JUNE (2008)
    Note : 15/20
    Techniquement très pertinent, plans aux couleurs toujours archi-travaillées, finesse dans le mouvement de la caméra, par exemple, cette esquive, dans le train, d'une scène dure, on la devinait mais elle sera juste amorcée à l'image, la déduction se fait d'office... Des personnages au physique attachant, des dégaines féminines frôlant le style "Bollywood". Des intrigues subtiles, entre autres, un fond d'adultère culpabilisant suivi d'un veuvage difficile à digérer. Des coeurs tourmentés, trop inégaux en armes affectives, ou déjà engagés, donc hésitants. L'homosexualité masculine se traduit ici par le désarroi du coeur conduisant à faire basculer le plus épris, un sentiment, pas le désir physique brut et bien viril dont on a l'habitude au cinéma gay... Très intéressant rapprochement de ces deux êtres abîmés dans un train, une femme et un jeune en pleine dévastation et qui vont s'apporter un soutien temporaire. Gros handicap de ce film, l'excès de "larmes de crocodiles" en temps réel, pitié, ça fait beaucoup d'eau... Car une fois le décor planté, l'insistance sentimentale en pleine débâcle, le bouleversement pressenti est loin de créer le suspense. Succession d'allers-retours interminables, gros-plans sur les visages défaits et, en plus, du théâtre interférant avec le quotidien... Sur le fond, très fine juxtaposition de détresses affectives intergénérationnelle. La forme lancinante est probablement due à l'extrême jeunesse du cinéaste thaïlandais O. Nathapon (si j'en juge par les photos récentes !), il devrait découvrir qu'écourter les démonstrations permet un public plus large. .
  • LA PRIMA COSA BELLA (2010)
    Note : 15/20
    Vu à Univerciné italien 2011 à Nantes sans en être marquée outre mesure. Evidemment, on brûle de savoir si la belle est bête ou pas si bête... Chacun en prend pour son grade dans son entourage dès qu'elle paraît : trop belle donc. Hélas, inutile de croire la comédie italienne ressuscitée pour autant. La magie de la bande-annonce s'envole très vite, c'est trop brouillon et bien trop bavard. Encore plus pour tenir le choc quand la poupée se rabat sur son fiston en mille et une nostalgies. Hormis cette belle plante à admirer, sorte de Sofia Loren recyclée en nettement moins charismatique, c'est un divertissement bien fait qui aurait gagné à en faire moins.
  • MY SECRET SKY (2008)
    Note : 17/20
    Le film s'ouvre sur la tante acariâtre, intéressée et qui les plante finalement là dans la case... Des enfants livrés à eux-mêmes, ils n'ont plus qu'à se mettre en marche s'ils veulent survivre dignement... Direction la grande ville à pied pour le frère et la soeur, au petit bonheur la chance, au gré des rencontres, silence sur leur détresse, ils sont tous deux bien vivants, donc ce sera pile ou face... La rencontre avec un gamin des rues loin donne soudain le vertige, bonne gueule de gavroche qui craquerait bien pour la petite demoiselle, l'occasion de se montrer chevaleresque... Hormis le danger de dormir dans un sous-sol sordide, de vivre de rapines, d'être cible de trafics, la chance ne peut que tourner, sinon il n'y aurait pas ce joli tapis zoulou symbolisant les ancêtres qui veillent... Excellente direction des jeunes interprètes, le tandem principal est crédible, le petit frère a le blues par moments, mais la fillette déjà très au fait des magouilles possède, dans sa petite robe jaune, cette droiture probablement héréditaire. Une situation critique - ce sont quand même des enfants à la merci de tous les dangers - mais émaillée de dialogues pleins de fraîcheur. Allusion au commerce équitable aussi : encore vivaces entre villes et campagnes, le troc des talents pour que chacun mange, rend moins lourd le sort de ces deux orphelins pour le spectateur : ou l'Afrique du Sud possède encore ce type de ressources, ou Madoda Ncayiyana est un optimiste né... .
