Critique(s)/Commentaire(s) de D.W. GRAPHITE

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  • HIGH HOPES (1988)
    Que le cinéma britannique est pétillant ! En voici encore un exemple charmant, exquis. Grande-Bretagne, rapports de classe. Tel pourrait être le sous-titre de ce film narquois et gentiment féroce. Bourges et prolos, parvenus et vieux idéalistes s'y affrontent à coups de petits fours et de tasses de thé, sous le regard las et terriblement émouvant d'une vieille dame un peu dépassée par les évènements. Un film "au quotidien" sur l'Albion d'aujourd'hui.
  • LUI ET MOI (1988)
    Ce qui pourrait paraître comme un regard malicieux sur la paranoïa masculine est en fait une manifestation de misoandrie charactérisée, et Doris Doerrie n'en est pas à son coup d'essai. Heureusement, le public français avait jusqu'à présent eté épargné de ses précédentes variations sur le thème, à part "Mes deux hommes" tous aussi douteux. La présence de Griffin Dunne confirme si besoin en était le manque d'originalité de la réalisatrice, qui a vu "After Hours". Sa composition ne fait qu'ajouter à notre agacement constant.
  • CHER FRANGIN (1988)
    Sujet tabou, la guerre est ici abordée de front, avec sincérité et justesse, bien qu'avec un certain militantisme. Mordillat énumère beaucoup de "détails" qui ont longtemps échappé à la conscience nationale : incorporation forcée, guerre colonialiste, conflits entre les officiers, torture, moyens expéditifs, violence contre la population civile, etc. Avec un regard de tendresse pour une couche populaire "résistante" et un excellent rythme de narration, Mordillat a fait un film qui ouvre la voie.
  • ROCKY 5 (1990)
    Après avoir enflé démesurément, jusqu'à faire de Rocky et de Rambo le même personnage, Stallone revient à de meilleurs sentiments : virage à 180° et retour sur le Rocky des débuts, loser et anti héros. Initiative salutaire, car ce Rocky-ci est certainement le meilleur de la série, efficace et intelligent (je vois d'ici les ricanements de certains. ), réussissant presque, par moments, à nous émouvoir (un comble !).
  • ROXANNE (1987)
    Ah, ces Americains ! Pour nous faire enfin une comedie pas trop tarte (et meme carrement reussie), ils sont obliges de puiser dans nos classiques. Cyrano de Bergerac, en l'occurence. Le film de Schepisi reprend les morceaux de bravoure de la piece de Rostand dans un melange de drolerie et de tendresse, dans la plus pure tradition des grands classiques.
  • NOTTURNO (1988)
    Les années noires de Schubert, compositeur maudit et miraculeux. Il n'est pas question, ici, de retrouver l'exubérance d'Amadeus, ni l'idolatrie triomphante du commun des films-biographies. Fritz Lehner a préféré mettre en scène le parcours d'une âme tourmentée, meurtrie, humiliée. Tourments admirablement rendus grâce à la caméra de Fritz Lehner et à son rythme (très lent, mais où jamais on ne s'ennuie), aux superbes images du chef-opérateur Gernot Roll et à l'interprétation sensible d'Udo Samel.
  • LES TORTUES NINJA (1990)
    Qu'est-ce qu'ils ne vont pas encore nous inventer ? Allons bon, finalement, on les aime bien, ces tortues ninja et leur ange gardien. Ce n'est pourtant pas vraiment sérieux. Alors autant s'amuser sans arrière-pensée. Les colorants ne sont dangereux que si l'on en abuse. (Olga von Clap)Les scénaristes d'outre-Atlantique n'en sont malheureusement pas à une idiotie prêt. Avec les Tortues ninja, on atteint de nouveaux sommets. Gageons qu'ils ne tarderont cependant pas à être encore dépassés.
