Critique(s)/Commentaire(s) de L.Ventriloque

Voir ses 50 films notés

Page 2 sur 18 (900 critiques au total)

  • SMALL CREATURES (2010)
    Note : 16/20
    Univerciné Britannique Nantes 2012. C'est dur et pourtant mignon. En perpétuelle oscillation entre "la mauvaise graine" et le foyer comme refuge, en témoignent les photos de famille. Avec une tension qui plane dès le début. Coggie en crise (et qu'on devine sans père) s'éloigne du giron maternel, combat sa grande soeur, charpentée, face rebondie, une gendarmette. La personnalité du film est qu'aux pires moments de violence hors champ, sont montrées les "petites créatures" symbolisant l'enfance, ce temps d'avant d'être déçu. Hamsters duveteux en plan très rapproché, bon gros chat tacheté. La maison, ses habitudes ont l'air de promettre qu'un jour tout s'arrangera. Le processus de cruauté arrive lentement et sûrement (un peu trop, on baîlle !). D'abord les insectes en deux morceaux. Et puis des tergiversations. Coggie a peur de lui-même, bien qu'il veuille se distinguer d'une façon quelconque, que sa seule possibilité se trouve à l'extérieur, ces copains-là, s'il ne veut plus, eux l'y obligent. Bandes de jeunes ni sportifs ni imaginatifs, société malade en recherche de boucs-émissaires, on peut penser à tout cela ou en rester à ce coin de Liverpool où un couteau signe le commencement d'une escalade. Steve et sa gueule d'ange devraient ulcérer les spectateurs. Coggie, fluet à figure ingrate mais vulnérable laisse partagé. Autant de teigneux que de doux dans cette histoire qui fait penser aux "Quatre cents coups" ou à "Fish Tank" !
  • ELENA (2011)
    Note : 19/20
    Le petit jour sur les baies vitrées d'une maison confortable. Lueurs solaires qui s'amplifient aux bords du long plan fixe, un oiseau pour l'animer, on est en temps réel chez des Russes un matin parmi d'autres. L'intérieur est de bon goût, ces lames de parquets très larges, bien cirées, tout respire la maison confortable. Qu'est-ce que c'est bien de voir des gens ordinaires au cinéma, ce couple avec chacun son lit pour connaître le repos, soudé par mille petits riens, dont l'hommage gaillard quand les désaccords terrassent... Une tension, les grands rejetons. Elena, physique solide d'ex-infirmière, première levée, dernière couchée, bichonne époux, enfants et petits-enfants, son mari à fille unique et caractérielle s'avérant surtout sportif. L'environnement rend dur, nombriliste, pragmatique au possible. Du coffre au train, les billets se déplacent. Un cheval blanc à terre symbolise la fin de quelque chose, de hautes cheminées surplombent des terrains vagues où des bandes nocturnes s'appliquent mutuellement les combats des jeux vidéo. Tableau au vitriol de la Russie contemporaine que cette affiche de la mamie avec bébé au giron ! Chômage et corruption commencent à griller les cerveaux dans un sens pratique invitant à ne plus avoir de scrupules du tout. Petits calculs de survie des anciens et des nouveaux, attention à sauvegarder la respectabilité de façade. A quel point est-ce russe et exclusivement russe, hum... Possible de trouver la mise en scène un peu trop délayée, franchement ce serait le seul défaut ! La jeunesse hyperactive, les très optimistes n'y verront qu'un nouveau délire de l'âme slave tourmentée qui réalisa "Le Retour" en 2003. Les patients et les réfléchis trouveront au contraire beaucoup de sens à cette anticipation de notre société à deux vitesses.
  • LA CHASSE (2012)
    Note : 15/20
    Thomas Vinterberg récidive dans son traitement des secrets de famille avec cette douceur d'éclairage aux tons chauds propres aux films scandinaves. A la proximité physique des enfants dans le jeu, répondent le puritanisme et l'arbitraire du collectif. Cette fois le cadre figure, non seulement le contournement des tares parentales, mais aussi bien, en seconde lecture, les réflexes induits par la récession, lisser, uniformiser... Un poison qui part de la directrice du centre, épaulée par un expert local... A partir d'une rumeur. L'art d'écarter un gêneur, trop singulier, trop indépendant. A croire que ces gens étouffent tous tacitement le véritable scandale local (le savent-ils, s'en doutent-ils, on en a la libre interprétation). Le rictus de la fillette renseigne le spectateur. On pense au procès d'Outreau, la parole de l'enfant, ce petit ange incapable d'arranger la réalité. Même impasse que dans Festen, fautif démasqué, éducateur rendu à lui-même. J'ai trouvé la petite amie d'une approche étrange, comme si Lucas s'en servait plus qu'il n'en était attiré. L'épouse du vrai grand malade et le fiston sorti de ses gonds sont en revanche très convaincants. Le bémol est que, malgré l'atmosphère très naturelle, l'excellente direction d'acteurs, les scènes de chasse et les traques, on tourne en rond à baigner dans l'obsession du réalisateur. Le dernier coup de feu qui fait mystère de son auteur est celui de trop.
  • LOS MUERTOS (2004)
    Note : 12/20
    Festival des Trois Continents nantais 2013. Pour être morts, ils sont morts... Quoique les grands mouvements de caméra du début forcent l'admiration. Chacun est happé, se dit que ces magnifiques morceaux de nature vont recéler quelque autre merveille. Point du tout. Voilà l'écrin d'humains décérébrés. A part l'ironie grinçante du titre, ne pas compter sur la joie. Encore moins sur l'humour. De l'intrigant on vire au sordide. Respect pour le choc énorme qu'on devine à la base, sauf que le réalisateur fonctionne comme un avare. Le quinquagénaire Vargas, belle g..., petit bedon, la liberté hors des murs. Or, impossible de s'identifier à ce drôle de zigue, il finit par révulser. Et puis tous s'avèrent trop mécaniques chacun à leur manière. La splendide nature prend des allures de pieuvre. Le cinéma argentin contemporain maniant le cynisme pourrait bien, du rire sardonique escompté, virer au rejet pur et simple de ses plus fervents spectateurs. Attention à la surdose, celle qui met dans un état nauséeux... Les amateurs d'effets sophistiqués, les techniciens de cinéma, les snobs peuvent aimer, raffoler même... De nombreux spectateurs, de réjouis à l'introduction devraient passer à l'hébétude... ou dormir. Trop lancinant, cru, pervers... Fortement déconseillé au grand public.
  • SCIALLA ! (2011)
    Note : 17/20
    Prix du Public à Univerciné Italien Nantes 2012. Le fait que le rôle du vieux soit tenu par Fabrizio Bentivoglio et que la porno-star soit Barbora Bobulova obligent à embarquer. Ils portent le film. C'est tout de suite efficace, très enlevé, ce qui gomme la caricature de jeune, sauvée par des scènes à scooter délicieuses, mais aux caractéristiques un peu trop convenues. Pour ce qui est du vieux prof ne reconnaissant pas une ancienne conquête en face à face à une table de café, hum, là aussi, à moins que ce soit pour renforcer le comique sous-jacent, son degré d'émotion jure avec sa myopie ! Ensuite dans la tension entre générations, toute la batterie des armes réciproques se déploie, les deux forces en présence usant de tous les codes pour arriver à l'efficacité. A noter que la gent féminine libérée de toute entrave sexuelle passe ici pour égale au partenaire puisqu'il va jusqu'à mentionner sa décrue libidinale, à saluer, c'est trop rare en ce moment ! Quelques lenteurs sur la dernière partie font croire que tout est bouclé... Erreur ! Surtout rester devant le générique dévidé à toute allure ! Il faut en guetter la toute dernière image au bout des palabres avec l'ex-étudiant tout à son affaire... Sans doute arraché de haute lutte pour ménager la sacro-sainte production ? C'est pourtant le point culminant de ce film !
  • TANGO LIBRE (2012)
    Note : 14/20
    Embarrassant, brouillon, chaotique, qui fait l'effet d'un patchwork mal assemblé. Dans le désordre, les scènes cruciales sont pourtant parfaites à l'image, il y a de l'ambiance, une lumière qui irradie l'endroit et les gens. On a envie de s'attacher aux trois protagonistes appelés à se mesurer, d'autant que Sergi Lopez débite quelques bons mots et rit en gros plan, on s'attend à une montée d'adrénaline, quelqu'un d'autre ou un événement qu'on ne pouvait pas deviner. Bien gentille la petite femme libre pour occuper l'écran. Préciser le pourquoi du comment afin de dérouler l'écheveau, ça va quelques minutes... On finit par souhaiter que le plus suicidaire disparaisse (trop de cirque !) afin d'avoir autre chose à se mettre sous la dent. Incompréhensible par exemple que le réalisateur se soit autant privé de l'acteur argentin le plus récalcitrant à danser au départ et qui finalement se décide. Il a "une gueule" et de la présence ! Dès le braquage de la caméra sur cet acteur précis, on s'attend à ce qu'il ajoute sa partition à l'intrigue amoureuse. Comparé à "Une liaison pornographique" et "La femme de Gilles" si aboutis, c'est un demi-film.
