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Critique(s)/Commentaire(s) Publiques de
D.W. GRAPHITE

  • LES NERFS À VIF (1991)
    Robert De Niro, démoniaque, au meileur de sa forme, bien vite transforme ce thriller ténébreux en histoire réellement terrifiante qui en clouera plus d'un sur son siège si ce n'est en-dessous. Martin Scorsese démontre qu'il maîtrise parfaitement les lois du film de genre, du moins en ce qui concerne le polar. Déjà considéré comme le plus grand cinéaste américain actuel, il va finir par complexer ses collègues. Il faut espérer qu'il fera aussi des émules. Pour le plus grand bien des amateurs d'émotions fortes.
  • LA BELLE HISTOIRE (1991)
    La générosité échevelée de Claude Lelouch, même si elle le conduit à quelques maniérismes et maladresses, est communicative. Elle agit d'abord sur les comédiens (qui irradient l'écran), sur les spectateurs ensuite, emportés par ce film fleuve où confluent moult rivières narratives. Lelouch est visiblement touché par la grâce. On le savait déjà. Mais cette fois, résolument, le mot doit s'écrire avec un G majuscule.
  • LE BAL DES CASSE-PIEDS (1991)
    Dans la grande et chaotique tradition des comédies à sketches, "Le bal des casse-pieds" est une suite de gags à la réussite inégale, mais où l'on s'amuse de bon cœur aux numéros d'acteurs (tout particulièrement, la délicieuse Valérie Lemercier). A une époque où les joyeux drilles se font rares sur nos grands écrans, des films comme celui de Yves Robert sont les bienvenus : ils égaient la météo (avide de tempêtes) de notre paysage cinématographique.
  • EDWARD AUX MAINS D'ARGENT (1991)
    Par le réalisateur de Batman et de Beatlejuice, voici certainement le film le plus mignon de l'année, une féerie baroco-moderne. A conseiller (vivement) aux plus jeunes comme aux autres. A la fois portrait malicieux d'une Amérique profonde, conformiste et médiocre (voilà pour les amateurs de cinéma sérieux), Edward est surtout un merveilleux hymne à la différence et à la tolérance, dont Edward-le-personnage (ravissant Johnny Depp) devient la figure emblématique. A voir de toute urgence.
  • POUR SACHA (1991)
    Alexandre Arcady était assurément plus à l'aise en milieu pied noir. Mais il n'a pu s'empêcher de faire le voyage en Israël, et il y marche visiblement sur des oeufs (minés), tant il s'efforce à la fois de prendre parti (kibboutz story) et de ménager quand même, maladroitement (mauvaise conscience ? ), les voisins gênants (Palestine aspirine). Le couple romantique Richard Berry - Sophie Marceau est alors un instrument efficace pour faire la différence comme pour donner le change. Mais tout cela ne fait pas très sérieux.
  • AFFAIRE NON CLASSEE (1991)
    Au thème de prédilection du cinéma américain la famille (on n'a pas fini d'essayer de se réconcilier) et une forme de prédilection le prétoire (on n'a pas fini de s'affronter). Mélangez bien, et cela donne Affaire non classée (ou, précédemment, Music Box, au scénario nettement plus intéressant). Ici, l'interprétation honnête des acteurs (avec la sensualité en plus pour Mary Elizabeth Mastrantonio) reste l'intérêt principal de cette énième variation sans originalité mais où l'on ne s'ennuie pas non plus. C'est déjà çà.
  • L'ANNONCE FAITE A MARIE (1991)
    Filmée à l'ascèse (on pense volontiers au cinéma de Straub et Huillet), "L'annonce" de Cuny est au plus près du texte immense de Paul Claudel. Alain Cuny se conçoit comme le serviteur du texte qu'il filme, rien de plus. Tout est là pour souligner l'humilité du metteur en scène. A l'école de Bresson, assurément. A l'école de la vérité.
  • TATIE DANIELLE (1990)
    La magnifique interprétation de Tsilla Chelton, sadique à souhait, fait tout l'éclat de ce film. D'une façon générale, tous les comédiens sont excellents, preuve d'une parfaite direction d'acteurs. Mais globalement, on reste un peu sur sa faim ..... Ce n'est pas que le film soit "raté" mais il est comme en deçà de ce que l'on pouvait attendre de surenchère de la part du réalisateur de "La vie est un long fleuve tranquille". Néanmoins, le film ne manque pas de bons moments. Il n'y a pas lieu d'être trop méchant .
  • NIKITA (1990)
    Luc Besson se positionne résolument comme un cinéaste "mode". Plus proche de "Subway" et même du "Dernier combat" (par le sujet et le rythme), "Nikita" a cependant en commun avec "Le grand bleu" (mais surtout, à nouveau, avec "Subway") le design, que Besson porte ici vers de nouvelles limites, avec un sens aigu du tape-à-l'oeil. Speedé, violent (ah, les grands bleus !), plus BD que clip vidéo quant à l'esthétique, "Nikita" a une façon originale de présenter son personnage vedette (auquel Anne Parillaud confère charme et allure) Ca vaut le déplacement.
  • LA FETE DES PERES (1990)
    La comédie française semble pouvoir se passer du meilleur (on a vu bien peu de bonnes comédies, ces derniers temps), elle ne peut pour autant se passer du pire. "La fête des pères" n'est pas loin de ce pire : une histoire niaise et simpliste, des personnages insipides, des dialogues sans originalité ni la moindre intelligence, des images à la carte postale. Bref, on prend les spectateurs pour des touristes, si ce n'est des simples d'esprit. Léger, trop léger. Non vraiment, à "la fête des pères" on n'est pas à la fête.
  • APRÈS APRÈS-DEMAIN (1990)
    Là où Anémone passe, le vaudeville devient poésie. A fortiori lorsqu'elle est accompagnée de vraies perles comme Agnès Soral, Claude Pieplu et Micheline Presle, ou encore Joanna Pavlis. Et a fortiori lorsque Frot-Coutaz signe scénario et dialogues. Résolument moderne, cette comédie est un ravissement constant, pour ses situations, son rythme, et pour la pêche de ses comédiens. Et qui plus est, elle n'oublie pas d'être émouvante. Un vrai bonheur de cinéma.
  • LA FILLE AUX ALLUMETTES (1990)
    Nourri à Dostoïevsky, Fassbinder et Bresson, le Finlandais Aki Kaurismaki provoque, avec "La fille aux allumettes", l'un des grands chocs cinématographiques de ce premier semestre 90. Un film coup de poing, rigoureux, impitoyable, tranchant comme une lame, sans une image ni une parole de trop. Un règlement de comptes avec le destin, qui marquera longtemps ceux qui l'auront vu.
  • LECTURES DIABOLIQUES (1990)
    Il semble de plus en plus difficile, dans le cinéma du fantastique et de l'horreur, de trouver des scénarii qui tiennent la route. Celui des "Lectures diaboliques" ne manque pas de piquant, mais trop de facilités viennent gâcher la fin du parcours (par ailleurs, pâlement interprété par la mignonne Jenny Wright), et il ne reste des "Lectures" que l'impression d'être passé à coté d'un grand film, comme le cinéma du fantastique et de l'horreur semble désormais incapable d'en produire.
  • CHASSEUR BLANC, COEUR NOIR (1990)
    Clint Eastwood est un cinéaste (et un acteur) à deux visages. Il y a d'un coté l'Inspecteur Harry, violent et facile, de l'autre le réalisateur de "Bird" (et maintenant de "Chasseur blanc, coeur noir"), d'une violence plus subtile. Dialogue avec John Huston par cinéma interposé, mais aussi grandiose réflexion sur l'ego, "Chasseur blanc, coeur noir" est un film où l'on trouvera autant l'aventure que l'empoignade psychologique et la chronique cinéphilique. Du grand cinéma.
  • TUMULTES (1990)
    Un sujet grave et juste, des dialogues beaux et justes, une distribution judicieuse et juste, des acteurs émouvants et justes (tout particulièrement la merveilleuse Nelly Borgeaud). D'où vient alors qu'on sort pourtant du film légèrement désappointé (parce qu'empêché d'une "immersion complète") ? Peut-être parce qu'à force de vouloir faire juste, le réalisateur a filmé de façon trop convenue. Peut-être a-t-il trop fait parler ses personnages et trop peu l'Absent. Peut-être a-t-il trop peu donné la parole au silence.
  • LA DESENCHANTEE (1990)
    La fraîcheur et la spontanéité de Judith Godreche éclairent ce film autrement bien trop "fabriqué" pour être aussi vivant qu'il ne veut le paraître. Très écrit (plutôt bien, d'ailleurs), le film de Benoît Jacquot ressemble plus à une démonstration peaufinée (beau travail de montage, intéressante démarche elliptique) et romanesque qu'à un film de consommation courant. Mais on peut aussi consommer. La jolie Judith est là pour cela, qui réussit ici ses noces blanches à elle, et dont on attend la confirmation avec un rôle plus composé.
  • LE PROVINCIAL (1990)
    Est-ce de la naïveté ou prendrait-on les spectateurs pour des ploucs ? Sous couvert de nous chanter un hymne à l'honnêteté (et aux joies simples et pures de la nature), Christian Gion veut nous refiler une camelote folklorique, niaise et abêtissante. Scénario insignifiant, dialogues insipides, Gabrielle Lazure mal traitée, personnages caricaturaux, paysages de cartes postales attrape-nigauds un navet de première ! Le réalisateur a pourtant trente ans de métier, mais son film ressemble plus à un mauvais brouillon de débutant.
  • NOUVELLE VAGUE (1990)
    Après une éclipse de quelque deux ans, Godard nous redonne de ses nouvelles vaguement, mais superbement. "Nouvelle vague" nous confirme que Godard n'a rien perdu de sa superbe. Alimenté par les dialogues les plus beaux du cinéma actuel (et pour cause : ils viennent tout droit de la bibliothèque du cinéaste : Dostoievski, Dante, Gide, etc. ), ce florilège de haute volée sur la condition humaine prouve que lorsque l'intelligence s'allie à la sensibilité, le cinéma devient quelque chose de très grand. Une vague ? Une déferlante !
  • CONTRE-ENQUÊTE (1990)
    Malgré les faiblesses de sénario, ce thriller énième-du-genre se laisse regarder sans ennui. Les rôles (pour l'interprétation, disons ici "bravo" à toute la patrouille) sont fixés d'avance, non sans manichéisme, et le melting pot de la police new-yorkaise reste un filon dont on n'a pas fini d'exploiter les "subtilités". Bien sûr, Lumet nous a habitué à mieux. Mais quand on voit "une certaine tendance" du cinéma américain actuel, on ne peut que se dire "ouf, c'aurait pu être pire". Et si le pire n'est pas encore derrière nous.
  • LA NURSE (1990)
    Jeune couple avec bébé, c'est charmant. Et sur ces images de l'innocence va débouler l'horreur. C'est "La nurse" de Friedkin, et ça nous rappelle bien d'autres films. En effet, sur ce thème sensible, les variations se sont multipliées, avec plus ou moins de bonheur. La nouvelle pierre que vient rajouter Friedkin, qui n'est pas le premier venu, à cet édifice de la terreur programmée ne manque pas d'efficacité, ni d'effets spéciaux. Mais elle n'apporte rien de neuf, ni dans le fond, ni sur la forme. Juste un rab de frissons.
  • DAMES GALANTES (1990)
    Les histoires de Don Juan brillent par leur énergie et leur insolence. Rien de tout cela, ici : c'est mou comme ce n'est pas permis. Tacchella est passé complètement à côté de son sujet, peut-être tétanisé qu'il était par le brio de certaines réalisations récentes ("Les liaisons dangereuses"). A la tiédeur inoffensive du propos émergent heureusement les comédiens, Bohringer (qui fait ce qu'il peut), mais surtout Laura Betti (un régal ! ), Robin Renucci (magistral) et Isabella Rossellini. Dommage pour eux que la réalisation ne suive pas.
  • ALEXANDRIE ENCORE ET TOUJOURS (1990)
    Chef d'oeuvre de narcissisme, le nouveau film de Youssef Chahine annonce que son auteur, le plus grand cinéaste arabe, garde la meilleure forme. Insolent comme jamais, à la fois parodique et sérieux, "Alexandrie encore et toujours" est remarquable de fraîcheur, de cabotinage jubilatoire, mais surtout de lucidité. Car dans le fond, Chahine aborde un problème majeur : avant de critiquer la dictature, chercher en soi-même le tyran masqué. Chahine aborde la question avec courage et avec culot. Sera-t-il compris ? Sera-t-il entendu ?
  • BIENVENUE A BORD ! (1990)
    Le principe du film est un dialogue ininterrompu (malgré des velléités) entre un "pauvre type" et un "emmerdeur" variante du fameux tandem ... Ce principe eut été heureux si le dialogue avait été plus inspiré. Hélas, il ne l'est pas et on est à souhaiter la désaffection rapide de l'un des deux interlocuteurs, le défaut de combattants (verbaux) mettant alors fin au combat ... Cela ne se réalise qu'au bout d'une heure trente. Une heure trente de bavardage incessant avec bien moins de hauts que de bas .
  • CRY-BABY (1990)
    Persiflant allègrement l'Amérique kitsch et bon chic bon genre, John Waters continue invariablement son oeuvre américanophage. Moins trépidant que "Hairspray", (mais toujours avec ces personnages hauts en couleurs qui méritent à eux seuls le déplacement), "Cry Baby" est un "Roméo et Juliette" revu et corrigé, pas sérieux pour un sou. De quoi verser une chaude larme.
  • TOUT POUR REUSSIR (1990)
    John Boorman fut le réalisateur d'"Excalibur". A l'image de la carrière de son auteur, ce nouveau film est trop inconstant pour être vraiment convaincant. Emule de Capra, Boorman a voulu faire une oeuvre optimiste. Mais la frontière entre optimisme et mièvrerie comporte des brèches fatales. Et Boorman, qui enchaîne les meileurs moments aux pires (les plus risibles) avec une facilité déconcertante, ne verse que trop souvent dans la mièvrerie. Le seul intérêt de ce film trompeur restent finalement ses tableaux en trompe l'oeil. Edifiant.
  • NUIT D'ETE EN VILLE (1990)
    Michel Deville s'est à nouveau essayé à son habituel numéro de virtuose. Cette fois-ci, cependant, la démonstration hédoniste tourne à vide. Le film est certes intelligent, mais il a trop tendance à s'écouter parler. On y perd la sensualité du couple, et l'agacement l'emporte sur la sympathie que l'on pourrait éprouver pour les personnages. Dommage, car ce huis-clos rythmé par d'incessants mouvements de caméra rapprochée avait de prime abord de quoi séduire, et Jean Hugues Anglade est excellent.
  • GREMLINS 2 (1990)
    Le numéro 2 est un cran plus musclé que le numéro 1, normal : comment sinon justifier l'entreprise ? Cette logique du sequel vaut d'ailleurs autant pour les Gremlins que pour Robocop ou pour "48 heures". Le cas des Gremlins est juste légèrement différent. Y sont en effet en jeu à la fois l'humour et l'horreur. Eh bien, Joe Dante écrase ici deux mouches d'un seul coup. Férocité des situations, multiplication des références parodiques, certes souvent faciles mais toujours joyeuses. Et surtout toujours illustration parfaite du bon mauvais goût d'outre-Atlantique.
  • ALBERTO EXPRESS (1990)
    On peut aisément imaginer que l'insuccès injuste de "Harem" ait affecté Arthur Joffé, dont c'était le premier (et ambitieux) film. Après plusieurs années de silence, son retour ressemble fort à une catharsis. "Alberto Express", dans ses excès jubilatoires, laisse deviner un arrière-fond d'abattement. Qui est ici énergiquement (dans un style très "pub") balayé, au profit d'une comédie à la fois débridée et poétique : s'y succèdent le convoi de seconde classe (la comédie franche) et celui de première, du lyrisme et de la métaphore.
  • S'EN FOUT LA MORT (1990)
    Après "Chocolat", Claire Denis se confirme ici comme un des auteurs les plus sensibles du cinéma actuel. "S'en fout la mort" est un film superbe. Noir et sordide, certes, triste et désabusé, mais superbe répétons-le, véritable petit chef-d'oeuvre nocturne. Dans un style documentaire, caméra à l'épaule et montage elliptique à l'appui, Claire Denis nous parle moins des combats de coqs (déjà en soi une curiosité) que de l'amitié et de l'exil. Fastueux de sobriété, remarquablement éclairé et interprété, ce film va droit au coeur.
  • ILS VONT TOUS BIEN (1990)
    Décidément, les Italiens (Scola, encore récemment) sont bien mélancoliques. Et leur vision de l'Italie d'aujourd'hui et des relations entre les pères et leur progéniture est bien grise et amère (voire acide, pour ce qui est de la société). Le nouveau film de Giuseppe Tornatore (bien plus intéressant que "Cinéma Paradiso") est, en cela, exemplaire. Il pèche quelque peu par sentimentalisme et par maniérisme, mais gagne beaucoup par l'interprétation remarquable du grandissime Marcello Mastroianni. Quant à la morale du film, on vous laissera juges.
  • BOUGE PAS MEURS ET RESSUSCITE (1990)
    Dans l'auto-flagellation, les Soviétiques n'ont pas leur pareil. Les films de cette veine, tendance majoritaire de la production soviétique que de l'ère de la glasnost, sont terribles, d'une tristesse insoutenable, sans espérance et sans la moindre illusion sur le passé comme sur l'avenir. On ne dira pas, après cela, que les Soviétiques se couvrent les yeux. Au contraire, ils montrent et disent tout, loin de la langue de bois, loin de la propagande souriante, loin des clichés et des impératifs de divertissement. Loin d'Hollywood.
  • DOCTEUR PETIOT (1990)
    Le parti-pris expressionniste, et donc poétique (et non biographique) est remarquablement servi par la mise en scène et par l'interprétation monumentale de Michel Serrault. Dommage seulement que le scénario connaisse quelques moments de flottement et que les seconds rôles soient autant sacrifiés (littéralement vampirisés par la figure titanesque de Serrault-Petiot. Christian de Chalonge a fait un bon film, mais il est passé à côté d'un grand film.
  • PRESUME INNOCENT (1990)
    Les séances de tribunal constituent un exercice (de rhétorique) où le cinéma américain excelle. A cet égard, "Présumé innocent" est une démonstration louable, où Alan Pakula a retrouvé ses bons reflexes, tirant bel avantage de la fantastique présence d'un Harrison Ford magistral de désarroi et d'ambiguïté. Le scénario, très bien ficelé, de ce "Présumé innocent" réserve des surprises non négligeables, et même si la séance est un peu longue, on n'a jamais l'occasion de s'ennuyer.
  • HENRY ET JUNE (1990)
    Henry Miller est assurément un sujet difficile à traiter. Il y a quelques mois, Chabrol s'y cassait les dons (si, si ! ), maintenant, c'est au tour de Philip Kaufman. Adapter Anaïs Nin et Henry Miller a trouvé Kaufman en moins heureuse inspiration que pour "L'insoutenable légèreté." Il y a certes un très beau travail esthétique(directement inspiré des cinémas français et allemand des années 3O) ainsi que deux très belles et fascinantes actrices, mais l'épisode reste artificiel et n'échappe pas aux lieux communs. Une petite déception.
  • LE MARI DE LA COIFFEUSE (1990)
    Patrice Leconte filme l'idéal. Lumineux comme en un rêve, c'est l'amour fou, le bonheur stylisé, le rêve exaucé et le merveilleux de l'enfance toujours (re)vécue. Présenté ainsi, le film pourrait sembler confiner au kitsch. Or, jamais Leconte ne tombe dans ce travers. Parce qu'il sait nous dire le drame qui couve et parce qu'il sait nous communiquer l'humanité profonde de son histoire. Après "Monsieur Hire", Patrice Leconte persiste et signe, dans une des plus belles voies du cinéma français actuel.
  • PROMOTION CANAPÉ (1990)
    Il y avait un certain filon de la comédie française qui semblait avoir disparu de nos écrans : la comédie boulevardière au rire gras. Une disparition qui ne provoqua pas beaucoup de regrets (la télé ayant pris le relais). Qu'est-ce qui a donc pris à Didier Kaminka de sortir le genre de ses oubliettes ? Quelques bons gags, et puis plus rien. Quelques petits numéros d'invités surprises, et puis plus rien. "Promotion Canapé" a l'humour grossier et la grivoiserie facile. Pour casser du sucre sur le dos de l'Administration, il aurait mieux valu prendre du sucre fin.