  • LES DOORS (1990)
    Tout d'abord, éviter un malentendu. "Les Doors" est autant le portrait d'un groupe de rock et de son leader que de l'époque où ce groupe phénomène connut son (immense) heure de gloire, pas encore éteinte. C'est plutôt ce second aspect du travail de portrait d'Oliver Stone qu'il faudra privilégier, remarquablement traité, tant scénaristiquement qu'esthétiquement. Les Doors, alors s'avèrent surtout des messagers des sixties, avec un hérault, Jim Morrison (Val Kilmer, sidérant d'exactitude). Leur musique est omniprésente, hypnotique. Message reçu, quatre sur cinq.
  • TOM ET LOLA (1989)
    Voilà le film que l'on attendait pas. D'une grande beauté plastique, très sensuel, "Tom et Lola" est l'histoire de deux enfants pas comme les autres, qui découvrent la vie et l'amour, de deux enfants qui quittent l'enfance. Un poème et un conte, un hymne à la vie, à l'amour et à la liberté "Tom et Lola" est tout cela, et plus encore : un des grands moment de bonheur au cinéma de ce début d'année. Que ce film, en plus, soit un pur produit français fait plus que nous rassurer sur le potentiel insoupçonné de notre cinéma.
  • JUSQU'AU BOUT DU REVE (1989)
    Voilà bien l'histoire la plus incroyable de l'année ! Aussi insolite que belle, d'ailleurs. Car derrière sa candeur et sa nostalgie profonde, ce film est beau comme un rêve d'été. Cette quête du bonheur et cette rédemption par le rêve réalisé (je ne dévoilerai pas davantage de l'histoire pour ne pas en flétrir la fraîcheur) ont dans leur naïveté quelque chose de bon enfant, de profondément américain. Le rêve, dernier refuge dans une société dépersonnalisée et, depuis la mort des sixties, sans idéal.
  • MOITIE-MOITIE (1988)
    En principe, difficile de faire moitié-moitié avec Michel Boujenah, il a tellement de charme qu'il tire naturellement toute la couverture à lui. Ici aussi, dans cette réalisation, Paul Boujenah ne peut que "rouler pour" son frangin, d'autant que leur propos est le même : tendresse et bonheur de l'enfance. Dans ce show, Zabou n'est heureusement pas qu'un sparring partner passif. Et c'est un peu ce qui permet au film de ne pas verser dans l'unilatéral. L'ensemble, bien que sympatique, manque cependant de mordant.
  • MEURTRES EN NOCTURNE (1989)
    A l'été, les compagnies américaines raclent leurs fonds de poubelles. Le résultat : des films du (petit) calibre de "Meurtres en nocturne", thriller poussif affalé sur sa série de meurtres et qui capitalise sur le sport le plus ennuyeux du monde : le base-ball. Un seul conseil : évitez résolument la partie, sous peine de sommeil (et c'est encore la meilleure chose qui puisse vous arriver), sinon de désespérance.
  • ERREUR DE JEUNESSE (1988)
    Voilà un film qui sent ("empeste" dirons certains) la première oeuvre dès le premier plan. L'auteur, pour ses imperfections, pourra toujours se prévaloir de son titre. Car le film en a beaucoup, des imperfections. Avant tout le maniérisme de la mise en scène et les lourdeurs et maladresses des dialogues. Mais le film a quand même plus de charme que de maladresses. Ses dialogues ne récèlent pas que des aphorismes bancals. La poésie du film, sa sensualité et son désespoir chaleureux ont de quoi gagner notre sympathie.
  • KENNY (1988)
    L'enfant est mignon, le sourire engageant et le regard malicieux. Puis, sous le mince thorax, plus rien ! Amputé du bassin et des jambes, il se meut sur ses deux bras et se porte très bien, merci. A partir de là, on aurait pu craindre le pire : un portrait de monstre, genre Freaks, ou un plaidoyer apitoyé et larmoyant, genre "A vot' bon coeur; aux larmes, citoyens" sur le monde triste et dur des handicapés. Heureusement, le réalisateur a habilement évité toute pacotille. Son film et sincère et franc-jeu. Et puis, qu'est-ce que le normalité ?
