Critique(s)/Commentaire(s) de JIPI

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  • LA RUE ROUGE (1945)
    Tout juste précédé de "Double Indemnity" de Billy Wilder et préparant la venue d'"Angel face" d'Otto Preminger "Scarlet street", remake de "La chienne" de Jean Renoir, respecte son modèle au plus près, dans une étude de cas assez réussie sur la machination et son acceptation de la part d'un personnage médiocre et naïf, perdant toute lucidité devant une créature sublime, mais vénale, masquant à peine ses pôles d’intérêts malhonnêtes, dans un cynisme non perçu par un individu insignifiant, persuadé d'avoir été ciblé rien que pour lui-même. A la différence des physiques plus aboutis de Fred Mac Murray et de Robert Mitchum, Edward G Robinson détient une morphologie ingrate et de petite taille. Un constat devant suffire à un personnage ne répondant pas à des critères d'attirances, à rester conscient, en refusant de valider ce qui ne peut être.Et pourtant il n'en est rien, l'homme, dans un sursaut prétentieux et revanchard plonge, corps et âme dans ce qui va le détruire, en le poussant au crime et à la déchéance, suite à la découverte de son infortune."Scarlet street" restitue parfaitement un mécanisme implacable de destruction, dans un jeu dont les règles fusionnent une perversité à peine voilée, rejetée volontairement ou non par un personnage anodin, aveuglé par sa passion.Ceci répond à un des courants cinématographiques américains de ces années quarante, consistant à montrer la femme autonome ou sous influence, comme une machine de guerre sans pitié, fondant sur une proie représentant l'objectif à atteindre.
  • BEAU GESTE (1939)
    "Beau geste", très beau film sur la légion, ses exigences, ses sacrifices finaux, sa fraternité et ses débordements internes, fut interdit en France, pendant la seconde guerre mondiale. Cette sphère rigide et guerrière, salie de l’intérieur par l’arrivisme et la convoitise d’un de ses composants hiérarchique hyper dément, montre une architecture austère, complètement sclérosée par des procédures menant sadiquement, en se servant du règlement comme paravent, ses incorporés vers l’élimination finale.Les premières minutes ainsi que les dernières sont saisissantes admirablement proportionnées. Le final est bouleversant. Ces ultimes images sont incontestablement parmi les plus pathétiques du septième art.Une incroyable force se dégage de cet enfer saharien. Sous un soleil de plomb, les hommes sont rabaissés, bestialisés, de véritables moutons conditionnés, incapables de se révolter devant le sadisme d’un déjanté.Positionnés entre un règlement strict, en lutte avec les perceptions personnelles d’un sergent halluciné, le légionnaire environné de sable, traqué par le Touareg, n’a plus que le linceul du fortin comme épilogue."Beau geste" est absolument à voir, rien que pour l’admirable complémentarité de ce merveilleux et émouvant triangle fraternel, restant soudé devant les déferlantes incessantes d’un déséquilibré.Gary Cooper, Ray Milland, Robert Preston et Brian Donlevy sont extraordinaires dans leurs scènes, chaleureuses et démentielles, respectives.Une triade fraternelle, accablée de chaleur, aux liens indestructibles, se renforce dans la douleur de l'isolement."Beau Geste" est un chef-d’œuvre.
  • DEUX TÊTES FOLLES (1964)
    "J’ai emmené la tour Eiffel avec moi pour savoir dans quelle ville je me trouvais"Avec une telle réplique on peut s’attendre au pire comme au meilleur, c’est le meilleur qui l’emporte à condition d’accepter un farfelu bien dodu risquant de lasser un public décontenancé par ce bavardage copieux issu d’un bouillonnement cérébral incessant. Les situations rocambolesques de "Deux têtes folles" peuvent perturber des esprits aimant l’ordonnancement. C’est un peu du n’importe quoi qui défile dans un contexte de créativité sans cesse remodelé.Qu’importe, inutile de tenter de restructurer un tel débordement. Il faut adhérer sereinement à cette loufoquerie, uniquement détentrice de bonne humeur et surtout d’un adorable décalage assumé pleinement par deux doux dingues adoptant la panoplie de leurs personnages.Il serait dangereux de noyer la production avec de telles incohérences, mais ce genre de films n’étant pas légion, celui-ci est le bienvenu et se déguste avec bonheur, à condition d’accepter des quantités de connexions avortées faisant des protagonistes de cet opus des marionnettes conditionnées aux délires de leurs concepteurs."Deux têtes folles" est un film sur le monde des idées manageant deux esprits inventifs libérés de toute contrainte. Les situations se créent et se transforment au fil des intuitions d’un délire pétillant libre de tout marquage.
  • LUNES DE FIEL (1992)
    Les méandres nauséabondes et perverses d’un metteur en scène privé de liberté cinématographique, suite à une thématique répétitive, continuent de sévir dans un opus sans attrait, ne faisant qu’entretenir le compte en banque d’un esprit esclave d’un genre plus rentable que ressenti. Rien de nouveau dans ce torchis progressif, menant une simple rencontre vers son anéantissement, suite à une overdose sexuelle sans aucun tabou."Lunes de fiel" énième particule d’un travail en boucle, ne fait qu’assurer l’instabilité d’un réalisateur en chute libre, depuis "le locataire".Le culte du beau et l’idée du bien sont à des années-lumières de cette repoussante poubelle humaine, montrant nos pires travers dans une succession d’images récupératrices et sans originalités.Soporifique, artificiel, mal joué "Lunes de fiel" est à deux doigts d’être la pire réalisation d’un homme ne montrant que la déchéance de ses semblables. Une tel acharnement est pitoyable et n’aide en aucun cas la récupération de repères sains.Est-ce lui qu’il faut discerner dans les personnages de cette répugnante descente aux enfers ? Dans l’affirmative la vision de cet opus ne doit en aucun cas altérer un principe de construction basée sur la perfection et l’association des formes.Ici tout n’est que destruction vomitive et glauque et ne mérite que le pilon. La vraie vie est ailleurs, même si cet ailleurs ne fait que se répéter.
  • COMME UN CHEVEU SUR LA SOUPE (1956)
    "Tu ressembles à la vie, comme la vie te ressemble" Quel film sympa que ce "Comme un cheveu sur la soupe". Les tribulations rocambolesques de tout un petit monde populaire, farfelu, lunaire et jamais méchant. De doux dingues bien sympathiques moulés dans des situations inconcevables de nos jours. Lâchés au gré de leurs délires, dans un Paris éventré, sombre et crasseux ne privant nullement ses occupants d'une communication conséquente et festive. La nostalgie de toute une faune simple et décalée capable de vibrer dans une ville où l'on a encore quelque chose à partager en commun. Bravo.
  • BILLY BUDD (1962)
    Toute l'essence de cet opus remarquable et rarissime se situe en huis clos. Pressés par le temps quatre officiers doivent en leur âme et conscience juger l'acte irréparable commis par un jeune matelot analphabète, naïf et timide, ne trouvant parfois pas ses mots, enrôlé de force puis poussé à bout par un maître d'équipage sadique semblant quémander inconsciemment un châtiment.William Budd est un Jésus Christ maritime, un agneau sacrifié ballotté entre une discipline de fer, et une hiérarchie sans âme ne fonctionnant que par la répression.L'uniforme n'étant qu'un paravent, un prétexte à ne fournir que de la procédure sans révéler de véritables sentiments.La loi remplace la justice dans un procès bâclé. Un contexte verbal d'arguments contradictoires dont la finalité se promènent dans ces phrases manichéennes d'expansions et de retraits entre rigueurs et bontés.Ici il ne faut que débattre en ne pensant qu'a punir."Billy Budd" est un très très beau film sur les difficultés de s'extraire d'un schéma réglementaire afin de s'assumer en qualité d'homme, en valorisant le charisme d'un individu plutôt que de sanctionner la spontanéité d'un geste irréfléchi envers un personnage abject.