  • UN TRANSPORT EN COMMUN (2009)
    Note : 15/20
    Projeté au Festival des Trois Continents Nantais 2013. Pour ce qui est de la forme revisitée à l'africaine, on croit débouler chez Jacques Demy. Et un peu plus loin dans West Side Story... Toujours vivant, harmonieux et explicite (acteurs choisis dans la rue !), c'est un spectacle fluide, aux cadrages impeccables... La réalisatrice Dyana Gaye, également à l'origine de la bande-son confiée à des virtuoses, donne l'impression de savoir tout faire. On est pris dans son tourbillon de voyageurs. Déluge de mouvements auquel, pour reprendre souffle, manquerait peut-être un peu plus de langage parlé ? Peu de place pour l'imagination du spectateur. Le style comédie musicale made in Hollywood frôle presque le maniérisme, seul petit défaut de ce moyen métrage pour qui ne raffole pas de ce genre-là... Le bon petit coup de griffe envoyé à la France en déplorant l'inertie du Sénégal prouve en revanche qu'on est loin d'une intention frivole.
  • DEWENETI (2006)
    Note : 16/20
    Projeté au Festival des Trois Continents nantais 2013 sous le titre "Deweneti" (= bonne année en wolof ?). Joliment filmé par le tandem Dyana Gaye (Franco-Sénégalaise) et Rémi Mazet, chef opérateur-scénariste. Un conte qui invite, avant Noël, à se pencher sur ceux qui n'ont rien et se consolent avec les croyances qu'on leur a léguées. La morale de fond s'adresse aux enfants, ou aux adultes persuadés que l'éducation religieuse console de tous les maux (une brève réflexion et l'on réalise que les prières d'un jour ne sauraient empêcher la faim au ventre le lendemain de Noël, le surlendemain et les jours d'après)... Heureusement, la petite bouille d'Ousmane, qui n'est pas un enfant-soldat mais un échantillon d'enfants des rues de bien des nationalités possibles, invite à prendre conscience que la charité, valeur d'origine bourgeoise, devient la norme quand le Grand Capital broie les pouvoirs publics, les protections sociales, l'aide à l'enfance, avec la barbarie au bout du processus... Les dialogues, la façon de cadrer Dakar sous tous les angles, la verve de l'issue veulent laisser une impression de légèreté. On n'était encore qu'en 2006... Ce court-métrage remplacerait avantageusement la publicité dans les salles !
  • LES TROIS SOEURS DU YUNNAN (2012)
    Note : 18/20
    Prix du Public et Montgolfière d'Or du Festival des Trois Continents nantais 2012. Clair-obscur dans un réduit sordide, plans larges sur les déambulations au dehors entre troupeaux et chiens. Attention, le réalisateur fait jouer à ces trois enfants leur rôle véritable. Sur la forme, constamment splendide. Sur le fond, insoutenable. Et en même temps touchant. Soit, on se gratte la tête, l'hygiène se résume à quelques rinçages à l'eau froide. Cependant il flotte une réelle affection entre ces gens, chacun fait ce qu'il peut dans un univers de toute façon ingrat. La jeunesse doit apprendre à se dépêtrer. Une mère démissionnaire, un père en ville pour son emploi, trois fillettes qui travaillent chez les voisins (on vient les chercher !) contre nourriture et compagnie. Une maison incendiée. De petites ombres frigorifiées qui durent plus qu'elles ne vivent. Tombées très bas, un rien les ranime. Ainsi, leurs chaussures neuves sont comme des ailes avec papa vers la ville. L'aînée seule, elle ira à l'école, l'oeil du grand-père pas loin. C'est elle qui pourrait inquiéter le plus, sans défense parce que sans repères familiaux pendant un long moment... BIen entendu, ce n'est pas une vie d'enfants telle que le revendique le poème "Les petits damnés de la terre". De petites existences aussi rudes, ces sauve-qui-peut des femmes lassées de lutter. La région de Yunnan sans combat quotidien rendrait neurasthénique si l'on en juge par d'autres films chinois ayant dépeint ces sommets à perte de vue battus par les vents. Un point positif, cette troupe d'endurcis en réunion au milieu de nulle part et qui entend garder son dernier moyen de subsistance !
  • IT'S A DREAM (2012)
    Note : 16/20
    Découvert au Festival des Trois Continents Nantais 2012. C'est filmé façon Asghar Farhadi dans "Une Séparation", par paliers, avec des éclats débarquant violemment et retour au système D, ce revers de la mondialisation. Nouveauté, des espiègleries comme le fou rire nerveux de la jeunesse. Le personnage central voilé, au visage gracieux affiche une expression plus voyouse que d'habitude. Elle fonce, tient tête de toute sa grâce à l'homme d'affaires, à ses sbires. Pour autant, au lieu du cuisant revers attendu, ses larmes, ses trajets avec ce copain en voiture. Toute jeune créature touchant aux liens du sang jette le trouble dans le regard masculin, aussi complice soit-il avec son épouse. On reste un peu sur sa faim... Le spectateur a toute latitude pour passer du drame intime, universel, à celui du peuple iranien, là où la transgression conduit à des peines sans commune mesure avec les fautes commises. Le titre "C'est un rêve" justifierait les nombreuses ellipses ? En toute dernière partie, fort malaise. Sans doute la lassitude des issues "grand ouvert". Crainte de la censure iranienne ou limite imaginative du réalisateur ? Certains spectateurs préfèrent dire "je n'ai pas tout compris" et plébisciter un film plus net.
  • AUGUSTINE (2011)
    Note : 16/20
    Plus que la lourde introduction (ce crabe, ces verres de vin), c'est le fil entre Charcot et sa patiente, sous l'oeil de lynx de l'épouse (impeccable Chiara Mastroianni) qui captive. L'hypnose émane d'un spécialiste, pas de Charcot, quel dommage ! On se croirait dans une arène avec spectateurs gourmands des débordements féminins. Le regard éhonté du médecin alors que la créature se fait applaudir dévoile l'essentiel (la démonstrative Stéphanie Sokolinski s'avère parfaite pour ce rôle). On peut dès lors savourer la mise en scène, éclairages (lumière quasi biblique sur le visage de Vincent Lindon), costumes d'époque (les affriolants dessous de coton blanc !), ne rien perdre des chuchotements ni des changements de place du mal, avancer dans l'intimité encore masquée d'Augustine et son sauveur, quoique de plus en plus copains sans le montrer. Une avancée médicale certaine à l'époque où l'hystérie féminine se diagnostiquait, silence sur le reste. La chute d'escalier a le mérite de relativiser la supposée guérison de la demoiselle. Surprise que l'affaire faite (soi dit en passant drôlement "à la hussarde" pour une cinéaste !), Augustine s'éloigne telle une souris qui aurait volé du gruyère. Les expressions des époux culminent à ce moment-là, dans le style échevelé de leurs soirées... Ce qui frappe chez Alice Winocour est le sens du détail.
  • JOURS DE PECHE EN PATAGONIE (2012)
    Note : 17/20
    Le réalisateur de "Bonbon El Perro" récidive dans le style affectueux qu'on lui connaît. Même subtilité, même atmosphère de bons vieux potes. Il faut aimer la beauté des cadrages plus que l'action. Les poissons ne grouillent vraiment pas... En revanche, on a la bonhomie du personnage central, le type attachant d'emblée (quelle expression craquante !). Un gars qui se devine ancien tombeur malgré lui, sa femme et fille bâties en conséquence. Le parfait innocent des retours de manivelle. Des situations quotidiennes d'une apparente banalité défilent, on se croirait dans sa propre famille ou chez Pagnol revisité argentin. Bien observer la gestuelle, ces tout petits moments d'hésitation que l'usage fait rattraper poliment. En toile de fond, la sauvagerie de la Patagonie. La surprise est la première virée en mer après le choc, quand le corps, cette mémoire puissance mille, fait des siennes. Beau et fraternel. On peut juste déplorer quelques longueurs.
  • WE NEED TO TALK ABOUT KEVIN (2011)
    Note : 15/20
    Grande marée à la tomate, un gros effet... Puis peinture rouge en veux tu en voilà. Alerte au sang ! Une multitude d'allers-retours passé et présent montre l'effroi de cette femme. Déjà in utero, elle avait mal à son Kevin. Ils contribuèrent l'un et l'autre à se scinder dans des hurlements lourds de présage. Très vite le diablotin aux sphincters régressifs, nargue, cause comme un adulte, en éternelle provoc. Une incompatibilité d'humeur incurable, la crise d'ado puissance mille tant qu'aucun événement gravissime ne vient rompre la dyade. Et chacun(e) de charger la mère ou l'enfant, elle a ruminé trop de trucs et il a écopé... Rien sur le père, occupé à viriliser son fils pollué par le malsain giron. Or, le très gros plan des deux pupilles du monstre changées en cibles jette un léger froid pour qui songe à l'actualité récente du côté d'Oslo... Dommage pour Tilda Swinton et Ezra Miller dont l'aura commune permettait davantage côté dialogues, avec une musique qui colle un peu plus à la situation aussi tant qu'à faire.
  • THÉRÈSE DESQUEYROUX (2012)
    Note : 15/20
    Enfin Audrey Tautou dans un rôle qui lui va. Mature, très convaincante, le mythe Amélie Poulain enfin derrière elle. Une raillerie de la famille provinciale à peine formulée... Déjà un grand classique. Ô que c'est respectable, pétri de l'oeuvre romancée, convenable en dehors des petites fioles justifiant cette noire larme sur l'affiche. Le couple mal engagé se révèle dans le renversement des situations, c'est tout l'intérêt du film. Car Thérèse devient rengaine dans ses petites manies par en-dessous, pas assez de sang dans les veines !... Sans l'interprétation irréprochable, le retournement des rôles et ce supposé oxygène parisien, on frôlerait la platitude.