  • BLUE VALENTINE (2010)
    Note : 16/20
    Blue Valentine, titre de Tom Waits ou "le blues des amoureux"... L'enfant étant le lien, le sort du chien la hantise. Unis par leurs désirs de bâtisseurs, ce jeune couple des classes populaires étasuniennes s'est pourtant juré "fidélité pour l'éternité". 4 à 5 ans plus tard, le spleen. En d'incessants va-et-vient entre passé et présent, leur intimité à la loupe est dévoilée en une successions de scènes très racoleuses dont le mérite est de remonter à la surface le premier vrai couple sommeillant en chacun(e), du feu aux joues aux soupirs de rage, en passant par la culpabilité sur fond d'entraide et l'espoir que l'autre change. Jusqu'à l'explosion, l'attitude saine malgré le tiraillement d'avoir tranché non sans dégâts... Acteurs inégaux pour des rôles eux aussi en net déséquilibre. Michelle Williams (héroïque dans son épreuve hospitalière !) beaucoup plus palpitante que Ryan Gosling dont on repèrera la très jolie voix chantée.
  • VIVA CUBA (2005)
    Note : 19/20
    Toujours plein de santé, ce road-movie de 2005 projeté au Festival des Trois Continents Nantais en 2009 (applaudissements dans la salle) ! Il faut dire qu'on se rue sur les oeuvres les plus vivantes, le bouche à oreille y invite : splendeur que cette aventure de deux enfants en désaccord avec leurs parents, toute la tragédie cubaine à présent, rester sur l'île telle qu'elle est ou prendre le risque de s'expatrier... On rit, on s'étonne et on fond devant tant de créativité, la meilleure musique accompagnant chaque étape franchie par les deux fugueurs. Virtuosité de caméra, dialogues truculents, c'est familier et il n'y a pas une seconde d'ennui. L'art de rendre ludique un drame plus que jamais d'actualité.
  • COURS SI TU PEUX (2010)
    Note : 14/20
    Film-culte au cycle allemand Univerciné nantais de novembre 2010 : la misère existentielle d'un paraplégique par accident, le jour où son auxiliaire de vie lui fait voir de près la jeune fille qu'il convoite de son perchoir. Ils dorment tous les trois comme des braves... Dans la salle, les jeunes adhèrent tout de suite, rient beaucoup, totalement identifiés. Plus grande réserve des adultes... Car on peut trouver niais ce langage codé, languir de ces méandres immatures vers l'ultime vérité (à deux doigts de la fin seulement)... L'eau envahit ou engloutit... Quelques scènes intenses maintiennent en éveil, le ton change souvent, du léger au pertinent, j'aurais aimé davantage d'épaisseur... Une deuxième lecture se superpose, ces lugubres immeubles figurant l'économie actuelle, la solidarité d'une jeunesse prostrée en attendant le saut d'obstacles de la vie active. Ce jeune réalisateur est plein d'imagination à l'image mais m'a donné le tournis avec sa démonstration qui n'en finit pas. Je peux comprendre que ce type d'ambiance soit prisé avant d'affronter les obstacles de la vie d'adulte. On est plombé en plein vol et on reste "biberonner" parce que c'est la fin du monde... Oui, une vie avec un handicap lourd semble LE fardeau. La dernière demi-heure abonde d'effets faisant parfois penser aux énigmes de 2001 de Stanley Kubrick, tout aussi "barré"... Fan ou éreinté, en sortant de la projection, chacun devrait apprécier ce dont il dispose dans la vie réelle.
  • NAOMI (2010)
    Note : 18/20
    La mère, personnage central, rappelle à son grand fiston que rien ne l'a obligé à pareil choix, qu'il lui faut donc s'armer en travaillant ses points forts. Justement, outre la sublissime avec son grain de beauté à gauche sur la lèvre supérieure (que fait-elle avec cet "ancêtre" ?), le personnage de cette mère ne lasse pas d'étonner, son langage savoureux semblant représenter la distance qu'on peut avoir en découvrant Agecanonix et Falbala en chair et en os. D'autant plus raffiné que ça se passe en Israël sans la guerre. Sauf que ce n'est jamais irrévérencieux car ce couple, en dehors d'une inégalité qui fait sourire, a une réelle complémentarité. C'est faussement lent. Attention, ça couve : première partie d'un stoïcisme trompeur. La scène haletante autour d'un calumet témoigne d'une violence intériorisée qui n'arrêtera pas.