  • BEIGNETS DE TOMATES VERTES (1992)
    Evelyn Couch, boulotte naïve, soumise à la bouffe cholesterolée, fait la connaissance, lors d’une visite à l’hôpital, de Ninny Threadgoode. Celle-ci lui raconte, par intermittence, le merveilleux parcours en commun de Idgie Threadgoode et de Ruth Jameson, la saga prenant un départ dans une Amérique des années trente, ventripotente et raciste, jusqu’au bout des ongles.Ces deux jeunes filles, témoins d’un accident tragique, vont se rapprocher, apprendre à se connaître, se construire dans l’apparence d’une fausse différence.Idgie, sauvageonne enfant des arbres, se laisse approcher par la sensibilité de Ruth, une amitié éternelle va unir ces deux jolies jeunes filles, qui séparées le temps d’un mariage ratée, vont se retrouver pour ne plus se quitter.Evelyn, captivée par les récits épisodiques de Niny, se sent imprégnée par la robuste constitution psychologique de Idgie et de Ruth, sa vie va se transformer, prenant conscience de sa position dégradée au contact de ses contemporains, elle va se bâtir à leurs images et s’imposer comme une personne responsable se devant d’être respectée."Beignets de tomates vertes" est un film magnifique, un chef-d’œuvre de sensibilité où une femme raconte l’histoire de deux femmes influant à distance le destin d’une troisième.Ninny à l’automne de sa vie est une admirable conteuse, ses mots se marient merveilleusement avec l’image du cheminement, parfois tortueux, mais indestructible de Idgie et de Ruth, elle fait du courage de certains personnages de véritables icônes.Tout est sensible, prenant, trois femmes refusent de se noyer dans la dépendance violente, raciste et indifférente masculine de leurs temps respectifs et se révoltent à leur manière, en s’aspergeant pour deux d'entre-elles d’eau et de farine, sous le regard impuissant du maître des lieux, dépassé par cette dérive soudaine.L'amorce d’un nouveau temps, la femme devient déterminante, dans un relationnel enfin positionné à un niveau équivalent avec l’autre sexe.
  • DRACULA (1992)
    "Nous sommes devenus des fous au service de Dieu"Dracula est la poursuite d'un amour perdu à travers les siècles par un homme meurtri. Un désespoir continuel, entretenu par la haine envers la croix et les hommes que l'on méprisent, tout en gardant au fond de soi le potentiel d'une luminosité émotive soudainement opérationnelle, suite à la contemplation d'un portrait.Dracula est une œuvre antinomique. Une sensibilité enrobée de fureur. Une destruction pulsionnelle, cohabitant avec le besoin de retrouver quelques parcelles humaines, en se ressourçant malgré sa monstruosité sur des comportements perdus.Un monstre retrouve, tout en gardant une panoplie destructrice, un visage baigné de larmes.Le geste et la parole sont restaurés. Le regard redevient doux et attentionné. La bestialité abandonne pendant quelques instants ses concepts en laissant sa place à un esprit retrouvant miraculeusement l'envie de séduire.La mélancolique partition musicale de Wojciech Kilar accentue encore davantage la perception d'un environnement sombre, mélancolique dominés par le tourment incessant d'un déconnecté de Dieu, complètement dévasté, retrouvant son besoin de détruire, en concurrence avec la restauration subite d'un tempérament émotif.Dracula est un opus de souffrance, un manque indélébile, assouvi par des crises de démences, dans une symphonie gothique reproduisant magnifiquement les conséquences démoniaques d'une déchirure.
  • REMONTONS LES CHAMPS-ÉLYSÉES (1938)
    "Remontons les Champs Elysées" affiche fièrement à ce jour, pratiquement une vie humaine encore opérationnelle, grâce au bienfaisant câble ou à l'inespéré DVD permettant à cet opus de continuer d’exister. Bien sûr, il faut prendre sur soi en prêtant une oreille plus attentive que d'habitude devant ce noir et blanc un peu flou et ce son nasillard baignant dans un flot de paroles quasi continue.Il s'en passe des choses pendant la gestation de la plus belle avenue du monde.Grivoiseries et complots alternent non loin d'un paysage forestier adoptant lentement au fil de l'histoire le visage d'une urbanisation.De plus, le maître ne semble pas sous l'emprise de la modestie, en se révélant être le descendant de Louis XV, ceci devant l'extase d'enfants beaucoup plus passionnés par cette curieuse révélation, plutôt que par la validation d'une telle information.Ce qui compte est d'apprendre, en se mettant en valeur, devant de jeunes écoliers captivés par l'élaboration d'un concept citadin, en compagnie de personnages pittoresques dont les extravagances et les détachements envers un peuple, de plus en plus grondant, sont merveilleusement vendus par un conteur de qualité, légèrement pédant, mais prenant du plaisir à éloigner pendant quelques heures nos jeunes têtes blondes de l'emprise de la multiplication.Un cours historique savoureux, accompagné d'une diction parfaite, pouvant passer de nos jours comme surréaliste.
  • BRIGITTE ET BRIGITTE (1965)
    "J’aurais aimée être moche car je n’ai pas l’impression que c’est moi qu’on aime"Après une telle phrase on peut être rassuré sur le contenu de cette agréable comédie, fleuron d’un cinéma vérité, où métros, bus et billets de banque usagers reprennent vie. Les monuments parisiens sont notés par deux jeunes provinciales en miroir. Les questionnaires cinématographiques s’exécutent sous l’affiche de "Zorba le Grec". Dans une Sorbonne suintante, les cours sont pratiquement inaudibles, on révise comme on peut avec des antisèches dissimulées dans des endroits insolites.La célèbre élection présidentielle de mille neuf cent soixante cinq permet de se remémorer l’identité de tous les candidats, dans un imposant brassage de bulletins s’éparpillant dans les quatre points cardinaux d’un isoloir.Le contenu s’essouffle un peu quand il prend la clé des champs, mais le message reste fort en annonçant par des dictions novatrices abondantes de futures barricades et jets de pavés d’une jeunesse encore positionnée dans la genèse du discours révolutionnaire.Le mouvement hippie s’anticipe par ses bains dans des cuvettes en pleine grange, les bienfaits d’une nourriture bio et un lait de vache coulant en abondance. Brigitte la blonde et Brigitte la brune sont le potentiel démonstratif de nos futures transformations existentielles.Luc Moulet par la fraîcheur d’âme de son travail redonne envies et volontés à des sexagénaires du troisième millénaire de redémarrer une époque d’insouciances, de jeux et de découvertes, en ville comme dans les prés, en élaborant grâce à la spontanéité des dialectiques d’un jeune âge, les procédures d’un changement de comportement.Et puis voir Claude Chabrol succulent de lubricité, ça vaut vraiment le détour.
  • BREEZY (1974)
    Cette sucrerie mièvre et simpliste donnera du baume au cœur à tous les quinquagénaires, riches de préférence, espérant être subitement touchés par la grâce d'une jeune paumée, visiblement intéressée par un long parcours, avec le faciès aux tempes grises d'un homme aigri, aux portes de la vieillesse. Et en plus ça marche. C'est pour quand l'activation en temps réel de cette aguichante utopie ?
  • LES AMANTS DIABOLIQUES (1942)
    Une braise nommée érotisme et sensualité se consume à l’intérieur de volets clos, pendant qu’un mari abject est à la pèche ou à la ville. Un couple formaté par les sens s’adonne au plaisir, afin d’oublier la conquête des êtres et des choses par une misère déchaînée. Dans de telles conditions, il ne reste plus qu’une perversité libérée, consommatrices de baisers volés, de corps caressés dès qu’un vieux mari se retourne ou s’éloigne. Giovanna est sensuelle, voluptueuse, facile à cueillir. Gino se la joue par un esthétisme primaire mais efficace, en offrant dans l’embrasure des portes une sueur collée sur un linge de corps plus qu’éprouvé.Le processus est simple, mais fonctionne à merveille, une adepte du bovarisme, éveillée par des sens toujours en embuscades, se donne dans l’espoir d’un ailleurs sentimental non sollicité par un captif de la route. La chair s’affole sans sommations, encense un principe privé de conscience. Les amants se donnent prioritairement en activant de faibles projets d’évasions, ne menant nulle part.Les corps et les esprits sont sordides, minés par la crasse, les avenirs sont petits, véhiculés vers les métiers de rues, par le camion happé ou le train sans billet. Les parcours royaux sont introuvables par contre les contraintes existentielles pullulent.Luchino Visconti filme le dénudé avec comme toile de fond la merveilleuse luminosité d’une campagne italienne portant un même nom. La nature et l’homme font un bout de chemin ensemble dans l’histoire par l’intermédiaire de la misère qu’un paysage parfois presque lunaire reflète par sa désolation.Le néo-réalisme arrive à grandes enjambées en offrant dans cette œuvre sociale misères, érotismes et passions, consommant goulûment motivations et déterminations à s’en sortir, avec en bout de course une destinée tragique crée uniquement par la dominance d’un remords.