  • LES BÊTES DU SUD SAUVAGE (2011)
    Note : 17/20
    17,5/20 : Etrange atmosphère entre foutraque et fantastique. Quelques inégalités de régime sauvées par la magie des derniers plans... Possible d'être dérouté d'entrée de jeu par l'apparence brouillonne... On oscille entre "Uncle Boonmee celui qui se souvient de ses vies antérieures" et l'éprouvant "Three Sisters" chinois pour l'atrocité du cadre. Un hommage aux oubliés des catastrophes naturelles, à ceux qui connaissent le retrait progressif de la terre sous les pieds. La terreur des tempêtes, l'obligation d'habiter sur l'eau dans des embarcations de bric et de broc, la hantise d'être parqué dans des enclos aseptisés... On est saisi par ces vaisseaux de fin du monde, bouleversé de l'entêtement à refuser les secours afin de rester là où jeta la naissance. D'un côté c'est merveilleux parce qu'on voyage ferme, que les troupeaux d'aurochs captivent... et que la bande-son entraîne comme une courroie (somptueux accords !). De l'autre, c'est désespérant... Sans cesse la caméra se pose sur la petite fille, incarnant à elle seule la jeunesse qui fait face au pire. Visage et silhouette d'une douceur infinie comparée à la rudesse des échanges...Toujours lutter, casser ce qui reste pour se défouler malgré l'envie d'être prise dans les bras. Il se glisse des minutes veloutées entre père et fille, la caméra en champ contre-champ livre leurs regards, interdit de pleurer, mon oeil.
  • THE DEEP BLUE SEA (2011)
    Note : 17/20
    Cycle Univerciné Britannique Nantes 2013. Ce qui frappe dans cette romance des années Cinquante (tirée d'une pièce théâtrale) c'est que l'image fabriquée en 2011, cette impression de perpétuel couvre-feu, un je ne sais quoi d'atmosphère lourde réussissent à acclimater passé un moment. Très beau, un peu dans le style des films américains des fifties, mais tout de même la manie de l'introspection à pas de velours très appuyée. Le réalisateur dépeint ses étapes dans une chronologie de gestes quotidiens, par petites touches productives, rien ne manque... Le labyrinthe sentimental une fois appréhendé, le crime passionnel vient même à l'esprit... Peu de lumière (comme s'il n'y avait qu'un petit jour au fin fond d'une grotte), des prises de vue très inspirées dans des intérieurs pour la plupart, toujours dans un souci esthétique mais qui apporte du sens, on s'en rend compte après (la séquence de la caméra qui tourne autour de la jeune femme à l'esprit chaviré marque la mémoire). Beaucoup de minutie dans les choix musicaux, les décors, très respectueux de l'époque décrite. Cerise sur le gâteau, Rachel Weisz, diaphane ou effondrée, toujours un peu "absente à elle-même" ou feignant de l'être, . Le mari très adulte, touchant parce qu'avec toutes les facettes d'un homme fait. On a souvent envie de conduire Freddy à son avion... En résumé, si on ne dort pas dès les premiers plans, embarquement possible avec ce trio infernal, du dialogue redouté aux arrangements de bric et de broc vers l'ultime poigne morale.
  • BLUE JASMINE (2013)
    Note : 17/20
    Un bon petit cru de Woody, à fond dans le genre cocasse et désespéré. Interprétation attachante. Aucune souffrance cette fois-ci du débit verbal vitesse grand V, et pas plus de méandres qui égarent inutilement. Les étapes traversées par Jasmine défilent de manière fluide (très convaincante Cate Blanchett) en attendant sa transformation profonde. Ce reflet pertinent de nos sociétés mécanisées rend fraternel par sa façon de frôler le quotidien de tout un chacun. On retrouve bien l'éternel malentendu entre les sexes cher au réalisateur, je pense à l'épisode d'assistante dentaire transposable dans tellement d'autres contextes de la vie professionnelle ou de la vie tout court.
  • SUZANNE (2013)
    Note : 18/20
    Etonnante Katell Quillévéré qui récidive aussi bien sinon mieux que dans "Un poison violent" ! Même habileté à faire entrer dans son histoire par pans, nonchalamment avec d'habiles coupures. Mêmes dialogues minimalistes. Davantage de profondeur, le seul amour encore crédible étant l'alchimie des corps, ultime bastion contre le pourrissement collectif (ce refus d'accorder sa confiance comme si les mots étaient devenus la porte ouverte à toutes les trahisons)... Musique sur mesure, y compris au niveau de la signification, on est vraiment gâté, non seulement les compositions de départ, tout à fait à la hauteur de l'enjeu, mais cette version de "Suzanne" par Nina Simone qui reste entêter ! Le récit biographique comporte plein de blancs dans la vie de l'héroïne marquée par d'horribles coups du sort, (Sara Forestier dirigée ainsi promet autant que Sandrine Bonnaire !). Et puis ce père veuf qui fait son possible avec ses deux filles (rarement traité sous cet angle !) ne peut que taper dans le mille... La passion irrépressible est surtout prétexte à introduire "la débrouille" comme un dédoublement nécessaire... à la survie de l'espèce. Ensemble incroyablement mature de la part d'une trentenaire polie, lisse sous ses allures de mannequin ayant l'absolue maîtrise de son sujet, de ses acteurs. Déterminée autant que passionnée ! Portrait de femme à l'enfance fracassée certes, + charge sourde contre l'économie actuelle, l'officielle, pas l'autre !
  • THE MASTER (2012)
    Note : 14/20
    Brillant techniquement parlant peut-être, quelques fulgurances desservies par des dialogues qui en restent aux petites touches" qui en jettent" et rien de plus, comme s'il fallait ne se fâcher avec personne. Film pas aimable et pas non plus émouvant. Plein de tics de comportements comme pour meubler. En plus du trop plein de bien-pensance dégoulinante étasunienne derrière les situations ! Vraiment rien à en tirer si ce n'est une espèce d'enchaînement de deux hommes, ce à quoi on arrive à force se frotter l'un à l'autre faute de perspectives. Même fatras global que "Magnolia" dont on pouvait déplorer la pesante démonstration mais jubiler en seconde partie pour cause de "point sur les i"... Ici on s'embourbe toujours plus (pauvre Joaquin Phenix en type tordu, pitoyable Philip Seymour Hoffman en prêcheur autocrate !). Défilent tous les côtés "crades" du puritanisme américain du nord... Ce qui froisse est la totale opacité du point de vue du réalisateur. Complaisance ? Vacuité ? Bien la peine d'employer un tandem de cette trempe pour un numéro aussi fadasse.
  • LA TÊTE EN L'AIR (2011)
    Note : 16/20
    Projeté au Festival Espagnol de Nantes 2012. Un banquier refusant un prêt que l'image change en vieux gâteux refusant de manger sa soupe. Et pan, bon pour la maison de retraite ! Là où finissent les atteints d'Alzheimer, le pensionnaire Emilio anticipe tout en privilégiant son présent, scène équivoque de la piscine et doutes sur l'honnêteté de Miguel, le compagnon de chambre débrouillard. Le style est en tous poins fidèle à la bande dessinée de Paco Roca, mise en scène efficace, pour les connaisseurs en animation peut-être un peu trop simple ? Cela se laisse regarder, le sujet est à prendre avec des pincettes... C'est suffisamment expressif, joli, les angles variés, les dialogues à la hauteur du sujet de fond, lequel s'avère traité avec délicatesse malgré plusieurs flèches à l'intention de ceux qui certes s'occupent de leurs hôtes mais en imposant leurs rites. Un genre de liberté surveillée tant qu'on ne perd pas trop la boule. Car passé un cap, une mystérieuse chape est mise. Consolation, l'équité absente la vie durant est enfin à l'honneur... Les parachutés en maison de repos revoient le temps de leurs premières classes quand il fallait parmi les autres trouver sa place. Au prix de renoncer à tout repère de la vie d'avant, et cela quels que soient grade et pécule. Tout cela est parfaitement distillé, avec un Miguel sans attaches qui, de gros malin, s'adoucit plus la maladie d'Emilio gagne. L'objectif est atteint. N'importe quel spectateur peut sentir le progressif passage de la vie au néant sans être choqué.
  • ESPAGNOLS ! (2010)
    Note : 16/20
    Festival espagnol Nantes 2012. La voix-off du réalisateur Carlos Iglesias rappelle cette décision des pouvoir espagnols républicains (juste après Guernica) d'éloigner 30 000 enfants du territoire, dont 3 000 gagnèrent la Russie qui devait alors entrer en guerre contre les nazis, ce qui n'était pas du tout prévu... Le commissaire communiste et l'ex-aristocrate incarnent, après une altercation de principe, le juste milieu, honni quand le patriotisme refait surface et pourtant le seul apte à contenir les extrêmes. On suit donc ce train traversant les étendues neigeuses, le petit groupe avec les inévitables rapports de force et puis la faim qui fait courir des risques... En dehors de quelques haussements de ton, de plusieurs jolies scènes aussi (l'accueil réjoui après pourparlers, la singerie de marivaudage des trois jeunes, cette cigarette allumée par terre !), on se détache volontiers de ce convoi toujours plus effiloché pour se pencher sur les rescapés qui tentent le retour en dépit du franquisme... Les affres météorologiques rencontrées au tournage en Suisse feraient presque autant compatir que le sort des petits déplacés avec leurs guides dans les imprévus de la Seconde Guerre. Facture linéaire, style réaliste. Les échanges verbaux du groupe partent bien, attention à les capter vite sous la traduction allemande en bas de l'écran. Tout cela s'essouffle dans l'errance au milieu de nulle part. Dommage que l'émotion bien amorcée se raréfie... Instructif, infiniment respectable mais... classique comme un cours d'histoire !