  • HALFAOUINE L'ENFANT DES TERRASSES (1990)
    Le pays interdit, ou le paradis perdu de l'antre féminin terres inconnues qu'explore le regard malicieux et sensuel de Ferid Boughedir, cinéaste tunisien, donc arabe, donc au coeur du problème. La caméra est forcément voyeuriste, mais jamais elle ne cède à la complaisance naturaliste ou folkloriste. En revanche, elle se fait volontiers baroque, souvenance d'un monde englouti, sourde mélancolie. Plus qu'une simple visite au hammam des femmes, "Halfaouine" est une introduction à l'âme orientale.
  • SAILOR ET LULA (1990)
    La Palme d'Or 9O est vraiment ce qu'on a voulu en faire : le reflet de notre époque : complaisant, outrancier, tapageur, violent (hyper), acide, finalement sans grande originalité, si ce n'est la déformation grimaçante du mélodrame sirkien. On reçoit le film comme un sac de sable les rasades de crochets et de directs d'un boxeur exalté. Ce boxeur est ici David Lynch, bien servi (concédons-lui cela) par une mise en scène choc et des acteurs (Nicolas Cage en tête) vitrioleurs. On peut apprécier, mais c'est à vos risques et périls.
  • JEAN GALMOT AVENTURIER (1990)
    Si l'aventure exotique vous tente, embarquez-vous pour les Guyanes. Mais il n'y a rien de vraiment nouveau sous les tropiques, ni de très original dans ce film d'Alain Maline, dédié à Félix Eboué et à Frantz Fanon (oui, oui). Les couchers de soleil et les jolies négresses sont toujours aussi photogéniques, ainsi que la sueur fervente sur les fronts nobles des aventuriers épris d'idéaux humanistes. Reste Christophe Malavoy, une nouvelle fois remarquable, qui a bien mérité de la Guyane.
  • LES AFFRANCHIS (1990)
    Vous avez dit "mafia" ? Voilà bien un milieu et un environnement (urbain, nocturne) où Martin Scorsese s'épanouit, loin des aléas christiques. Nerveux, hyper-violent, d'une férocité au vitriol, pléthorique, "Les Affranchis" nous fait retrouver un Scorsese ethnologue, remarquable portraitiste des intérieurs de la mafia américaine, un Scorsese virtuose, ne reculant devant aucune gageure de montage, filmant et montant comme à la mitrailleuse, un Scorsese sans tabou ni manichéisme, d'une efficacité sanglante.
  • DARKMAN (1990)
    Coup d'esbrouffe d'un cinéaste dopé à l'esprit BD, ce film se fout de la véracité comme d'une guigne. Et prend sans doute ses spectateurs pour des potiches prêtes à servir de réceptacles aux intrigues et aux développements les plus grotesques, débités le plus sérieusement du monde. D'où ce "Darkman" qui plagie sans vergogne ses moult prédécesseurs (car il s'agit bien plus de copiage facile que de "citations"), et qui mériterait de demeurer là d'où il est sorti : dans l'obscurité des faux esprits qui l'ont échafaudé.
  • LA PUTAIN DU ROI (1990)
    Histoire vigoureusement romanes que, "La putain du roi" se regarde sans déplaisir. Il est vrai qu'elle ne se veut ni originale, ni (ré)novatrice. Juste romanesque, coulant comme un fleuve en automne (la saison du film). Les acteurs méritent tout particulièrement notre hommage, d'autant qu'ils ne sont pas ménagés par le sort que leur réserve le scénario. On savait déjà les qualités de Valéria Golino (qui après les bien moins réussies "Eaux printanières" semble abonnée aux rôles costumés), on découvre ici celles de Timothy "James Bond" Dalton.
  • GHOST (1990)
    Une idée originale fait souvent, lorsqu'on en a les moyens, un film réussi. Ici, les moyens n'ont pas manqué, et l'idée originale peut donc s'épanouir et donner une histoire à la fois mignonne (Demi Moore) et musclée (Patrick Swayze), avec un zeste de folie (Whoopi Goldberg) Même s'il n'échappe pas à un certain romantisme rose, qu'il remet aux couleurs de l'époque, "Ghost" est une oeuvre qui ne manque pas de sel. Son succès surprise outre Atlantique (bientôt réédité sur nos terres ?) est amplement mérité.
  • LA DISCRETE (1990)
    Discrètement, mais sûrement, ce film s'annonce comme l'un des plus beaux, des plus d"licieux, des plus épatants moments cinématographiques de l'année. De bout en bout, ce premier film de Christian Vincent est un ravissement. Intelligence du récit et des dialogues, jubilation luchinienne, fraîcheur et pétillance de Judith Henry (assurément une comédienne à suivre) voilà bien un film où le cinéma retrouve son naturel, et nous le bonheur d'une comédie vraie.
  • METROPOLITAN (1990)
    Peut-on traduire adapter un cinéaste aussi français que Rohmer aux Etats-Unis ? La réponse est "oui", qui nous est joliment fournie par "Metropolitan". Un moment exquis des certitudes péremptoires et des désarrois de candidats aristocrates de la jet-society de New York. Un peu plus loin, un peu plus dur que "Metropolitan", il y a Cassavetes. C'est-à-dire ce qu'il y a de mieux au cinéma américain.
  • UN COMPAGNON DE LONGUE DATE (1990)
    Un film sur le sida ? Grande est la tentation de terroriser une population où couve la panique. Mais non, jamais ce film honnête ne se fait catastrophiste, ni larmoyant, ni moralisateur. Il opte d'emblée pour la dignité et la chaleur humaine. Norman Rene et son équipe (tous sont issus du théâtre et semblent avoir travaillé en atelier) font la chronique des années Sida, dans une optique quasi-documentaire, dont la sensibilité et la délicatesse sont à peine décoiffées par quelques brusques accès de naturalisme. A voir et à méditer.
  • DR M. (1990)
    On ne sait si cet hommage à Fritz Lang est bien sérieux. On ne peut certes douter des intentions de Chabrol à ce sujet encore que les enfers en soient pavées, et encore eut-il fallu que le réalisateur ait eu les moyens de son entreprise. Or, l'oeuvre sent la démobilisation. Tout concorde vers une oeuvre de commande baclée. Comment sinon expliquer la laideur étonnante de ce film rebutant, ainsi que la totale absence de ce qui a toujours fait le bonheur du cinéma chabrolien, la direction d'acteurs ? Non vraiment, ce "Dr. M" est un Chabrol à oublier.
  • TILAI (1990)
    Idrissa Ouedraogo persiste et signe. Il nous livre son drame d'une main calme et sereine, on pourrait même dire nonchalante. Le problème est que le réalisateur burkinabé se renouvelle très peu et utilise sans le changer d'un iota le langage qui avait fait le bonheur de "Yaaba". Malheureusement, il manque ici la spontanéité de "Yaaba" et sa chaleur, comme il manque la tension qu'on aurait pu attendre d'un tel drame. Et l'on reste suspendu, abandonné à l'aridité africaine.
  • PRETTY WOMAN (1990)
    S'il s'était pris au sérieux comme la plupart de ses homologues américains ce conte de fées aurait été aussi creux que faux. Mais voilà, "Pretty woman" sait bien qu'elle ne peut nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Alors, elle joue cartes sur table, et c'est bien. "Pretty woman" dit ce que le cinéma hollywoodien maîtrise si bien: le rêve d'une autre vie. Julia Roberts et Richard Gere sont ce rêve là, Cendrillon et son Prince charmant. Puis arrive minuit et il faut rentrer. On rentre, encore sous le charme. C'était bien.
  • LACENAIRE (1990)
    La peine de mort existe encore au cinéma, mais le couperet tombe souvent sur des films qui ne le méritent pas. Ce "Lacenaire", en revanche, aurait amplement mérité de la guillotine. Francis Girod confirme ici ses piètres dispositions de réalisateur et ses non moins piètres talents de directeur d'acteurs. Tout ici sonne faux et creux, tout est lamentable. On en sort accablé, pour Lacenaire, (paix à son âme) autant que pour le pauvre Daniel Auteuil et pour le cinéma français (qui heureusement ne manque pas de meilleurs serviteurs). A fuir absolument.
  • ROCKY 5 (1990)
    Après avoir enflé démesurément, jusqu'à faire de Rocky et de Rambo le même personnage, Stallone revient à de meilleurs sentiments : virage à 180° et retour sur le Rocky des débuts, loser et anti héros. Initiative salutaire, car ce Rocky-ci est certainement le meilleur de la série, efficace et intelligent (je vois d'ici les ricanements de certains. ), réussissant presque, par moments, à nous émouvoir (un comble !).
  • LE PETIT CRIMINEL (1990)
    Rarement, le cinéma occidental récent aura su trouver de tels accents de sincérité, d'authenticité, de vérité. Ce magnifique film, interprété avec une intensité rare par ses comédiens (Gérald Thomassin ainsi que Clotilde Courau deux lumineuses révélations et Richard Anconina dans son rôle le plus beau et le plus émouvant), marque un point d'orgue dans l'oeuvre de Jacques Doillon, cette fois étonnant de pudeur et de calme énergie. Rarement, le cinéma français récent se sera autant rapproché de sa société et de ses jeunes. Enfin une oeuvre vraie !
  • TANTE JULIA ET LE SCRIBOUILLARD (1990)
    Le roman (luxuriant) de Mario Vargas Llosa, phagocyté par William Boyd et transposé dans la Nouvelle-Orléans des années quarante, donne surtout à Peter Falk l'occasion d'un one-man-show magnifique de cabotinage gai et débridé. En face de lui, Barbara Hershey, sobre et mesurée, et Keanu Reaves, anodin, semblent jouer les simples figurants. Réalisé sans grande originalité, le film de Jon Amiel n'a d'autre prétention que d'être un bon divertissement gratiné, à la Peter Falk. Une cuisine qui passe facilement. Sans indigestion.
  • LES TORTUES NINJA (1990)
    Qu'est-ce qu'ils ne vont pas encore nous inventer ? Allons bon, finalement, on les aime bien, ces tortues ninja et leur ange gardien. Ce n'est pourtant pas vraiment sérieux. Alors autant s'amuser sans arrière-pensée. Les colorants ne sont dangereux que si l'on en abuse. (Olga von Clap)Les scénaristes d'outre-Atlantique n'en sont malheureusement pas à une idiotie prêt. Avec les Tortues ninja, on atteint de nouveaux sommets. Gageons qu'ils ne tarderont cependant pas à être encore dépassés.
  • DANCING MACHINE (1990)
    Aux antipodes de la pirouette aérienne, "Dancing Machine" est un faux-pas magistral. Le scénario et le montage, risibles, semblent uniquement destinés à la gloire inutile d'un Delon dégoulinant de prétention ou encore aux débuts improbables d'un Patrick Dupont pathétique. S'il avait fallu faire la contre publicité du cinéma ou de la danse, Behat et Delon n'auraient pas pu mieux faire. Insignifiant.
  • LES DOORS (1990)
    Tout d'abord, éviter un malentendu. "Les Doors" est autant le portrait d'un groupe de rock et de son leader que de l'époque où ce groupe phénomène connut son (immense) heure de gloire, pas encore éteinte. C'est plutôt ce second aspect du travail de portrait d'Oliver Stone qu'il faudra privilégier, remarquablement traité, tant scénaristiquement qu'esthétiquement. Les Doors, alors s'avèrent surtout des messagers des sixties, avec un hérault, Jim Morrison (Val Kilmer, sidérant d'exactitude). Leur musique est omniprésente, hypnotique. Message reçu, quatre sur cinq.
  • MR ET MRS BRIDGE (1990)
    Au-delà de la fresque d'une famille bourgeoise dans les années trente, des conflits familiaux et tensions conjugales, Mr et Mme Bridge, est à mon avis un film éminement féminin. Chaque femme, psychologiquement réprimée ou ouvertement libérée fait de sa vie un refus. Secrétaires, épouses ou maîtresses, toutes, tentent désespérément de croire encore à leurs rêves, à leurs illusions sur l'amour. Mais les années ont passé, l'habitude a pris son cours et si Mme Bridge pousse de malheureuses plaintes de solitude, ses amies tâtent à la réflexion politique voire au suicide. Cinéaste raffiné et délicat par excellence, James Ivory sait nous émerveiller par ses récits à mots couverts. Ses non-dits n'atténuent jamais la férocité de son propos, plein de finesse, qui semble s'insérer entre tasse de thé et petits fours. Portrait radical et incisif mais néanmoins tendre et (faussement) bienveillant d'un couple d'Américains moyens dopés à la bonne conscience WASP, "Mr. & Mrs. Bridge", récit retenu et malicieux, est une pièce de choix à ajouter au portrait de l'Amérique de toujours.
  • FENÊTRE SUR PACIFIQUE (1990)
    Si l'on fait fi des arguments scénaristiques du film, on a de quoi être terroriste, en effet : ce qui arrive à ce sympathique jeune couple (notons, au passage, la présence de la ravissante Melanie Griffith) est tout à fait atroce, d'autant que le "salopard" qui leur cause tant de désagréments est interprété avec une conviction redoutable par Michael Keaton, et d'autant que la mise en scène de John Schlesinger est fort efficace. En revanche, les excès de la législation américaine ici dépeinte ont de quoi laisser perplexe. Perplexe et incrédule.
  • LA CONTRE-ALLÉE (1990)
    Lorsqu'un cinéaste décide de mettre en scène ses fantasmes (ce qui est fréquent), cela peut donner des résultats sulfureux. Ou faire "flop" lamentablement. Tout dépend des fantasmes, n'est-ce-pas ? Ceux d'Isabelle Sebastian sont du genre nunuche : fascination pour la prostitution, rapport vice-innocence, instinct maternel, regard d'enfant sur monde adulte et tout le reste. Logiquement une oeuvre ronronnante de gentillesse naïve, qui tient absolument à nous faire prendre des vessies pour des lanternes. "Lacontre-allée" est une voie àne pas emprunter.
  • LE BRASIER (1990)
    Projet ambitieux et ne manquant pas de prétentions à la virtuosité, "Le Brasier" est trop touffu et trop lourd pour qu'en émerge une ligne claire. On se perd dans les labyrinthes de la mine infernale, et c'est comme si Eric Barbier avait vu trop grand et ne savait plus comment gérer sa mégalomanie. Finalement, le film s'étouffe sous son propre poids, qui écrase les détails de la saga (le social, le romanesque, le politique, etc. ). Et les morceaux de bravoure fracassante se noient dans le magma noir d'une production qui a vu trop grand.
  • LE MYSTÈRE VON BULOW (1990)
    Coupable ou innocent ? Là n'est pas la question, en définitive. Le film de Barbet Schroeder, raffiné et cossu, se concentre surtout sur le face-à-face de deux hommes, de deux états d'esprit, de deux mondes, l'aristocrate hautain et un rien auto-destructeur, et l'intellectuel juif, extraverti et hyper-vivant. Remarquablement interprété (Jeremy Irons, dans un rôle de grande classe, Ron Silver, qui confirme son talent caméléonique, et Glen Close, dans une composition courageuse et ingrate), truffé d'humour noir et grinçant, "Le mystère von Bulow" est fascinant.
  • L'EXPERIENCE INTERDITE (1990)
    Le syndrome du "Cercle des poètes" a encore frappé. Mais cette fois-ci, rien de séduisant dans cette ténébreuse histoire de jeunes gens qui, suprême snobisme, se shootent à la mort. Une métaphysique de pacotille et de grands effets carnavalesques masquent mal la stérilité d'un scénario qui a pour seuls alibis son atmosphère baroque et Julia "Pretty Woman" Roberts, ici deux supercheries de plus. Enfreindre les interdits est une chose, mais il n'y a pas forcément gloire à en tirer.
  • HOT SPOT (1990)
    Le pervers (judicieusement) Dennis Hopper est de retour, qui vient ici troubler l'apathie sereine du cinéma américain. A la façon d'un film noir d'antan (personnage masculin loser, femmes fatales, carnivores et maitresses du jeu), il nous assène ici avec maestria un thriller brulant comme l'enfer, lubrique et méchant. Personnages qui ne manquent pas de sel (ni de formes...), dialogues pas piqués des hannetons, action trépidante, rien ne manque à cette superbe série B. Même pas la conclusion, hautement immorale. Très fort !
  • J'AI ENGAGÉ UN TUEUR (1990)
    Le moins que l'on puisse dire, c'est que Léaud n'est pas engagé ici à contre-emploi. Aki Kaurismaki joue à fond sur son image de douleur silencieuse et obstinée. Rigoureusement. Mais c'est justement là où le film pêche par excès de complaisance : le terrain est par trop balisé, et tout se déroule alors sans grande surprise. Ce qu'il manque au nouveau film d'Aki Kaurismaki, c'est cet émerveillement noir qui faisait le charme des précédents. Aki serait-il mûr pour un changement de registre ?
  • L'OPÉRATION CORNED BEEF (1990)
    Une comédie française grosse et grasse, faussement impertinente, gratuite (sauf le ticket d'entrée, malheureusement) et jonchée de pitreries. Il reste, dans cette triste farce, quelques bons numéros de comédiens. Ce sont les habituelles circonstances atténuantes. Il serait complaisant de les octroyer. Si on le fait, c'est moins pour sauver le film que pour remercier les acteurs pour la peine (inutile) qu'ils se sont donnée.
  • GÉNIAL MES PARENTS DIVORCENT (1990)
    Ce titre calamiteux devrait d'emblée sonner le glas de la carrière d'un film qui mériterait pourtant de rencontrer son public : les moins de quinze ans. Comédie charmante, qui pétille de rires enfantins, le film de Patrick Braoudé semble une nouvelle version modernisée de "La guerre des boutons". Finalement, le propos du film est bien moins dangereux, bien moins anti-famille que ne l'indique son titre. Bien mieux que "Maman, j'ai raté l'avion" ou "Chérie, j'ai rétréci les gosses", ce film devrait plaire à nos plus petits. Parents, osez donc le pas !
  • LE JOUR DES ROIS (1990)
    Paulette Dubost, Micheline Presle, Danielle Darrieux et Robert Lamoureux autour de la galette des rois, une rencontre délicieuse, avec des comédiens (auxquels il faut ajouter l'ineffable Michel Galabru) qui résonnent encore du grand cinéma français d'antan. Marie-Claude Treilhou, autour d'une situation "minimaliste", a concocté une petite comédie savoureuse, à la tendresse et le sarcasme s'entrechoquent avec le plus bel entrain. Un régal !
  • LA TRIBU (1990)
    Un thriller mauvais, bête et inutile, bref : "A la Boisset". On pourrait d'ailleurs consacrer cette expression, tellement le réalisateur s'efforce depuis quelque temps de rater lamentablement ses (de plus en plus) besogneuses productions. Yves Boisset est l'exemple type, et navrant, du cinéaste qui a perdu toute crédibilité. "La tribu" vient en apporter une nouvelle illustration dont on se serait bien passée. Faut-il diagnostiquer un coma profond ou espérer encore une improbable rémission ?
  • LE PARRAIN 3 (1990)
    Digne conclusion à la saga du Parrain (malgré quelques facilités scénaristiques patentes), ce troisième épisode de la série se laisse voir comme un sompteux opéra vis- contien où la mélancolie de Francis Ford Coppola fait des ravages. Les acteurs, comme toujours chez Coppola, sont magnifiques, même si Al Pacino a quelque peu tendance à théâtraliser son jeu. Mais Sofia Coppola (superbe révélation) et Andy Garcia (exceptionnellement sobre) le rattrapent avec maestria comme pour assurer la relève.
  • L'ANNÉE DE L'ÉVEIL (1990)
    Bourré de bonnes intentions (dont la moindre n'est certainement pas celle de ne PAS vouloir forcément à faire une adaptation figée du récit de Charles Juliet), L'année de l'éveil s'avère être une jolie petite réussite, malgré une mise en scène académique (ce n'est pas forcément un défaut) et quelques maladresses (les dernières scènes ! ). La générosité de l'oeuvre, son histoire initiatique et romanesque et l'interprétation de ses acteurs (et autant de jeunes talents révélés) ont de quoi emporter adhésion et enthousiasme, voire ferveur.
  • ARACHNOPHOBIE (1990)
    On ne considère pas communément l'araignée comme un insecte particulièrement sympathique ce serait même plutôt le contraire. A la façon d'un Jack Arnold ou d'un Roger Corman des années cinquante, le film capitalise sur notre terreur des araignées pour nous terrifier davantage encore. Sans cascades d'hémoglobine ni effets grandiloquents, mais avec des arguments plus "hitchcockiens", "Arachnophobie" est un film d'horreur remarquablement maîtrisés qui prouve qu'on peut bien se passer du gore sans que notre chair de poule n'en pâtisse. Brr !