  • LE NARCISSE NOIR (1947)
    Certaines images de cet opus sensuel et procédurier sont d'un esthétisme magnifique. Des couleurs grandioses sur un site isolé, froid et venteux, domicile temporaire de toute une évacuation sensorielle impossible à comprimer, malgré la parole donnée.Être religieuse et investie ne peut empêcher un esprit d'endormir un sensitif virulent.L'isolement et l'attrait de la mission s'évapore vite devant un besoin d'exister, basé sur la dominance, la jalousie, la volupté et la convoitise.Un film étrange et surprenant sur la solitude, mère d'un désir menant vers la folie ou la réminiscence des souvenirs des esprits privés d'indépendances pensives.Le rejet ou l'énorme difficulté de porter un uniforme d'éthique consumant par ses contraintes toutes les passions interdites.
  • LE BATEAU (1981)
    Visages ruisselants de sueurs sur fonds bleus ou rouges avec aiguilles scrutées intensément par un équipage en danger quasi en permanence, semble être les morceaux de bravoure de ce film préférant s’étendre sur le plan rapproché. L’homme est littéralement récupéré par son aventure dont ses sens reproduisent à la perfection la tension dramatique. Les mésaventures constantes de ces mariniers stimulent un esprit d’équipe. Une merveilleuse machinerie soudée et opérationnelle s’exprime loin des bars et des entraîneuses.La caméra comprime par des cadrages restreints une claustrophobie de tous instants. L’usine à gaz de ce bateau des profondeurs n’est pas analysée dans son intégralité. Ce ne sont que de petites surfaces occupées principalement par des regards inquiets.Malgré une approche honnête des deux principaux ingrédients de ce périple, l’espoir et la crainte en alternance, "Le bateau" souffre d’un manque que l’on retrouve souvent dans certains films de Wolfgang Petersen, un rendu psychologique dramatique très correct, conséquence d’un budget certainement serré, forçant des visages trop mis à contribution à s'autodétruire par la terreur, afin de combler un extérieur délaissé, faute de moyens.Heureusement, le bouquet final remet les pendules à l’heure.
  • LA HAUTE SOCIÉTÉ (1956)
    Attention vous ne pourrez plus détacher votre regard de la sublime et parfaite déesse blonde et blanche, ondulant au bord de sa piscine, ou pilotant sans un voile de vent, une décapotable flambant neuve. Ceci aura l’avantage d’atténuer un jugement sévère sur cette guimauve musicale acidulée, permettant d’exhiber de somptueux intérieurs, de jolis bateaux, des robes de princesses et des costumes sur mesure, n’offrant que des clichés provocateurs et nauséabonds sur une classe privilégiée surfant sur papier glacé loin des inquiétudes du lendemain.Cette romance de midinettes bien vieillotte fait figure de musée. La principauté n’est plus bien loin pour une comédienne au pic d’une beauté de la tête aux pieds presque insoutenable.Il n’y a qu’elle, rien qu’elle, dans cette niaiserie insouciante alternant scènes simplistes et opus chantés, ceci par les deux voix les plus emblématiques de l’époque qu’Elvis Presley se chargera de fragiliser quelques mois plus tard.Tout cela est insolent, une richesse désinvolte est montrée en exemple dans un contexte naïf, sans perception de la vraie valeur des choses. Des êtres sublimement beaux, oisifs et bien habillés, excitent sous le prétexte de le faire rêver la convoitise du laborieux dans une panoplie luxueuse, paresseuse, préservée de toutes contraintes."Haute Société" faire figure de catalogue, avec sur chaque page de somptueux éléments décoratifs sans âme, ne faisant évoluer que de l’ameublement sophistiqué et des portes manteaux humains aux bottes des couturiers.
  • L'ASSASSINAT DU PÈRE NOËL (1941)
    L’intrigue est simpliste, absorbée par une neige pesante déversée sur un village isolé, à deux doigts d’un basculement fantastique, faisant presque oublier que nous sommes en guerre et que les sujets cinématographiques liés à l’actualité sont traqués impitoyablement. Il ne reste plus qu’un récit de Noël, avec des enfants à fond dans le concept pour entretenir la flamme d’un septième art muselé. Le polar, sujet passe-partout, sied parfaitement à une configuration où l’étude de caractère confronte l’autochtone avec lui-même.Cette thématique, déconnectée d’un contexte de guerre, se reproduira l’année suivante avec "L’assassin habite au 21". Dans le cas de "L’assassinat du Père Noël", il s’agit d’entretenir un climat presque irréel en maintenant opérationnel, malgré la minceur du scénario, le jeu d’acteurs prestigieux tels que Harry Baur ou Robert le Vigan, par des colères pleurnichardes et un visage halluciné.Malgré l’isolement du site, les enfants sont respectés, comblés de cadeaux, en cette époque de disette. La suspicion ne s’adresse qu’à un notable au propos incohérents presque féeriques sur lequel les villageois s’acharnent.Le concept montre le manque de cohésion totale d’une communauté frappés par les grands froids, qu’ils soient naturels ou militaires, incapable de surmonter ses différends.La méfiance, la surveillance et la dénonciation quittent les grandes agglomérations pour s’ébattre en haute montagne. Difficile de bypasser des comportements liés à des années de logique de guerre et d’occupation."L’assassinat du Père Noël" est un sympathique conte de fées, bouleversant dans ses dernières images, où un merveilleux enfant-roi, revêtu d’une nouvelle vitalité, se blottit contre un Père Noël à la parole encourageante.
  • LE GRAND SAUT (1993)
    "Le grand saut" est une caricature dramatique et loufoque, dénonçant dans un second degré aussi lucide que décalé, le fonctionnement particulier de certaines entreprises américaines mécanisées des années cinquante. Une consultation effectuée du sol au plafond, par un gros lourdaud provincial effacé, puis égocentrique parachuté sur une grosse pomme en excès de vitesse, brodée dans les affaires et les comportements les plus fous.Contemplée de haut par des dirigeants arrivistes, indifférents, costumés de gris, élevés à l'expansion du dollar dans des bureaux gigantesques, tutoyant un ciel insensible.Loin de toute une masse interne privée de toute créativité, exécutant en sous sol des taches inutiles incorporées à la thématique de leur enseigne.Le challenge de ces dirigeants, aussi fantasques que cloisonnés, parait inéducable.Progresser, devenir le meilleur sur le marché, pour enfin péricliter en pleine gloire par un grand saut vers un néant libérateur.De l'idiot manipulé, fil rouge entre l'exécutant sans âme et le patron suicidaire, toute une cohorte n'ayant plus la notion de soi, s'autodétruit dans un concept managé par le conditionnement menant vers l'exagération, toute une cité privée de libre arbitre.Un opus éloquent sur la manière de switcher par arrivisme ou médiocrité sa conscience dans un monde absurde, ôtant toute perception d'un véritable message à conquérir, puis à délivrer.
  • LE TRÉSOR DE LA SIERRA MADRE (1948)
    La résurrection de l'enfant reste l'unique morceau de sensibilité de cette aventure hirsute et poussiéreuse, exécutée par des personnages violents et incontrôlables d’abord solidaires, puis s'épiant les uns les autres sur un sol torturé, au même titre que leurs visages déformés par la faim et l'avidité. Ces collines mexicaines dénudées sont le dernier jardin de quelques miséreux en bout de courses, grisés par une prospection de l'or bien incertaine, dont les efforts considérables développés en commun contre une nature imprévisible et des congénères sans foi ni loi ne sont qu'un pale rayon de soleil, au milieu d'une méfiance ininterrompue.Les raisonnements logiques s'éteignent lentement, en laissant leurs places à la paranoïa.Un rôle magnifique pour Humphrey Bogart dans un premier temps misérable, combatif et encore propre, sombrant sans espoir, suite à un mauvais choix dans le doute, le délabrement cérébral, la crasse et la folie.