  • TOUT POUR REUSSIR (1990)
    John Boorman fut le réalisateur d'"Excalibur". A l'image de la carrière de son auteur, ce nouveau film est trop inconstant pour être vraiment convaincant. Emule de Capra, Boorman a voulu faire une oeuvre optimiste. Mais la frontière entre optimisme et mièvrerie comporte des brèches fatales. Et Boorman, qui enchaîne les meileurs moments aux pires (les plus risibles) avec une facilité déconcertante, ne verse que trop souvent dans la mièvrerie. Le seul intérêt de ce film trompeur restent finalement ses tableaux en trompe l'oeil. Edifiant.
  • NUIT D'ÉTÉ EN VILLE (1990)
    Michel Deville s'est à nouveau essayé à son habituel numéro de virtuose. Cette fois-ci, cependant, la démonstration hédoniste tourne à vide. Le film est certes intelligent, mais il a trop tendance à s'écouter parler. On y perd la sensualité du couple, et l'agacement l'emporte sur la sympathie que l'on pourrait éprouver pour les personnages. Dommage, car ce huis-clos rythmé par d'incessants mouvements de caméra rapprochée avait de prime abord de quoi séduire, et Jean Hugues Anglade est excellent.
  • LE CRIME D'ANTOINE (1989)
    Encore un scénario indigent, inepte, niais, bref totalement inutile. La mise en scène, plate et complaisante, n'arrange pas les choses. Quant aux acteurs, dirigés à la neurasthénique, ils jouent le jeu avec une application nonchalante. Un jeu où le gagnant n'est pas le public.
  • NOYADE INTERDITE (1987)
    La verite passe par les femmes, dans ce polar psychologique et pince-sans-rire, filme pa un cineaste qui aime les femmes. Elles sont donc superbes (et mysterieuses), de Anne Roussel a SuzanneFlon, de Gabrielle Lazure a Elizabeth Bourgine, de Marie Trintignant a Andrea Ferreol, et est-ce un hasard si les morts sont des hommes ?
  • MISTER FROST (1989)
    On a bien du mal à reconnaitre ici un film français, ce que "Mister Frost" est pourtant. Mais ses concepteurs ont compris que pour vendre leur produit aux Americains (donc au marche le plus lucratif), il fallait un traitement à l'américaine. C'est-à-dire privilégier le spectaculaire à l'intimisme, l'action à la psychologie, les effets visuels au scenario, le mystérieux au poétique. "Mister Frost" est un thriller diabolique (forcément) et intrigant, très bien joué. Comme un bon produit made in USA. Et c'est un film français.
  • TRIPLEX (1990)
    Une pitrerie franchouillarde de plus, bien agitée, cédant volontiers à l'affolement et à la crise de nerfs, aux dépens du scénario. Bon point, cependant : une nouvelle arrivée au charme fou, Cécile Pallas, à laquelle on souhaite la bienvenue sur nos écrans et une belle carrière (donc de meilleurs films).
  • LES SECRETS PROFESSIONNELS DU DOCTEUR APFELGLUCK (1990)
    Un psychanalyste pas très sérieux (un escroc ou un charlatan, au vu de ce qui va suivre) nous propose à des indiscrétions au sujet de certains de ses clients, et c'est parti pour une comédie à sketches, très Orchestre du Splendid, mais Splendid en manque d'inspiration. A part une séquence joliment balancée (le jeu télévisé) le programme est fade et facile, pres que désinvolte. Décidément, il suffit quelquefois de bien peu (d'imagination) pour faire un film.
  • MISSISSIPPI BURNING (1989)
    Alan Parker est un cinéaste efficace, qui sait parfaitement doser ses effets. Ceci, il l'a maintes fois démontré. En revanche, on pourra déplorer son recours à la violence (exacerbant ce "point de non-retour" où les "bons" sont obligés d'avoir recours aux méthodes des "mauvais"). Par ailleurs, s'il dépeint fort judicieusement la communauté blanche du Sud, il n'en fait pas moins un portrait injuste des Noirs, passifs et assistés. "Mississippi burning" est un pamphlet autoritariste contre le racisme.