  • DELICATESSEN (1990)
    Attention, le cinéma nouveau est arrivé ! Mais ce n'est pas forcément une bonne nouvelle, même si l'oeuvre est visiblement jouissive, espiègle et inventive à souhait. Car, formés à l'école du clip (musical, mais surtout publicitaire), les réalisateurs jonglent certes avec les effets spéciaux et les blagues à tout va, mais au détriment de l'émotion et de la chaleur. Gratuité des effets, frime et m'as-tu-vu sont donc au rendez-vous, non sans virtuosité (nous le concedons volontiers), pour un film fou, mais à la folie artificielle et froide.
  • UN ANGE A MA TABLE (1990)
    Une très belle fresque intime et familiale, dont la poésie essaie (et parvient) d'aller à la rencontre de la sensibilité du personnage dont s'inspire le film. Film généreux, tendre et humble (de l'humilité de ceux qui savent s'effacer derrière la sincérité de leurs sujets), "Un ange à ma table" est des oeuvres que l'on garde longtemps dans sa mémoire. Comme une sensation belle, comme un ami fidèle.
  • TRIPLEX (1990)
    Une pitrerie franchouillarde de plus, bien agitée, cédant volontiers à l'affolement et à la crise de nerfs, aux dépens du scénario. Bon point, cependant : une nouvelle arrivée au charme fou, Cécile Pallas, à laquelle on souhaite la bienvenue sur nos écrans et une belle carrière (donc de meilleurs films).
  • LES SECRETS PROFESSIONNELS DU DOCTEUR APFELGLUCK (1990)
    Un psychanalyste pas très sérieux (un escroc ou un charlatan, au vu de ce qui va suivre) nous propose à des indiscrétions au sujet de certains de ses clients, et c'est parti pour une comédie à sketches, très Orchestre du Splendid, mais Splendid en manque d'inspiration. A part une séquence joliment balancée (le jeu télévisé) le programme est fade et facile, pres que désinvolte. Décidément, il suffit quelquefois de bien peu (d'imagination) pour faire un film.
  • IN BED WITH MADONNA (1990)
    "Documentaire" ? On peut en douter. Les coulisses de la star ressemblent plus à une scène bis, où l'émule de Marilyn continue à jouer les saintes nitouches. Le spectacle vole bas. Rien à redire, en revanche, sur les qualités de montage du film. Si sa commanditaire échoue à masquer ses intentions démagogiques, son metteur en scène s'avère un artisan de très bon calibre. Il faudrait le voir à l'oeuvre sur des sujets plus consistants.
  • BIX (1990)
    La musique est superbe. Et c'est tout. Car le scénario, en voulant inutilement éviter le récit linéaire et chronologique, ne démontre plus rien, et la mise en scène, bien que Pupi Avati ait semblé très motivé par son sujet (cf. ses déclarations à la presse), est quasiment inexistant. Il reste la musique (de l'excellent jazz blanc des années vingt). Certes l'essentiel pour un film jazz. Mais alors, on pourrait se contenter du disque.
  • LA REINE BLANCHE (1990)
    En dehors des modes et des nouvelles esthétiques, Jean-Loup Hubert poursuit imperturbablement son (grand) chemin, toujours en liaison directe avec le cinéma français le plus classique, celui "d'après à la guerre". Evidemment, l'oeuvre semble alors quelque peu anachronique, et même dépassée, tellement elle reste figée dans son classicisme. Dans ces conditions, Jean Carmet (qui en aurait douté) et Richard Bohringer s'en sortent haut la main. En revanche, Catherine Deneuve semble mal à l'aise : qui n'avance pas recule ?
  • UN COEUR QUI BAT (1990)
    Insondables sont les mystères d'une âme, car faites de mille quêtes et de mille détresses. Une rencontre, quelquefois, met deux âmes en présence, deux mystères. Il y a alors espoir, tentative de parole, mais le mystère demeure. Le film de François Dupeyron (réalisateur déjà remarqué pour le très beau "Drôle d'endroit pour une rencontre") prend le temps du geste et de la parole, il prend le temps du désir et de la quête. Profond, tendre, attentionné, hédoniste, avec aussi la cruauté de la lucidité, il raconte son histoire. Belle et désespérée.
  • URANUS (1990)
    Ce film pléthorique ressemble à bien des égards à un match de rugby qui se serait pris dans une mêlée inextricable. A la boue émerge un quinze certes bien soudé, où chacun fait à son tour quelques foulées ballon en main et avec plus ou (plutôt) moins de bonheur. Noiret est mou, Luchini s'est trompé de match, Galabru maltraite l'émotion, Marielle est remarquable de flegme serein et Depardieu en taureau déchaîné fait encore son Cyrano. On s'embourbe, et Claude Berri, cette fois, rate son essai. Largement.
  • PERMIS DE TUER (1989)
    Scénario et cascades OK, mais voilà un "Bond" différent, plus musclé et plus violent, moins charmeur et moins spirituel. On assiste à un appauvrissement, du moins à une désacralisation, du personnage. Qui imaginait Bond s'abaisser à la vengeance ? Ce n'est pas encore du Bronson, mais c'est déjà presque du Mel Gibson. Les femmes participent à cette tendance. Moins plantureuses et moins "objets", elles sont devenues actives et ont de l'influence sur le héros comme sur l'action. C'est çà, la modernité !
  • MISSISSIPPI BURNING (1989)
    Alan Parker est un cinéaste efficace, qui sait parfaitement doser ses effets. Ceci, il l'a maintes fois démontré. En revanche, on pourra déplorer son recours à la violence (exacerbant ce "point de non-retour" où les "bons" sont obligés d'avoir recours aux méthodes des "mauvais"). Par ailleurs, s'il dépeint fort judicieusement la communauté blanche du Sud, il n'en fait pas moins un portrait injuste des Noirs, passifs et assistés. "Mississippi burning" est un pamphlet autoritariste contre le racisme.
  • APRES LA GUERRE (1989)
    Toujours dans la veine naturaliste et bucolique du "Grand chemin", Jean-Loup Hubert a réalisé, pour et avec ses enfants, une jolie histoire contre la guerre, cette chose absurde avec son cortège d'atrocités (de part et d'autres) où les hommes, entraînés par une force qu'ils ne contrôlent plus, ne comprennent pas ce qui leur arrive. Images léchées, belle lumière, de jeunes acteurs épatants (Bohringer est moins à l'aise), le film n'a certes pas la force et le lyrisme des "Jeux interdits", mais c'est un bel hymne à la tolérance et un rappel opportun.
  • LES DEUX FRAGONARD (1989)
    L'idée de départ était très forte, ce combat entre la vie et la mort par art interposé, entre deux frères et autour d'une jeune fille. Malheureusement, ce va-et-vient entre gravité et légèreté reste, sous la houlette du réalisateur, fort conventionnel, lisse comme une toile de Fragonard. Trop lisse pour un tel sujet, hélas. On ira, cependant, pour revoir un bon quatuor : Joaquim de Almeida, Robin Renucci, Philippine Leroy-Beaulieu et Sami Frey. Comme au théâtre.
  • MONSIEUR HIRE (1989)
    Un Michel Blanc fantômatique (le masque même de l'impassibilité (douloureuse) et une Sandrine Bonnaire radoucie (mais qu'est-ce qu'elle cache bien son jeu. ) traversent ce film plastiquement très beau, d'une grande limpidité. Dans cette épure mélancolique, tout repose sur les regards. A ce jeu, le film de Leconte est une grande réussite, qui culmine avec la séquence finale, lorsque Michel Blanc et Sandrine Bonnaire se croisent une dernière fois (et dans quelles conditions !).
  • PEAUX DE VACHES (1989)
    Flamboyant, tel un western, rigoureux, superbement interprété par un trio formidable (Sandrine Bonnaire, Jean-François Stevenin, Jacques Spiesser), voici un premier film parfaitement maîtrisé et particulièrement convaincant. Montage syncopé, alternant entre rythme hallucinant (notamment l'incendie d'ouverture) et lenteur mélancolique, cadrage, prises de vues, direction d'acteurs tout dénote d'un grand talent de cinéaste. On attend impatiemment le prochain film de Patricia Mazuy.
  • LE CRIME D'ANTOINE (1989)
    Encore un scénario indigent, inepte, niais, bref totalement inutile. La mise en scène, plate et complaisante, n'arrange pas les choses. Quant aux acteurs, dirigés à la neurasthénique, ils jouent le jeu avec une application nonchalante. Un jeu où le gagnant n'est pas le public.
  • BUNKER PALACE HOTEL (1989)
    L'univers glauque et inquiétant des B. D. de Bilal transposé sur grand écran. C'est encore mieux que les dessins (les voix et le son en plus), une grande réussite. Le décor, la lumière, la texture de la pellicule, les personnages, la musique, les bruits tout est d'une maîtrise parfaite au service de l'univers graphique et fantasmagorique bien particulier d'Enki Bilal. Assurément, le film le plus "différent" de l'année, avec des acteurs superbement "bilalisés".
  • NOCTURNE INDIEN (1989)
    Curieusement, il est moins question ici de l'Inde Eternelle que de l'âme de Fernando Pessoa, le grand poète portugais. Tout comme Pessoa, auquel il se réfère, le personnage principal (J. H. Anglade, fragile et "dustin-hoffmanien") est en quête de soi, et le film retrace fidèlement les étapes finales (terminales dira-t-on, comme pour une lente agonie) de cette recherche. Adapté du roman d'Antonio Tabucchi, le film d'Alain Corneau est peut-être un peu statique, mais on est vite pris par sa magie, son énigmatique mélancolie, sa beauté noire et profonde.
  • YAABA (1989)
    Face aux machineries prétentieuses du cinéma commercial, ce petit film d'Afrique est une vraie leçon de cinéma. D'une simplicité radieuse, cette chronique villageoise africaine et sa grand-mère bouleversante viennent rappeler les valeurs humaines que les temps (et les hommes) se sont chargé d'éroder. "Yaaba" ne se veut pourtant pas donneur de leçon. Si morale il y a, c'est celle d'une fable, d'une histoire de tous les jours.
  • BAPTÊME (1989)
    Et lentement s'écoule le long fleuve qu'est la vie, avec ses joies et ses peines, ses moments de bonheur et ses drames. Le film fleuve de René Féret (dédié à ses parents), riche d'un charme désuet comme on n'en fait plus, charrie aussi un bon paquet de sensiblerie "facile". L'authenticité de l'interprétation est pour beaucoup dans la réussite du film, tout comme le travail sur la lumière. Malgré sa bonne volonté, "Baptême" n'atteint cependant jamais l'ampleur de "Heimat".
  • MYSTERY TRAIN (1989)
    L'Amérique, sous le regard de Jarmush, c'est enfin autre chose que cette image étincelante véhiculée par Hollywood. Memphis, Tennessee, lieu de culte du King, Elvis Presley, est une ville désaffectée, paumée, morte, fantômatique. Et Memphis, Tennessee, c'est un peu d'Amérique profonde. Alliant l'humour et la mélancolie, l'élégance et le rythme, Jarmush amuse, subjugue et envoûte. Les deux premiers volets de ce TRIPtyque sont particulièment savoureux. Balade blues, dans la lignée des précédents Jarmush. Un train à ne pas manquer.
  • LA FOLLE JOURNÉE OU LE MARIAGE DE FIGARO (1989)
    Placée sous le "patronage" de la Révolution (Bicentenaire oblige), cette adaptation de l'oeuvre phare de Beaumarchais s'avère fort longuette et fastidieuse, particulièrement mal filmée (éclairages baveux et mous, montage de débutant, cadrages hâtifs). Coggio en tête, les acteurs cabotinent à qui mieux-mieux. Marie Laforêt (impériale) et Fanny Cottencon (fraîche et complice) sauvent la mise. Mais il aurait fallu bien davantage pour sauver ce film bâclé.
  • AUSTRALIA (1989)
    Aux antipodes de la nostalgie "facile" ("combien de tonnes je vous mets ?"), "Australia" est un film pudique, retenu, presque blessé. Mais aussi et justement pour sa sensibilité, qui jamais n'est sensiblerie un film fort et particulièrement beau. Admirablement interprétée par ses protagonistes (jusqu'au "moindre" second rôle), cette histoire (le déclin du vieux monde et la confrontation d'une identité avec son passé enfoui) à la beauté à la fois mélancolique et pleine d'espoir du soleil couchant.
  • JUSQU'AU BOUT DU REVE (1989)
    Voilà bien l'histoire la plus incroyable de l'année ! Aussi insolite que belle, d'ailleurs. Car derrière sa candeur et sa nostalgie profonde, ce film est beau comme un rêve d'été. Cette quête du bonheur et cette rédemption par le rêve réalisé (je ne dévoilerai pas davantage de l'histoire pour ne pas en flétrir la fraîcheur) ont dans leur naïveté quelque chose de bon enfant, de profondément américain. Le rêve, dernier refuge dans une société dépersonnalisée et, depuis la mort des sixties, sans idéal.
  • LES BAISERS DE SECOURS (1989)
    Le plus narcissique de nos cinéastes (et aussi le plus torturé) a encore frappé ! Et on ne peut que s'en féliciter. Car ces "Baisers de secours" constituent l'un des moments de bonheur les plus purs que l'on ai vu au cinéma ces derniers temps. "Cinéma de famille", moments intimes, à la fois crus et d'une grande pudeur, avec de très beaux dialogues (de Marc Cholodenko), c'est du cinéma chuchoté, une confidence arrachée à un journal, mots de désespoir et d'espérance.
  • UN ENNEMI DU PEUPLE (1989)
    Le maître indien (et bengali) nous avait habitué à mieux. Son nouveau film est décevant, comme si après cinq années d'interruption, le cinéaste avait perdu la main. Nous n'incriminerons pas outre mesure l'extrême didactisme, confinant au simplisme, de l'oeuvre destinée à un public moins "averti" que le public occidental, sa démarche se justifie. En revanche, et malgré un bon pré-scénario (la pièce d'Ibsen), le film est mal écrit, et filmé avec la platitude d'un sitcom. Satyajit Ray vient d'inventer le "sitcom engagé".
  • ERIK LE VIKING (1989)
    Terry Jones et John Cleese faisaient naguère partie de la fameuse équipe des Monty Python. Mais pour "Erik le Viking", ils ont oublié leur punch en cours de route. Lourde machinerie, le film est laborieux et empâté, et manque résolument d'étincelles. Une bien morne traversée, à la férocité ramollie et à la sauvagerie éteinte.
  • SAUF VOTRE RESPECT (1989)
    Un polar de pacotille, qui ne dépasse jamais le niveau d'un sous-produit télé. Plat pour l'intrigue, tiedasse pour l'atmosphère, mous pour les acteurs, désinvolte pour la mise en scène -c'est du cinéma jetable, qu'il vaut mieux jeter, avant même de le consommer.
  • SUIVEZ CET AVION (1989)
    Le cinéma reprend des couleurs et du pétillant avec cette pimpante comédie clin d'oeil, nourrie aux vitamines Capra, MacCarey et autres Wilder. En émule de Capra, Patrice Ambard a fait un premier film qui brille de mille feux, remarquablement balancés. En Cary Grant, Lambert Wilson s'amuse comme un fou et en étonnera plus d'un. Et en Claudette Colbert, Isabelle Gélinas, épatante, est LA révélation du film. Assurément, un avion à suivre résolument.
  • GREAT BALLS OF FIRE (1989)
    Jerry Lee Lewis n'en faisait qu'à sa tête, et ainsi Dennis Quaid, qui cabotine comme ce n'est plus permis, mais tout cela passe très bien, le film a la pèche et nous aussi. Festival de rythmes, de mouvements et de couleurs, le film dévale le long de la carrière abrupte (because vie privée) du rocker speedé, avec au passage un pied-de nez au bien sage Elvis. Sur un ton léger, mais où perce la gravité, "Great balls of fire" tire la langue à la morale qui l'a bien mérité.
  • DERNIÈRE SORTIE POUR BROOKLYN (1989)
    "Moi, Christiane F. " avait déjà démontré le talent glauque d'Uli Edel pour dépeindre l'univers des zonards jusqu'au-boutistes. Pour "Dernière sortie", le cinéaste a disposé de plus de moyens et nous fait donc "bénéficier" d'une plus grande prodigalité dans cette descente aux Enfers. Cru, violent, exhibitionniste, "Dernière sortie" ne perd que peu d'images pour s'attendrir. Son dessein et d'estomaquer, de bousculer ceux d'entre nous qui ignorent les nuits noires et les matins blafards de nos jungles.
  • NOCE BLANCHE (1989)
    Pour qui a vu les deux premiers films de Jean-Claude Brisseau, moments forts comme on n'en voit que trop rarement dans le cinéma français, ce troisième est une déception. Tout en restant fidèle à sa thématique (la jeunesse face au monde) et à son acteur fétiche (Bruno Cremer, toujours aussi remarquable) Brisseau s'est enlisé dans un romanesque à la limite de la mièvrerie, support marketing pour Vanessa Paradis, dont l'indispensabilité pour le rôle est discutable.
  • UNE SAISON BLANCHE ET SÈCHE (1989)
    Les bonnes causes ne font pas forcément les bons films. Elles font d'ailleurs souvent le contraire quand, comme "Une saison blanche et sèche", elles s'empêtrent dans un sentimentalisme de larmes et de sang et dans un manichéisme primaire. Le film, qui semble conçu si on en juge par son esthétique pour la télévision, est certes une adaptation honnête du roman d'André Brink. Mais ses effets de manche sentimentalistes sont autrement ravageurs. Seul Marlon Brando, immense, vaut le déplacement.
  • COMÉDIE D'AMOUR (1989)
    Michel Serrault est tellement grandiose qu'on pardonne au réalisateur toutes les licences qu'il a pu prendre avec la réalité, par ailleurs fort licencieuse (sinon plus ! ). D'autant que les dialogues, grâce à Léautaud, mais aussi grâce à ses adaptateurs, sont parmi les plus remarquables que nous ait offert le cinéma français depuis bien longtemps. Amoureux du cinéma littéraire, et vous qui savez que Michel Serrault et l'un de nos plus grands comédiens dans l'absolu, précipitez-vous sans attendre sur ce petit fléau.
  • LE CUISINIER, LE VOLEUR, SA FEMME ET SON AMANT (1989)
    Pompeux et lourd, le nouveau film de Peter Greenaway tombe dans les pires travers de son auteur lorsque celui-ci se prend trop au sérieux : condescendant, il étale sans vergogne sa fatuité, comme sa provocation scatophile et morbide. Il n'y a décidément rien à prendre au menu. Sans humour ni saveur, le propos se perd dans un magma de tableaux baroques, débordants jusqu'à la nausée. Indigestion assurée.
  • PLUIE NOIRE (1989)
    Un petit colis fixé à un parachute et qui lentement glisse vers Hiroshima, et quelques instants plus tard c'est l'Enfer. "Pluie noire" est un film d'après la Catastrophe, qui fixe le destin de ces "monstres" que sont devenus les survivants, pour leurs compatriotes mêmes. "Pluie noire", film grave mais jamais sentencieux, est filmé dans un très beau noir-et-blanc délavé. Pudique, il ne fait cependant pas d'ellipse sur l'infernal carnage. Imamura nous met dans l'obligation de voir. Le témoignage est une exigence morale.
  • QUAND HARRY RENCONTRE SALLY... (1989)
    Coté pile, une comédie malicieuse autour du thème "Vont-ils le faire ou pas ? ". Et "le", c'est l'amour, le sexe, enfin la préoccupation n°1 de l'homme urbain occidental. Coté face, une chronique émouvante de l'amour et de l'amitié, au tour de la grave question "L'amour rend-il l'amitié impossible ?". La pièce rend un tintement à la fois gai et chaleureux. Et le film est très certainement ce que le cinéma américain a fait de plus réjouissant depuis longtemps.
  • VALMONT (1989)
    Moins spectaculaire que la "version Frears", l'adaptation des "Liaisons dangereuses" par Forman n'en est pas moins réussie. Seulement, là où Frears se voulait virtuose (et y réussissait brillamment), Forman a cherché l'authenticité. Celle des rapports sociaux (suivez le portrait des domestiques, gommés chez Frears), comme celle même que sous-tendait le récit épistolaire du roman de Choderlos de Laclos. Un bon point pour Forman, superbement servi par des acteurs merveilleux.
  • BLACK RAIN (1989)
    L'ethnocentrisme, l'autosatisfaction et le mépris des autres cultures, voilà bien l'un des douteux apanages du cinéma américain. Ridley Scott a mis son efficacité cinématographique au service de cette "cause", et cela donne "Black rain", accumulation des clichés et des lieux communs les plus automatisés autour du Japon. Et voilà que le parvenu veut donner des leçons (de civilisation ? ) au sage. Il faut dénoncer ce film pour ce qu'il est : une saloperie.