  • IMAGINE : JOHN LENNON (1988)
    John Lennon est un personnage fascinant, luttant internement de manière farouche tout le long de sa vie, afin de transformer un contenu interne hyper violent en lui associant un concept pacifiste, la paix, nécessaire dans un premier temps à être porteur de son image tout en utilisant les masses, qui ensuite comme une thérapie renvoie en sa direction cette force apaisante comme un miroir. La période Beatles est antinomique, elle permet certes d’accéder au succès avec tous les privilèges qui sont bien souvent synonymes de débordements tolérés par cette définition, mais impose en parallèle un véritable chemin de croix.Le visage dépressif et halluciné de John Lennon chantant (Help) "Au secours" pendant un concert new-yorkais, où l’on entend à peine leur musique, noyée sous l’hystérie de cris effrayants, est le parfait exemple d’une époque où le groupe est robotisé, cette foule nécessaire aux premières années adore ou lapide les disques de ces personnages qui eux-mêmes par les contraintes du système ont attisés par certaines déclarations l’amour ou la fureur d’une foule dans les deux cas incontrôlable et versatile.Les bons mots de Ringo, agrémentés de l’humour féroce et incompris de John déchaînent les médias. Cette supériorité verbale, certes maladroite des Beatles, par rapport à Jésus Christ, dévoile une société coincée qui ne sait pas déceler dans ces propos un humour de réflexion.Le cheminent gentillet des premières mélodies du groupe dissimule un phénomène dangereux, un potentiel de bombe à retardement, qui une fois amorcée, apporte les dérives inévitables d’un groupe cloisonné dans une production débile où il ne faut qu’avoir l’air gentil avec l’uniformité d’un même costume.La période "Sergent Peppers" est une deuxième naissance, le cheveux et les barbes poussent, le groupe livre par certains titres leurs dépendances avec la drogue qui leur permet de claquer la porte sur toute une période de contraintes. Le groupe se libère par un texte enfin adulte et responsable.Malgré cela, la lente autodestruction est en marche avec un ingrédient déterminant Yoko Ono, véritable parasite programmé pour tout faire sauter.Le gâchis de l’album "Let it be" associé à l’idée pourtant novatrice et géniale d'un concert sur un toit, est significatif. La musique surgit de nulle part, stoppe les passants cherchant d’où peut bien venir ces sons qui n’ont plus de consistances matérielles.La fin est brutale "le week-End perdu" qui dura 18 mois où John ne fut que festif, lui permet de retrouver, avant l'épreuve suprême, une jeunesse corrosive, capricieuse et insouciante.Le karma final, que John avait prédit dans une interview, ressemble à une exécution. Ce personnage Mark David Chapman, déterminé à tuer, n’est-il pas simplement l’autre visage de John, celui qui considère que le côté du personnage en rédemption depuis tant d’années, à perdu la partie.La scène de l'intrusion du fan dans la propriété de John est prémonitoire, elle cache, par la passivité du personnage, la curiosité d'une approche douce et mystique de l'idole. L'assaut final du second fan meurtrier est un visage qui applique une sanction. La boucle est faite.John eut pourtant des comportements encourageants, par la volonté de combler d’attention Sean, son deuxième fils par rapport à Julian, premier né terrorisé par les colères et l’indifférence de ce père célèbre.Le parcours de John n'est qu'un déchirement continuel entre la grâce et la rigueur où le juste milieu ne fut qu'un eldorado inconnu.
  • STATION TERMINUS (1952)
    "Station Terminus" est un film glauque, instable et larmoyant sur une époque lourde et procédurière dont les impossibilités d'exister ne font qu'entretenir l'indifférence, la réglementation outrancière, la convoitise et une perversité malsaine glanée à la dérobée. Un couple adultérin se déchire sur un site kaléidoscopique bourrée à bloc, réceptacle de toutes les couches de la société qu'elles soient civiles militaires ou ecclésiastiques.Un troupeau sans âme sous la directive d'un ordonnancement sans lumière.Un film daté, triste et austère, sur un amour impossible avec comme toile de fond le naufrage d'un pays étouffé par ses interdits.
  • LE BALLON ROUGE (1956)
    Elles sont bien obsolètes ces images d'un enfant inhalant en totale liberté les substances humaines et matérielles d'un Paris sombre et bruyant. Un parcours surprenant de nos jours, effectué par un gamin solitaire, rêveur, sans protection, lâché dans un urbanisme vieillot mais curieusement sans danger, en compagnie d'un petit copain de rencontre aérien, fidèle et farceur.Dans des rues populaires, supportant terrains vagues et immeubles écorchés, arpentées en tout sens par toute une bande d'oisillons encore propriétaire du bitume et de ses passages secrets.Des états d'âmes enfantins cruels et batailleurs, extériorisant par le jeu le besoin impératif de s'évacuer pendant quelques temps d'un monde adulte toujours plus près de la sanction que de la tolérance.Des contraintes écolières et parentales, oubliées dans des jalousies et attaques soudaines, offrant à un petit garçon sensible le visage multiple d'une amitié originale, l'emportant vers une finalité jamais dévoilée.Une destination inconnue et poétique, que seule une âme décalée peut connaitre et comprendre.
  • UNE NUIT SUR TERRE (1991)
    Cinq histoires démarrent simultanément de nuit, en cinq endroits de la planète, d’Ouest en Est, de Los Angeles à Helsinki, en passant par New York, Paris et Rome. L’outil thématique de ces cinq sites, aux antipodes d’une luminosité touristique, est identique. Un taxi au bord de l’effondrement transporte dans des lieux insolites une clientèle pour la plupart marginalisée.Ces cinq parcours délivrent un message similaire. Une brève rencontre, entre marginaux, tisse quelques moments drôles et chaleureux. Tous ces personnages surgis de nulle part, livrent le temps d’une course, quelques parcelles de confessions atypiques, avec comme toile de fond des rues tristes et enneigées.De nuit, visuellement, la planète est à l’unisson, ceci dans quatre langages différents. La course vers le soleil levant ne délivre qu’une uniformité.Etre pauvre à New York où à Helsinki n’engendre que les mêmes états d’âmes.La chaleur humaine est à l’intérieur des voitures, le rire est loin d’être rare, c’est un miracle tant l’aspect extérieur est à l’abandon. Une communication, calquée à l’image de gens simples, s’illumine grâce à la force de mots orduriers, rapprochant bizarrement ces êtres pauvres, mais sans contraintes.On rentre dans son quartier insalubre où l’on se fait déposer le long d’un canal. Tout est surprenant, inattendu. Les premiers contacts peu engageants se clôturent par un encouragement à entretenir sa marginalité.Peu importe; l’essentiel est de vivre à l’instar d’un système quelques contacts, de créer un fil conducteur conversationnel de base entre protagonistes de ces brefs moments passés en commun.Chacun impose ses limites intellectuelles, apprend à se connaître en se quittant bons amis, sauf dans certains cas où malgré une conclusion dramatique l’humour l’emporte sur le tragique."Une nuit sur terre" est un ingénieux film concept sur cinq horloges terrestres n’activant qu’un seul message. La liberté d’être différent.Une survie déconnectée d’un contexte diurne politiquement correct, interdisant tout décalage.
  • L'OBSEDE (1965)
    "L'obsédé" est une rencontre bouleversante entre un solitaire mélancolique et une petite bourgeoise insouciante et protégée. Deux mondes ne pouvant se côtoyer que par l'action préméditée d'un revanchard, en manque d'affection et de puissance. Brimé au bureau dont la solitude ne sert qu'a entretenir une perversité latente et reconduite.Impossible d'échapper à un prédateur alternant pouvoirs et déprimes, s'acharnant sur une proie terrorisée, puis hypocrite et manipulatrice, masquant son indifférence dans de fausses apparences, ne formatant qu'un seul objectif.Echapper à un écorché vif dominant et fragile n'étant pas de son monde.Une lutte des classes impitoyable, entre un employé médiocre et moqué et une jeune étudiante pédante et friquée, brusquement projetée dans un monde où la souffrance devient un concept partagé.Une rivalité implacable, parsemée de quelques accalmies entre deux personnages extrêmes, dont les différentes positions sociales leurs permettent de cohabiter dans la fureur et le compromis.
  • NOUS NE VIEILLIRONS PAS ENSEMBLE (1972)
    " Un amour violent veut seulement punir et pardonner ensuite. Le plus haut degré de l'amour ne connaît que oui et non, point d'intermédiaire, point de purgatoire, rien que le ciel et l'enfer. " Jean-Paul Richter ; Les pensées et réflexions. Fuites et retrouvailles sont omniprésentes dans un climat ou l’on espère toujours se faire pardonner par le repentir et le bon mot. L’existence ne devient plus qu’une scène ou l’on se lâche sans retenue en devenant l’otage de ses tensions et sérénités. Une maitrise de soi temporaire n’empêchant nullement l'entretien d'un noyau relationnel récurrent , constitué de nombreux dérapages ne faisant que démanteler lentement une relation amoureuse sur le grill , pensant à tort pouvoir durer dans le temps par ses continuelles séparations et retrouvailles. Tout ne devient plus qu’une atmosphère incertaine alternant entre tendresse et altercation ne faisant que monter inexorablement en puissance. L’entretien journalier d’une fin annoncée où l’on ne peut maitriser que momentanément les sévices d'une nature violente et imprévisible. Préférant s’autodétruire en entretenant jusqu'à son trépas les décibels d’une passion dévorante. Une susceptibilité Incapable de s'extraire d'une agressivité spontanée et de la souffrance qu'elle occasionne.