  • TREELESS MOUNTAIN (2008)
    Note : 17/20
    Kim So-yong est cette frêle et toute jeune femme en casquette irlandaise et bottes de cuir clair au Festival des Trois Continents Nantais ce lundi 30 novembre 2009 pour dire quelques mots de son film "Treeless Mountain", tissé à partir de son vécu... On découvre ensuite à l'écran un splendide duo de fillettes, naturelles, avec cette grâce tranquille des enfants s'en remettant à l'adulte qui les guide. Très jolis plans... On peut reprocher que l'histoire s'étire avec ses interludes successifs (c'est ça la petite enfance), la réception des nouvelles maternelles apparaît rare... Reste ce car, vénéré régulièrement... Sans que ce soit tire-larmes, la tristesse s'empare du spectateur, on devine le drame de ces deux jeunes êtres, aucun coup de fil, des calculs de cette tante qui boit, serait-ce un abandon pur et simple ? Où diable sont les hommes du film ? Si le père demeure mystérieux dans son lien à la mère, le grand-père est ressenti comme fuyant la caméra (on "l'entraperçoit" une seule fois à récriminer...). La vieille dame à la serviette éponge sur la tête apporte enfin l'éclaircie de substitution. Raffolé du cochon en plastique comme gage d'attente, la charge des mots maternels (repères cruels s'ils durent !),les sauterelles grillées... Les spectateurs ballottés petits entre plusieurs adultes vont s'identifier, on sent bien l'angoisse enfantine tournant à vide... Parallèle avec tout parent actuel en difficulté matérielle croissante de par le monde, contraint de faire échouer leur progéniture un mois ici, un an là... Femmes seules à se dépêtrer de tout, pays sans contraception... Consolation et pas des moindres : si l'on se réfère à la réalisatrice entrevue avant le film, le résultat de pareil traitement semble bien être la force de caractère !
  • LE VOYAGE DE LUCIA (2010)
    Note : 16/20
    Anciennement titré "L'Appel", Prix du Public au Cycle italien Univerciné Nantes 2011, les deux actrices principales font tout le prix de ce film gracieux. Elles peuvent tout se permettre sous ce regard fin, distancié, décortiquant l'attitude des compagnons, ce qui fait qu'hommes ou femmes sont sous le charme, très intrigués quant à l'issue. Si le naturel de Léa, Argentine et bohème va de soi, Lucia, hôtesse de l'air est avant tout pianiste (point culminant du film, ce "vivre l'instant" de l'aïeule !). Prises de vue, son, dialogues, d'une délicatesse constante virent aussi vers les dures réalités. On patine sur le rafiot en Patagonie mais la morale sera sauve : les dernières minutes récupèrent magistralement les spectateurs et spectatrices qui auraient été tentés de décrocher.
  • BANDHOBI (2009)
    Note : 19/20
    Gloire à "Bandhobi", Montgolfière d'Or du 31ème Festival des Trois Continents nantais ! Ce petit bijou coréen garde éveillé en inversant le discours misérabiliste, l'élément féminin de petite constitution représente la puissance : une jeune pimbêche du coin face à un grand discret d'ailleurs, attention, il a du répondant... Le schéma idéal pour évacuer LE tabou actuel grâce à la distance, ça se passe là-bas en Asie... La famille en prend plein les mirettes, elle a beau se recomposer gentiment, un beau-père à partager avec Môman pousse une ado exigeante à faire crise sur crise... Pour les Français empêtrés dans leurs différences mal assumées du fait d'un ministère excessivement zélé, ce film donne un grand coup de pied dans la fourmilière de l'immigration et de l'identité nationale et permet de comparer les sorts de sans-papiers d'un pays à l'autre... Il pointe le désastre des populations clivées du fait de la volatilité du travail, de la quête incessante de sous, de la loi du plus malin... Ô que c'est délectable ce rejet bien net puis ce lent apprivoisement, qui ne sera pas capitulation non plus... Boudeuse sud-coréenne moderne (actrice reconnaissable entre mille) dont le jeune Bengali habitué à la dure et à l'éphémère, sourit... Vivement que cette oeuvre tonique trouve producteur en France !  .
  • ACCIDENT (2009)
    Note : 15/20
    Le démarrage de "Accident" de ce réalisateur aux 3 Continents nantais 2009 coupe le souffle. On dirait une horlogerie de précision. Les premiers détails conduisant à ces fameux accidents envoûtent, du cousu main qui pourrait inspirer les malfrats en mal d'inspiration. Après, comme le déballage de coups fumants n'a plus de cesse, on décroche, à moins d'aimer l'action pour l'action. Attentes et filatures, filatures et attentes... dans cette ville, d'une inhumaine noirceur... Voilà que, surprise au final, l'histoire se tiendrait malgré la surenchère d'effets, superman touché en plein coeur revient de ses obsessions, s'amende ?... Spectacle raffiné, un peu téléphoné mais dont l'ironie qu'il fallait en fait garder depuis le début, fait prendre l'intégralité au second degré... Entre bande dessinée et clip de pub. Ce pourrait être carrément du virtuel, sans nécessité d'acteurs à payer tant c'est lisse et bien propret dans le genre ! .