  • BLANCANIEVES (2012)
    Note : 19/20
    Comme l'industrie cinématographique produit une quantité astronomique de films chaque année, rien n'oblige à rapprocher celui-ci de "The Artist" ni même à anticiper côté oscarisation 2013... Ce muet noir et blanc de 2012 librement adapté du conte de Grimm remanié par Perrault, peut embarquer par la seule force qui s'en dégage. D'emblée, le traitement s'avère ultra-sophistiqué sur des thèmes ultra-simples. Naissance/mort, servage/cupidité, paralysie/mobilité, normalité/nanisme.... En prime, la corrida burlesque et en contrepoint une fillette sexy flanquée de sa mascotte, un coq, il rend végétarien au moins sur le moment. Des grincements réguliers... Le principe de plaisir des années Vingt est néanmoins présent, la finesse, l'espièglerie. On se croit par instants chez les meilleurs muets de Lubitsch, ou chez Chaplin pour l'aspect moral. Les rationalistes regrettent que "ça parte dans tous les sens", les puristes sont affligés qu'on ait osé (quelle insolente liberté !) et les amateurs d'action pour l'action ont un avis mitigé... Le "point de vue de l'auteur" serait trop dilué au fil des séquences ?... Vrai que c'est tellement bien ficelé qu'on en reste... muet ! Marginalité et liberté se confondent et puis voilà... Etonnante dernière partie, le sursaut et cette larme d'impuissance ! Si l'expressivité des personnages en plus de la minutie picturale et sonore captivent, l'oeuvre rejoint la bande dessinée contemporaine, on se f... de tout le reste, seul importe le regard particulier de Pablo Berger sur les contes de notre jeunesse, j'en redemande !
  • BONNE ANNEE GRAND-MERE ! (2011)
    Note : 18/20
    Maritxu ! Découvert ce merveilleux film au festival espagnol nantais 2012. Franchement, pourvu qu'il rafle le prix Fondation Borau Opera Prima ! Maritxu ! Un prénom repérable crié d'une pièce à l'autre et fifille qui obtempère alors que son époux trouve qu'elle s'esquinte. Ce film familial traite du sort des anciens en fin de course, comment s'arrange-t-on de devoir soudain être assistée après tant d'années de don de soi ? Moitié Tatie Danielle avec des béatitudes à la Harpo Marx suivies d'une forme d'autisme, la dénommée Mari n'est jamais à court de gags, pire qu'un apprenti marcheur découvrant la maison, car même la nuit... Ce n'est pas pour rien que le symbole des scènes de chasse revient en boucle... Ils changent tous progressivement, ces enfants et petits-enfants. Autour de la vieille au petit pas chaloupé, les trajets voiture occupent une large place avec ce bébé sur les bras et un garçonnet qui cause d'homme à homme, la vérité sort de la bouche des enfants. Vrai, c'est lui qui fait avancer le film ! On traque chaque suite de plans en accéléré, sûr de rire un bon coup lors de la prochaine vacherie de la vieille coriace... Et puis subrepticement, virage à 180 degrés vers plus grave, une ambiguïté qui fait l'effet d'une claque après caresse dans le sens du poil... A la mamie inoxydable s'ajoute une concurrente, comme le temps passe !
  • N'AIE PAS PEUR (2011)
    Note : 16/20
    En compétition pour plusieurs prix au festival espagnol de Nantes édition 2012. A nouveau le thème de l'enfance saccagée par des adultes en pleine confusion mentale. L'an dernier, c'était "Elisa K" amnésique, cette année Silvia qui somatise. Elle est flanquée d'une mère aussi navrante que papa qui joue à on se regarde dans les yeux le plus longtemps possible, brrr ! Le film martèle l'indicible de rigueur dans ce milieu où la douleur s'anesthésie, où bouder s'apparente à une faute de goût, une chape sur tout ce qui peut demander réflexion, des demi-mesures tacites qui font perdurer le malaise. L'introduction montre la petite toute enjouée entre papa et maman. La promenade se solde en yeux largement ouverts sur un canapé. S'intercalent des témoignages d'autres victimes une fois adultes... Michelle Jenner joue parfaitement sa partition, renversée volontaire sur la chaussée pour extirper son poids et être secourue par une fée soignante. La faiblesse de la démonstration (ou sa force pour les très bcbg ?) est que le propos finit par se placer prudemment "en creux" (peur de froisser la sacro-sainte dentisterie ?). Le spectateur déduit beaucoup, laissé en plan comme un vulgaire analysé. Et Silvia a souvent moins de 25 ans dans l'histoire !
  • PAPADOPOULOS AND SONS (2012)
    Note : 13/20
    Univerciné Britannique Nantes 2013. A nouveau cette école du lisse caractéristique des téléfilms et de la pub ! La crise, la crise, langage de la bonne presse. Veuf millionnaire déchu et blonde business woman, enfant binoclard complice du tonton de retour, on les voit venir à des kilomètres... Bande-son et caméra omniprésente dans les coins et recoins, action mastiquée, aucune place pour l'imagination. Parfois un petit rire, "se faire plaisir", la philosophie des temps présents. C'est quand même une suite de figures imposées une nouvelle fois, tendance lourde du cinéma britannique contemporain ?... Des acteurs principaux très mannequins par rapport aux rôles secondaires mieux campés. Beaucoup de balayages de caméra, des gros plans hyper expressifs, avant d'en arriver à la voiture au milieu de rien avec les deux frères, le must du film. Suivi du "hello goodbye" hospitalier, assez étrange... Deux séquences qu'on croirait extirpées d'un film plus abouti. Car en dehors des infos bancaires, immobilières très accessibles à toute la famille, l'agitation et les questions pratiques font un ronron bavard, meublent. Débarquent pêle-mêle le son cristallin de la musique apparentée à Théodorakis, l'album photo, le renoncement au kébab, les danses issues de l'actualité réelle. Tous se voulant l'hommage britannique au peuple grec ou autres sacrifiés de la finance. Le glamour en moins peut-être !
  • PLEURE, Ô MON PAYS BIEN-AIMÉ (1951)
    Note : 15/20
    Découvert aux Trois Continents Nantais 2013. Grand classique des fifties offrant à cogiter avec le cas de conscience qu'il pose. C'est certes convenu côté forme, on peut s'ennuyer un peu tout en étant admiratif des cadrages, se dire que "pour l'époque" c'était de l'excellent cinéma. Très moralisateur. Au moins une histoire qui respecte le livre d'Alan Paton, les bons et les mauvais campés comme il se doit (admirables révérends !). Le plaisir de voir Sidney Poitier et Canada Lee ensemble à l'écran dans des rôles complémentaires. En situation politique troublée (début de l'Apartheid), un jeune transgresse, forçant son pasteur de père à une situation inextricable. Un déroulement où protagoniste et antagoniste en prennent pour leur grade. Toujours sur fond de discrimination et coups du sort, la foi occupe une place honorable sans plus dans ce film à portée universelle. On est instruit du plus important, ce que la misère à son point culminant finit par faire des individus.
  • A ALEGRIA (2010)
    Note : 13/20
    Projeté aux Trois Continents Nantais 2013. L'idée de fond séduit. Affiche et bande-annonce attirantes, toujours précieux quand une bande de jeunes décide de créer pour faire passer sa colère. Sauf que c'est un peu "tiré par les cheveux" côté déroulement de l'histoire ! Il y a bien quelques bons moments si on parvient à se dédoubler, à entrer dans les jeux de rôles aidant à faire passer les croyances. Mais à aucun moment, ce fantôme qui débarque parmi des ados ne déclenche d'émotion. Bien trop fumeux à moins de s'enliser dans le retour des croyances actuelles, chloroforme des sociétés en récession... Belle réussite des masques à l'écran toutefois, le fantôme animal sur la plage a beaucoup de g..., fait un instant s'évader du frelaté global. Quoique la conclusion rachète un peu l'impression brouillonne par son sursaut de vitalité, je reste décidément sceptique sur un partage possible avec des spectateurs de cette manière détournée d'encaisser les violences existentielles. Ou alors traité plus finement.
  • LA ROUILLE (2011)
    Note : 18/20
    Découvert à Univerciné Nantes 2012. Dans l'Italie d'aujourd'hui, des immigrés, un notable (téméraire Filippo Timi !). La façon dont c'est traité fait songer à Barbe Bleue, Le Petit Poucet, La Petite Fille aux Allumettes. Possible d'aller jusqu'à Dracula si l'on compatit pour ce raide toubib qui, de chanteur d'opéra doucereux, dès qu'il prend sa voiture, peut virer ogre remonté avec une clé. Un grand distrait dès qu'il reste longtemps à l'air libre (scène des enfants spectateurs au ras du comique !). On navigue entre grotesque et démoniaque sans qu'aucune scène ne révulse, à part la gêne éprouvée pour l'individu qui déjante... En parallèle, cette zone rouillée loin des HLM fait l'effet d'un terrain de jeux s'il n'y avait cette terreur ambiante. La visite sur toute sa surface et dans les tréfonds alterne avec plusieurs comportements adultes et leur impact. Le jeu qui dégénère jusqu'à faire peur (Stefano Accorsi), la constante réprimande, on a droit à toute la gamme de la responsabilité parentale. La lumière poussiéreuse des premiers plans faisait craindre l'installation dans le morbide, d'autant qu'il y a quand même des meurtres... On reste pourtant en pleine sensorialité enfantine, bruitages métalliques, passage du jour au noir complet. Quelques lenteurs mais en tous points esthétique. L'issue assurée par les enfants ne lasse pas non plus de réjouir. Tout comme cette prof d'arts plastiques rivant son clou à un collègue normatif (magnifique Valeria Solarino !), un très grand moment !