  • CHAMBRE A PART (1989)
    "Chambre à part" n'a de la comédie que l'apparence. Bien vite, nous nous apercevons que Michel Blanc arbore sa mine des jours graves, sans parler de Jacques Dutronc, dandy en rupture de ban. Splénétique et terriblement désenchanté, "Chambre à part" est l'histoire de quatre personnes qui ont mal à la vie ouvertement ou secrètement. Un scénario de très belle facture et un quatuor d'interprètes remarquables font de ce film une oeuvre solide et durable.
  • UN MONDE SANS PITIE (1989)
    Un dandy en deuil de ses utopies et du monde tel est le personnage central de ce film de l'après-les illusions. Avec poésie et sans pathos, avec le rythme de la ville et sans les clichés de l'époque. Et avec des interprètes qui savent mesurer la justesse de ton : Hippolyte Girardot, Mireille Perrier (merveilleuse) et un nouveau venu qui promet, Yvan Attal. "Un monde sans pitié", premier film d'un jeune cinéaste de 28 ans, nous annonce aussi un vent de renouveau dans le cinéma français. Il était temps !
  • PALOMBELLA ROSSA (1989)
    N'en déplaise à ceux qu'il agace ou exaspère, Nanni Moretti continue impavide sur son cours autarcique. De ses films, modèles d'égocentrisme maniaque, celui-ci est peut-être le plus émouvant. Parce qu'il est l'aveu de la perplexité d'un homme, d'un intellectuel, face à son parcours, à sa famille politique en dérive, à sa société. Le plus échevelé et le plus rigoureux des nouveaux cinéastes italiens, Moretti rend au passage un hommage à Fellini. Et le nouveau rejoint en grandeur les anciens.
  • MONA ET MOI (1989)
    Sympathique comme ne l'est que le cinéma de famille, "Mona et moi", nous permet de retrouver Denis Lavant (en attendant Carax. ) et Jean-François Stévenin, dans une ambiance de rock zone de bon aloi. Rien que pour cela, il mériterait notre gratitude. Hélas, le film ne présente guère plus d'intérêt que cette réunion de famille. Un scénario inexistant en réduit considérablement la portée, et le film avance comme un concert aux impros trop longues et elles mêmes trop vides pour masquer l'absence de morceaux consistants.
  • CONTE DE PRINTEMPS (1989)
    Peut-être est-ce la floraison printanire, mais le nouveau film d'Eric Rohmer fait partie des plus verbeux de son auteur, réputé pour ses dialogues foisonnants, littéraires, quelquefois agaçants. Les dialogues se font d'autant plus pesants que le film prend du temps à se mettre en place (c'est le plus long réalisé par Rohmer). Mais une fois lancé, on y retrouve le charme, le plaisir et la liberté qui caractérisent l'oeuvre rohmerienne, et on suit les évolutions de ses personnages comme dans une intrigue hitchcockienne (si si !).
  • LES ENFANTS DU DESORDRE (1989)
    Rien de bien nouveau, rien de bien original et rien de bien folichon dans ce film didactissime et dont la sensiblerie a (contrairement à ses personnages) réussi sa réinsertion. Et lorsque la réalisatrice nous assène finalement une descente aux enfers, façon "Moi, Christiane F. "), cela fait bien longtemps que nous avons jeté l'éponge. Une petite sympathie, pourtant, pour Emmanuelle Beart et Patrick Catalifo, qui se sont pas mal démenés. Ca ne fait pas beaucoup pour un film.
  • BANDINI (1989)
    Après les grands espoirs soulevés par son (très beau) premier film ("L'amour est un chien de l'enfer") Dominique Deruddere nous ramène à de moins lyriques attentes. Son "Bandini", platement filmé, est une grosse déception. On serait même en droit de se demander, suprême injure à John Fante, ce qui a valu au livre d'être adapté. Joe Mantegna se fait cabotin, et les autres (le casting reste excellent), toujours filmé en champ, contre-champ, ne sauvent pas une situation, qui sont eux-mêmes hors situation.
  • JOYEUX NOËL BONNE ANNÉE (1989)
    Le couple Michel Serrault Virna Lisi, par le biais de la caméra du toujours vert Luigi Comencini, nous offre un des plus beaux moments d'émotion de cette fin d'année au cinéma. A une époque où les beaux sentiments rivalisent d'ardeur commerciale, ce film tendre et malicieux sait déjouer les pièges du "passage obligé". Il ne faudrait pas passer trop vite sur ce film au titre un peu mal-venu et à l'auteur peut-être trop hâtivement jugé comme galvaudé. Plus qu'un bon film, "Joyeux Noël..." est un film bon.
  • CARNET DE NOTES SUR VÊTEMENTS ET VILLES (1989)
    Un travail de commande qui permet à Wim Wenders, cinéaste désormais idolâtré, de discourir sur notre époque, sur la mode et, plus intéressant, sur la création. Résolument léger, le film ne se prétend pas truffé de trouvailles de génie même si nombre d'admirateurs risquent d'y chercher paroles d'Evangile. Ce "Carnet de notes" a la légèreté d'un croquis, mais aussi il est attachant, comme des bribes d'un journal. Comme une étude de grand maître, c'est un incontournable pour wendersiens et pour admirateurs de Yohji Yamamoto.
  • 3615 CODE PERE NOEL (1989)
    Pour ceux qui croient encore au Père Noël, ce film est un rude coup au moral. Moins un film fantastique pur et dur (dont il use néanmoins des effets), le film de René Manzor est une fable sur la perte de ses croyances d'enfant. Une fable aussi autour de la corruption de l'imaginaire des enfants (et, partant, de ceux qui les entourent : nous ! ) Finis le merveilleux et l'esprit chevaleresque, voici venue l'ère de la destruction pure et simple, et de la destruction infernale. Dommage seulement que Manzor pèche par trop de références directes (même parodiques).
  • LEVIATHAN (1989)
    Dans un bâtiment isolé, ajoutez un passager clandestin indésirable, si possible dangereux, inconnu et, encore mieux, incontrôlable. Le suspense est garanti, il suffit de (relativement) bien doser les tensions entre les personnages (un méchant par ci, un noir à sacrifier par là, deux ou trois jolies filles et un chef contesté), de maîtriser le temps de cuisson et le tour est joué. Voilà donc la recette, déjà maintes fois servie (avec un modèle récent : "Alien"). Mais on nous la ressert encore, parce que c'est facile, trop facile.
  • MELODIE POUR UN MEURTRE (1989)
    "Sea of love" le titre est de dérision. En cela, il n'est pas mal choisi. Mais ne vous y trompez pas, le romantisme est celui d'un désespéré, Al Pacino en héros-blues-qui sait-se-démener-quand-il-le-faut vraiment. Il faut dire qu'Ellen Barkin, troublante de sensualité animale (bye bye Basinger) et d'ambiguïté, vaut tous les risques. "Sea of love", et ce n'est pas le moindre de ses mérites, a aussi le courage d'y aller franchement, à une époque où le sida a flanqué un sacré coup de froid pudibond aux concepteurs de scénarios hollywoodiens.
  • LA VENGEANCE D'UNE FEMME (1989)
    On pourrait penser que le film de Doillon se termine là où il aurait dû commencer. Il est vrai que "l'action" est lente et que ses protagonistes parlent parlent parlent sans répit. Le paradoxe, c'est que pour refuser (et réfuter) le manichéisme réflexe, le scénario devait nécessairement "prendre son temps" pour mettre en place les éléments de la confrontation. Et quelle confrontation ! Un face-à-face bergmanien entre une comédienne souveraine (Isabelle Huppert) et une autre qui a enfin trouvé un rôle à la mesure de ses potentialités.
  • LE CERCLE DES POETES DISPARUS (1989)
    Thoreau, Whitman, Frost, Keats, leurs poèmes (superbes) servent d'aliment au petit groupe de jeunes du film, mais aussi au film lui même. Et l'aliment poétique est un puissant fortifiant. On ne fera pas au "Cercle" le reproche de l'académisme. Car on n'aura pas l'esprit à le faire, tellement est prenant ce vibrant hommage à l'homme, à sa liberté et à la force de son imagination. Le romantique (au sens littéraire, philosophique du terme) en nous exultera au renfort revigorant de ce film magnifique splendidement interprété.
  • TOM ET LOLA (1989)
    Voilà le film que l'on attendait pas. D'une grande beauté plastique, très sensuel, "Tom et Lola" est l'histoire de deux enfants pas comme les autres, qui découvrent la vie et l'amour, de deux enfants qui quittent l'enfance. Un poème et un conte, un hymne à la vie, à l'amour et à la liberté "Tom et Lola" est tout cela, et plus encore : un des grands moment de bonheur au cinéma de ce début d'année. Que ce film, en plus, soit un pur produit français fait plus que nous rassurer sur le potentiel insoupçonné de notre cinéma.
  • SIMETIERRE (1989)
    Les fautes d'orthographe du titre, volontaires, sont encore ce qu'il y a de plus original dans ce film d'horreur classique et sans surprise. Si le public d'Avoriaz lui a accordé son prix, cela tendrait à montrer que ce public reste fort complaisant avec ce qu'il attend de ses films préférés. Et c'est avec la même complaisance que King, Lambert et d'autres lui livrent ses petites frayeurs.
  • SHOCKER (1989)
    L'implacable affrontement entre le Bien et le Mal trouve avec "Shocker" une nouvelle variante, aussi spectaculaire qu'ingénieuse. Et Wes Craven trouve avec Horace Pinker un nouveau filon qui prendra certainement (on peut prophétiser) la relève de Freddy. Alors, gare à la télévision (jolie trouvaille), qui, paraît-il, n'épargne pas ses amateurs.
  • OUTRAGES (1989)
    La guerre du Viet-Nam est devenue un genre cinématographique à part entière, sous-genre du film de guerre. Un genre qui s'est créé ses propres conventions et tics divers, comme tantôt le western, le polar ou le film d'horreur. Autant deréflexes que De Palma, selon son habitude, a parfaitement assimilés. Et il a tenu à le dire avec un bel étalage de complaisance. Ce film est sans doute une satisfaction pour l'égo du réalisateur avant d'être une fête pour les cinéphiles ni même une pièce de plus dans l'accablant dossier vietnamien.
  • MERY POUR TOUJOURS (1989)
    Le sujet était bon (et même important : la délinquance des jeunes, dans la jungle mafieuse de Palerme comme ailleurs), mais Marco Risi l'a gâché irrémédiablement par son traitement romanesque et démonstratif. On est didactique ou on n'est pas, semble penser le fils de Dino Risi. Ce n'est pas notre avis. Voilà comment le film se perd dans le spectaculaire et le cliché, même avec les meilleures intentions du monde.
  • LA MESSE EN SI MINEUR (1989)
    Guillermou maîtrise parfaitement le crescendo dans la nullité. En fin, s'il maîtrise la moindre chose dans ce film, qu'il ose qualifier "d'hommage à Jean-Sébastien Bach". Casting (vous imaginez le rugbyman Charvet en contrebassiste ? ), "direction" d'acteurs, décor, éclairages, prises de vues, montage. C'est un calamiteux désastre à tous les niveaux. Et à commencer par le scénario, un des plus débiles de l'histoire du cinéma. Que des films de la sorte trouvent producteur et même distributeur est tout simplement un scandale.
  • LA BAULE-LES-PINS (1989)
    Diane Kurys aime bien feuilleter les albums de famille, avec ses joies et ses drames. Le drame, en l'occurrence, est celui du divorce. Le sujet n'est pas nouveau, ni son traitement. Film de femme, "La Baule Les Pins" en a la sensibilité, quelque fois la sensiblerie, souvent la misoandrie. On n'est pas forcé d'être d'accord avec le parti pris. On le sera, en revanche, sur le portrait de famille, surtout par la grâce des enfants. C'est sympathique mais d'une mélancolie déjà vue.
  • CRIMES ET DÉLITS (1989)
    Le cru 89/9O de Woody Allen est étonnant à double titre : d'abord parce que pour la première fois, le cinéaste y montre des aspects noirs insoupçonnés (pour la première fois chez lui il y est question d'un meurtre; noirceur aussi dans la mésaventure qui arrive à la soeur du cinéaste Clifford), ensuite parce que c'est la première fois que Woody Allen y mélange le grave et le comique (ses deux penchants), et l'alliage, très risqué, est ici une totale réussite mais où la gravité prend le dessus. Car toujours la gravité l'emportera.
  • MAMAN (1989)
    Un éloge des hors-la-loi, ces "ratés" de la société, sympathique et plein de tendresse. Ce petit film sans prétention et sans autre objet que son amour pour ses personnages échappe à tous les clichés obligés. C'est un peu, lui aussi, un hors-la-loi du cinéma. L'attaque de la banque CNC (! ) est, à cet égard, un morceau savoureux. "Maman", bien sûr, doit beaucoup à Anémone, généreuse et exubérante. Et Anémone est certainement la comédienne française la plus adéquate pour ce personnage : libre et culottée.
  • OUBLIER PALERME (1989)
    Le candidat-maire est un peu mou et l'argument du film (la jalousie) introduit de façon un peu téléscopé, mais le thème tient la route, même s'il est abordé de façon plutôt légère. Car c'est bien là le problème du film de Francesco Rosi : il est trop "américain", trop peu "sicilien". Comme son personnage, il a un problème de racines et d'âme, et comme son personnage il reste à la surface des choses. Et le regard de Vittorio Gassman, en vieux prince enfermé, pèse comme un reproche.
  • NÉ UN 4 JUILLET (1989)
    Après moult détournements et autres "lèse-Vietnam" (cf. "Outrages"), voilà enfin le film qui touche l'Amérique en son point douloureux. Dans "Platoon", Stone était encore un brin légitimiste, dans "Né un 4 juillet" il s'est enfin débarrassé de toute retenue pour balancer au public américain (et dans un style grandiose) sa vérité en face, Tom "Top Gun" Cruise dévirilisé, une génération sacrifiée, et une société hypocrite qui ferme les yeux. "Né un 4 juillet" est l'un des films les plus indispensables sur le Vietnam.
  • MUSIC BOX (1989)
    Jessica Lange et Armin Mueller Stahl, interprètes formidables, confèrent au film une grande intensité dramatique, montée par un scénario très solide et canalisée par une mise en scène fluide. Au-delà de "l'anecdote" du film (contrairement à certains, suivez mon regard, nous ne confondons pas les "détails"), le thème du film aborde nos "secrets" ordinaires : que savons-nous du passé de nos parents, du nôtre, en somme ?
  • LA GUERRE DES ROSE (1989)
    Danny DeVito détourne le couple doré du cinéma américain beat de triomphalisme (Michael Douglas, Kathleen Turner) pour, via un affrontement baroque, nous donner une caricature aussi féroce que pertinente de la société "yuppie", dont les valeurs et les gouts ont ici des allures d'anamorphoses grimaçantes. Fort logiquement (et heureusement), le vitriol n'empêche pas la rédemption. Pour cela, il faut un choc violent. Facile pour les personnages d'un film, mais que faudrait-il pour une rédemption sociale ?
  • TANGO ET CASH (1989)
    Embourbé dans une carrière américaine sans issue (d'ici à la fin de son contrat, qui l'oblige à "livrer" un certain nombre de films), Konchalovski s'est perdu dans une histoire "plus débile que ça, tu meurs". Le scénario est tellement affligeant qu'il n'y avait vraiment rien à y sauver. Les amateurs de films musclés pourront se consoler avec un scénario qui pour être creux n'en fait que plus de bruit. Et puis, dans ce polar soldé, ils ont Stallone et Russell ensemble. Plus les lunettes de Stallone, cela fait trois.
  • SUSIE ET LES BAKER BOYS (1989)
    Ce premier film de Steve Kloves est un des meilleurs scénarii de l'année, qui s'appuie sur un solide sens de l'observation ainsi que sur des dialogues particulièrement bien "torchés" soit deux caractéristiques aujourd'hui rares. Sur un tel canevas, Michelle Pfeiffer comme les frères Bridges composent des personnages superbes. Une mention spéciale pour la somptueuse Michele Pfeiffer, ici plus belle encore, et quelle voix ! Vive Pfeiffer et les Bridges Boys, et on attend impatiemment la confirmation d'un cinéaste prometteur.
  • ET LA LUMIERE FUT (1989)
    "Et la lumière fut" laisse perplexe. Ce regard occidental sur l'Afrique charrie son lot d'images plus proches du cliché et des attentes d'exotisme que de la poésie.. Pourtant, on ne peut se méprendre sur la générosité des intentions de Iosseliani : filmer (à la documentaire) un monde originel, et filmer la fin d'un monde. Mais l'attrait du film pour le folklore et la légèreté du traitement montrent à l'évidence que le cinéaste s'est fourvoyé dans une vision de "touriste engagé". Un touriste qui se voudrait plus royaliste que le roi.
  • MISTER FROST (1989)
    On a bien du mal à reconnaitre ici un film français, ce que "Mister Frost" est pourtant. Mais ses concepteurs ont compris que pour vendre leur produit aux Americains (donc au marche le plus lucratif), il fallait un traitement à l'américaine. C'est-à-dire privilégier le spectaculaire à l'intimisme, l'action à la psychologie, les effets visuels au scenario, le mystérieux au poétique. "Mister Frost" est un thriller diabolique (forcément) et intrigant, très bien joué. Comme un bon produit made in USA. Et c'est un film français.
  • HISTOIRE DE GARÇONS ET DE FILLES (1989)
    Au milieu de tous ces films qui font beaucoup de bruit pour rien, voici un petit joyau dont la petite musique recèle un moment de beauté vraie. Autour d'une rencontre familiale, Pupi Avati nous fait, par petites touches, le portrait d'un segment de la société, avec ses rêves (brisés), ses illusions (perdues), ces petits et ces grands mensonges qui font la vie et qui fondent son étrangeté. Comme un Tchekhov méridional, ce très beau film laisse un gout de beauté et de douleur, où le chagrin se marie au bonheur.
  • AFFAIRES PRIVEES (1989)
    Dans sa forme, il n'y a rien à redire de ce solide thriller de Mike Figgis (nettement mieux ficelé que son précédent) bien mené par Andy Garcia et Richard Gere et où l'on retrouve tous les bons ingrédients du genre. Plus gênant, est cependant le discours du film, résolument focalisé sur l'aspect viril de la rivalité entre les deux hommes. Ceci est peut-être vrai, dans le fond, pour tous les affrontements et pour toutes les luttes pour le pouvoir, mais la réalité est quand même plus subtile, que diable !
  • CYRANO DE BERGERAC (1989)
    Ce "Cyrano" tient moins de l'épopée que de l'opéra. Rappeneau a traité d'égal à égal avec l'oeuvre maîtresse de Rostand, qu'il a prise à bras le corps pour en faire une adaptation parfaite. Avec même (tendez bien l'oreille) quelques alexandrins en plus des originaux. Dans le tourbillonnement constant qu'est ce "Cyrano" émergent des comédiens fabuleux : Depardieu dans un rôle qui entrera dans l'histoire, Weber magistral, Anne Brochet aussi délicate que vigoureuse. Et jamais le tumulte ne devient cacophonie, jamais ne se perd l'intime .
  • MY LEFT FOOT (1989)
    Daniel Day Lewis est un comédien formidable, il l'a déjà montré dans maints précédents films. Ici on a l'impression qu'il s'est carrément dopé, tellement s'impose sa démonstration, que doivent jalouser autant Robert De Niro (assagi) que Mickey Rourke (qui panse ses plaies). Si on n'est pas trop allergique au jeu hyper-expressionniste, on applaudira frénétiquement la performance. Sinon, on pourra se rabattre sur les autres comédiens et sur la mise en scène, sentimentaux certes, mais émouvants de sobriété.
  • BLUE STEEL (1989)
    On ne se méfie jamais assez des apparences. L'héroïne du film l'apprend des le début de l'histoire, et les spectateurs en subiront les conséquences à mi-parcours. C'est la que les choses se gâtent .... Car ce "Blue Steel" avait paru au départ de fort solide facture, diabolique et efficace, mais brusquement le scénario s'emballe, se désaxe, coule sous les clichés et sous un déchaînement de violence à répétition, sur les traces sanglantes d'un Peckinpah des mauvais jours. Ca dérape plutôt salement. Quel gâchis !
  • SIDEWALK STORIES (1989)
    Malice et tendresse sont les maîtres mots de ce film chaplinien de Charles Lane, un nouveau venu du cinéma black américain (heureusement) plus proche de Spike Lee que d'Eddie Murphy. Son amour pour ses personnages, sa peinture du milieu des sans-abris (jamais misérabiliste, sauf la fin, seul ratage du film), et sa constante auto-dérision font de cette comédie qui flirte avec le mélodrame une des bonnes surprises de la saison. Il ne lui manque peut-être qu'un peu de rythme, mais surtout, ni la couleur, ni la parole.