  • LE VIEUX JARDIN (2006)
    Note : 16/20
    Admirablement filmé, comme apparenté, au plan cinématographique, au film "Les climats" de Nuri Bilge, autre virtuose de la caméra. Et encore une fois sur le thème du tiraillement séculaire, cette difficulté à concilier l'amour pour une femme (qui finit par emprisonner) et la pulsion de mouvement vers la communauté (risques inclus). Evidemment ici, l'emprisonnement de 17 années ravive la flamme amoureuse au détriment de la conviction politique... Quelques images dures, un peu trop appuyées parfois pour nous autres occidentaux (ce côté hara-kiri du cinéma coréen), pour illustrer la guerre, les luttes sociales, et aussi pour massacrer un prétendant trop gamin (les crachats répétés) et cette pauvre cancéreuse par accumulation de chagrin... Mais l'ensemble est bien cohérent et conduit vers une réflexion élargie (couple/société)... Les deux acteurs principaux ajoutent au questionnement par leur charme indiscutable, le héros ayant gagné en séduction avec l'âge, ce qui est rare au sortir de prison ! Les retrouvailles avec l'enfant apportent une note tonique imprévue, cette ressource qui bouscule le père, et devrait faire rire toutes les mères !
  • ELEVE LIBRE (2008)
    Note : 16/20
    Rencontre d'un jeune et d'un trio prompt à "confondre l'amour et la gymnastique" ? Les coups de raquettes pourraient faire croire à quelque toux nerveuse... Le blond Jonas, cadré en tout par des adultes en mal de projections à plaquer, plutôt que de redoubler et se retrouver avec les tout jeunots, préfère étudier en candidat libre. Le dénommé Pierre l'accueille chez lui pour cet enseignement : une maison où on parle à coeur ouvert, de soi, comme de la copine Delphine, le premier amour, fortement idéalisé. Les trois hôtes émoustillés semblent fins connaisseurs, devanceurs de désirs, la dame est particulièrement à l'aise... Repas, baignades, soirées discothèque et études constituent le programme. Parfait, ne serait ce léger malaise global... Une histoire plus gonflée que je ne l'aurais cru ! Sur l'air du mythe soixante-huitard "être libéré", le leurre du siècle précédent... Pareil rite d'initiation existerait encore dans de rares tribus, à Bali je crois bien, mais sous nos latitudes, du fait de la socialisation, ces fantaisies primitives désarçonnent. Pour preuve, une franche tension vient s'abattre sur le spectateur à partir de Delphine à table avec la maisonnée... Et ça n'arrêtera plus ! "Plus entraîner que forcer", dit le précepteur... Armes inégales, pouvoirs incomparables. Le plus pénible pour l'adulte est bien le contraste de Pierre, être bien intentionné aux vues pertinentes avec son revers, la chair triste, cette contamination, les répercussions à imaginer peut-être sur des générations ensuite... Joachim Lafosse dénonce, il prend un discret parti pris, pas si neutre que cela... Techniquement, même art des prises de vue, même acuité que "Nue Propriété", même étau... C'est riche de détails, ça fait gamberger longtemps après la projection. Et espérer des soins pour les égarés du désir !
  • MELANCHOLIA (2011)
    Note : 19/20
    D'ordinaire, j'évite Lars Von Trier par instinct de conservation. Mais cette prédation cosmique attire. Des mariés patinant dans leur voiture avec force bisouilles, tandis que la petite étoile rougeoie, bientôt boule bleue géante et perturbante avec son souffle menaçant, ça promet... Des embourbés au ralenti dans leur dernière occupation, de bons uppercuts sur les convenances et le pouvoir en roue libre. Des dames exultent. La science masculine prend une claque. Très peu de soufre, la petite phrase de la mère, ou la mariée qui se fait la malle, le foin aussi posé sur le cadavre dans l'écurie. Du réalisme mixé à du fantastique fait que c'est proche. Ces gens nous ressemblent, ressemblent à ceux que nous côtoyons sauf le garçonnet emprunté à Tarkovski dans "Le Sacrifice". "Impossible de se cacher" dit-il. Le trash auquel les personnages arrive est acceptable puisqu'ils sont condamnés. On peut aussi visualiser sa propre mort à travers ce film. Ou y trouver une allusion aux tsunamis, éruptions volcaniques, Fukushima, et autres réalités apocalyptiques peut-être lointaines mais néanmoins réelles. Le rire s'invite pour certains sur les derniers plans, tellement ils ont l'impression de se faire absorber pour de vrai. On sort de la salle bien sonné. Bref coup de blues ensuite (en regard de l'actualité) duquel retenir, après sommeil, l'image des deux planètes... à deux doigts de s'embrasser. Un merveilleux malheur. Ouf, c'est une fiction tout de même. Et déjà un classique !