  • AFFAIRES PRIVEES (1989)
    Dans sa forme, il n'y a rien à redire de ce solide thriller de Mike Figgis (nettement mieux ficelé que son précédent) bien mené par Andy Garcia et Richard Gere et où l'on retrouve tous les bons ingrédients du genre. Plus gênant, est cependant le discours du film, résolument focalisé sur l'aspect viril de la rivalité entre les deux hommes. Ceci est peut-être vrai, dans le fond, pour tous les affrontements et pour toutes les luttes pour le pouvoir, mais la réalité est quand même plus subtile, que diable !
  • CYRANO DE BERGERAC (1989)
    Ce "Cyrano" tient moins de l'épopée que de l'opéra. Rappeneau a traité d'égal à égal avec l'oeuvre maîtresse de Rostand, qu'il a prise à bras le corps pour en faire une adaptation parfaite. Avec même (tendez bien l'oreille) quelques alexandrins en plus des originaux. Dans le tourbillonnement constant qu'est ce "Cyrano" émergent des comédiens fabuleux : Depardieu dans un rôle qui entrera dans l'histoire, Weber magistral, Anne Brochet aussi délicate que vigoureuse. Et jamais le tumulte ne devient cacophonie, jamais ne se perd l'intime .
  • VALMONT (1989)
    Moins spectaculaire que la "version Frears", l'adaptation des "Liaisons dangereuses" par Forman n'en est pas moins réussie. Seulement, là où Frears se voulait virtuose (et y réussissait brillamment), Forman a cherché l'authenticité. Celle des rapports sociaux (suivez le portrait des domestiques, gommés chez Frears), comme celle même que sous-tendait le récit épistolaire du roman de Choderlos de Laclos. Un bon point pour Forman, superbement servi par des acteurs merveilleux.
  • MY LEFT FOOT (1989)
    Daniel Day Lewis est un comédien formidable, il l'a déjà montré dans maints précédents films. Ici on a l'impression qu'il s'est carrément dopé, tellement s'impose sa démonstration, que doivent jalouser autant Robert De Niro (assagi) que Mickey Rourke (qui panse ses plaies). Si on n'est pas trop allergique au jeu hyper-expressionniste, on applaudira frénétiquement la performance. Sinon, on pourra se rabattre sur les autres comédiens et sur la mise en scène, sentimentaux certes, mais émouvants de sobriété.
  • L'UNION SACREE (1988)
    Voilà un film que l'on aurait pas de remords à déconseiller. De bout en bout, c'est un moment bien désagréable. Malgré sa mise en garde en guise de conclusion-de-conclusion (et qui, un comble ! , se veut un avertissement contre cette même violence qu'il délègue à ses personnages principaux), le film n'a rien à voir avec un essai contre le terrorisme. Au contraire, c'est une mise en scène dangereuse, à l'appel au racisme et à l'intolérance devient une suite logique, comme la violence fut une réponse à la violence.
  • BLACK RAIN (1989)
    L'ethnocentrisme, l'autosatisfaction et le mépris des autres cultures, voilà bien l'un des douteux apanages du cinéma américain. Ridley Scott a mis son efficacité cinématographique au service de cette "cause", et cela donne "Black rain", accumulation des clichés et des lieux communs les plus automatisés autour du Japon. Et voilà que le parvenu veut donner des leçons (de civilisation ? ) au sage. Il faut dénoncer ce film pour ce qu'il est : une saloperie.
  • LA FETE DES PERES (1990)
    La comédie française semble pouvoir se passer du meilleur (on a vu bien peu de bonnes comédies, ces derniers temps), elle ne peut pour autant se passer du pire. "La fête des pères" n'est pas loin de ce pire : une histoire niaise et simpliste, des personnages insipides, des dialogues sans originalité ni la moindre intelligence, des images à la carte postale. Bref, on prend les spectateurs pour des touristes, si ce n'est des simples d'esprit. Léger, trop léger. Non vraiment, à "la fête des pères" on n'est pas à la fête.