  • ADIEU AU FAUX PARADIS (1989)
    Tevfik Bacer, cinéaste turc établi en RFA, est au coeur du problème du déracinement qui déchire une communauté qui subit violemment le choc de deux cultures aux antipodes. Ce choc, ce sont les femmes surtout qui l'encaissent, passivement ou, comme ici, en réagissant. Le cinéaste en parle avec sensibilité et avec force. Sa maîtrise des moyens du cinéma fait le reste, et donne au film efficacité et force de conviction, sans jamais céder ni à la sensiblerie, ni au voyeurisme, ni à la stylisation, qui sont le lot commun des films de "femmes en prison".
  • JOURS TRANQUILLES À CLICHY (1989)
    Où donc sont restées la malice et la truculence que l'on connaissait à Claude Chabrol ? Chabrol s'est englué dans le roman de Miller comme une mouche dans un pot de confiture. Là où Miller était cru, Chabrol est gras ; là où Miller était insolent, Chabrol est tout juste libidineux ; là où Miller était naturel, Chabrol accumule les artifices ; là où Miller était lyrique, Chabrol est empesé. Ses "Jours tranquilles" sont du toc et de plus mauvais.
  • RÊVES (1989)
    Si le sommeil est l'antichambre de la mort (comme on a pu le dire), "Dreams" est en huit stations une tentative d'exorciser la mort, ou plutôt la peur de la mort. Tentative avant tout pathétique, où l'on voit Kurosawa fougueusement retomber dans ses tics les plus maladifs : son humanisme effréné et écorché vif, son hiératisme "théâtre nô oblige", ses masques outrancièrement grimaçants. Restent de belles images et un parcours initiatique à travers la vie et à travers la phantasmagorie d'un cinéaste géant et momifié.
  • IL GELE EN ENFER (1989)
    Mocky fait certainement les nanars les plus sympas (parce que les moins prétentieux) du cinéma français. La barque prend l'eau de tous bords, les rames pagaient dans une joyeuse anarchie, mais Mocky et son équipe se sont tellement amusés qu'il en reste toujours quelque chose sur l'écran. C'est donc rocambolesque, frivole, kitch, nymphomane, "demovegou", mais quelque part le cinéma y retrouve ses origines : un merveilleux jouet pour grands enfants.
  • ENNEMIES : UNE HISTOIRE D'AMOUR (1989)
    Une histoire d'amour, deux ou trois ? Le "héros" du film ne s'en sort pas... En revanche, Mazursky s'en sort très bien, avec l'adaptation du beau roman de Singer, à notre plus grand plaisir. Car l'histoire que ne pouvait imaginer qu'un conteur yiddish d'une Europe centrale anéantie par la mort nazie est magnifique, comme ses interprètes, formidables. L'émotion sans le mélodrame, et des personnages dévastés par ce qu'ils ont vécu d'une guerre des ténèbres, è la recherche de dignité et d'un reste de vie.
  • STANLEY ET IRIS (1989)
    Du cinéma de bons sentiments, comme le cinéma américain institutionnel en fabrique à la chaîne, les yeux fermés et la conscience tranquille. Sentimentalisme et optimisme béats sont les ingrédients de la sauce, dans laquelle baignent Fonda (normal) et De Niro (plus étonnant et plus navrant. ) L'Amérique profonde, vue sous cet angle (malgré quelques concessions critiques), n'a rien de bien passionnant. On est loin des films américains de Louis Malle ou encore, pour citer un flambant pavé dans la mare récente de "Roger et moi".
  • MISS DAISY ET SON CHAUFFEUR (1989)
    Une histoire gentille et inoffensive, loin des grands tumultes de l'Histoire, loin du bruit et de la fureur du monde. D'aucuns diront "aseptisée", et ils n'auront pas tort. Mais pourquoi mégoter ? Le cinéma laisse une place à Spike Lee et une autre à Miss Daisy. Alors, apprécions-en le charme désuet, la lumière tamisée et la superbe interprétation de Jessica Tandy et de Morgan Freeman. Sans pour autant oublier les grands tumultes de l'Histoire, aux accalmies trompeuses.
  • LES NOCES DE PAPIER (1989)
    La conquête de sa dignité d'homme libre est un combat acharné, qui peut passer par des "combines". Ici, ça met en lumière l'urgence de la tolérance et de la connaissance de l'autre. Un bon scénario soutenu par des dialogues remarquables de justesse, une mise en scène sensible et un jeu d'acteurs (où l'on retrouve Geneviève Bujold dans un rôle magnifique) très beau de sincérité et de vérité. Un film à voir absolument, à une époque où l'emportent le toc et la suspicion.
  • MISS MISSOURI (1989)
    C'est tellement niais que ça en devient grotesque. D'emblée, le film semble tiré d'un mauvais roman de gare. Tout y est navrant, frisant la débilité profonde, du scénario et des dialogues au jeu du pauvre Anconina (bien meilleur en second rôle qu'en tête d'affiche), en passant par la lumière. Et ne parlons pas du portrait de l'Amérique "profonde". "Miss Missouri", à défaut de coupes ou de lauriers, peut prétendre au titre du film le plus nul de la saison.
  • LA CAPTIVE DU DESERT (1989)
    La "captive" de Depardon, sur le mode d'un quasi-documentaire, nous plonge dans un au-delà de nous mêmes et de notre conscience. D'emblée, nous sommes directement (par le décalage de culture, d'identité et de mémoire) concernés, d'emblée, nous sommes directement (par la force de l'image de Depardon) projetés dans cet espace étrange, lunaire, qu'est le désert, et d'emblée nous y sommes autant étrangers et nous en sommes autant prisonniers que la captive (personnage de fiction ou Sandrine Bonnaire-même ? ). Vision étrange, belle, hallucinante.
  • QUELLE HEURE EST-IL ? (1989)
    Toujours mélancolique, Scola. Ce face-à-face père-fils, pour être "déjà-vu", n'en reste pas moins pertinent, puisque le passage de flambeau entre deux générations ne se fait pas (et encore moins aujourd'hui.) sans malentendu. Bien que "télé-filmée" (le nouveau mal du cinéma), la confrontation est admirable (tout en n'atteignant jamais les sommets de "La mort d'un commis voyageur"), mais le film de Scola est dépasse. Les fils d'aujourd'hui se reconnaîtront plus dans "Un monde sans pitié" et parmi les "Poètes disparus". Toujours passéiste, Scola.
  • LENINGRAD COWBOYS GO AMERICA (1989)
    L'humour pince-sans-rire d'Aki Kaurismaki fait mouche dans le premier quart d'heure, mais s'essouffle en cours de route. L'histoire, certes bien sympathique (surtout par son burlesque constant), reste trop mince et se renouvelle peu, finissant par ressembler à un banal road-movie jalonné de jam sessions énumérant les variantes du rock'n roll (versions Memphis, Nouvelle-Orléans, Mexique, etc. ). Aki Kaurismaki (dont on vient de voir la formidable "Fille aux allumettes") est nettement plus à l'aise dans le blues que dans la comédie. Question de climat ?
  • IL Y A DES JOURS ET DES LUNES (1989)
    La fidélité est la qualité principale de Lelouch. Fidélité à son image, à son style, à ses thèmes. Fidélité à son amour des comédiens (tant mieux), à sa passion de la caméra (plus de générosité que comme chez d'autres de prétention. Fidélité à sa grandiloquence et aux histoires de vie, d'amour et de mort, bref de destinées (chacun y puisera selon ses goûts). Pour la spontanéité et l'émotion qu'il tire de ses comédiens, pour la liberté (même excessive) que prend la caméra, pour l'ampleur renouvelée des formes, on peut retenir Lelouch.
  • ATTACHE-MOI ! (1989)
    D'entrée de jeu, on retrouve le style particulier, "movidien", de Pedro Almodovar, toujours aussi ludique et lubrique, ici comme en hommage-parodie du Brian DePalma de la première époque (hélas révolue). Mais Almodovar, saoulé par les vivats, se prend à son propre jeu facétieux et échoue sur sa complaisance. Le scénario semble alors baclé, ouvert à toutes les facilités, celles proprement scénaristiques et dramaturgiques, et celles liées à l'emploi torride de Victoria Abril. Espérons que ce ne soit là qu'une défaillance passagère.
  • KILL ME AGAIN (1989)
    Pas trop mal ficelé, ce polar noir dans la veine des grands "anciens". Caméra efficace, ambiance fidèle à la grande école "série B", des séquences qui ne manquent pas de piquant et des acteurs convaincants, tout particulièrement Joanne Whalley-Kilmer en allumeuse fatale. Malheureusement, par son ton et son emphase (son manque de distanciation et son absence du goût du clin d'oeil), "Kill me again" ressemble plus à un film sous influence qu'à un hommage au film noir. Le scénario présente alors trop peu d'originalité pour être captivant. On connait l'histoire.
  • BLACK RAINBOW (1989)
    Le lierre avance, avance, recouvrant et étouffant tout sur son passage. Et aussi le bon vieux cinéma américain. "Black Rainbow" est ainsi un thriller noué, qui tient seulement par la composition forte de Rosanna Arquette, dans la peau d'un personnage à fleur de peau, au bord du déséquilibre. Mais cela ne suffit pas à sauver un film au scénario trop bancal, qui accumule tous les clichés qu'il peut rafler sur son passage. Le résultat est quelquefois à la limite du comique. Un comble.
  • LE RETOUR DE FLESH GORDON (1989)
    D'emblée, sans équivoque, on est catapulté dans la galaxie des parodies. Avec un mauvais goût jubilatoire, malaxant allègrement scatologie et blagues de bas étage, ce film ressemble plus à une série Z bricolée par des étudiants allumés qu'à toute autre chose habituellement projetée sur nos écrans. Le film ne se prend jamais au sérieux, et c'est bien. Il ne faut donc pas le prendre au premier degré, sous peine d'apoplexie, tellement est infranchissable cette montagne de mauvais goût élevée au rang d'esthétique, ce dégueulis dans le jardin de l'Amérique.
  • L'ORCHIDEE SAUVAGE (1989)
    L'érotisme nouveau est arrivé, et il n'apporte vraiment rien de neuf. Les recettes sont connues, et Zalman King en fait usage en vieux roublard, sans subtilité et enveloppées dans une esthétique clip et à la sauce brésilienne. (naguère, ce fut la thaïlandaise. ). Il ne manque que la soca dance. Quant aux "acteurs", Mickey Rourke semble presque gêné d'avoir à passer par là pour redorer son box office, Jacqueline Bisset joue les utilités et Caree Otis n'est vraiment pas partie pour décrocher l'Oscar. On ne peut que conseiller l'abstinence.
  • PREMIERS PAS DANS LA MAFIA (1989)
    "Premiers pas dans la "mafia" peut se voir et se lire à deux niveaux. C'est d'abord une comédie légère et sans prétention, parsemée d'ingrédients inédits et étonnants. Mais c'est surtout un formidable hommage à un acteur formidable : Brando, mythe vivant et certainement le plus grand acteur de tous les temps. Et le néophyte qui fait ses premiers pas face à l'acteur dieu, c'est le cinéaste lui-même (qui se contente de placer et de tenir sa caméra, les acteurs faisant l'essentiel) et sa réflexion à l'image, Matthew Broderick, un futur très grand.
  • LE ROI DE NEW YORK (1989)
    Dans un écrin de soie noire, noire comme la nuit, noire comme la mort, brille d'un éclat étrange le visage fantômatique de Christopher Walken. Le film d'Abel Ferrara tout entier peut se résumer dans cette image. Dominé par la présence hors du commun de Christopher Walken en Ange de la mort, "Le roi de New York" est un splendide film noir, qui a de la mort la violence mais aussi la douceur. Lors d'une séquence, le réalisateur appelle Murnau ("Nosferatu") à la rescousse. Figure emblématique et parrainage nullement usurpé.
  • VOYAGEURS SANS PERMIS (1989)
    Après le navrant "Tango et Cash", Andrei Konchalovsky se réhabilite avec "Voyageurs sans permis", road movie doux-amer et même désespéré. James Belushi et surtout Whopi Goldberg campent remarquablement deux marginaux en porte-à-faux avec leurs cerveaux et qui parcourent une Amérique sans rêve, crade et désespérante. Les mythes de l'Amérique, travail, famille et réussite sociale, sont ici revisités par un cinéaste désabusé. Parmi les films "officiels" (ceux "made in Hollywood"), celui-ci est certainement l'un des plus courageux et des plus attachants.
  • L'AMOUR (1989)
    Sandrine, Martine, Joël, Paulo et les autres. Très rohmérien, Philippe Faucon filme les hésitations sentimentales des jeunes de banlieue. Petit désarroi sentimental qui débouchera sur le grand désarroi de la vie. La comparaison avec Rohmer s'impose : les mêmes chassés croisés, la même incertitude, la même détresse, la même primauté de la parole, la même proximité de la caméra aussi. Faucon est ausssi plus tendre avec ses personnages, ses dialogues sont moins écrits et son regard plus fortuit. Une petite chronique bien sympatique.
  • L'ETE DES ROSES BLANCHES (1989)
    Attention, l'ère des coproductions internationales tous azimuts commence ! En voici une, américano-anglo-yougoslave, qui permet peut être l'existence même de son objet, mais qui aussi le gâche en partie. Expliquons-nous : le film de Rajko Grlic est délicat et beau, lyrique comme sait si bien l'être le cinéma yougoslave, où se fondent les sensibilités méditerranéenne et slave. Mais la langue anglaise, et malgré la belle prestation des acteurs, est par trop incongrue et nous ramène constamment dans le hors-champ de la production. Dommage !
  • MEURTRES EN NOCTURNE (1989)
    A l'été, les compagnies américaines raclent leurs fonds de poubelles. Le résultat : des films du (petit) calibre de "Meurtres en nocturne", thriller poussif affalé sur sa série de meurtres et qui capitalise sur le sport le plus ennuyeux du monde : le base-ball. Un seul conseil : évitez résolument la partie, sous peine de sommeil (et c'est encore la meilleure chose qui puisse vous arriver), sinon de désespérance.
  • DOUBLE JEU (1989)
    Sondra Locke a peut-être réussi là où auparavant avait échoué sa collègue réalisatrice Kathryn Bigelow ("Blue Steel") : faire un polar au féminin. "Un double jeu" à cet égard, détonne parmi la panoplie des films du genre : sentimental (trop), hésitant tant, il dévoile le volontiers ses étatsd'âme, ses incertitudes, ses apories. En ce sens, c'est une curiosité. Malheureusement, le scénario est trop prévisible, il manque d'intérêt dramaturgique et n'est guère rehaussée par le peu de charisme des acteurs, engloutis dans l'eau de rose.
  • RETOUR VERS LE FUTUR 3E PARTIE (1989)
    Toujours spectaculaire et entraînant, ce troisième épisode de la grande saga de Zemeckis la clôt cependant en eau de boudin, et c'est bien dommage, car le second épisode (le meilleur des trois, car le plus scénaristiquement délirant) promettait une suite en crescendo. Mais cette fois, les scénaristes se sont perdus dans la surenchère romanesque, noyant l'épopée dans une eau de rose naïve et moralisatrice. Heureusement que leur humour auto-parodique maintient l'entreprise à flot. Les limites du film sont aussi les limites du "système" américain.
  • EUROPA EUROPA (1989)
    Les films précédents d'Agnieska Holland (notamment "Récolte amère") avaient démontré qu'elle savait allier sujets forts et mise en scène efficace, ce nouveau film vient le confirmer. Là Où le bât blesse, c'est lorsque la réalisatrice veut trop en faire, coté efficacité de la mise en scène. La force simple et pure de son sujet (le déchirement d'identité d'un jeune juif, obligé de faire le choix obscène, insupportable, de se faire nazi pour survivre) est noyé par un traitement épique à la Hollywood. Ah, quand on en fait trop.
  • TROIS ANNÉES (1989)
    Du pur Tchekhov, qui ravira les inconditionnels du grand maître des sentiments humains. On pourrait tout juste reprocher à Fabrice Cazeneuve de filmer son adaptation de manière trop sage, trop tranquille, et dans un style de film télé haut-de-gamme, façon "mieux-disant culturel". Mais la fidélité de l'adaptation ainsi que le jeu remarquable de Sabine Azéma et de Jacques Villeret transcendent la lenteur du mouvement et emportent notre adhésion fervente.
  • COUPABLE RESSEMBLANCE (1989)
    L'usine Hollywood en sort à la chaîne, de ces produits standardisés, où le scénario est un moteur plus ou moins capable d'entraîner la carosserie d'images montées, et où les acteurs ne sont que de simples pièces de rechange, interchangeables à souhait. James Woods, ici, "fonctionne" bien. Et c'est tout ! Les concepteurs du film, qui connaissent sur le bout des doigts tous les vieux trucs, ne se sont vraiment pas surmenés. Et les décors de tribunaux, terrain bien balisé, permettent aux scénaristes de manoeuvrer en pilotage automatique.
  • TAXI BLUES (1989)
    On aime bien, en Occident, cette nouvelle glasnost-vague de films soviétiques qui font le portrait de "l'empire déglingué". Voilà pourquoi on ne se contente plus de seulement adapter des oeuvres sincères (oeuvres-cris tel que le récent "Bouge pas, meurs, ressuscite") mais on fait en sorte de les susciter soi-mêmes, tels qu'on voudrait les voir. Ainsi naît "Taxi Blues", coproduction avec la France, dont on peut douter de la pureté d'intention. La complaisance de ce "Taxi Blues" racoleur en éclipse les rares bonnes phrases.
  • LA RAGE AU COEUR (1989)
    Aux antipodes du cinéma black militant de Spike Lee, du black marginal de Charles Lane ou du black institutionnalisé d'Eddy Murphy, "La rage au cœur" est un petit joyau, illustration de ce que l'on peut faire de mieux au cinéma : mener un récit à part, avec un rythme à part et une atmosphère à part. Charles Burnett réussit à la fois à transcender son particularisme black pour prendre une dimension universelle mais aussi à retrouver les racines profondes, africaines, magiques, du peuple noir américain.
  • MILOU EN MAI (1989)
    Placé sous la double paternité de Tchekhov (La Cerisaie) et de Renoir, le nouveau film de Louis Malle est un ravissement, teinté de perplexité. Ravissement pour la fête de ses personnages, tout particulièrement Michel Piccoli, dans l'un de ses plus beaux rôles, et Dominique Blanc, véritable Bette Davis du cinéma français actuel. Mais perplexité aussi pour la douce amertume de sa nostalgie, qui le laisse souvent pousser à l'extrême sa caricature. A la fois tendre et féroce, le film garde néanmoins une grande justesse de ton.
  • POUR UNE NUIT D'AMOUR (1988)
    Ah! qu'il est revigorant, l'air de la "Mitteleuropa" ... des personnages a la Bohumil Hrabal, un récit métaphorique pétaradant, un esprit coquin-coquin (quel est la vraie "cause", en fait la révolution ou le sexe ? ) et beaucoup de charme et de joliesse ... ce film mérite absolument le détour. Incontestablement, une grande réussite et une tonicité à toute épreuve.
  • HAIRSPRAY (1988)
    Quelle pèche ! J’ai complètement craqué pour la sémillante Tracy et ses copains sautillants. Ah! Ce look rose bonbon, ces madisons et ces twists des bons vieux fifties ... mais les sixties sont là, et le vent commence à tourner ... Waters qui aime aussi bien amuser que provoquer a commis un pamphlet cool et joyeux contre le racisme bof et contre le terrorisme anti-gros ...
  • ENVOYEZ LES VIOLONS (1988)
    Il ne s'agit pas de violon, mais plutôt de flûte traversière, dans ce divertissement fort sympathique, plein de charme (le sourire irradiant d'Anconina et le regard d'Anémone n'y sont pas étrangers) bourré de clins d'œil. Il n'y a rien a redire -sauf peut-être une certaine répétitivité, mais comment faire autrement ? On passe un excellent moment ... avec en prime, un Galabru absolument phénoménal, comme d'habitude ...
  • FLIC OU ZOMBIE (1988)
    Un flic n'est jamais aussi efficace qu'une fois tué ... et ressuscité, on le sait bien. Alors, il y a la manière "Robocop" et il y a la méthode "zombie" et celle-ci si l'on en juge à ce qui arrive a l'inspecteur Roger Mortis (sic) et à son collègue Doug, est aussi redoutable qu'absolument décapante joyeusement morbide, ce film est l'oeuvre la plus horriblement drôle de l'année.