  • POTICHE (2010)
    Note : 19/20
    Parfaite caricature des entreprises familiales des années 70 présentée avec le piquant des comédies américaines d'après-guerre 39-45. Une fabrique de parapluies : rien qu'à voir l'enseigne, mes zygomatiques entrent en danse... Peu d'atteints de sinistrose grimacent autour de moi dans la salle, les petits patrons seraient autorisés à tiquer mais rien de sûr... Pour qui a approché les contradictions d'une entreprise familiale, jubilation presque obligatoire. Luchini et Deneuve s'étripent, dans un tac au tac bien ajusté qui prélude à un renversement de situation... Depardieu en rajoute une couche... Les enfants se rallient au parent préféré... Mémorable apparition éclair de Sergi Lopez en chauffeur poids lourd... Du diable si ça fait un peu "Au théâtre ce soir", toutes les vieilles ficelles : on éclate de rire parce que ça pulse de tous les côtés ! A peine une petite baisse de régime avant l'explosion finale. Un registre certes emprunté à une époque révolue, "naphtalinée" selon certains internautes. Etrange comme cela rencontre un écho en 2010. Ozon évite (une nouvelle fois !) de nous inonder de personnages malsains ou qui ont un petit pois... Au passage, quelques relents de campagne présidentielle 2007 ou même de mandat présidentiel tout court. "C'est beau la vie" chanté autrement, on y croirait presque tant Catherine Deneuve est épatante dans ce style-là !
  • VOLEM RIEN FOUTRE AL PAÏS (2006)
    Note : 15/20
    Une analyse nécessaire pour tous ceux qui, plutôt que de s'exporter au gré du marché, restent dans leur coin et font des boulots sordides comme scier un porc en deux à longueur de journée. Peut-être chaotique, tellement on passe d'un essai d'autarcie à l'autre, mais enfin, après la précédente caricature "Attention danger travail", celle-ci est une autre facette de ce désir émergent à condition de refuser d'être un commode parasite qui ne tente rien : rester créateur (ou à peu près) de son cheminement personnel, refuser de devenir ces éponges qui absorbent ce qu'une élite marchande a décrété. Les pistes explorées ici, crédibles pour certains d'entre nous, qui ont déjà bien bourlingué, ramènent toutes aux sources. Tout cela reste relatif, maladroit, pourrait même faire "grand luxe des pays civilisés décadents". Soit, mais loin d'en sortir désespérée, j'y décèle un instinct de conservation réjouissant : ON RIT FRANCHEMENT d'un bout à l'autre, de la petitesse et aussi de l'ingéniosité humaines !
  • PERSEPOLIS (2007)
    Note : 16/20
    En découvrant ce dessin animé pour adultes en avril 2008, comme un tas de gens plus attirés vers les acteurs en chair et en os, je me dis "que ne l'ai-je vu plus tôt !"... Voilà d'adorables dessins, rien que de gracieux dessins, ingénieusement déménagés de la version papier vers la toile, grâce à l'alchimie Satrapi/Paronnaud. Et qui en racontent ! Avec toute la technique empruntée aux studios du genre mais en faisant dans le sobre, le tout simple expressif, comme les gosses : on se balade et on est surpris autant qu'instruit. Et ça cause comme la jeunesse européenne d'à c't'heure ! Le regard étant toutefois celui d'une femme assez sereine finalement. Bien des grands-mères délurées se reconnaîtront. On comprend la complexité de l'Iran, les liens lors d'exils, avec ce fol espoir que les pays réputés libres soient plus stimulants. Etonnante fragilité de Marjane, une fois adulte, d'avoir été choyée même en territoire miné de l'extérieur. Le plus terrible est de devoir passer de la joie à la déprime, passé houleux et lendemains hasardeux. La voix de Danièle Darrieux incarne la grand-mère (mais j'ai irrésistiblement pensé à Denise Grey...), les voix parlées de Catherine Deneuve et de sa fille, Chiara Mastroiani se confondent par moments, c'est troublant comme un fil inaltérable entre générations.