  • UNE JOURNÉE À ROME (2012)
    Note : 16/20
    Programmé à Univerciné Cycle Italien Nantes 2013. On sent bien que la fille de Luigi Comencini en connaît un rayon au plan technique. L'atmosphère est bien créée, avec des gags qui pimentent, un couple d'une plastique assez convaincante pour qu'on salive bien à les voir se mesurer, le féminin se taillant la part du lion. Le scénario fait longtemps léger en revanche, la drague qui monte qui monte se voit à des kilomètres, le problème est que se cantonner dans les fanfreluches et les minauderies ça demande une cervelle d'oiseau s'il n'y a rien d'autre... A mi-chemin on commence à craindre que l'idylle s'enlise, pitié quelque drame plutôt qu'une liaison banale !... L'épaisseur accourt après la robe à 5 000 euros qui voltige, le monologue de la jeune fille allongée sur les marches (très beaux instants). Ce pourrait être le charme d'une impro comme on peut en vivre parfois dans la réalité et qui laisse des souvenirs impérissables s'il n'y avait cette redescente vers les immeubles où Gina retrouve sa mère. Et là, un ange passe... La manière de s'attarder sur les apparences pour mieux amener du sordide rappellerait assez le style de Sofia Coppola, autre fille de réalisateur... Comme Cendrillon qui voit son carrosse se changer en citrouille, toute la démonstration de cette journée en roue libre (et qui a le tort de balader un peu trop les spectateurs) se mue en désespoir de la jeunesse italienne contemporaine, empoisonnée par les frasques du Cavaliere, de la Camorra en plus des décisions à l'échelle européenne et de la mondialisation.
  • HAVING YOU (2013)
    Note : 14/20
    Univerciné Britannique 2013 Nantes. On dirait un téléfilm bien ficelé, distribution ultra lisse, le terme "amazing" prononcé avec gourmandise, niaiseries autour du mariage, léger surjeu des acteurs, la bague dans son écrin, n'en jetez plus... Photo et cadrages variés, complets autant qu'irréprochables. De deux choses l'une, cela respire l'élève appliqué... ou bien c'est pour mieux nous faire tomber de l'armoire ! Comme c'est bien fait côté forme, on hésiterait presque à en traiter le fond... Pourtant, piétiner entre atermoiements du protagoniste et minauderies de son entourage peut gonfler, pressuriser. C'est ne voir qu'un seul aspect de la situation... Tarde cette scène cruciale de la mère et l'enfant par exemple, un peu trop. On se résoud certes aux accidents de la vie, on s'incline le mouchoir prêt à moins d'être un monstre. Justement, m'indispose cette manière de forcer le spectateur à adhérer. D'autant que surfer sur le compassionnel en laissant tomber un personnage fait un peu règlement de comptes... à bon compte. D'accord pour l'enfant qui représente l'avenir en marche, mais que devient le vieux père, ce grincheux impardonnable dont la souffrance est passée à la trappe, c'est sans doute la question à éviter.
  • LES SOLDATS DE SALAMINE (2003)
    Note : 15/20
    Projeté au Festival Espagnol nantais 2012. C'est assez laborieux d'entrer dans ce récit inspiré de la nouvelle de Javier Cercas (Actes Sud). Parce que le fil conducteur qu'est la romancière-journaliste déconcerte... On sent la volonté de rendre accessible, charnel, d'apporter de l'assimilable à destination de la jeunesse qui "zappe" si facilement. Résultat, une dérive qui vire au délayage... Le jeu de séduction entre les deux jeunes femmes figure un angle hédoniste marqué de la société contemporaine espagnole, soit. Que la demoiselle reste de marbre face à ses rencontres dérisoires par rapport à son sujet, soit. Sensibiliser le spectateur le plus récalcitrant afin qu'un fasciste en sale posture puisse l'émouvoir demande certes des gants... Pari tenu ! Elle se fait désirer la séquence d'une beauté qu'on sent à couper le souffle ! Autre diversion longue durée, le périple vers Dijon. Des à-côtés aidant à accepter les paradoxes gênants de l'histoire, ceux-là même que les enseignants hispaniques ont eu longtemps ordre de taire. Dommage que ces excès fatiguent au détriment des archives et des reconstitutions. Quelques coupures et on avait un chef-d'oeuvre ! Exceptionnelle chanson sous la pluie, soldat qui tourne sur lui-même, ces deux regards rivés l'un à l'autre après le summum de l'horreur, merveilleux ralenti, de quoi rêver de la bonté faite homme !
  • LES EQUILIBRISTES (2012)
    Note : 16/20
    Projeté à Univerciné Italien Nantes Edition 2013. Quand Madame ne pardonne pas à Monsieur de l'avoir cocufiée, que la débâcle économique s'y rajoute, avec l'impossibilité de se loger, le cumul de boulots, le film semble conseiller de faire un choix radical plutôt que de se laisser glisser... Ce sont surtout les enfants qui paient le prix fort de ce dérapage d'un soir sanctionné par un divorce à l'amiable avec double pension alimentaire qu'on suppose exorbitante (tout est basé sur l'adhésion sans réserve du spectateur sauf qu' il manque des détails chiffrés pour qu'on y voie clair). Ivano de Matteo épargne la mère soucieuse de récupérer en dignité (apparemment, elle ne travaille pas). Par contre, il charge le père tenu de payer, payer et qui ne réagit plus à quoi que ce soit en fait parce qu'il déprime. Qu'ils aient des crédits sur le dos, admettons. Toutefois, ne plus pouvoir rien financer en cumulant les jobs laisse dubitatif. On se dit que sans le décrochage du mari, le couple se serait de toute façon retrouvé endetté jusqu'au cou... Giulio ne dépense quasiment rien pour lui-même une fois déconnecté de son foyer ! J'avoue avoir davantage pensé au sort des populations grecques actuelles qu'à celui des Italiens et des Français qui, sauf précarité extrême, parviennent tant qu'ils n'ont pas de loyer à payer, à vivre vaille que vaille de leurs emplois mis bout à bout.
  • BENDING THE RULES (2013)
    Note : 19/20
    19,5/20 : Découvert "BENDING THE RULES", Prix du Public aux Trois Continents nantais 2013. Trop peu récompensé !...Car c'est une oeuvre aboutie, finement construite, cadeau aux spectateurs qui ont là, en plus d'un saut dans l'Iran actuel, matière à cogiter comme s'ils étaient ensuite conviés à un débat... Prenant le spectateur par la main, la caméra groupe une situation à celle d'après, ce qui donne des plans-séquences très productifs, avec cette habileté iranienne de présenter deux actions à la fois. L'oreille rivée à un dialogue pendant que l'écran grouille de la circulation automobile. Alors, aujourd'hui, dans un pays majoritairement jeune, comment "sortir du pays" au prétexte d'une pièce de théâtre ? Quel est le prix de la transgression en Iran ? Behnam Behzadi pose la question et la traite. Les apparences de la liberté sont là. Trompeuses. L'art laisserait croire aux libertés d'action tout court si ne planait ce suicide manqué, la crainte d'une récidive. Les personnages sont avant tout des copains, ils ressemblent aux occidentaux dans leur parler, leurs échanges, mêmes attirances, mêmes causes d'agacement. Le réalisateur-conseilleur-arbitre, personnage le plus mûr, le plus attachant du lot rejoint souvent les jeunes filles aux voiles "fashionable", jamais austères, il laisse ses acteurs délirer en buvant leurs bières car c'est lui qui porte le film et surveille la porte. Celle par où les adultes peuvent venir. Quand le père veuf débarque flanqué d'un oncle falot, il fait bigrement peur... Un film en tous points délectable, instructif, vivement la sortie officielle en France et le dvd !
  • LA VOIX ENDORMIE (2011)
    Note : 17/20
    A remporté le Prix du Public au Festival espagnol de Nantes 2012. Directement inspiré d'une fiction de Dulce Chacon (allergique aux paillettes et morte d'un cancer à 49 ans). Le réalisateur scénariste Benito Zambrano reprend fidèlement les personnages créés à partir de témoignages réels de femmes persécutées au début du franquisme. Pour la plupart échouées dans des geôles crasseuses, avec pelotons d'exécution réguliers, rites bigots empreints du sadisme qu'encourage le pouvoir absolu... Traitées facilement de "putes communistes" par des fascistes de mèche avec leur avocat commis d'office, l'issue est connue d'avance... La plus raffinée des épreuves semble être d'accoucher et d'être passée par les armes peu de temps après. Le marivaudage entre deux jeunes apporte un soupçon d'humour, ce qui change un peu des torrents de larmes versées parce que pas moyen de faire autrement... Un aperçu de population muselée juste après la seconde guerre mondiale déjà éprouvante. Quand on pense que la poigne de Franco - qui fait penser à la folie bureaucratique de l'autre extrême ! - s'exerça jusqu'en... 1975 ! Ce film terrible relate une page d'histoire de l'Espagne de manière frontale, sans doute était-il possible de couper certains plans très tire-larmes... C'est l'enfer à l'état pur. Quelques belles âmes que la mort de proches a gardé humains sortent du lot de zombies, cette garde-chiourme par exemple. Sans elle le film serait intenable. On est forcé de songer à ceux et celles qui attendent dans les couloirs de la mort d'aujourd'hui, en 2012. Sans opérer de scabreux parallèles avec notre présent, s'imprégner, grâce à ce film, des faits actuels et passés afin de rester lucide et voter pour ce qui se montre le moins toxique ne saurait nuire !