  • BOUGE PAS, MEURS, RESSUSCITE (1990)
    Dans l'auto-flagellation, les Soviétiques n'ont pas leur pareil. Les films de cette veine, tendance majoritaire de la production soviétique que de l'ère de la glasnost, sont terribles, d'une tristesse insoutenable, sans espérance et sans la moindre illusion sur le passé comme sur l'avenir. On ne dira pas, après cela, que les Soviétiques se couvrent les yeux. Au contraire, ils montrent et disent tout, loin de la langue de bois, loin de la propagande souriante, loin des clichés et des impératifs de divertissement. Loin d'Hollywood.
  • CHAMBRE A PART (1989)
    "Chambre à part" n'a de la comédie que l'apparence. Bien vite, nous nous apercevons que Michel Blanc arbore sa mine des jours graves, sans parler de Jacques Dutronc, dandy en rupture de ban. Splénétique et terriblement désenchanté, "Chambre à part" est l'histoire de quatre personnes qui ont mal à la vie ouvertement ou secrètement. Un scénario de très belle facture et un quatuor d'interprètes remarquables font de ce film une oeuvre solide et durable.
  • UN MONDE SANS PITIÉ (1989)
    Un dandy en deuil de ses utopies et du monde tel est le personnage central de ce film de l'après-les illusions. Avec poésie et sans pathos, avec le rythme de la ville et sans les clichés de l'époque. Et avec des interprètes qui savent mesurer la justesse de ton : Hippolyte Girardot, Mireille Perrier (merveilleuse) et un nouveau venu qui promet, Yvan Attal. "Un monde sans pitié", premier film d'un jeune cinéaste de 28 ans, nous annonce aussi un vent de renouveau dans le cinéma français. Il était temps !
  • SIDEWALK STORIES (1989)
    Malice et tendresse sont les maîtres mots de ce film chaplinien de Charles Lane, un nouveau venu du cinéma black américain (heureusement) plus proche de Spike Lee que d'Eddie Murphy. Son amour pour ses personnages, sa peinture du milieu des sans-abris (jamais misérabiliste, sauf la fin, seul ratage du film), et sa constante auto-dérision font de cette comédie qui flirte avec le mélodrame une des bonnes surprises de la saison. Il ne lui manque peut-être qu'un peu de rythme, mais surtout, ni la couleur, ni la parole.
  • DOCTEUR PETIOT (1990)
    Le parti-pris expressionniste, et donc poétique (et non biographique) est remarquablement servi par la mise en scène et par l'interprétation monumentale de Michel Serrault. Dommage seulement que le scénario connaisse quelques moments de flottement et que les seconds rôles soient autant sacrifiés (littéralement vampirisés par la figure titanesque de Serrault-Petiot. Christian de Chalonge a fait un bon film, mais il est passé à côté d'un grand film.
  • LET'S GET LOST -CHET BAKER- (1988)
    Personnalité légendaire du jazz, Chet Baker allait en connaître les cimes comme les abîmes. A l'ascension rapide du jeune premier, beau comme une divinité grecque allait succéder la descente aux enfers de la défonce. Mais qui était vraiment Chet Baker ? Le film de Bruce Weber adopte le phrasé aérien et fumigène du virtuose de la trompette et fait ressortir la duplicité d'un personnage hors normes. Les témoignages se contredisent, mais faut-il faire la part de la réalité, la part du mythe ? Le jazz continuera à veiller jalousement sur ses légendes.
  • JEU D'ENFANT (1988)
    Le sujet aurait pu donner un film diabolique et même joliment pervers. Rien de tout cela, hélas ! La complaisance avec laquelle l'histoire est décrite et filmée fait tout capoter. Une banalité mineure, comme le (mauvais) cinéma, en passant par Avoriaz, en produit au kilomètre.
  • ADIEU AU FAUX PARADIS (1989)
    Tevfik Bacer, cinéaste turc établi en RFA, est au coeur du problème du déracinement qui déchire une communauté qui subit violemment le choc de deux cultures aux antipodes. Ce choc, ce sont les femmes surtout qui l'encaissent, passivement ou, comme ici, en réagissant. Le cinéaste en parle avec sensibilité et avec force. Sa maîtrise des moyens du cinéma fait le reste, et donne au film efficacité et force de conviction, sans jamais céder ni à la sensiblerie, ni au voyeurisme, ni à la stylisation, qui sont le lot commun des films de "femmes en prison".