  • LA PETITE FILLE DE LA TERRE NOIRE (2007)
    Note : 16/20
    Découvert au Festival des Trois Continents nantais en 2008. C'est une ville minière dans la montagne coréenne, avec des fumées et crachotements d'un autre âge, enfin pour nous autres Français... De plus, il fait toujours froid si l'on en juge par la neige en contraste avec le noir ambiant, triste patelin ! Pourtant l'on y chante (magnifiquement !) de retour du fond de la terre, devant la télé ou en sillonnant le village en voiture... Zoom sur la petite famille monoparentale, un papa et ses deux gosses scolarisés (le garçon retardé dans son développement). Le père, pour une fois, plutôt gentil (à la différence de nombre de rôles masculins asiatiques lâches, désespérants)... Un père responsable, il "assure". Nulle information sur la mère. Quoi qu'il en soit, la jeune Young-lim, 9 ans, devient une aide précieuse pour le mineur le jour où une sale pneumonie vient tout compliquer... Une torpeur alcoolisée peut ulcérer un tout jeune cerveau... Il faut bien suivre la fillette dans son parcours à l'image... Une sacrée petite bonne femme, plutôt tendre, d'une lucidité qui saisit... Etonnant comme Jeon Soo-il embarque le spectateur dans un long processus descriptif, jusqu'à le faire se morfondre dans ce pays de malheur... Mais c'est pour mieux le piéger, toujours dans le monocorde (peut-être un peu terne comme mise en scène quand ça se gâte, les plans fixes demandent de la patience !)... Les spectateurs restent vissés à leur siège ou alors quittent précipitamment la salle pour prendre l'air car "la petite" dans sa très forte envie de survivre, ne fait pas dans la dentelle... Derniers plans hallucinants.
Notes de L.Ventriloque
(par valeur décroissante)
FilmNote
KEANE (2004) 19
VIVA CUBA (2005) 19
BANDHOBI (2009) 19
THE FOURTH PORTRAIT (2010) 19
ALAMAR (2009) 19
POTICHE (2010) 19
MELANCHOLIA (2011) 19
LES NOCES REBELLES (2008) 18
L'ETREINTE DU FLEUVE (2010) 18
FRAGMENTS (2009) 18
FAMILY PHOBIA (2009) 18
LA DERNIÈRE PISTE (2010) 18
UNE VIE TRANQUILLE (2010) 18
NAOMI (2010) 18
LE DERNIER VOYAGE DU JUGE FENG (2006) 17
MAR ADENTRO (2004) 17
LE BEL ÂGE (2009) 17
BASSIDJI (2009) 17
MY SECRET SKY (2008) 17
TREELESS MOUNTAIN (2008) 17
LE DERNIER VOYAGE DE TANYA (2010) 17
BARRIERE (2010) 17
CUCHILLO DE PALO (2010) 17
LE VIEUX JARDIN (2006) 16
CARTOUCHES GAULOISES (2007) 16
PERSEPOLIS (2007) 16
FROZEN RIVER (2008) 16
ELEVE LIBRE (2008) 16
LA PETITE FILLE DE LA TERRE NOIRE (2007) 16
LE PÈRE DE MES ENFANTS (2009) 16
EN EAUX TROUBLES (2008) 16
HUACHO (2009) 16
LA DOMINATION MASCULINE (2009) 16
LITTLE WHITE LIES (2006) 16
OXHIDE II (2009) 16
PEAR (2010) 16
L'ENFANT DU PAYS (2002) 16
BLUE VALENTINE (2010) 16
LE VOYAGE DE LUCIA (2010) 16
VOLEM RIEN FOUTRE AL PAÏS (2006) 15
À LA DÉRIVE (2009) 15
A MOMENT IN JUNE (2008) 15
ACCIDENT (2009) 15
PIANOMANIA, A LA RECHERCHE DU SON PARFAIT (2009) 15
LA PRIMA COSA BELLA (2010) 15
IL DIVO (2008) 14
FEMMES DU CAIRE (2009) 14
SANTIAGO 73 POST MORTEM (2010) 14
COURS SI TU PEUX (2010) 14
LOUISE-MICHEL (2008) 13