  • LA VILLE IDÉALE (2012)
    Note : 15/20
    Projeté à Univerciné Italien Nantes 2013. Les applaudissements (avant projection) dans la salle du Katorza de l'acteur sympathique du brillant "Nos meilleures années", une célébrité dans son pays, étaient pleins de promesses, assez pour embarquer sans résistance dans son labyrinthe kafkaïen. Or, à moins de cultiver ces ambiances du "tous pourris", de se contenter des réparties entre les oppresseurs et l'écolo ridicule tant le trait est forcé, on reste dubitatif... Voire carrément en rase campagne passé une heure. Domine cette belle dame perchée sur ses chaussures compensées, plus grande que celui qui la vénère. Le genre mannequin géant cher aux petits hommes de notre monde politico-financier, aussi majestueuse qu'une grande rose posée dans un vase fuselé ou allongée pour que le public se rince l'oeil. Hormis cette présence surréaliste, c'est une suite de bévues virant à la noirceur épaisse. Encore l'acceptation de l'apocalypse en marche, celle-là même dont l'actualité nous abreuve au quotidien. Quelques jours après persiste l'impression d'un dédale inextricable, sans point de vue de l'auteur... Même l'écologie vire à la fumisterie, on est donc désespéré, sans autre perspective que faire avec l'absurde. Un monde en représentation, d'où toute recherche de sens serait vaine. Des moments cocasses, quelques bonnes réparties peuvent aider à tenir et gommer un peu l'impression d'aimer par respect pour une première oeuvre de la part d'un acteur attachant (par ailleurs) plus que par réelle conviction.
  • TEL PERE, TEL FILS (2013)
    Note : 18/20
    Suivre une démonstration cinématographique sans en croire un traître mot. Simplement parce qu'elle est de très grande qualité. C'est le cas ici où il semble impossible, dans la vie réelle, que même suite à la bévue d'une soignante, deux enfants de cet âge puissent être échangés... En le considérant comme pure fantaisie de cinéaste, on a tout loisir d'apprécier le filmage des bambins et de leurs parents mis à l'épreuve. C'est magnifiquement mené, à bonne distance et avec humour. On glisse du papa le plus joueur au superman boudeur ou père des temps présents, ou clone de père, comme on voudra, le plus feinté de tous à mon humble avis... J'ai trouvé les contextes familiaux par trop inégaux (l'enfant unique parachuté avec d'autres enfants en bas âge y trouve forcément son compte alors que le petit ribouldingue chez le couple très comme il faut, hum, adaptation de surface)... Restent les mères, virant jumelles à l'écran, deux rusées dans leur manière d'avancer les pions... Etrange chassé-croisé familial tel qu'il est, improbable à moins de bascule totale des institutions dans la déraison au motif que "le sang c'est le sang"... En élargissant le propos à la société entière hors de cette question, le film peut ouvrir débat.
  • ALI A LES YEUX BLEUS (2012)
    Note : 16/20
    16,5/20 : Remarqué à l'Univerciné Italien nantais 2013 pour sa personnalité. Les contradictions adolescentes sont ravageuses quand s'y ajoute l'obligation identitaire. Ainsi même si l'on naît à Rome de parents égyptiens, il faut faire des choix en tenant compte de l'islam. Ce film l'explique à travers des situations simples où le tiraillement affleure sans cesse. On comprend la difficulté que crée la souplesse de moeurs du pays d'adoption comparée à la bride que sont les valeurs familiales traditionnelles (être renié = impensable). Ils paraissent plus que seize ans les deux copains, Nader l'oiseau sur la branche, fascinant avec son regard bleu lavande et ses allures sensuelles, Stefano le Romain libre d'entraves religieuses, g... butée, volonté franche de s'affirmer, un tantinet mauvaise graine a priori, qui l'entraîne dans la débrouille... Le titre laconique "Ali les yeux bleus" se réclame du poème "Prophétie" de Pier Paolo Pasolini afin d'illustrer discrètement le printemps arabe... Au moins, Claudio Giovannesi prend-il discrètement position en exposant les différents angles qu'il entend décrire. Chaque étape amène le déclic permettant de se mettre à la place des personnages lors des crises (tristesse pour le spectateur médusé que les lentilles teintées nimbant de mystère le regard de Nader soient finalement sacrifiées à l'image, banalisant le personnage en dernière partie !). Les parents, les copains, Brigitte... L'islam semble loin de leurs préoccupations globales au quotidien, voire incompatible... A moins que Stefano, qui lorgne une pudique jeune fille à la chevelure engageante, la serre d'un peu trop près... L'escalade de violence est inévitable.
  • LES ADIEUX À LA REINE (2011)
    Note : 17/20
    Réserves faites sur la vérité historique (où est donc passé le séduisant Conte de Fersen ?), c'est un magnifique condensé des paillettes d'un pouvoir avant la chute. Trois jours pour rester ou fuir... En creux, la masse populaire, ce monstre... Pas de sang, pas de violence frontale. Juste quelques fioritures peu productives, les piqûres de moustique, la pendule... Il est contagieux le pas heurté de cette lectrice imaginaire dans le labyrinthe où elle retrouve, outre ses pareilles, les privilégiés désormais en alerte. On la suit, on tombe avec elle et on se relève aussi. Le château intérieur et extérieur est ainsi arpenté, l'occasion de cadrages d'un rare raffinement. Alors c'est vrai qu'il y a cette liste qui crée le choc. Cause le froissement bien sonore des étoffes lors d'une entrevue collective avec sa majesté. Dommage que les conversations des actrices les plus jeunes soient à l'inverse devinées plus qu'entendues nettement... Les sautes d'humeur de Marie-Antoinette comme les signes que se font en catimini ces dames dans son dos compensent cette lacune (les petites taches de lumière disséminées dans les intérieurs d'un visage à l'autre ou les plans bleutés qui prennent la relève sont pur délice). Quelques flâneries en robe de poupée le long des plans d'eau pour la postérité.Très revigorant à l'image... Un film à oscars que ce Versailles flamboyant, exportable sans difficulté. Le plus est vraiment le fond du film, ce drame qui parle à notre quotidien : milliardaires repus, hiérarchie rempart, flexibilité sans limite... Jusqu'à quand ?
  • I WISH (NOS VOEUX SECRETS) (2011)
    Note : 16/20
    Un divorce et deux frères qui se côtoyaient chaque jour communiquent par portable. Par petites touches musicales et sautillements d'un lieu à l'autre, on met du temps à les différencier... Le mot "audit" dans la bouche du piaffant Ryunosuke sonne bizarrement adulte, son trajet scolaire laisse à penser qu'il est mieux loti que son frère Koichi, gros poupon qui cultive aussi l'adulte en lui, sidéré de vivre au ras d'un volcan qui dépose des cendres sur le linge... Il est impossible d'éviter le rapprochement avec plus invisible, inodore, incolore et bien contemporain au Japon mais si anxiogène qu'on restera sur les papouilles, la complicité des grands-parents venant au secours des géniteurs séparés, ce père laxiste bon copain, cette mère attentionnée faisant partie du décor sans plus... De charmants ébats physiques dont cette longue galopade vers les deux trains à grande vitesse et les voeux crachés au vent qui libèrent d'un futur demandant des pirouettes toujours plus nombreuses. Hirokazu Kore-Eda s'oblige à rester gracieux, prend tout son temps pour enliser les spectateurs (ou les censeurs ?) dans la fraîcheur de l'enfance jusqu'au cou. Las, derrière les gâteaux au goût incertain, se profile l'archipel aux remuantes plaques tectoniques, le marasme socio-économique international, le spectre nucléaire tant passé que récent.
  • A LONG WAY FROM HOME (2013)
    Note : 19/20
    Univerciné Britannique Nantes 2013. Sous des dehors qu'on pourrait croire téléphonés, le traitement est d'un raffinement rare. C'est à la fois bon enfant, pétillant et profond. D'abord la ville de Nîmes, un personnage à elle toute seule, les habitudes du couple (qu'on peut pressentir inutiles, planplan...) alors qu'elles offrent l'occasion d'amener la jeune fille qui met le feu aux poudres. Blonde, fraîche, directe et... intelligente ! L'actrice Natalie Dormer campe à la perfection l'étincelante intruse donnant des suées à tous ceux qui l'approchent... Ensuite cela n'arrête plus, en ménageant une distribution des sentiments aussi équitable que surprenante. On se croirait chez un cinéaste argentin contemporain côté regard. Tout est explicite mais jamais lourd, du charme (l'allure de jeune homme un peu à part qu'est devenu Joseph, le mouvement du pied féminin dans la piscine). Avec en permanence des traits d'humour (le chapeau !), des acteurs bluffants, cette photographie d'une luminosité renversante, ça et là une scène plus intimiste qui en dit long. L'exposition de deux couples, l'un patiné et l'autre comme oiseau sur la branche, desquels se dégage une philosophie, un réalisme dans quoi notre époque déboussolée pourra puiser. Comme cela fait du bien en 2013 de voir un film joli, raffiné à tous points de vue et qui "sonne" vrai !