  • PRESUME INNOCENT (1990)
    Les séances de tribunal constituent un exercice (de rhétorique) où le cinéma américain excelle. A cet égard, "Présumé innocent" est une démonstration louable, où Alan Pakula a retrouvé ses bons reflexes, tirant bel avantage de la fantastique présence d'un Harrison Ford magistral de désarroi et d'ambiguïté. Le scénario, très bien ficelé, de ce "Présumé innocent" réserve des surprises non négligeables, et même si la séance est un peu longue, on n'a jamais l'occasion de s'ennuyer.
  • PALOMBELLA ROSSA (1989)
    N'en déplaise à ceux qu'il agace ou exaspère, Nanni Moretti continue impavide sur son cours autarcique. De ses films, modèles d'égocentrisme maniaque, celui-ci est peut-être le plus émouvant. Parce qu'il est l'aveu de la perplexité d'un homme, d'un intellectuel, face à son parcours, à sa famille politique en dérive, à sa société. Le plus échevelé et le plus rigoureux des nouveaux cinéastes italiens, Moretti rend au passage un hommage à Fellini. Et le nouveau rejoint en grandeur les anciens.
  • MONA ET MOI (1989)
    Sympathique comme ne l'est que le cinéma de famille, "Mona et moi", nous permet de retrouver Denis Lavant (en attendant Carax. ) et Jean-François Stévenin, dans une ambiance de rock zone de bon aloi. Rien que pour cela, il mériterait notre gratitude. Hélas, le film ne présente guère plus d'intérêt que cette réunion de famille. Un scénario inexistant en réduit considérablement la portée, et le film avance comme un concert aux impros trop longues et elles mêmes trop vides pour masquer l'absence de morceaux consistants.
  • HENRY ET JUNE (1990)
    Henry Miller est assurément un sujet difficile à traiter. Il y a quelques mois, Chabrol s'y cassait les dons (si, si ! ), maintenant, c'est au tour de Philip Kaufman. Adapter Anaïs Nin et Henry Miller a trouvé Kaufman en moins heureuse inspiration que pour "L'insoutenable légèreté." Il y a certes un très beau travail esthétique(directement inspiré des cinémas français et allemand des années 3O) ainsi que deux très belles et fascinantes actrices, mais l'épisode reste artificiel et n'échappe pas aux lieux communs. Une petite déception.
  • NOCTURNE INDIEN (1989)
    Curieusement, il est moins question ici de l'Inde Eternelle que de l'âme de Fernando Pessoa, le grand poète portugais. Tout comme Pessoa, auquel il se réfère, le personnage principal (J. H. Anglade, fragile et "dustin-hoffmanien") est en quête de soi, et le film retrace fidèlement les étapes finales (terminales dira-t-on, comme pour une lente agonie) de cette recherche. Adapté du roman d'Antonio Tabucchi, le film d'Alain Corneau est peut-être un peu statique, mais on est vite pris par sa magie, son énigmatique mélancolie, sa beauté noire et profonde.
  • CONTE DE PRINTEMPS (1989)
    Peut-être est-ce la floraison printanire, mais le nouveau film d'Eric Rohmer fait partie des plus verbeux de son auteur, réputé pour ses dialogues foisonnants, littéraires, quelquefois agaçants. Les dialogues se font d'autant plus pesants que le film prend du temps à se mettre en place (c'est le plus long réalisé par Rohmer). Mais une fois lancé, on y retrouve le charme, le plaisir et la liberté qui caractérisent l'oeuvre rohmerienne, et on suit les évolutions de ses personnages comme dans une intrigue hitchcockienne (si si !).