  • LA SORCIERE (1988)
    Une histoire bien nébuleuse, qui ne sert finalement que de prétexte aux fantasmes de Bellochio ... Apparemment, il a été lui-même tellement impressionné par la plastique de Béatrice Dalle qu’il en a complètement -mais alors complètement- oublié les fils de l'histoire ... Evaporée dans les rêves d'une nuit des Walpurgis ... Seuls les fans de Béatrice Dalle ont de quoi se régaler. Leur sorcière préférée leur est quasiment servie sur un plateau, sans feuille de vigne. Bien maigre consolation.
  • UNE NUIT À L'ASSEMBLÉE NATIONALE (1988)
    Je ne ferai pas de longs discours … en deux mots : spectacle affligeant.
  • L'ENFANCE DE L'ART (1988)
    Ah ! Ah ! Que c'est beau la jeunesse ... Comme çà sait si bien s'entredéchirer, comme çà sait si bien évoluer entre clichés et lieux communs, comme elle sait si bien alterner le niais et le pathétique ... Non, vraiment, c'est un bien mauvais film que celui-ci, de ceux que l'on s'étonne de voir produire encore, lourd, niais (je confirme) d'une lumière douteuse et filmé comme un pied. Girod ferait bien de retourner a ses chères études, ou plutôt de ne pas prendre de caméra lorsqu'il s'amuse avec ses élèves du conservatoire ...
  • A GAUCHE EN SORTANT DE L'ASCENSEUR (1988)
    Quiproquos à gogo et rebondissements -la recette est désormais bien connue- mais là où le nouveau Molinaro fait mouche, c'est un véritable feu d'artifice que nous concoctent les principaux acteurs ...... tous s'en donnent à coeur joie, avec une belle complicité. Résultat : une comédie pétillante, pétaradante, sans répit aucun ...... avec une mention particulière pour Bohringer, halluciné et hallucinant .
  • LA LÉGENDE DU SAINT BUVEUR (1988)
    Cet homme va mourir, mais ces quelques jours qu'il lui reste à vivre, il va avoir un avant-goût du paradis. Fidèlement adapté d'une longue nouvelle de Joseph Roth (la dernière, terriblement autobiographique), ce film d'Ermanno Olmi a une douceur, une bonté, une générosité véritablement anachroniques. Rutger Hauer, émouvant et détonnant dans un contre-emploi au regard vitreux, et Sandrine Dumas (les plus beaux yeux du cinéma français), irrésistible, donnent vie (intérieure) et grâce à ce conte, désespérément beau.
  • FAUX-SEMBLANTS (1988)
    Spécialiste des transformations kafkaïennes, David Cronenberg nous en a concocté une nouvelle histoire à chair de poule. Cette fois, il s'agit de jumeaux (campés par un Jeremy Irons époustouflant) qui vont s'entre-dévorer, sombrant dans une schizophrénie sans fond. Sans effets spéciaux sanguinolents, Cronenberg réussit la double gageure, technique (Jeremy Irons face à "lui-même", très fort ! ) et psychologique (quel pressing !) qu'il s'est imposée. Faux-semblants est incontestablement son meilleur film.
  • PARRAIN D'UN JOUR (1988)
    L'amitié n'est peut-être pas (encore) une valeur perdue, mais elle est devenue une valeur rare, donc précieuse. Quelque chose d'anachronique, comme cette autre notion, l'honneur. David Mamet (scénariste des "Incorruptibles") a écrit une superbe histoire sur l'amitié, une fable au goût de naguère, où Don Ameche émouvant et Joe Mantegna touchant forment un duo aussi classique que magnifique. Lumière et bonheur !
  • DEUX (1988)
    Claude Zidi s'est aventuré dans un genre qu'il connaît bien peu, le drame et qu'il est loin de maîtriser. Et bientôt le drame dégénère en mélodrame. Quelques belles répliques perdues au milieu d'un fatras grandiloquent, un scénario lourdingue, des incohérences grossières, une "psychologie" qui se prend dans ses propres filets et une prédilection pour les coups de théâtre kitsch font de ce film navrant l'anti-must du moment. Dommage pour Depardieu et pour Detmers. Zidi, retourne donc aux comédies !
  • MOITIE-MOITIE (1988)
    En principe, difficile de faire moitié-moitié avec Michel Boujenah, il a tellement de charme qu'il tire naturellement toute la couverture à lui. Ici aussi, dans cette réalisation, Paul Boujenah ne peut que "rouler pour" son frangin, d'autant que leur propos est le même : tendresse et bonheur de l'enfance. Dans ce show, Zabou n'est heureusement pas qu'un sparring partner passif. Et c'est un peu ce qui permet au film de ne pas verser dans l'unilatéral. L'ensemble, bien que sympatique, manque cependant de mordant.
  • JE SUIS LE SEIGNEUR DU CHATEAU (1988)
    "Il ne s'agit plus de vivre, il faut règner" décline le fils du châtelain au début du film. Et la lutte pour le "pouvoir" peut commencer. Ce qu'il y a de plus fascinant, dans cette confrontation, c'est justement la personnalité des deux jeunes garçons, qui font une composition hallucinante. En revanche, la réalisation (et là, Wargnier persiste et signe) pêche par trop de lourdeurs. D'un gothique mastoc, le film s'empêtre dans son armure.
  • KENNY (1988)
    L'enfant est mignon, le sourire engageant et le regard malicieux. Puis, sous le mince thorax, plus rien ! Amputé du bassin et des jambes, il se meut sur ses deux bras et se porte très bien, merci. A partir de là, on aurait pu craindre le pire : un portrait de monstre, genre Freaks, ou un plaidoyer apitoyé et larmoyant, genre "A vot' bon coeur; aux larmes, citoyens" sur le monde triste et dur des handicapés. Heureusement, le réalisateur a habilement évité toute pacotille. Son film et sincère et franc-jeu. Et puis, qu'est-ce que le normalité ?
  • CAMILLE CLAUDEL (1988)
    Un film solide mais sans grandes surprises, bien fait (notamment un superbe travail de lumière) mais d'une facture très classique. Isabelle met toute sa conviction dans son rôle, qu'elle façonne comme Camille sa glaise. Face à elle, Gérard Depardieu (tiens, c'est encore lui ! ) ne passe pas inaperçu, gabarit oblige. Somme toute, un bon moment que l'on revivra bien, à l'occasion TV, en soirée unique ou en feuilleton.
  • ITINERAIRE D'UN ENFANT GÂTÉ (1988)
    Le visage de Belmondo est à lui seul une épopée. Une épopée sentitimentale et un itinéraire magnifique. Et un immense acteur, à la fois humble et majestueux. Lelouch a peaufiné son style et son rythme, avec la complicité d'une brochette de superbes acteurs (Belmondo bien sûr, mais aussi Anconina-la-grâce, Marie-Sophie Lelouch-l'émotion, Lio et Daniel Gelin) servis par des gros-plans opportuns. Un Lelouch triomphal, un film heureux.
  • UNE AUTRE FEMME (1988)
    Comment dire l'immense bonheur de voir, de ressentir ce nouveau moment de Woody Allen "Hannah et ses soeurs", "September", à chaque oeuvre de cette lignée bergmano- tchekhovienne encore plus de grâce, de lumière, de sensibilité, de délicatesse, de sérénité dans les tourments. Gena Rowlands, sortie tout droit des films de Cassavetes, est belle, digne, bouleversante. Son regard, l'aura de Mia Farrow, la présence émouvante de John Houseman. Comment dire l'immense bonheur de retrouver Woody Allen ?
  • Y A-T-IL UN FLIC POUR SAUVER LA REINE ? (1988)
    Joyeusement, furieusement, ignominieusement insolent. La bande de "Y a-t-il un pilote dans l'avion ? " a réussi un coup fumeux dans le genre (bien connu dans nos chaumières) des Nuls. Les gags ne sont pas toujours des plus heureux, mais l'ensemble est leste et bien enlevé.
  • RAIN MAN (1988)
    Un road-movie initiatique à la (bonne) manière d'Hollywood, que Hoffman traverse superbement, avec une composition inoubliable d'acuité et de candeur. En face de lui, Tom Cruise, honnête tâcheron de la génération yuppie et Valeria Golino, mignonne transalpine en virée US, sont comme tétanisés par le formidable Dustin. Du bon cinéma, bien ficelé qui sent l'Oscar (multiple) à bout de nez.
  • LA SALLE DE BAIN (1988)
    Le roman de J. PH Toussaint était effectivement du sur-mesure pour Tom Novembre. Il y est donc, fort logiquement, parfait, on ne peut mieux faire, dans le genre ahuri, absent. L'adaptation à l'écran du livre est très réussie, pour la lettre comme pour l'esprit. Avec en prime le charme ironique de Gunilla Karlzen (ole!!), dont le jeu va comme un gant à l'interprétation globuleuse de l'autre hurluberlu. Dans la forme comme dans le propos, un exercice de style réussi.
  • LES AVENTURES DU BARON DE MÜNCHHAUSEN (1988)
    L'entreprise est tellement gigantesque que le pauvre spectateur, minuscule fourmi, est complèment englouti dans des effets spéciaux aliénants. Et tel un dinausaure, le film de Gilliam est trop lourd pour bou- ger sa carcasse monumentale. C'est vraiment dommage, car le travail effectué est kolossal. Mais il arrive un moment à l'organisme (du pauvre spectateur, minuscule fourmi) d'être saturé du doping visuel.
  • WORKING GIRL (1988)
    L'homme a toujours eu besoin de fables, et l'homme moderne aussi a besoin de fables, de fables modernes. "Working girl" est une de ces fables modernes sur la condition du yuppie, ou plutôt du sous-yuppie, cet aspirant au statut de cadre, de jeune cadre "jeune, dynamique, ambitieux". "Working girl" est une jolie réussite, tonique et revigorante, bien sûr optimiste (opportunément et par définition). Avec en battante sympathique la craquante Mélanie Griffith, et en cadre raviné -mais-qui-a-encore-de-beaux-restes- l'excellent Harrison Ford.
  • MISTER NORTH (1988)
    Un bien beau film, d'une facture classique, littéraire et "british", sur lequel plane l'ombre et l'esprit de l'Irlandais tutélaire, le grand John Huston. Ce premier film du fils pourrait bien, en fait, être le dernier du père. John Huston est d'ailleurs crédité de la production et du scénario. Pour servir le Maître, tous jouent léger, aérien : l'exquise Anjelica Huston, l'impérial Robert Mitchum, Lauren Bacall, hustonienne de toujours, Anthony Edwards en nouveau Redford, et aussi Virginia Madsen, une très heureuse rencontre.
  • UNE HISTOIRE DE VENT (1988)
    Un vieil homme qui part au bout du monde à la rencontre du vent, quel beau sujet de légende antique ! Plus qu'un film, Une histoire de vent est un poème. Un poème où souffle un lyrisme jubilatoire. A 9O ans, le plus vieux cinéaste vivant donne une belle leçon de cinéma aux nouvelles générations "d'hommes à la caméra". Instants magiques lorsque Ivens traverse le décor lunaire de Méliès. Ivens, l'homme qui voulait "dompter le vent avec la caméra" et qui y réussit.
  • LES LIAISONS DANGEREUSES (1988)
    Malgré tout ce que les "puristes" trouveront à redire sur l'esprit ou la lettre de toute adaptation d'une oeuvre littéraire, malgré les griefs des esprits chauvins qui se réservent le droit d'adapter les classiques bien français, j'affirme haut et fort que le film de Stephen Frears est superbe, un vrai et grand plaisir qui se laisse apprécier de bout en bout. Perverse, malicieuse, hédoniste, servie par des acteurs de haute volée (ma préférée est Michelle Pfeiffer, é-ton-nan-te), la mise en scène prend réellement son pied. Et nous avec elle.
  • HIGH HOPES (1988)
    Que le cinéma britannique est pétillant ! En voici encore un exemple charmant, exquis. Grande-Bretagne, rapports de classe. Tel pourrait être le sous-titre de ce film narquois et gentiment féroce. Bourges et prolos, parvenus et vieux idéalistes s'y affrontent à coups de petits fours et de tasses de thé, sous le regard las et terriblement émouvant d'une vieille dame un peu dépassée par les évènements. Un film "au quotidien" sur l'Albion d'aujourd'hui.
  • L'UNION SACREE (1988)
    Voilà un film que l'on aurait pas de remords à déconseiller. De bout en bout, c'est un moment bien désagréable. Malgré sa mise en garde en guise de conclusion-de-conclusion (et qui, un comble ! , se veut un avertissement contre cette même violence qu'il délègue à ses personnages principaux), le film n'a rien à voir avec un essai contre le terrorisme. Au contraire, c'est une mise en scène dangereuse, à l'appel au racisme et à l'intolérance devient une suite logique, comme la violence fut une réponse à la violence.
  • JEU D'ENFANT (1988)
    Le sujet aurait pu donner un film diabolique et même joliment pervers. Rien de tout cela, hélas ! La complaisance avec laquelle l'histoire est décrite et filmée fait tout capoter. Une banalité mineure, comme le (mauvais) cinéma, en passant par Avoriaz, en produit au kilomètre.
  • ROSELYNE ET LES LIONS (1988)
    C'est de la frime" ainsi Roselyne condamne-t-elle, à juste titre, le show d'un dompteur tout en muscles qui veut faire de l'ombre aux deux jeunes stars dorées. C'est également ce qu'on peut dire, hélas, du nouveau Beineix. Certes flamboyant, "rock et baroque" (selon ses propres mots, sic!) et malgré ses images chiadées, ses glissandos de caméra et de jolies trouvailles de dialogues, le film arrive à peine à cacher l'absence de profondeur de son histoire. Et ce n'est pas Isabelle Pasco, traitée en "l'as-tu-vue" par Beineix, qui le fera oublier.
  • CHER FRANGIN (1988)
    Sujet tabou, la guerre est ici abordée de front, avec sincérité et justesse, bien qu'avec un certain militantisme. Mordillat énumère beaucoup de "détails" qui ont longtemps échappé à la conscience nationale : incorporation forcée, guerre colonialiste, conflits entre les officiers, torture, moyens expéditifs, violence contre la population civile, etc. Avec un regard de tendresse pour une couche populaire "résistante" et un excellent rythme de narration, Mordillat a fait un film qui ouvre la voie.
  • CONVERSATIONS NOCTURNES (1988)
    L'aliénation d'un homme, perdu dans la jungle des mots, dans une Amérique aliénée par ses hantises, autant dire que Talk Radio est un film noir. Noir, parce que sa vision de l'Amérique, entre fachos, junkies et tarés de toutes sortes, est tout autre qu'idyllique. Talk Radio est fascinant. Pour cette vision noire mais aussi pour le jeu étourdissant d'Eric Bogosian (par ailleurs co-scénariste) et pour la caméra virevoltante et le montage speedé d'Oliver Stone. On en ressort abasourdi par tant de violence tapie derrière les mots.
  • MES NUITS SONT PLUS BELLES QUE VOS JOURS (1988)
    Alors, naïfs, vous osiez croire que Zulawski filmerait bien sagement le roman (superbe) de Raphaelle Billetdoux ? Des clous ! Notre écorché-vif-et-fier-de-l'être a phagocyté le bouquin, dont il puise seulement le titre et quelques grandes lignes qui lui servent à faire des siennes, une fois de plus. Hystérie et verbiage sont au rendez-vous, dans cette boursouflure larmoyante et grandiloquente, reflet de l'angoisse de vivre post-sida d'un certain milieu parisien.
  • BLANCS CASSES (1988)
    Les Français en Afrique voilà un sujet qui a déjà été abordé à maintes reprises. Souvent bien (Claire Denis, Jean-Jacques Annaud) mais très banalement dans le cas de Blancs cassés. Le film (résolument petit) de Philippe Venault est sans passion, plat, paresseux, ennuyeux. Le jeu des acteurs en reflète la physionomie générale, et il n'y a que Jacques Bonnaffé et (surtout) John Berry pour maintenir un peu de mouvement dans la torpeur générale.
  • AU-DELA DU VERTIGE (1988)
    On attendait mieux de Zanussi, surtout plus de rigueur. Mais non, "Au-delà" du vertige est lourd et particulièrement mal filmé. Le réalisateur confond atmosphère avec filtres à caméra, nous imposant deux heures d'images mastoc très malheureuses. Ce désastre ne devrait cependant rien enlever au crédit de Renée Soutendijk, qui fournit une prestation impressionnante dont il est dommage que les nuances pâtissent du parti-pris esthétique du réalisateur.
  • NOTTURNO (1988)
    Les années noires de Schubert, compositeur maudit et miraculeux. Il n'est pas question, ici, de retrouver l'exubérance d'Amadeus, ni l'idolatrie triomphante du commun des films-biographies. Fritz Lehner a préféré mettre en scène le parcours d'une âme tourmentée, meurtrie, humiliée. Tourments admirablement rendus grâce à la caméra de Fritz Lehner et à son rythme (très lent, mais où jamais on ne s'ennuie), aux superbes images du chef-opérateur Gernot Roll et à l'interprétation sensible d'Udo Samel.
  • PATTI ROCKS (1988)
    L'univers (mental) des hommes, éternels enfants. A travers un voyage nocturne, un quasi huis-clos (en road-movie théâtral) épatant et dégrisant sur un (in)certain machisme. A la fois grave et hilarant, voici l'un des films les plus intéressants du moment. Pour hommes et pour femmes, pour tous les grands enfants.
  • TROP BELLE POUR TOI (1988)
    A sujet banal (un homme entre deux femmes), traitement peu banal: Bertrand Blier a décidé d'aller à l'encontre des règles habituelles de scénario, et de déconstruire sa narration. Résultat : un puzzle navigant entre réel et imaginaire, où les dialogues sont constitués de ce que les personnages pensent et non de ce qu'ils se disent réellement. Conséquence : un film sans consistance, où l'espace comme le temps flottent dans un vide fictionnel que nourrissent les "dialogues" hasardeux, la musique de Schubert ad nauseam et la fausse fluidité de l'image.
  • UN CRI DANS LA NUIT (1988)
    Le sort réservé à cette mère de famille (Meryl Streep) ahurissante de véracité, d'authenticité de même que Sam Neill, qui incarne le mari), par la justice, mais sur tout par la presse et le public, n'est pas sans rappeler notre affaire Grégory. Un cri dans la nuit n'est pas un film spectaculaire, c'est un reportage sobre et sincère, à la mise en scène honnête tout l'opposé, semble-t-il, des reportages de presse sur l'affaire, qui a défrayé la chronique en Australie, entre 198O et 1988.
  • L'AMI RETROUVE (1988)
    Depuis "L'épouvantail", Jerry Schatzberg est à la recherche d'un second souffle. Avec "L'ami retrouvé", ce n'est pas encore le souffle retrouvé. L'adaptation du livre de Fred Uhlman, sobre et humble comme il se doit mais somme toute plutôt académique, n'apporte rien de nouveau au débat sur la montée du nazisme, déjà très richement nourri par le cinéma allemand. Mais Hollywood, on le sait, préfère faire les choses à sa guise.
  • NEW YORK STORIES (1988)
    1. Martin Scorsese, pour les couleurs, le mouvement, la lumière, Nick Nolte et of course Rosanna Arquette ! 2. Francis Coppola, (pour ses inconditionnels), pour sa féerie, son optimisme, la réapparition de Giancarlo Giannini, et pour l'irrésistible Zoé. 3. Woody Allen, pour sa névrose sublime, son angoisse de vivre, sa mère au-dessus de New York (l'une des meilleures idées de cinéma depuis longtemps).
  • JÉSUS DE MONTREAL (1988)
    Et si le Christ redescendait sur Terre ? Son aventure pourrait être un peu celle de Daniel (Lothaire Bluteau chapeau ! ) et de sa petite troupe (A noter que Catherine Wilkening y joue un peu son propre rôle d'actrice sacrifiée). Après une Passion du Christ new look (et splendide, déchirante), voilà que tout bascule vers un nouveau chemin de croix, stigmatisant parallèlement une société de fric, de bizness, de mépris, d'indifférence et d'hypocrisie. Un film indispensable.
  • LES ANNEES SANDWICHES (1988)
    "Les années sandwiches" est certainement l'un des films les plus émouvants de la saison. Non seulement pour son sujet ou pour le charme de la nostalgie, mais surtout pour sa simplicité, sa discrétion, sa pudeur et sa tendresse. Ses protagonistes, Thomas Langmann (un petit Peter Lorre !), Nicolas Giraudi etun formidable Wojtek Pszoniak, ont su trouver le ton juste, un rayonnement qui donne à cette chronique une beauté vraie.
  • LES INSOUMIS (1988)
    Né d'une urgence de filmer, comme il est une urgence de respirer et de vivre, le nouveau film de Lino Brocka est le constat d'une faillite, celle d'un régime qui, à force de compromis, s'est compromis. Lino Brocka, cinéaste musclé (à la Costa-Gavras) mêle avec opiniâtreté scènes intimes et séquences de lutte, dans un contexte où l'individu ne peut échapper à la tourmente extérieure, où le fragile cocon familial est un leurre impossible. Un film important.