  • OS INQUILINOS (2009)
    Note : 19/20
    Découvert "Os Inquilinos", documentaire-fiction de Sergio Bianchi datant de 2009 projeté aux Trois Continents Nantais 2013. Une perle rare ! C'est comme si on s'invitait dans la petite famille et son turbulent voisinage. On est placé entre parents et enfants se préparant le matin ou peinant à dormir la nuit, identifiés jusqu'à l'os. Chaque plan dégusté, les dialogues intégrés, les silences ingurgités. Tour à tour grinçant, charmant, d'une profondeur rare. D'une bienveillance de fond qu'on décèle lors du délicieux glissement entre réalité et rêve, souvent endossé par le chien, personnage crucial. On sent le vrai talent de metteur en scène et de conteur derrière ce travail de composition. Un thriller intelligent, de l'action, des montées d'adrénaline, rien qui puisse faire bâiller. Les personnages, mi-victimes mi-espions les uns des autres, sortent de leurs gongs, vous remuent en donnant l'impression d'une presque norme entre voisins (et pas qu'au Brésil !) depuis la production du film en 2009. Cadeau suprême, comme pour moucher le cinéma d'Amérique Latine contemporain qui dit l'extrême cruauté et laisse en plan de manière grossière, "Os Inquilinos" fait qu'au lieu de sortir de la salle anéanti par l'escalade de violence, le spectateur qui en a pourtant pris plein les mirettes s'estime chouchouté.
  • LE FUSIL DE LALA (2008)
    Note : 18/20
    Découvert au Cycle "Reflets du Cinéma Chinois" édition 2012 Cinématographe nantais (bande-annonce Lala's Song ou Gun Lala de Qiang sur You Tube). Ce conte initiatique rend justice aux arbres et invite à discuter de l'âge adulte... Pour ces montagnards rois des cultures étagées (somptueuses !) c'est 15 ans... Des troncs d'arbres sont relayés par des milliers de verticales sur fond de chlorophylle. Tout un savoir-vivre puisé à même la nature et qui ne saurait résulter de peuples bernés par défaut d'instruction ou endoctrinement religieux de tyrans successifs. Ces pacifistes que seraient les Miaos, à tradition exclusivement orale, semblent avoir échappé aux guérillas qui instillent la rage de posséder toujours plus... Peu de mots, des gestes éloquents, des démonstrations brèves. Pas l'ombre d'un rituel guerrier, pas d'arts martiaux dans ces chants et danses utilitaires tout en étant divertissantes. Le regard, les dialogues, les non dits coulent de source, rappelant les croyances indiennes ou inuits en beaucoup plus limpide. Aucune trace de féodalité à part la notion d'ordre. L'important est ce soin régulier à entretenir le lien entre âmes appelées à disparaître et âmes à venir... Livrés à eux-mêmes en cas de catastrophe, ils manquent d'extincteurs, tout en possédant de fort jolis fusils, en particulier le dernier qu'on croirait cadeau pour princesse désireuse d'apprendre le tir. Dans ce coin de Chine, le jeune mâle peut pleurer un petit peu sans risquer le ridicule... Il peut aussi s'éloigner hors de la communauté pour s'endurcir. De là à se croire autorisé à trimballer quatre fagots dans sa brouette, peut-être pas... En dehors de la poudre (qui sert surtout à tirer en l'air) les apports incontournables de la civilisation s'avèrent être les chaussures de tennis... Le brillant des uniformes masculins, les chignons sur le côté des têtes et les jupes courtes qui se balancent à chaque pas aident à garder en mémoire le message rassurant de l'ensemble. A voir par ceux, grands et petits, qui sont las des joutes entre possédants et possédés !
  • ALCESTE A BICYCLETTE (2012)
    Note : 18/20
    Ce qui frappe c'est le mot de la fin ! Seule une comédie peut aller jusqu'à cette extrémité sans faire lever les boucliers de la bienpensance. C'est léger et profond en même temps. Il y règne la fantaisie propre à une libre interprétation d'un classique. Tout y est recyclé pour que les jeunes générations puissent travailler l'argumentation et les anciennes s'indigner... ou s'amuser. Sous des dehors légers, on mesure l'écart qui se creuse toujours plus entre les chloroformés et ceux, volontairement en retrait, qui refusent (la vasectomie illustre bien le degré de folie auquel on est confronté). Film très sain avec ses balades à vélo, sa rengaine italienne meublant le grand vide entre les êtres, à combler par un quelconque sirop. Mentir mais toujours sauver la face s'avère un engrenage assez périlleux dans ce film. Le misanthrope campe le groupe de récalcitrants à l'alignement ultralibéral qui divise, fausse, lamine d'un bout à l'autre du globe et jusqu'aux plus fortes amitiés... Du coup, même si on n'a pas trop apprécié de l'étudier à l'école, Molière vu sous cet angle donne envie, par la parole ou le geste, de préférer chaque fois que c'est possible une pirouette à un empilement toujours plus important de mensonges à soi et aux autres.
  • HENRI (2013)
    Note : 14/20
    Glissé dans la peau d'un travailleur social plein d'écoute on peut tenir les presque 2 heures. Egalement si l'on a juste survolé le milieu des êtres à "absences répétées". Ceux qui s'estiment hors des dérives mentales décrites vont invoquer la fraternité, le respect de tous, abrités derrière un commode et lâche "ne pas juger". Les soignants adhèrent... ou lèvent les bras au ciel tant les borderline(s), capitalisme sauvage accélérant la cadence, reviennent faire partie du quotidien de tout un chacun. Au bout de l'introduction, oupse, grosse ficelle... que Henri le restaurateur ait une femme du style de Lio, étonnement mais on veut bien.. Qu'ensuite il se rapproche de Rosette, léger malaise à moins d'être en apesanteur ou ramené chez les Deschiens au côté naïf mâtiné d'absurde qui rejoint le divertissement. Par bribes à la télé oui. Non stop ainsi, lourd sur l'estomac. Y manque l'intensité de "Quand la mer monte" auquel le regretté Gilles Porte avait contribué. Côté direction d'acteurs, Jackie Berroyer égal à lui-même, le côté nature de Miss Ming et Pippo Delbono bien net, hélas trop éléphants dans un magasin de porcelaine ! Ensemble plaisant pourtant, sauf qu'on peut rester en retrait parce qu'ils sont trop vite cernés dans leur laborieuse quête l'un de l'autre par simple mimétisme. Les lieux décrits, l'atmosphère, les accents font que la démarche globale s'amorce en cahotant, la dernière partie délivrant l'oxygène. C'est le déroulement des étapes, la façon de placer les outrances qui m'ont personnellement éreintée. Un moyen métrage ou même un court suffirait à pareille démonstration. Et ce malgré l'élan qu'on est nombreux à avoir pour Yolande Moreau et son univers ! Cette fraîcheur de vues qu'elle garde. La prochaine fois, espérons-le ;.
  • LA RELIGIEUSE (2012)
    Note : 17/20
    Donne envie de relire Diderot et de revoir la version de Rivette (1966) pour débattre de la liberté individuelle. Une fois passée la cérémonie à plat ventre avec "bâche" qui peut faire croire à un regard empesé du cinéaste, on découvre qu'il n'en est rien ! Que le sort de la jeune fille dépend étroitement des mères supérieures, la première bienveillante, chloroformante, la seconde narcissique perverse, la troisième bouleversante bien qu'à force de se répandre elle en devienne aussi "frappée" (Isabelle Huppert) ! Bien sûr, Pauline Etienne a l'innocence requise, le refus des compromissions, lui manquerait peut-être un brin de sensualité ?... En parallèle il y a cet appel au secours, cet homme reçu comme devant un confessionnal et retrouvé dans la diligence (pour aller où, le spectateur peut tout imaginer là encore, qui sait ce qu'il peut advenir sous protection masculine :-) !). J'ai bien aimé le soin apporté aux lieux, ce maquillage et cet éclairage a minima, les costumes m'ont parfois surprise (ces carrés blanc bien repassés sur la poitrine, ce tissu bleu de robe de chambre et... on voit les épingles !). Bien qu'attachée au calvaire que vit La Religieuse en question, je trouve qu'il y a un fort écho avec aujourd'hui, après le cocon familial, les études qui illusionnent par rapport au monde du travail avec ses restructurations incessantes. Ainsi malgré moi, bien davantage que le sort de ces pauvres filles, j'ai senti, en creux, le défi que les jeunes générations ont à relever face à l'ultra-libéralisme contemporain toujours plus dévastateur.
  • EN ECOUTANT LE JUGE GARZON (2011)
    Note : 18/20
    Documentaire en noir et blanc découvert au Festival Espagnol de Nantes 2012. Des lignes verticales coupent bizarrement les nez et les mentons des deux hommes attablés avec un verre d'eau chacun, il y a du tabou dans l'air... L'écrivain Manuel Rivas d'emblée séduisant, tout le contraire d' inféodé, jamais mielleux ni cassant. Garzon, avec sa bonne face ouverte et son langage simple d'enseignant conférencier bon père de famille est de surcroît sympathique. Place à l'éthique que les tyrannies n'ont pas et que les affaires n'ont plus. L'exemple du défunt Falcone, un juge italien persécuté de son vivant et qu'une foule nombreuse vint vénérer lors de ses funérailles est invoqué... Terroristes, tyrans, lobbies, tous mis dans le même sac sont dans le viseur de Garzon. Que l'on trouve dans ces entretiens quelque chose d'exclusivement hispanique, la lutte contre le franquisme au mépris de toute diplomatie internationale, ou bien les ravages galopants de la mondialisation qui veulent la fin de l'humanité, une constante émerge : dictature = corruption. Démocratie = l'application des lois, non leur détournement par le délitement de procès... C'est ce que martèle le petit juge menacé à l'époque du tournage et désormais acquitté moyennant de ne plus exercer. Le spectateur identifié à la cause défendue adhère à cette version des faits. Car on dirait deux bons copains qui causent. La forme statique rebuterait sans la jolie pirouette de fin !