  • TAXI BLUES (1989)
    On aime bien, en Occident, cette nouvelle glasnost-vague de films soviétiques qui font le portrait de "l'empire déglingué". Voilà pourquoi on ne se contente plus de seulement adapter des oeuvres sincères (oeuvres-cris tel que le récent "Bouge pas, meurs, ressuscite") mais on fait en sorte de les susciter soi-mêmes, tels qu'on voudrait les voir. Ainsi naît "Taxi Blues", coproduction avec la France, dont on peut douter de la pureté d'intention. La complaisance de ce "Taxi Blues" racoleur en éclipse les rares bonnes phrases.
  • LE MARI DE LA COIFFEUSE (1990)
    Patrice Leconte filme l'idéal. Lumineux comme en un rêve, c'est l'amour fou, le bonheur stylisé, le rêve exaucé et le merveilleux de l'enfance toujours (re)vécue. Présenté ainsi, le film pourrait sembler confiner au kitsch. Or, jamais Leconte ne tombe dans ce travers. Parce qu'il sait nous dire le drame qui couve et parce qu'il sait nous communiquer l'humanité profonde de son histoire. Après "Monsieur Hire", Patrice Leconte persiste et signe, dans une des plus belles voies du cinéma français actuel.
  • LES ENFANTS DU DESORDRE (1989)
    Rien de bien nouveau, rien de bien original et rien de bien folichon dans ce film didactissime et dont la sensiblerie a (contrairement à ses personnages) réussi sa réinsertion. Et lorsque la réalisatrice nous assène finalement une descente aux enfers, façon "Moi, Christiane F. "), cela fait bien longtemps que nous avons jeté l'éponge. Une petite sympathie, pourtant, pour Emmanuelle Beart et Patrick Catalifo, qui se sont pas mal démenés. Ca ne fait pas beaucoup pour un film.
  • PROMOTION CANAPÉ (1990)
    Il y avait un certain filon de la comédie française qui semblait avoir disparu de nos écrans : la comédie boulevardière au rire gras. Une disparition qui ne provoqua pas beaucoup de regrets (la télé ayant pris le relais). Qu'est-ce qui a donc pris à Didier Kaminka de sortir le genre de ses oubliettes ? Quelques bons gags, et puis plus rien. Quelques petits numéros d'invités surprises, et puis plus rien. "Promotion Canapé" a l'humour grossier et la grivoiserie facile. Pour casser du sucre sur le dos de l'Administration, il aurait mieux valu prendre du sucre fin.
  • BANDINI (1989)
    Après les grands espoirs soulevés par son (très beau) premier film ("L'amour est un chien de l'enfer") Dominique Deruddere nous ramène à de moins lyriques attentes. Son "Bandini", platement filmé, est une grosse déception. On serait même en droit de se demander, suprême injure à John Fante, ce qui a valu au livre d'être adapté. Joe Mantegna se fait cabotin, et les autres (le casting reste excellent), toujours filmé en champ, contre-champ, ne sauvent pas une situation, qui sont eux-mêmes hors situation.
  • HALFAOUINE L'ENFANT DES TERRASSES (1990)
    Le pays interdit, ou le paradis perdu de l'antre féminin terres inconnues qu'explore le regard malicieux et sensuel de Ferid Boughedir, cinéaste tunisien, donc arabe, donc au coeur du problème. La caméra est forcément voyeuriste, mais jamais elle ne cède à la complaisance naturaliste ou folkloriste. En revanche, elle se fait volontiers baroque, souvenance d'un monde englouti, sourde mélancolie. Plus qu'une simple visite au hammam des femmes, "Halfaouine" est une introduction à l'âme orientale.
  • JOURS TRANQUILLES À CLICHY (1989)
    Où donc sont restées la malice et la truculence que l'on connaissait à Claude Chabrol ? Chabrol s'est englué dans le roman de Miller comme une mouche dans un pot de confiture. Là où Miller était cru, Chabrol est gras ; là où Miller était insolent, Chabrol est tout juste libidineux ; là où Miller était naturel, Chabrol accumule les artifices ; là où Miller était lyrique, Chabrol est empesé. Ses "Jours tranquilles" sont du toc et de plus mauvais.