  • MIGNON EST PARTIE (1988)
    Une jeune cinéaste de la vague Moretti, qui sait faire simple, et dont ce premier film est très attachant, tendre et désenchanté. A la fois chronique d'une fin d'enfance et schéma en coupe d'un certain quotidien citadin italien, "Mignon est partie" suit la grande tradition des regards d'enfants sur le monde. Un regard interrogateur, mi-figue mi-raisin, d'une douce nostalgie.
  • CHIMERE (1988)
    On ne peut qu'être navré (sinon irrité) devant une telle platitude. Ce film est à l'image de ses personnages, sans épaisseur, à l'image de ses dialogues, inepte. Le scénario pédale dans le mou, en une succession de scènes bouche-trou, du moins n'en voit-on pas une autre justification. Chimère : vaine imagination (Petit Robert). Le film de Claire Devers correspond exactement à la définition.
  • LA BARBARE (1988)
    Et voilà qu'on nous ressert, une fois de plus, de l'homme mou, flasque et lâche, de l'épouse humiliée et digne, et de la jeune Carmen en furie. Sur fond de désert (ou, accessoirement, de couloirs de clinique), on nous accommode tout cela à la sauce Sigmund, tendance "recherche du père", et à nous les réjouissances ! Une accumulation de poncifs qui, les dialogues aidant, forme une litanie mièvre, grotesque même. Assurément, Mireille Darc ferait bien de rester de l'autre côté de la caméra.
  • L'AMOUR EST UNE GRANDE AVENTURE (1988)
    "Blague" Edwards pose ici un regard narquois sur la condition de l'homme américain. Les tribulations amoureuses d'un "ex-mari" sont ici prétexte à un marivaudage, ma foi, pas désagréable, mais qui ne casse pas la baraque à moins d'apprécier un certain humour américain (écrivain à succès, barman, confident, "parties", beuveries, psychanalyste-REconfident, etc. ). Les séquences des préservatifs fluorescents sont particulièrement loufoques. Ce sont celles qui resteront de ce film finalement bien gentillet.
  • BAL POUSSIERE (1988)
    Chronique candide d'un village d'Afrique, chronique aussi d'un petit harem (aux odalisques plantureuses et toujours prêtes à se chamailler comme à se rabibocher), "Bal poussière" est une comédie bon enfant et nonchalante, très africaine. Le film n'échappe pas à un certain folklorisme, mais sans s'y apesantir. Jouant avec les réalités sociales (polygamie, oppositions tradition-modernité et ville campagne, etc. ) et se jouant d'eux, une comédie qui a beaucoup de charme.
  • YOUNG GUNS (1988)
    On croyait que Peckinpah et Léone avaient porté l'estocade finale au mythe du western, mais celui-ci bouge encore, et Christopher Caine dégaine à son tour pour vider son chargeur dans le tas. Mené par une escadrille de nouveaux pistoleros du cinéma américain (et tout devant Emilio Estevez et Kiefer Sutherland), "Young guns" est un western "sale" et bruyant, où tout le monde est pourri jusqu'à la moelle, où Billy-le-Kid est un usurpateur immature et son gang une poignée de trouillards allumés. Les westernophiles ne seront pas déçus.
  • BRULANT SECRET (1988)
    Burning secret. Brandauer énigmatique (c'est un grand, je vous dit ! ) et Dunaway fragile et déchirée (d'une délicatesse aux antipodes de "Barfly")une rencontre magnifique, celle d'une âme tourmentée et d'une âme frustrée. L'univers de Zweig parfaitement reconstitué, comme en une machine à remonter le temps.
  • LES BOIS NOIRS (1988)
    Quel ennui ! Difficile de se sentir concerné par ce film lourd qui avance à un rythme de tortue. On y observe les protagonistes comme des intrus au milieu d'une bande d'ahuris du drame romantique. Pas de chance pour notre vamp nationale, banalisée et souvent mal servie (on a vu Deray plus inspiré), et dont c'est la énième "seconde catégorie". Philippe Volter et Geneviève Page, en revanche, sont à meilleure enseigne, malgré le crépuscule que leur réserve le scénario.
  • LES EAUX PRINTANIERES (1988)
    Une romance tragique tout ce qu'il y a de plus classique, qui déçoit beaucoup de la part du cinéaste polonais, auteur d'oeuvres plus fortes, de "Travail au noir" au "Bateau phare". Tout en n'apportant aucune originalité et aucune innovation notable au thème vieux comme le cinéma (et même plus vieux encore), la réalisation est cependant honnêtement menée. Le film ravira les romantiques mélancoliques et les admirateurs de Nastassja Kinski, qui littéralement illumine le film (le directeur de la photo en sait quel que chose).
  • LA VIE ET RIEN D'AUTRE (1988)
    Un sujet en or cette homérique entreprise pour identifier les centaines de milliers de morts au dit "champ d'honneur". Hélas, Tavernier s'embourbe dans les tranchées de son champ de bataille et dans les chemins tortueux de sa romance (au demeurant, Noiret et Azéma sont magistraux). C'est tellement long qu'il est obligé de faire vite et donc de nous bombarder d'un déchaînement inlassable de mouvements de caméra, de coups de montage et de bavardages crépitants. Soumis sans répit à cette rafale harassante, on en sort passablement estourbi.
  • ARIEL (1988)
    Sans désespoir ni misérabilisme, le trajet du héros du film est exemplaire. Exemplaire d'abord de la "pêche" d'un cinéaste froid, précis et qui mène son action sans atermoiements, à la vitesse de l'éclair. Exemplaire ensuite du dynamisme d'un cinéma-blues qui refuse de s'enfermer dans son spleen. Exemplaire enfin de la vitalité de "l'autre cinéma", artisanal, tiers, périphérique. Un cinéma de véracité, et surtout un cinéma de liberté.
  • CINÉMA PARADISO (1988)
    Comme sait si bien le faire le cinéma italien, un retour dans le passé ruisselant de nostalgie. Il faut vraiment avoir un coeur de pierre pour ne pas être emporté par l'émotion déferlante. Philippe Noiret est bouleversant, dans ce qui restera comme l'un des plus beaux rôles de sa carrière, et le jeune Salvatore Cascio, fidèle à une longue tradition du cinéma italien (de "Sciuscia'" à "Un enfant de Calabre"), nous chavire par son innocence et sa spontanéité.
  • ROUGE VENISE (1988)
    Rien de neuf sur les rives du Canale Grande, et rien de bien passionnant. Polar ou comédie, dans les deux cas, c'est aussi léger et lassant, et aussi mystérieux que peut le permettre une histoire somme toute sans grand intérêt .
  • COUSINS (1988)
    S'il faut juger "Cousins" dans le cadre de la longue liste de remakes made in USA (et il nous semble impossible de faire autrement), le film de Joel Schumacher est certainement un remake réussi, car parfaitement adapté à l'américaine. C'est assurément un remake plus justifié que, par exemple, l'inutile "Trois hommes et un bébé". Le film est plaisant, pas désagréable à regarder (si on n'est pas allergique au romantique ruisselant), très "American spirit" et donc aussi beaucoup moins cru et moins passionné que "Cousin, cousine". French is better!
  • LA FILLE DE QUINZE ANS (1988)
    Lorsqu'on a le goût de la beauté, on a aussi celui de la perversion. C'est le cas de Juliette, qui ne se veut pas une fille comme les autres et qui, Doillon oblige, n'a pas choisi la simplicité comme ligne de conduite. Oui, "Doillon oblige", car ce jeu n'est que trop celui de Jacques Doillon, qui lorsqu'il ne verse pas dans les sentiments paroxystiques, s'évertue à les effleurer pour les faire bruisser en sourdine. Ses acteurs ont de la grâce, une grâce fragile qui est le meilleur d'un film aux abois, contenu, paradoxal.
  • BREVE HISTOIRE D'AMOUR (1988)
    "Comment vivre ? " question nodale du projet de Krzysztof Kieslowski, les "Dix Commandements" en autant de films. Et Kieslowski ne propose pas de réponse, mais apporte un constat, net, tranchant, fulgurant : dans l'impasse de vie, l'amour reste le dernier rayon de lumière. Sans eau de rose, ni lyrisme de pacotille. Et ce constat-là restera sans doute l'un des plus marquants de l'année.
  • SEXE MENSONGES ET VIDÉO (1988)
    On l'attendait au tournant, ce film de jeune prodige, palme d'or à Cannes, à 26 ans et à son premier film. Le risque, au bout de cette attente, est de mettre la barre un peu haut. Car Soderbergh n'est pas Welles. Sexe, mensonges et video, incursion dans les hantises du yuppie moyen dans l'Amérique profonde, n'en est pas moins un film fort, filmé avec énergie et virtuosité par un cinéaste dont on attend désormais encore plus impatiemment la suite.
  • LE TEMPS DES GITANS (1988)
    La musique, les couleurs, les personnages, la composition des images, les mouvements de caméra d'emblée, "Le temps des gitans" nous emporte dans son giron envoûtant. Deux heures et demie plus tard, on en ressort émerveillé et fort ému. "Le temps des gitans", histoire d'amour aux arômes des Balkans, poésie de la terre et du destin, symphonie baroque, est un film-fête halluciné au souffle épique. Qui confirme Emir Kusturica comme un des plus brillants (et mégalos) cinéastes actuels.
  • LE SINGE FOU (1988)
    Un film morbide et malsain comme on en fait rarement (mis à part Greenaway, mais il est de notoriété cinéphilique que celui-ci est un "cas"). Si on préfère les situations claires, ce film est à éviter absolument. Si l'on peut se contenter de l'interprétation solide (mais perplexe) de Jeff Goldblum, qui baigne en pleine sauce thanatique, alors bon courage ! (D.W.Graphite)
  • ERREUR DE JEUNESSE (1988)
    Voilà un film qui sent ("empeste" dirons certains) la première oeuvre dès le premier plan. L'auteur, pour ses imperfections, pourra toujours se prévaloir de son titre. Car le film en a beaucoup, des imperfections. Avant tout le maniérisme de la mise en scène et les lourdeurs et maladresses des dialogues. Mais le film a quand même plus de charme que de maladresses. Ses dialogues ne récèlent pas que des aphorismes bancals. La poésie du film, sa sensualité et son désespoir chaleureux ont de quoi gagner notre sympathie.
  • LET'S GET LOST -CHET BAKER- (1988)
    Personnalité légendaire du jazz, Chet Baker allait en connaître les cimes comme les abîmes. A l'ascension rapide du jeune premier, beau comme une divinité grecque allait succéder la descente aux enfers de la défonce. Mais qui était vraiment Chet Baker ? Le film de Bruce Weber adopte le phrasé aérien et fumigène du virtuose de la trompette et fait ressortir la duplicité d'un personnage hors normes. Les témoignages se contredisent, mais faut-il faire la part de la réalité, la part du mythe ? Le jazz continuera à veiller jalousement sur ses légendes.
  • GUNMEN (1988)
    Le réalisateur s'est visiblement plus préoccupé d'acrobaties et de pitreries sanglantes que de scénario. Ce qui nous donne un accéléré effarant de massacres dont la multiplication ne fait que souligner la gratuité et l'absurdité. Kirk Wong veut faire d'un marathon un sprint, et pour ce faire il enfile les ellipses les plus fantaisistes. Emule de Leone, de Peckinpah et du film noir (qu'il n'a pas pris le temps de digérer), il nous assène tous les clichés possibles et imaginables. Caricature de film, "Gunmen" est une gaminerie de mauvais goût.
  • LES AS DU CLIP (1988)
    Le cinéma rock se partage entre deux tendances , le "sérieux" (tel "Sid et Nancy" d'Alex Cox) et le "pas-sérieux-du-tout" (tel le récent "Leningrad Cowboys" d'Aki Kaurismaki). "Les as du clip" est à ranger, indubitablement, dans cette seconde catégorie, avec son charme et ses défauts. Le scénario est (bien sur) calamiteux, mais qu'à cela ne tienne, le film a une pêche d'enfer et poursuit sa route chaotique dans la totale insouciance de l'ordre et de la rigueur, avec pour seul impératif celui de s'amuser. Comme un bon disque funky.
  • JEU DE GUERRE (1988)
    Sur le mode mineur (d'abord, la méfiance : est-ce un énième nanar d'été ?), puis sur le mode majeur (celui de sa thématique le sort des Indiens aujourd'hui et de son traitement), le film de Franc Roddam est une des bonnes surprises de ce mois de juillet. Franc Roddam aborde avec justesse un des thèmes tabous de l'Amérique blanche (le viol continu de l'identité culturelle des Indiens, rejetés dans des réserves indignes) et reporte efficacement le western à l'époque contemporaine. Plus qu'un genre, le western est ici un rapport de forces.
  • GHOSTS OF THE CIVIL DEAD (1988)
    Rarement on aura vu film aussi dur, dans un domaine où le cinéma s'est souvent illustré par sa complaisance. Basé sur des "bavures" (que ce mot est ici euphémisme !) réelles, "Ghosts of the civil dead" est, sous la forme d'un rapport, un réquisitoire implacable contre certaines méthodes pénitentiaires, contre la prison en général. Froid et d'un réalisme abrupt et clinique, le film de John Hillcoat est une descente aux Enfers dont on ne remonte que pour entrevoir un autre enfer. Telle est la loi du cercle vicieux.
  • LUI ET MOI (1988)
    Ce qui pourrait paraître comme un regard malicieux sur la paranoïa masculine est en fait une manifestation de misoandrie charactérisée, et Doris Doerrie n'en est pas à son coup d'essai. Heureusement, le public français avait jusqu'à présent eté épargné de ses précédentes variations sur le thème, à part "Mes deux hommes" tous aussi douteux. La présence de Griffin Dunne confirme si besoin en était le manque d'originalité de la réalisatrice, qui a vu "After Hours". Sa composition ne fait qu'ajouter à notre agacement constant.
  • CHINE MA DOULEUR (1988)
    Cinéma chinois ne rime pas avec chinoiseries. Evitant autant l'exotisme racoleur que le pamphlet bruyant, Dai Sijie a fait un film magnifique de simplicité et de pudeur. Récit d'un séjour initiatique tout autant que pied de nez à la bêtise et à la cruauté d'un régime implacable de méchanceté sous son masque débonnaire "Chine ma douleur" procède par petites touches, comme en une estampe, et démontre qu'avant les rues, la fronde s'opère dans les esprits.
  • MYSTIC PIZZA (1988)
    "Je ne passerai pas ma vie à servir des pizzas" lance le personnage interprété par Julia Roberts. Paroles prémonitoires, puisque depuis, la belle a fait bien mieux : le trottoir, comme on sait, et le box-office. C'est justement à ce trottoir rutilant que l'on doit la sortie tardive de ce film antérieur, qui n'aurait rien perdu à rester dans les oubliettes. Les pizzas sont portugaises (rigoureusement sic ! ), et la mélo-comédie une niaiserie pour teenagers de la sombre province yankee. Plouc.
  • ROXANNE (1987)
    Ah, ces Americains ! Pour nous faire enfin une comedie pas trop tarte (et meme carrement reussie), ils sont obliges de puiser dans nos classiques. Cyrano de Bergerac, en l'occurence. Le film de Schepisi reprend les morceaux de bravoure de la piece de Rostand dans un melange de drolerie et de tendresse, dans la plus pure tradition des grands classiques.
  • CORENTIN OU LES INFORTUNES CONJUGALES (1987)
    Une aimable plaisanterie, empoudrée et emperruquée. Si on y cherche plus que cela, on ne trouvera pas. L'idée de départ est originale, certes : cette belle-maman qui a jeté son dévolu sur la nonchalante fortuné du sieur Corentin et qui l'accuse devant une très pittoresque commission d'être un constipé de la braquette. Hélas, la plupart des personnages manquent totalement d'énergie, ce qui nous donne un film à la fois morne et décousu, qui vaut surtout par quelques éclats épars.
  • LES AILES DU DESIR (1987)
    D'une beauté inouïe, de la première à la dernière image, de la première à la dernière phrase. On a l'impression d'avoir attendu très longtemps une telle oeuvre. Avec "Les ailes du désir", Wenders explose littéralement, se révèle "l'homme providentiel" du cinéma actuel. Et Ganz et Sander, quels acteurs ! Des anges, des géants !
  • LA LUMIERE (1987)
    On ne peut que se laisser envoûter par cette oeuvre magique, belle et gracieuse comme une danse rituelle. On ne peut qu'être transporté au-delà du temps par cette oeuvre chaude et lancinante, légère comme un songe. Le film de Cisse est un conte merveilleux, pour tous ceux qui aiment l'imagination et l'ailleurs.
  • LES GENS DE DUBLIN (1987)
    Dernier film réalisé avant sa mort par John Huston, conscient de l'imminence de son départ, "les Gens de Dublin" est une oeuvre délicate, forte et sereine, belle dès les premières images et dont la douce mais profonde tourmente n'apparaît qu'aux abords du dénouement. Ce film bouleversant vient en apporter une nouvelle confirmation : la disparition de John Huston laissera un vide immense.
  • TOO MUCH (1987)
    D'abord une mise au point indispensable : ce n'est pas un film "mode", malgré le titre, ni un film "teenager", comme le laisserait croire la couleur rose bonbon de ce même titre. Souvent pétillant et fort sympathique, allant tantôt vers le comique, tantôt vers le dramatique, "Too much" est une critique bien sentie d'une sociéte britannique figée. Et Emily Lloyd, une découverte.
  • LA VIE EST UN LONG FLEUVE TRANQUILLE (1987)
    Ca commence comme du théâtre de Bouvard-sketches à gogo pour passer rapidement la vitesse supérieure, celle d'une satire sociale au vitriol, impeccablement et très intelligemment construite et jouée sabre au clair par une compagnie déchaînée. Si le petit Momo-Maurice exerce une bien mauvaise influence sur sa nouvelle famille, cette première œuvre de la pub-star Chatiliez est une cure tonifiante QUI, si j'ose dire, DECOIFFE ...
  • ECLAIR DE LUNE (1987)
    Une comédie douce-amère, chaleureuse, rafraîchissante, sympathique ... des éléments que l'on retrouve que trop rarement dans ces néo-slapsticks qui sont devenus le lot courant de nos écrans. Les personnages sont attachants même "le moins amical" (le papa). Cher en particulier fait un numéro de première classe, dans un rôle taillé sur mesure et la chaleur qui se dégage du film doit certainement beaucoup à cette sympathique communauté sicilienne d'un New York familial et nocturne ...
  • SAMMY ET ROSIE S'ENVOIENT EN L'AIR (1987)
    La face férocement cradingue d'une Albion mise à rude épreuve. Et si Sammy et Rosie s'envoient en l'air, ce n'est pas forcément ensemble ...Incontestablement, Frears est devenu en trois films, LA référence en la matière pour toute vision originale d'une Grande-Bretagne où l'immobilisme et le chambardement font un couple aussi bizarre qu'indéniable. Il s'en dégage une poésie violente, une aura échevelée où les temps s'entrecroisent, où les générations s'entrechoquent, où les couleurs s'entrêmelent ...
  • LONGUE VIE A LA SIGNORA (1987)
    Les galeries de personnages (les tics attaquent ! ) ont toujours quelque chose de fascinant. Celle qui défile à l'occasion de ce festin absurde (on pense à la réunion des "Saisons du plaisir") est particulièrement pittoresque. Le regard d'Ermanno Olmi est peut-être un peu réducteur, mais on se laissera facilement emballer par cette satire douce de deux mondes aux antipodes, d'un naturel perdu, d'un protocole de vie où la vie a de la mort tous les traits.
  • ÉTROITE SURVEILLANCE (1987)
    Voilà un polar bien sympathique qui sait ce qu'humour veut dire ... un parfait dosage de drôlerie, d'action et de suspense en font un thriller aussi trépidant que malicieux . Madeleine Stowe, la surveillée, est vraiment craquante. quant à Richard Dreyfuss, le vaillant surveillant, il est irrésistible ...
  • BLUE JEAN COP (1987)
    Certains scénaristes ont vraiment un culot monstre. En l'occurrence, l'auteur de cette histoire, tellement tirée par les cheveux qu'on en reste abasourdi. Erreurs élémentaires et invraisemblances flagrantes se succèdent et s'entrechoquent à un rythme ahurissant ... Autrement, cette "cop-story" est mouvementée à souhait (avis aux amateurs) et souvent fort adroitement filmée. Elle vaut certainement plus par ses cascades et carambolages que par son intrigue ... Mais n'est-ce pas justement ce que l'on attend ?