  • QUERELLES (2010)
    Note : 18/20
    D'abord du noir complet et des parlotes sous-titrées, hum... Ensuite, la petite voiture filmée comme un jouet sur circuit embarque à grands coups de dialogues sous-titré et un son très feutré. On sent l'apport Kiarostami dans la manière de prendre son temps, de surprendre le regard en apportant des angles inattendus pour d'un coup s'inviter dans l'habitacle du véhicule et ses occupants, ouf, nous y voilà ! Les prises de vue passent des plans généraux très larges au noir d'un capot automobile ou d'un tunnel de train, quel voyage... On est surtout identifié à cet enfant aux allures aristocratiques taxé d'une envie de faire pipi dès qu'un arbre apparaît, quoique le couple fournisse aussi son effet miroir sans problème. Une panne, un pont, des fruits éparpillés... L'angoisse du noir à la pleine lumière, le vent sur la végétation, des chemins de terre étroits à la route qu'on quitte suite à une pulsion du conducteur, des trombes d'eau... Un film iranien, vite éjecté par les autorités contemporaines, se doit de dire sans dire. C'est long et pourtant on s'arrête ou on roule avec ce duo plein de gestes et le petit entre eux qui n'en perd pas une... Les jeunes cerveaux exècrent les chamailleries adultes et les reproduisent à leur tour en ménage. L'Iran, pays à jeunesse largement majoritaire cloué sur son sol démontre l'impasse totale sur ce point, on pense au dernier succès d'Asghar Farhadi au message très proche.
  • THE HAPPY LANDS (2012)
    Note : 19/20
    Univerciné Britannique Nantes 2013. Oeuvre majeure rencontrant compréhensible réticence... Le synopsis rebute si l'on néglige de regarder la vidéo correspondante, laquelle s'avère reconstitution historique des plus agréables à suivre. On n'est jamais déçu lors de la projection tant, au niveau culture générale, c'est d'exceptionnelle qualité. Scénario, son, image, tout accroche et sans baisse de régime. Pour peu que l'on parvienne, à notre époque du "tout numérique et du tout positif" à vouloir apprendre de l'histoire au lieu de se contenter de nos manuels incomplets, des productions littéraires ou cinématographiques édulcorées et autres miroirs aux alouettes. Indispensable sortie du chloroforme... Il s'agit bien de la violence sournoise amenant les aberrations comportementales, l'hystérie collective, les divisions, boucs-émissaires, tout ce qui conduit aux extrémismes et à la barbarie... La spirale à l'origine des pires chaos de l'humanité. Mais traitée objectivement. Regard humaniste derrière la caméra, des moments heureux, cette solidarité non feinte des effondrements, quand les meilleurs du lot s'illustrent. La manière de filmer dans le genre poético-réaliste du réalisateur ménage le public beaucoup plus que notre sordide actualité. Ce pan de l'histoire écossaise (peut-être un peu didactique parfois, c'est là son moindre défaut) entre dans les consciences des spectateurs qui ont pris la peine de s'y pencher en laissant sa marque... Témoignages autour de 1926, quelques bribes d'analyse par des contemporains, un tour complet du sujet, évident parallèle avec notre monde actuel, en quelque sorte une mise en garde !
  • PHILOMENA (2013)
    Note : 18/20
    18,5/20 : Univerciné britannique Nantes 2013. Sacrée petit bout de femme que Philoména sous les traits d'une actrice âgée pleine de répondant, véritable bras d'honneur au glamour, à la chirurgie esthétique. C'est la fête perpétuelle dans cette histoire grinçante et romantique à la fois, sans jamais qu'on dérive flagornerie où clichés. Ainsi, le couple Martin Sixmith et Philoména fonctionne à plein, leur objectif jamais perdu de vue, chacun conscient des abîmes intergénérationnels. Deux tempéraments complémentaires pour une mission funambule, sur fond d'institutions à couvercle plus ou moins hermétique... En chemin, Stephen Frears habille ses personnages de sa verve (réalisateur au mieux de sa forme dans ce film !). La manière de raconter un livre à partir d'un moyen de transport, sans crier gare une ou deux répliques cinglantes, de celles qui émanent des personnes revenues de très loin dans la souffrance intime. On a les yeux qui s'embuent pendant un long cri de douleur, on éclate de rire la séquence suivante... Tout repose sur la pétillance de Judi Dench, "la plus mignonne des petites vieilles du grand écran". Elle donne envie d'avoir son genre de rides (très attirante plastique même filmée en gros plan avec toutes les marques de l'âge), ce naturel, ce timbre de voix aussi, ce phrasé, cette manière d'articuler chaque syllabe, son sens de la répartie en cas d'attaque. Un pur délice... La bonne distance par rapport à l'événement de départ, des prises de vue avec coupures aux bons moments, l'action qui n'arrête pas, font écarquiller les yeux et se dire, ah, comme ils ont dû tous s'amuser pendant le tournage !
  • ONDINE (2009)
    Note : 16/20
    Dès le début, le filet ramenant la sirène avec cette caméra qui balaie large ou se recentre sur la capture, on part dans le fantastique. Et voilà qu'elle vomit cette créature, répond au pêcheur... Crainte de s'orienter vers un scabreux mélange des genres, voire le désastre. Surtout que le filet d'après, cette prise saumonée inédite résultant du chant, déclenche l'hilarité. Là-dessus une petite handicapée, et puis une famille qui sent le soufre, on a décidément peur pour le réalisateur. Ne reste qu'à compter avec le caractère un peu à part du père (Colin Farrel), ce Syracuse, Circus, pour aller plus vite "le clown". Sa marginalité fait qu'on suit la petite pâlichonne (Alison Barry), une pipelette craquante... C'est elle qui inquiète le plus. Du chêne religieux lors des confessions à l'hôpital ou en pleine causerie sur route (joli plan de la petite tête de l'enfant vue de la voiture), on passe aux sauts dans l'eau pour moult raisons. En pleine vie communautaire sur une île de buveurs envahie par toutes sortes de gros poissons. Brillante et brève plongée explicative justifiant le point de départ, l'histoire s'avère plus plausible qu'escompté... Possible d'apprécier à condition de pouvoir alterner l'étrange, le grave et quelques pirouettes de pince-sans-rire. La splendide Alicja Bachleda-Curus aurait gagné à limiter ses vocalises de surface (si plates, si artificielles qu'on se boucherait bien les oreilles) et à les propulser tout de suite vers les profondeurs.
Notes de L.Ventriloque
(par valeur décroissante)
FilmNote
ELENA (2011) 19
BLANCANIEVES (2012) 19
BENDING THE RULES (2013) 19
A LONG WAY FROM HOME (2013) 19
OS INQUILINOS (2009) 19
THE HAPPY LANDS (2012) 19
BONNE ANNEE GRAND-MERE ! (2011) 18
LA ROUILLE (2011) 18
LE FUSIL DE LALA (2008) 18
EN ECOUTANT LE JUGE GARZON (2011) 18
QUERELLES (2010) 18
LES TROIS SOEURS DU YUNNAN (2012) 18
ALCESTE A BICYCLETTE (2012) 18
SUZANNE (2013) 18
TEL PERE, TEL FILS (2013) 18
PHILOMENA (2013) 18
SCIALLA ! (2011) 17
LA VOIX ENDORMIE (2011) 17
LES ADIEUX À LA REINE (2011) 17
JOURS DE PECHE EN PATAGONIE (2012) 17
LES BÊTES DU SUD SAUVAGE (2011) 17
LA RELIGIEUSE (2012) 17
THE DEEP BLUE SEA (2011) 17
BLUE JASMINE (2013) 17
LA TÊTE EN L'AIR (2011) 16
ESPAGNOLS ! (2010) 16
N'AIE PAS PEUR (2011) 16
I WISH (NOS VOEUX SECRETS) (2011) 16
ONDINE (2009) 16
SMALL CREATURES (2010) 16
IT'S A DREAM (2012) 16
AUGUSTINE (2011) 16
UNE JOURNÉE À ROME (2012) 16
LES EQUILIBRISTES (2012) 16
ALI A LES YEUX BLEUS (2012) 16
DEWENETI (2006) 16
WE NEED TO TALK ABOUT KEVIN (2011) 15
LES SOLDATS DE SALAMINE (2003) 15
LA CHASSE (2012) 15
THÉRÈSE DESQUEYROUX (2012) 15
LA VILLE IDÉALE (2012) 15
UN TRANSPORT EN COMMUN (2009) 15
PLEURE, Ô MON PAYS BIEN-AIMÉ (1951) 15
TANGO LIBRE (2012) 14
THE MASTER (2012) 14
HAVING YOU (2013) 14
HENRI (2013) 14
PAPADOPOULOS AND SONS (2012) 13
A ALEGRIA (2010) 13
LOS MUERTOS (2004) 12