  • LA POURSUITE IMPITOYABLE (1966)
    Des images ahurissantes et courageuses, montrant une contrée sur le flanc, complètement rongée par des idéologies aussi disparates que démesurées. Chaque ressource, toutes disciplines confondues, se vautrant dans ses vérités individuelles et leurs excès.Le tout ne faisant que révéler un état des lieux aussi pitoyable que prétentieux.La spirale négative d'une bande de petits bourgeois affairistes et décadents, entretenus par le racisme, la croyance disproportionnée, le sexe et la beuverie dans une écoeurante kermesse locale, au bout de nulle part, entrainant une bande de dégénérés vers le fond du trou.Le cliché saisissant d'une Amérique des années soixante, possédant une multitude de perceptions différentes, dont l'essence n'est que perversités et violences.Un chef d'œuvre.
  • LE SILENCE DES AGNEAUX (1991)
    Cet opus sombre et mélancolique dépeint parfaitement, dans un contexte sensible et épuré, les premières approches douloureuses d'un métier, par Clarice Starling jeune stagiaire déterminée, fragile, souvent au bord des larmes, projetée dans un monde insoutenable, dominé par le prédateur insensible et le martyre horriblement mutilé. Il s'agit de conserver sa motivation dans des investigations pénibles et réalistes, squatée par des images sensitives d'adolescentes et une absence insoutenable, tout en étant généreuse en confidences souhaitées et collectées par un tueur psychopathe, d'abord odieux, puis protecteur et paternel.Un premier contact acerbe et destructeur, puis tendre et abouti, entre une écorchée vive et un monstre adouci par la perception d'un être véritable et sensible, le temps de quelques révélations.Un film émouvant sur quelques moments intimes entre deux esprits temporairement éloignés de leurs thématiques par la puissance d'un verbe en commun.
  • SHINING (1980)
    "All work and no play makes Jack a dull boy""The shining" est un crescendo terrifiant éloigné de tout. La dérive lente vers la folie d'un esprit influençable, incapable de résister bien longtemps à l'attirance d'un édifice maléfique.Vaincu par l'isolement et le désœuvrement un bon mari et un bon père, sous l'emprise d'images effrayantes, se laisse lentement absorbé par le pouvoir démoniaque d'un complexe pharaonique et silencieux.Une destruction interne acceptée et assumée sur un site angoissant temporairement coupé du monde.Un chef d'oeuvre.
  • LE TEMPS D'AIMER ET LE TEMPS DE MOURIR (1958)
    "Ici le printemps vient plus tard, pour le découvrir, il faut patauger dans la boue". Peu importe la nationalité de l’individu portant l’uniforme, ses souffrances sont les mêmes. Que ce soit dans la steppe, sous les ruines ou accablé par la propagande, le soldat, qu’il soit vert de gris ou autre, subit toujours les horreurs d’un conflit en répandant en fonction des contextes sa sensibilité ou ses angoisses.Incluant séquentiellement selon les sites, les horreurs de la guerre et le repos temporaire d’un guerrier récupéré par les sens, le temps d’une permission, ce magnifique opus romanesque délivre une panoplie dialectique assez complète sur toutes les perceptions nécessaires à deux climats particuliers. La guerre et les sentiments.Douglas Sirk est un grand monsieur. Aidé considérablement par le support papier du roman de Erich Maria Remarque, cette œuvre somptueuse est une fresque émotionnelle mélodramatique exceptionnelle, extirpant de nos profondeurs des sensations de plus en plus recluses, suite à nos climats couillus mettant aux placards nos potentiels de midinettes.Jouons le jeu devant cette vitrine luxueuse, un peu naïve, mais tellement efficace, dont la finalité impitoyable s’élabore tout le long d’un parcours fait de glaces, de plaisanteries de sapeurs, d’alertes et de passions éphémères, grisant un soldat en alternance.Un très grand film sur une boulimie passionnelle, accumulée par un sursitaire que le destin laisse souffler quelques instants, en lui offrant avant de l’emporter, un morceau de bravoure, suite à une condition enfin perçue.
  • LE PRIX DU DANGER (1982)
    Une farce caricaturale désopilante, complètement ratée sur le danger bien réel de voir basculer un jour encore lointain nos sympathiques et indolores jeux actuels vers les extrêmes, suite à un audimat porté disparu. Ici tout est risible, surfait et plat. Une vraisemblance bien pâle, malgré quelques étincelles révélatrices de ces comportements embusqués ou en pleine lumière, calculateurs, procéduriers ou transcendés, appartenant à ces métiers basés sur le racolage visuel, destiné à un troupeau aussi versatile que conditionné.Un film décevant, mais révélateur d'une dérive assassine encore endormie.
  • L'AUBERGE ROUGE (1951)
    Extrêmement caustique "L'auberge rouge" réunit le temps d'une soirée et d'une nuit, sur un site enfoui sous la neige, un microcosme représentatif d'une société dominée par le bourgeois pédant, le curé tapeur, pique assiette et l'aubergiste assassin. Ce panier de crabes dominé par la rapine, le mépris et le profit, tente d'établir une communication en se servant habilement de leurs limites comme fil rouge.Chaque composant asservi par la table, la collecte de la pièce ou la convoitise de la rivière de diamants, n'en devient que plus méprisable dans des potentiels d'acquisition toujours reportés.Les joutes verbales, malgré leurs agréables mélopées, ne sont que le paravent d'une société en décomposition, malgré la coupe et la propreté de certains habits.Un paraître prétentieux ou faussement humble, partenaire de l'opportunité d'engranger, de philosopher, de rabaisser ou de pulvériser le pâté en croute, en rajoutant le mépris et la moquerie envers celui qui sert ou celui qui prêche.Tout un échantillon bourgeois répugnant se démarque du laborieux, en adoptant dans des ronflements presque animaliers, la configuration de ceux qu'ils méprisent.Drôle, malgré un message humaniste alarmant, "L'auberge rouge" est le calice d'un laboratoire pompeux, primaire, religieusement sophiste dans une manière de pensée hypocrite, sélective et méprisante.
  • PORTE DES LILAS (1957)
    Un sujet laborieux, tissé dans un contexte populaire, reproduit à la perfection, montrant des années cinquante sordides, dominées par les poches vides, la combine et la demeure au bord de l'effondrement. Un petit coin de Paris populaire, démuni, rempli d'enfants des rues, imaginatifs et turbulents, environnés de cloches et de chiftirs vivant au jour le jour, en se grisant de musiques et de mauvais vin.L'échec d'un sujet sans intérêt, évoluant dans une portion d'histoire remarquablement reconstituée.A voir pour la toile de fond clochardisée d'un microcosme exsangue, aux murs et aux esprits délabrés ou décalés, encore décisionnaires de l'écoulement de leurs journées.Une nouvelle fois, le fond l'emporte sur la forme.
  • L'ILE MYSTERIEUSE (1960)
    Un film d'aventures de bonne facture, ressuscitant dans des effets spéciaux aussi amusants que performants pour l'époque, les jeudis après-midis d'antan de beaucoup d'adolescents, visitant aujourd'hui avec un peu d'appréhension le territoire de la soixantaine. La merveilleuse visite d'une île perdue, au look King Kong en compagnie de quelques parachutés, luttant contre des monstres improbables.De sympathiques moments offerts à une jeunesse non exigeante, satisfaite de se connecter sur un travail honnête et captivant.
  • LES BRICOLEURS (1962)
    Les bricoleurs fait partie d'une multitude de faux navets tournés pendant nos prospères années soixante dont les scénarios tenant largement sur des timbres postes permettaient à une famille de comédiens aussi farfelus que conviviaux de se retrouver régulièrement sur des tournages. Peu importe l'absence de virilité du produit, il fallait bosser et accepter souvent n'importe quoi.Ceci permettait paradoxalement à de nombreux fantaisistes de l'époque de passer du bon temps ensemble en se régénérant mutuellement dans des prestations lunaires tentant le cœur gros comme ça de sauver un ensemble du naufrage.Les bricoleurs n'échappe donc pas à la règle d'un système dont le seul but était de divertir un public facile avec du n'importe quoi.Et puis après tout à quoi bon tirer sur une ambulance qui n'en est peut-être pas une.Il y a de belles dames dans ce fourre-tout sans queue ni tête pour la plupart injustement oubliées.Qui se souvient de France Anglade, de Valérie Lagrange, de Claudine Coster et de Elke Sommer?De magnifiques poupées ayant en leurs temps fourni de la matière à mes fantasmes d'adolescent.Alors vive les bricoleurs et leurs états seconds que nos lucidités trop fortes ont condamnés au pilon.
  • LE RETOUR DE MARTIN GUERRE (1981)
    "Le retour de Martin Guerre" annonce l’éveil d'une nouvelle raison, la reconsidération de la condition humaine froide, rigoureuse à l’image de cette terre ingrate qu’il faut sans cesse triturer pour manger. Bertrande prend vie par la révolte, elle défie l’autorité en quittant subitement l’outil de travail. Le village décontenancé affiche ses faiblesses, devant la détermination de ce couple unit par lui-même.Une femme opte pour la valeur d'un individu au détriment de son identité.Martin n’est plus Martin, c’est un homme un vrai.
  • LE SOLEIL DES VOYOUS (1967)
    Amusant de voir Eliot Ness venir tâter de la fourgonnette et du bar à putes dans un polar à la française, dominé par un Jean Gabin au tour de taille jupitérien. Le concept de la star américaine en perte de vitesse dans son fief, venant astiquer son blason sur d’autres terres, n’est pas toujours du meilleur gout.Laurel et Hardy dans les années cinquante avec le désastreux Atoll K avait déjà essuyés les plâtres de ce concept à risques.Dans une première analyse, c’est comme si Robert Stack en perte de vitesse, quittait un grand club de football espagnol, pour venir finir sa carrière dans l’hexagone.Ce traitement basique, contant la reconstitution dans la tourmente d’un duo fraternel de baroudeurs chaleureux, possède son unique valeur de prestige dans la récupération d’une grosse pointure."Les incorruptibles", célébrissime série américaine télévisée dans les années soixante, permet au "Soleil des voyous" d’en récupérer la pièce maîtresse le temps d’un film.Cette époustouflante transaction pour l'époque enrobe ce produit standard de toute sa lumière.Quand au traitement sans être flamboyant, il se regarde comme un produit du genre, avec ses malfrats calibrés à la française, auxquels Robert Stack essaie de s'adapter le mieux qu'il peut avec un timbre de voix sonore, semblant plus phonétique que réellement verbal.Suzanne Flon épouse effacée est merveilleuse de simplicité, en faisant comme d’habitude semblant de ne rien comprendre.
  • L'AVENTURE C'EST L'AVENTURE (1971)
    "Profitez de la vie, il est plus tard que vous ne le pensez" Amusant de voir cette association hilarante et décalée se balader dans la vie en s'abreuvant de toutes les opportunités possibles. Un délirant pied de nez, adressé à une époque agonisant lentement dans ses absences de libertés, adressé par une brochette d'extravertis, déconnectés des horaires fixes, se divertissant du quotidien, en se servant habilement d'une manière atypique de toutes les idéologies, non forcément comprises dans leurs profondeurs.Un trajet savoureux, sans attaches ni contraintes, sous un soleil vaillant, loin du bureau et de l'usine.
  • JOURNAL D'UN CURE DE CAMPAGNE (1950)
    Seule une même hérédité rapproche un jeune curé de ses nouveaux paroissiens ruraux consommés par l'alcool et la solitude dont certains à peine éclos rêvent de diaboliser la terre par leurs soifs de tout connaître. Se nourrissant mal en buvant du mauvais vin le nouveau curé d'Ambricourt rongé par un mal incurable se débat dans un torchis campagnard mêlant méfiance et suspicion.Le fils pleuré génère cloisonnement et renoncement de la foi pendant que certains troubles de l'adolescence se partage entre la servitude de Marie Madeleine et le vice dévorant de Salomé.Un esprit assailli par ses états d'âmes, élabore dans le mépris et l'austérité un agenda de doutes, d'adultères, de mépris et de haines analysés par une hiérarchie approuvant le manque d'amour que doit subir un homme d'église de la part de paroissiens acceptant difficilement l'aspect monocorde de la parole de Dieu.Sur la fin le Christ est moqué et molesté, itinéraire identique que semble prendre un lointain descendant sur un site abandonné.Ce nouvel envoyé de Dieu instable et trop tendre valorise trop fortement la pureté de son ministère, omettant de comptabiliser les nouvelles exigences d'une génération montante lassée de subir continuellement un enfermement religieux.Les lacunes d'un homme d'église uniquement guidé par la conquête de la grâce au détriment des besoins d'une jeunesse avide de vivre intensément le bien comme le mal dans un monde palpable.
  • LE GENOU DE CLAIRE (1970)
    L'air est bon, les paysages somptueux valorisent les modules d'un texte vivifiant déroulant ses décibels apaisants dans une nature lumineuse offerte à la contemplation. Les corps sont moraux et tremblent uniquement par le propos.Claire apparition de rêve presque divine abrite étonnamment un intérieur sans passion, léger et volatile, satisfait d'un air du temps protecteur et juvénile égrenant sans surprises ses procédures d'été sur un site propre.Le pôle magnétique du désir, une oeuvre d'art offrant dans un moment d'absence le centre du monde que l'on tient apaisé et assouvi dans le creux de sa main dans une longue caresse sans lendemain offerte sous une agréable pluie de fin d'après-midi .La capture d'un geste simple contenant une victoire tapissée de tous ses manques.
  • LE CORBEAU (1943)
    Y a-t-il une frontière entre le bien et le mal ? Dans une ampoule lancée manuellement, se balançant de gauche à droite, où est l’ombre, où est la lumière ? Si une main tente de stopper ce mouvement, semblant éternel, une douleur instantanée libère la main de l’ampoule en redonnant vigueur à ce Ying Yang sombre et lumineux.Un climat particulier déclenche haines et dénonciations collectives, semant désordres et vengeances, dans un contexte préalablement trop passif. Soudainement activé par un mécanisme invisible, un microcosme épargné implose de l’intérieur, en déroulant inexorablement une implacable théorie des dominos.Considéré comme anti-français, avec un résidu boulevardier, "Le corbeau" est avant tout un laboratoire expérimental contenant dans son noyau une machine nauséabonde, suspicieuse et délatrice, prête à l’emploi.Le polar sert une fois de plus de cache-misère à un cinéma ayant momentanément perdu, dans un contexte particulier, une liberté d’expression. "Le corbeau", tout en paraissant déconnecté d’un climat historique, imposant œillères et silences, saupoudre quelques messages.L’œuvre est initiatrice, un maître de jeu démontre, par quelques missives bien pendues, la fragilité psychologique de ses concitoyens.Le cinéma françai, en ces années d’occupation, effectue par des scénarii répétitifs, une lessive interne montrant des habitants désemparés, désunis, broyés par un logiciel démoniaque lancé sur un marché déserté rapidement par la résistance et la bravoure."Le corbeau" n’échappe pas à la règle, une bourgade s’autodétruit en refusant la cohésion contre une pestilence initiatique. "Le corbeau" est l'ampoule délivrant la lumière ténébreuse d'âmes inconsistantes.Tous ces esprits, brusquement perturbés, se déchirent au lieu de lutter solidairement contre un appareil destructeur. Il n’en faut pas plus pour établir un état des lieux lâche et dénué d'un esprit de groupe.Le peuple France juge négativement certains de ses comportements en images, ceci par l'intermédiaire de ses propres enfants, voila de la manne pour un occupant n’ayant pas d’appréciation à opérer sur les comportements en interne d’un pays conquis."Le corbeau" possède un esprit auto immolateur, offert à un maître éphémère. Un point de l’hexagone livre un huis clos sordide, une citoyenneté lâche, divisée au premier soubresaut.Le professeur Vorzet explique admirablement l’impossibilité de fractionner ombres et lumières dans une figure décente, préférant favoriser le symbole éternel de l’incertitude, celui-ci devenant une procédure existentielle. Le docteur Rémi Germain entamé se met à douter."Le corbeau" délivre sur une dernière bombe écrite, inachevée, une alchimie associant le mot sentence dans un transfert épiloguant une remise à niveau en commun.Une double main achève l’épidémie. Celle d'un vengeur et d'un repu."La punition est levée"Le cours est terminé.
  • LE DERNIER MÉTRO (1980)
    Privé de mouvement suite à ses origines, Lucas Steiner végète dans un sous-sol de théâtre. Au dessus de lui des corps et des voix s’agitent et répètent. Des passions virtuelles, couchées sur papier, émeuvent peu à peu ces comédiens, tyrannisés par des incessantes coupures de lumière.Marion Steiner s’agite entre sous-sol et surface. Epouse modèle, elle se sent récupérée néanmoins par la fougue lumineuse de Bernard Granger, coureur de jupons et redresseur de tort.En ses années de guerre le pouvoir est détenu par la chaleur et la lumière. La chaleur se découvre dans les salles obscures où les Parisiens se réfugient quelques heures avant de retrouver un logis glacial.La lumière est imprévisible, elle s’arrête soudainement en pleine répétition, occasionne des angoisses à cette troupe de théâtre devant conserver son sang-froid devant la double adversité de l’ombre soudaine et de la plume terrible et hypocrite du critique d’art Daxiat, collabo et antisémite envers la masse, mais sympathisant au cas par cas.Les efforts de Raymond le régisseur, homme à tout faire, et de Germaine Fabre, rétablissent un relationnel familial basé sur la sincérité des responsabilités.Lucas, en chef d’orchestre cloîtré, bénéficie de sens plus développé, il perçoit la sensibilité et les limites des comédiens, jouant au dessus de lui, il corrige, prend des notes que Marion de plus en plus attirée par Bernard, néglige de consulter. Bon prince il encourage leur union."Le dernier métro" pouvoir alternatif de l’ombre et de la lumière, rapproche une sensibilité mutuelle établie dans un premier temps par un texte de théâtre, qui lentement déstabilise les fonctions premières de deux comédiens, dont l’une se doit de respecter ses engagements de base.La présence indisposante de l’occupant est à gérer dans un contexte sympathisant où ces gens aux métiers artistiques ont la chance inouïe d’être sur les planches et non sur le front des combats.La liberté de s’exprimer par le théâtre est une manière de survivre dans un Paris momentanément privé d’indépendance.Certaines arrogances cachent une force, la passion de vivre intensément de peur que tout s’arrête subitement. C’est le message principal de ce film, une lumière vacillante qui ne doit s'éteindre sous aucun prétexte.
  • SAMSON ET DALILA (1949)
    Equilibré entre ses scènes guerrières et intimistes, "Samson et Dalida" péplum hautement chatoyant, étale ses différences entre conflits et sensualités dans d'agréables parfums contradictoires, laissant chaque concept dynamique ou sentimental s'exprimer dans ses plus belles parures. En salon ou sur le pré, l'opus abonde de générosité contemplative, distribuant intelligemment en fonction de sa virulence ou de son accalmie, corps à corps conséquents, colonnes gigantesques, cuirasses rutilantes et étoffes somptueuses, donnant par leurs prestances de belles luminosités au conflit ou au banquet.Il s'agit d'en mettre plein la vue et ça marche malgré quelques pauses larmoyantes presque astronomiques, permettant à une action trop absente de se faire désirer.Un cinéma obsolète, spectaculaire, massif et opulent, se noyant dans l'ivresse de décors tutoyant la démesure d'"Intolérance".
  • LES GRANDES FAMILLES (1958)
    Difficile de passer la main quand on détient tout et que l'on ne veut pas le perdre, pas même le partager avec une descendance pressée de grandir en imposant sa manière de faire, bouleversant le long fleuve tranquille d'un existant ronronnant dans sa récurrence. Seul dans sa tour d'ivoire, bien au delà d'un second souffle, un patriarche refusant de passer la main dirige sans montrer la moindre défaillance un empire financier presque Byzantin.Les décorations, les titres et les privilèges pullulent sur des esprits bien souvent revanchards et opportunistes dont le carriérisme se camoufle dans le bon mot servant à l'entretenir.Certains aveux sont sincères mais enrobées d'intelligence, dans un contexte où il faut savoir mener sa propre barque en sachant remercier.Seul un petit fils encore inoffensif semble avoir de l'intérêt pour un ténor de la finance encore vaillant, sans illusion sur un environnement familial hypocrite, austère, calculateur ou libertin, qu'il ne désire pourtant pas quitter en le manageant par une réplique appropriée.Un donneur de leçon désirant canaliser avec trop de virulence le punch d'une génération montante un peu trop dynamique à son gout ne fait que détruire la survie de sa propre continuité.Il ne lui reste plus que finir seul accablé de remords à condition que ceux-ci puissent s'exprimer sans orgueil ni fierté.
  • LE JOURNAL D'UNE FEMME DE CHAMBRE (1963)
    Le site est rude, froid, éloigné de tout. Un tel isolement entretient la querelle de voisins, la haine du Juif et du Bolchevik. Le papillon est tiré au fusil, la parole est brève, chaque composant de l’échelle hiérarchique en impose ou se soumet. Les propositions indécentes fusent dès la troisième phrase, dans un dialogue rudimentaire, se consumant rapidement faute d’intellect. L’aristocrate compte ses balles, pendant que le domestique s’entretient de théories simplistes et sommaires.Le maître de maison, refoulé sexuel, traque la femme de chambre, le vieux pervers se fait faire la lecture en brûlant ses dernières cartouches dans le fantasme de la bottine. La maîtresse de maison enrobée d’une frigidité approuvée par un curé tapeur, arrose au centime près un mari frustré, halluciné par le manque, culbutant n’importe quoi dans la grange, afin d’entretenir une libido devenue presque porcine.Célestine / Marie issue d’un Paris perçu dans un tel vide rural comme débauché, se joue de ces intérêts amoureux, mêlés de dominations, en offrant une fausse soumission calculée, excitant encore davantage les besoins sommaires de nationalistes embusqués ou de vieux cochons cloîtrés.Finalement c’est la femme de chambre qui mène le jeu, en offrant espérances éternelles ou étreintes consentantes à des prétendants bavant de possessions charnelles ou de minables projets."Le journal d’une femme de chambre" délocalise la perversité en gîte rural. Une campagne triste, livrée à elle-même, dominée par le désir bestial et la dérive politicienne, convoite individuellement une soubrette distribuant habilement ses attraits à des rustres compartimentés en fonction de ses désirs.Célestine / Marie allume, choisit l’heureux élu, puis se couche sans rien ressentir.L’horizon du trottoir cherbourgeois presque perceptible, ne semble même pas émouvoir cet esprit tant l’impact de la débauche est latent en prenant l’habit d’un besoin étrangement en harmonie avec cette contrée démunie de lumière intellectuelle.Tout en étant du Mirbeau, c’est presque du Zola devenu bunuelien.
  • URGA (1991)
    Espace à perte de vue et corps en mouvements, voici ce qu’offre "Urga" sur un fond de réflexion créé par une civilisation imposant lentement une transformation économique et sociale à ces familles éloignées de tout. Des images et des termes nouveaux envahissent ces immenses plaines.Par l’intermédiaire de Sylvester Stallone, le grand Sam fait de l’œil à cet oncle saoul du matin au soir, ne dormant jamais. Le terme de frère est récupérateur et annonce le danger de l’anéantissement d’un esprit intuitif, basé sur les règles de la nature.L’ivresse de ce territoire sans limites est une des dernières transcendances galopantes permises à ces hommes aux mœurs ancestrales, immolant des moutons dans la douceur et le respect.Tout ici est singulier, un accordéon entame soudainement un paso-doble anachronique, Gombo traque par jeu sa femme au lasso, le regard semble sévère, mais l’homme est aussi bon que sa parole est rare.Ce sont les derniers instants vécus par des esprits et corps libres, qui bientôt devront se plier à des phénomènes de masses, nommés préservatifs et télévisions.Le monde change, le contrôle des naissances est rigoureux, Gombo est hors-la-loi avec ses trois enfants conçus dans l’absence et le respect des lois.La température de la ville est loin d’être stimulante. Véhiculé par un agréable compagnon, il découvre les boites de nuits, les beuveries, les manèges tournoyants, les boîtes à conserves et la localisation curieuse d’une partition musicale.Chez lui, c’est la pureté d’un espace aux lumières naturelles changeantes, ici c’est la crasse d’un troupeau mécanisé et endoctriné."Urga" est le vertige d’un horizon incapturable, l’offrande céleste de l’ombre et de la lumière offerte à des hommes à la vue perçante, atout majeur pour être comparable au maître des lieux, l’aigle royal.
  • LE SECRET DE LA PYRAMIDE (1985)
    "C'est l'aventure de votre vie, Watson. "Oui et aussi un peu la nôtre, par l'intermédiaire de ces deux jeunes personnages atypiques et complémentaires réunis spontanément par leurs attraits du mystère, dans l'investigation, l'analyse et le raisonnement.Une association fougueuse et captivante, unissant le temps d'une enquête, deux esprits neufs, passionnés de rébus sur le fil du rasoir, entre Harry Potter et Indiana Jones, dont les élucubrations mouvementées formatent le début d'une association saine et constructive.L'intelligence et l'encadrement au service du bien, dans une belle histoire ardente et sensitive dont chaque instant est habilement travaillé, ceci permettant à nos sens de ne jamais fléchir devant l'offrande d'images soutenues qu'elles soient intrépides ou légèrement ensommeillées.Un opus d'une jeunesse éternelle, protégé par son dynamisme de l'inévitable fin des combats, nous attendant patiemment à l'orée du bois.
  • LACENAIRE (1990)
    Ce personnage légèrement ébauché dans "Les enfants du paradis" méritait bien une étude particulière. Auto suicidaire, ce lettré extravagant et imprévisible désire quitter de manière flamboyante un monde dominé par la rudesse parentale et la dominance des prêtres. Le vol, le plaisir et le meurtre sont les garants d’une guillotine patiente. L’homme s’en délecte à l’avance. Le rendez-vous avec la grande faucheuse est ardemment désiré, presque jouissif, pour un personnage évoluant sans retenue dans un contexte rejeté.Puisque ce monde n’est pas accepté, il faut en abuser à outrance, par les coups, le pistolet, les bons mots et les corps féminins basculés ironiquement. Le malandrin reçoit galamment, ripaille en cellule, offre son visage au moule. Séduit l’assistance par une rhétorique enflammée.Un refus d’intégration devient l’envolée d’une anarchie assouvie goulûment, par un prince débauché, sanguinaire dénué de repères affectifs, alimentant la matière de sophistes charlatans.Lacenaire, contestataire épanoui, fait le procès de la perversité cachée de ses contemporains, en se grisant d’interdits. L’homme est introverti, mauvais, dissimulé dans des procédures moralistes, pingre, cachant sous la robe sacerdotale ou l'habit propre d'un grisonnant, la convoitise de jeunes chairs.Lacenaire dénonce, méprise, corrige aux poings les imperfections de ses semblables, en se dirigeant lentement vers la lame libératrice.Daniel Auteuil dispose enfin d’un grand rôle, qui n’est pas s’en rappeler l’itinéraire fou de Joseph Bouvier dans "Le juge et l’assassin".Un dénonciateur de temps moroses et corrompus hurle son isolement et son désespoir, par un parcours criminel.Lacenaire, hôte éphémère volontaire d’une terre rejetée, joue sa propre pièce de théâtre à l’aide de partenaires considérés comme les ingrédients d’une jouissance personnelle.
  • LE FESTIN DE BABETTE (1986)
    Cette côte danoise du Jütland, rongée par les vents et la pluie, clame au fil des jours, un chant langoureux nommé "austérité et sacrifice". C’est une vie de dévotion que Martina et Philippa s’imposent, sans remous ni révoltes.Le père est dur, enclavé dans ses principes, la vie n’est offerte qu’a Dieu. Martina et Philippa, un temps belles et désirables, sont courtisées, mais leurs destins est tracé. Ce sera une vie de dévotes, triste, loin des villes et des prétendants.Babette en fuite se réfugie en bout de course dans ce lieu perdu, s’intègre, apprend le langage local, se dévoue et récolte l’admiration de toute cette faune isolée.Nantie par un gain soudain, elle organise un succulent dîner français, commémorant le centenaire de la naissance du père de Martina et Philippa. Elle trime en cuisine, les convives aux visages de pierres muselés par les contraintes religieuses, s’interdisent toutes réactions devant ces plats servis hors du commun.Peu à peu l’alcool stimule de nouvelles couleurs sur des visages endormis. La parole dévie des procédures implacables imposées par ces croyances pures et dures. Des gestes tendres sont distribués, des mains touchent des visages.Le général Lorentz, ancien prétendant éconduit de Philippa, se pâme devant ces cailles en sarcophages, lui rappelant un séjour parisien agrémenté d’un merveilleux repas dans un café anglais, dont le chef cuisinier n’est peut-être pas si loin.Les efforts cachés sont la lumière du silence, quoi de plus merveilleux que de révéler son nom par un odorat, sans se montrer, s’isoler, transpirer dans l’indifférence, retranscrire ses passions par la disposition harmonieuse de mets dans une assiette, n’attendre aucune reconnaissance de convives rassasiés, quittant cette sainte table où certains se sont subitement éveillés à la vie.Babette, par cet anonymat, se positionne à l’égal de cette petite communauté coupée du monde, qui à l’écart de toute technologie, active admirablement une fonction unique :L’amour des autres dans la dévotion offerte à toute une existence.Cette très belle nouvelle venteuse et aride de Karen Blixen, remarquablement mise en images dénudées, déclenche le débat métaphysique de fond de nos sociétés possédant de moins en moins de repères.Comment se projeter par les autres en se servant de l'obscurité comme une lumière?
  • CEREMONIE SECRETE (1968)
    Dans des pièces innombrables, contenant des lits gigantesques et des robes étouffées, dans des armoires quelquefois entrouvertes, un huis clos pervers s’exécute entre une mère sans fille et une fille sans mère. La quête, de celle qui n’est plus là, devient une pièce de théâtre, deux rôles virtuels sont immédiatement distribués, assimilés, incrémentés par des dialogues adaptés à des situations mère / fille improvisées.Soumission, dominance et perversité se succèdent en fonction de l’évènement. Une possession, jadis endurée, semble manquer en étant soudainement simulée. Un repas de premier contact est ingurgité à la grosse par une pseudo- mère rôteuse, manquant d’élégance, devant le regard lubrique d’une fille consciente de son ascendance.Recluses dans une immense demeure, deux démentes déchaînées, n’ayant plus aucun contact avec la réalité, s’autodétruisent par des procédures en miroirs, interposées dans un intemporel grotesque dominant.Ce film vénéneux, dévorant, auto-destructif, logé dans de fausses protections, montre les désastres psychologiques d’un énorme manque affectif accumulé, menant par une trop longue absence, à des comportements hors normes.Un sinistre visuel, accompagné d’un auditif plaintif de boîtes à musique se mêle à la force auto-persuasive de photos-montages. Des corridors, à peine éclairés, alimentent la matière de luttes et d’armistices sans fins, entre deux femmes affectives et destructrices, selon le cas, se martyrisant en alternance, par l’intermédiaire de deux personnages de composition.
  • DU SANG DANS LE DÉSERT (1957)
    Emouvante rencontre initiatrice entre un chasseur de prime vieillissant, ancien sheriff aigri ayant perdu femme et enfant et un jeune sheriff inexpérimenté respectueux des lois, dans une bourgade où l’on tire avant d’avoir fait les sommations d’usages. " The Tin Star" (l’étoile d’étain) propulse un homme brisé sur le chemin d’une double récupération paternelle, professionnelle et sentimentale, offerte par la providence.Le destin et ses circonstances empêchent continuellement Morg Hickman de quitter une ville dominée par la violence, qu’un gamin assermenté ne peut contenir ni gérer.Un ange invisible protège Ben Owens, jeune inconscient en lui conservant continuellement la protection d’un homme aguerri et rationnel, prouvant que l’on peut intelligemment capturé de dangereux bandits de manière réfléchie, sans barbarie. Une action isolée, se démontrant préférable à la désorganisation galopante d’une foule déchaînée.La thématique du récit est claire, s’aider soi-même en aidant les autres.Le challenge est cossu, former un homme de loi fougueux, mais sans expérience afin d’entretenir sa longévité dans une conjoncture de terrain réaliste, en se réinsérant en parallèle dans une vie de couple avec enfant."The Tin Star", western sensible et humain, montre avec bonheur la lucidité d’un homme en reconstruction, dispatchant avec une rationalité exemplaire des procédures de survie, à un fils spirituel marchant sur ses traces.
  • VIVA ZAPATA (1951)
    Je me bats depuis si longtemps que je ne comprends pas la paix. Trente quatre ans de despotisme font sortir un nom du troupeau.La mise en service d'une ressource représentative d’une image locale misérable que l'on manipule intelligemment afin d'en tirer profit.Zapata sanguin et emporté, inexpérimenté et mal entouré se retrouve de plus en plus accablé par sa charge en manageant les substances d’un territoire à son image rotant et hirsute périclitant en permanence dans la soulographie, la manipulation, l'incompétence la lâcheté, la dénonciation et la corruption le tout inséré dans des brasiers virulents ne s’éteignant jamais.Parachuté sur un sol ou les rapports de forces ont peu de chances de s'inverser l’espérance d’un temps nouveau se consume rapidement accablant le mordant d'un esprit prenant conscience qu’il ne pourra rien changer.Les riches restent riches, fuient les combats en se réfugiant couvert de biens sur des terres ensoleillées pendant que le révolutionnaire réduit au rang de fusible s'écroule criblé de balles en ne possédant même pas sur lui le cout d'une bouteille de tequila.L'éternelle fracture sociale exposée dans le très émouvant roman de Jean d’Ormesson Au plaisir de Dieu.Un châtelain fait monter son garde chasse sur les hauteurs de son domaine et lui demande : Que vois-tu ?Je vois des champs et des arbres.Eh bien tout ça est à moi. Maintenant ferme les yeux, que vois-tu ?Rien.Eh bien tout ça est à toi.