  • UN ZOO LA NUIT (1987)
    Le père, le fils et les mauvais esprits, pas évident, ce film canadien très noir, violent et cruel, physique(ment) et surtout psychiquement ... On en sort vraiment secoué, malmené ... du moins pour ceux qui tiennent jusqu'au bout ... Le réalisateur ne fait pas dans la simplicité (ni dans la fine dentelle par ailleurs) son film prend deux directions très différentes : le Marcel loubard chez les gangsters, séquences très S. M. et le Marcel filial qui retrouve son père, scènes d'une grande émotion. Le zoo est glauque, le zoo est lyrique ....
  • L'INSOUTENABLE LÉGÈRETÉ DE L'ÊTRE (1987)
    Du livre miraculeux de Milan Kundera, Philip Kaufman a réussi à tirer un film tout aussi miraculeux. Même s'il a pris quelques libertés avec le roman original. Ponctué de superbes gros plans (et quels formidables acteurs ! ), "L'insoutenable légèreté" est un moment d'émotion d'une grande intensité, inoubliable. Et ses séquences "d'actualités intégrées" sont d'anthologie. L'indispensable "légèreté" du cinéma.
  • RANDONNEE POUR UN TUEUR (1987)
    Pas si vétéran que cela, Pépé Poitier, qui escalade allègrement façades et parois pour hommes-araignées, court, saute, plonge ... Il maîtrise parfaitement la situation (en duo avec un Tom Berenger étonnant, lui si "urbain" dans "Traquée", le revoici en parfait montagnard) et arbore avec superbe un air dégoûté, comme lui seul sait faire. Dans ce thriller bien ficelé et sans le moindre moment de répit, les deux hommes sont embarqués dans une poursuite implacable, intense, qui emporte le spectateur loin des sentiers battus.
  • LA TRAVESTIE (1987)
    Qu’est-ce que c'est triste ! et dire qu'un film aussi lugubre sort en plein été, il y en a qui ont le sens du paradoxe. , . avec en prime, une réalisation lourdingue d'un Yves Boisset vraiment pas au meilleur de sa forme, qui réussit seulement à amocher Zabou, contre toute attente ... un beau ratage.
  • LA MERIDIENNE (1987)
    Voilà un "petit" film qu'il ne faudrait pas laisser passer ... Dans la lignée de Rohmer et de Truffaut, une oeuvre pleine de charme et de grâce, d'une douce légèreté. Le choix des acteurs (tous quasiment inconnus) est judicieux. Une mention spéciale notamment pour Kristin Scott Thomas. Un délice ...
  • MILAGRO (1987)
    On connait l'engagement politique de Robert Redford. Le thème de son film n'a donc rien de surprenant... "Milagro" est une oeuvre humaniste qui insiste sur les rapports de l'homme à sa terre et à ses racines, un hymne à la culture latino-américaine qui imprègne si fort le sud des Etats-Unis ... Ce qu'il y a d'étonnant, en revanche, c'est la forme. Des superbes images viennent ponctuer un récit où l'étrange se mêle au réalisme, où dans la rudesse de la mêlée la caméra garde une tendresse constante ...
  • CHOCOLAT (1987)
    Sous l'apparence d'un film paisible, voire nonchalant, Claire Denis signe une oeuvre délicate et dense, où les personnages s'expriment plus par les regards que par les mots, rapports de connivence et d'ambiguïté et ambiance d'empire finissant. Chronique d'un petit bout de France coloniale dans une Afrique aride, brûlante, majestueuse, "Chocolat" est une oeuvre de tensions (et de tentations) diffuses comme Isaach de Bankole, il faut y rester à l'affût ...
  • EL DORADO (1987)
    Vous croyez connaître Aguirre le fou ? Et bien vous étiez dans l'erreur ? Vous le voyiez mégalomane, cruel, paranoïaque ? Vous avez tout faux. Klaus Kinski et Werner Hertzog étaient des imposteurs. Carlos Saura, lui, le sait : Don Lope de Aguirre était un prince de la liberté, son avènement sanglant lors de cette excursion sylvestre pour « El Dorado » la suite logique d'une implacable lutte pour le pouvoir entre les officiers de la troupe ....
  • DE SABLE ET DE SANG (1987)
    L'histoire d'une fascination. La fascination de deux hommes pour la peur, celle qu'ils ont devant la mort et celle qu'ils ont devant la vie. L'histoire de leur attraction/répulsion pour l'Espagne ou seulement ils pourront exorciser leurs démons. Une histoire qui aurait pu séduire mais qui hélas s'enlise dans la théâtralité, le statisme de la caméra, la grandiloquence du propos. A l'opposé de Kundera (sinon d'Almodovar) c'est ici l'insoutenable pesanteur de l'être.
  • JAUNE REVOLVER (1987)
    Olivier Langlois est passé de bien peu à coté d'une oeuvre de première ..... C'est bien dommage. car on sent bien que son projet est d'ambition, que son idée est de faire un film "marquant" genre "Mauvais sang" tout y concourt, d'abord les personnages, les couleurs, le rythme, les dialogues. Mais le scénario se perd ensuite dans un dédale inexprimable ... Vraiment dommage, car "Jaune revolver" contient beaucoup de très bonnes choses. A remarquer tout particulièrement une jeune actrice qui fera certainement des étincelles : Laura Favali.
  • CRY FREEDOM (1987)
    Le générique de fin illustre parfaitement le paradoxe du "Cri de la liberté" : une oeuvre de fiction, aussi bien intentionnée soit-elle, ne vaut pas la force d'émotion que peuvent donner des images de la réalité, fussent-elles brèves et censurées. Ce cri anti-apartheid est finalement surtout une certaine vision de Blancs qui "découvrent", "prennent" conscience" de l'iniquité fondamentale de leur système. Le film est généreux, mais son regard reste limité ...
  • GOOD MORNING VIETNAM (1987)
    Une très plaisant one man show. Humour à gogo. Incontestablement une réussite dans la comédie de guerre. En quelques sortes un second MASH. Ernst Stavro Blofeld (02/10/88)Loin d'être une nième resucée de l'équipée US au Vietnam, le film de Barry Levinson est à la fois émouvant, fort et furieusement hilarant (et quel rythme) qui ne veut rien escamoter d'un conflit qui aura déchiré une génération. Les acteurs sont totalement dans le coup, notamment Robin Williams et Forest Whitaker qui confirme sa classe étonnante de "Bird" ...
  • TRAQUEE (1987)
    Les attractions ne sont pas toujours fatales, mais les mères de famille sont décidément de vraies lionnes, dans les films américains 88, surtout lorsque leur flic de mari pousse sa mission un peu trop loin avec sa "protégée" ... Mais il n'y a pas de souci a se faire, le "message" social est clair : un flic du p'tit peuple et une lady "haut de gamme", çà n'a pas d'avenir. "Traquée" un film noir à l'eau de rose ...
  • LIAISON FATALE (1987)
    Non, non et non. Ce film est tout simplement scandaleux ! 1. Il est misogyne. Pire : il l'est insidieusement. 2. C'est la grosse leçon de morale. Reagan et le Vatican vont apprécier. 3. Cote suspense, c'est plutôt les grosses ficelles. Kitch ! 4. Quant au dénouement, je vous épargne les détails. Indigeste.
  • SAXO (1987)
    Très "série noire", le nouveau Zeitoun est digne de la grande, la très grande tradition du film noir. Tous les ingrédients y sont, de l'histoire un peu floue à l'anti-héros looser via la femme fatale (la magnifique Akosua Busia, une voix superbe et des yeux, my God ! ) et les fascinants personnages secondaires. Intéressant à noter, également : le film fait pendant à "Autour de minuit", dont ce serait le coté zone ...
  • SOIGNE TA DROITE (1987)
    Les notes de Saint Jean-Luc qui-fait-du-cinéma-pas-des-films, sur la vie et sur la mort, sur le rêve et sur la création, sur le silence et sur l'attente, sur le cinéma (mais si! ) et sur l'acteur. Dans "Godard" il y a "God", et dans le film un Idiot de balade. Est-ce un personnage de La Fontaine ou le héros d'un roman de K. Ramazov, un ancien champion de tennis ou l'imprésario des Rita Mitsouko ? C'est ainsi que Godard est grand. C'est comme caaa, lalalala !
  • ENCORE (1987)
    Le premier film français sur le thème du sida choisit délibérément la carte du non-spectaculaire. Un parti-pris fort louable. Vecchiali, champion toutes catégories du plan-séquence, a peaufiné un exercice de style en forme de pièce de théâtre, aux dialogues solides et littéraires ... mais si l'action est anti-dramatique, retenue, visant plutôt la réflexion que les sens, la mise en place des éléments du drame (et de la problématique) se fait un peu attendre ... Austère, anti-lyrique, quelque peu aride, mais sage, fort et marquant.
  • UN ENFANT DE CALABRE (1987)
    Ce film de Comencini a quelque chose d'anachronique, parmi la programmation actuelle. Entre méga-productions, stars du médiamatraquage et clinquances à la "matez-mes-effets-speciaux", voici une oeuvre tendre et émouvante, naturelle et belle. Comencini est désormais bien catalogué comme "cinéaste de l'enfance". Au-dela de son theme prefere, il a su renouvelerses perssonnages, ses images, ses émotions. Ne ratez pas son petit coureur de Calabre.
  • LA PASSERELLE (1987)
    Décidement, la saison recèle quelques bonnes surprises. Ce thriller aux aspects gothiques, petit-fils de "Fenêtre sur cour", est du lot. Pierre Arditi s'y confirme un des meilleurs comédiens de sa génération et Mathilda May comme un des plus sûrs espoirs de la prochaine. N'hésitez donc pas à emprunter "La passerelle", c'est un passage passionnant.
  • INTERVISTA (1987)
    Fellini ne fait plus que le même film depuis cinq ans, diront certains. Le maestro sait si bien saisir la magie disparue du cinéma d'antan, peut-on également assurer. "Intervista", hommage à Cinecitta (cinquantenaire, cette année) est un moment très émouvant (et très lucide), qui ravira les felliniens inconditionniels et beaucoup d'autres.
  • LES INNOCENTS (1987)
    Ah, ces jeunes ! Il y en a une qui ne sait pas ce qu'elle veut, un qui sait ce qu'il a à faire (et qui le dit et qui le fait ...) et un autre qui sait ce qu'il n'aime pas (les Arabes). Quant au plus jeune, il est carrément muet. Techine nous parle donc des jeunes. Avec une caméra tournoyante et des zooms incessants, à vous laisser flagada, un discours grandiloquent, des dialogues mélodramatiques et des personnages plus interrogatifs qu'interrogateurs. Avec un résultat très discutable.
  • TABATABA (1987)
    On va peut-être reprocher à ce film sa lenteur paresseuse, qui semble prendre des allures précautionneuses. On peut aussi lui reprocher son maniérisme. De fait, le film est très beau. Sa beauté plastique n'est plus maniériste quand on sait l'artisanalité habituelle des films du tiers monde. Sa lenteur, elle, le met un ton au-dessus des habituels pamphlets manichéens de la dialectique anti-colonialiste. Ici, on est conscient d'un désarroi profond et digne, celui d'un peuple jeté dans un jeu de massacre au-delà de sa culture.
  • CHEESEBURGER FILM SANDWICH (1987)
    C'est le risque pour tous les films à sketches, et celui-ci ne faillit pas à la règle : à part quelques (rares) bonnes séquences, l'ensemble est plutôt décevant. Plat et sans saveur comme un quelconque programme de télévision. Sa seule qualité : il se laisse vite oublier.
  • HELSINKI-NAPOLI (1987)
    Suite à la rencontre de deux anti-cyclones, l'un finlandais, l'autre italien, au-dessus de Berlin, un petit air frais et sans prétentions souffle sur le petit monde des séries B. D'un coin à l'autre d'un Berlin nocturne, peuplé de personnages attachants, voici une équipée pléthorique, chaotique, joyeuse (à l'image de Nino Manfredi) et sympatique. Avec en prime moult apparitions revigorantes, notamment Jean Pierre Castaldi en Ruskoff et le vieux Samuel Fuller en "méchant" gangster.
  • UN TOUR DE MANÈGE (1987)
    Il vaut mieux avoir les yeux rivés sur Juliette Binoche et oublier tout le reste, dans ce film. Car le reste, ce n'est pas grand chose, hélas : une histoire banalissime, une mise en scène aux antipodes de la moindre originalité, des dialogues inoffensifs. Oui, il vaut donc mieux garder les yeux rivés sur Juliette Binoche et, lorsque son rôle lui autorise une apparition, sur Denis Lavant, magnifique.
  • LE GRAND DEFI (1987)
    Sous son côté Amérique profonde et ses aspects de film basket-ball, "Le grand défi" est un film sur la confiance en soi restaurée. Cette confiance en soi qui est ce que l'homme a de plus précieux et sans laquelle il n'est pas grand chose. Pour cela, ce film rustique et obstiné fait du bien. Gene Hackman et Barbara Hershey sont les meilleurs représentants et de cet effort de survie et de l'âme de l'Amérique profonde. A leurs côtés, Dennis Hopper, en marginal ivrogne, est formidable.
  • L'OEIL AU BEUR(RE) NOIR (1987)
    Candidats locataires ou amateurs de franche rigolade, soyez avertis : ce film est à double tranchant. Coté face -ou plutôt coté farce, on rigole à tout bout de chemin des déboires de nos compères et des péripéties à la "touche-pas-à-mon-pote". Coté pile, c'est quand même un film où le rose ne l'emporte pas, contrairement aux traditions de la comédie .
  • LE MAITRE DE MUSIQUE (1987)
    La mise en scène est certes molle et sans charisme. Les amoureux de l'art lyrique (et j'en suis) seront cependant ravis par un bouquet étincelant d'arias et de lieder, magnifiquement interprétés, qui sont à la fois l'alibi du film et son salut.
  • ZEGEN (1987)
    Ceux qui s'attendent a un nouvel "Empire des sens" seront decus. Seront en revanche epates les amateurs d'un autre genre de debauche, tout en ideaux. Zegen est donc l'epopee souvent cocasse d'un Don Quichotte nippon dont le grand dessein est de creer une "maison close nationale", au service du Japon et de l'Empereur.
  • NOYADE INTERDITE (1987)
    La verite passe par les femmes, dans ce polar psychologique et pince-sans-rire, filme pa un cineaste qui aime les femmes. Elles sont donc superbes (et mysterieuses), de Anne Roussel a SuzanneFlon, de Gabrielle Lazure a Elizabeth Bourgine, de Marie Trintignant a Andrea Ferreol, et est-ce un hasard si les morts sont des hommes ?
  • LE DERNIER EMPEREUR (1987)
    Il n'y a pas à hésiter : il FAUT re(voir) ce film magnifique. Un grand moment d'émotion, un spectacle d'une beauté d'autant plus éclatante que Bertolucci a su éviter les clichés exotisants. Moments de grâce et de force, le "dernier empereur" est de la race des films inoubliables. Les Oscars raflés en masse sont peut-être la plus petite surprise (ou la plus grande évidence) de l'année.
  • ALOUETTE JE TE PLUMERAI (1987)
    Plus menteur que Chabrol, tu meurs ! Diabolique Chabrol, qui atteint dans le film de Zucca des sommets d'intrigue sourde et de drôlerie noire. Une histoire toute en mensonges à tiroirs, en fausses pistes et en double-fond (que même le scénariste s'y est un peu perdu). En revanche, le réalisateur maîtrise parfaitement sa caméra et ses couleurs. Mais le roi, le "must" du film est Chabrol, mi-rapace, mi-caméléon.
  • HOMEBOY (1987)
    Des histoires d'anti-héros, Mickey Rourke, çà le connait ... à chaque fois, il en fait des tonnes, coté interprétation -dans les excès, il laisse bien loin derrière les plus fidèles de la méthode. A ses cotés, il faut cependant remarquer un Christopher Walken étonnant ... mais là ou le film pèche le plus, c'est par le manque de rythme, le défaut de punch. Heureusement que la réalisation se rattrape par des images absolument superbes, d'une très grande pureté nocturne. Ah ! la nuit...
  • AMSTERDAMNED (1987)
    Baignade interdite ... polar très efficace, mais somme toute plutôt conventionnel ... frissons garantis, action sans temps mort (mais avec morts en cascade) et rebondissements-chocs ... un peu plus d'humour, cependant, ne nous aurait pas fait de mal ... moment d'anthologie : une course-poursuite en hors-bord sur les canaux d'Amsterdam, qui en est encore secouée.
  • OÙ QUE TU SOIS (1986)
    Une atmosphère étrange, où l'inéluctabilité de l'accident et de la mort se mêle aux fausses craintes et aux mensonges flous. Même s'il aborde un sujet pas particulièrement folichon, ce road-movie, mâtiné de chansons de Paolo Conte, ce "petit film" ne mérite pas de passer inaperçu parmi la programmation actuelle.
  • LES BALEINES DU MOIS D'AOUT (1986)
    Un seul mot pour dire ce que j'ai ressenti à ce film formidable : le bonheur ! Tout simplement. Revoir Bette Davis, Lilian Gish et Vincent Price dans de si beaux rôles est un émerveillement continu et qui vous accompagne longtemps encore après la dernière image. Et dire que les aléas de la distribution ont failli nous priver de ce joyau (qui sort à Strasbourg cinq mois après Paris! ) j'en pleurerais de dépit ...
  • COBRA VERDE (1986)
    Voici enfin l'opus 3 de la grande saga du duo Herzog-Kinski (après Aguirre et Fitzcarraldo). Et c'est un enchantement! Klaus Kinski en guerrier illuminé est inénarrable, inégalable sinon proverbial. Il se mélange à cette splendide terre d'Afrique avec un naturel d'enfer. Acteur prodigieux, récit fantastique, images fulgurantes et chorégraphies superbes, le nouveau film de Werner Herzog, cinéaste visionnaire, est de ces oeuvres qui défient le temps.
  • WITHNAIL ET MOI (1986)
    Deux jeunes bourgeois déjantés, annonciateurs de la génération punk, velléitaires et lâches, pataugent dans le fatras en fusion que charrie une civilisation en décomposition. Dans un décor étonnant, expression d'une apocalypse culturelle et mentale, avec un duo à la Laurel et Hardy psychédélique (et une foule d'autres personnages tout aussi "pittoresques") aux dialogues magnifiques d'humour et de causticité, voici illustré le mal de vivre d'un Empire qui ne rêve plus de grandeur. Un must !
  • ANGOISSE (1986)
    Une fois de plus (après Almodovar), l'originalité et le culot viennent d'Espagne. "Angoisse" en est une illustration particulièrement recommandable : une film "d'horreur" peu conventionnel et très ingénieux. Nous ne sommes pas ici devant UN, mais bien devant DEUX films, défilant en parallèle, et dont le second reprend la situation du spectateur même. Un jeu constant, malicieux et diabolique, entre l'écran et la salle. Savoureux !
  • L'AMOUR EST UN CHIEN DE L'ENFER (1986)
    Cela commence comme un récit initiatique pour finir comme l'histoire d'une déchéance. Le film est produit par la Belgique mais, inspiré par l'oeuvre de Charles Bukowski, il est 1OO% américain, versant noir du mythe "American graffiti". Noir comme une eau profonde la nuit, comme une tempête, comme la poésie de Rimbaud, comme la tourmente d'une camé enfin, "L'amour est un chien de l'enfer" est un film désespéré, un long sanglot, sous lequel perce la désillusion de la pureté, la révolte, le refus d'un monde trop ordinaire. A boire absolument (mais avec modération !).
  • COEURS FLAMBÉS (1986)
    Discrètement, pudiquement, avec tendresse et délicatesse, "Coeurs flambés" nous parle de solitude et de besoin d'amour. La gravité est toujours tempérée par l'humour et la cordialité du ton, et par la chaleur de l'actrice principale, l'émouvante Kirsten Lehfeldt. L'atmosphère, mal servie par un sous-titrage laconique, peut paraître trop peu familière. Mais ici comme au Danemark, les coeurs ont le même besoin de flamber et les hommes doivent autant prendre à deux mains le courage d'être vulnérable.
  • MA VIE DE CHIEN (1985)
    Ingemar 10 ans est un petit garçon à l'introspection active et à l'humour féroce. Il a déjà une devise : "il faut comparer", alors pour exorciser ses malheurs, il compare ... Parmi tous les films sur l'enfance (et on a eu la chance d'en voir beaucoup, ces derniers temps), celui-ci se démarque tout particulièrement par son regard sur le monde, la personnalité du petit Ingemar et la tendre folie de ses voisins. A voir d'urgence !
  • MATADOR (1985)
    "Je t'aime plus que ma propre mort" dit la tueuse au tueur ... le film de Pedro Almodovar est tout entier à l'image de cette confession : morbide, cynique, passionnel, obsessionnel. une magnifique corrida et une très curieuse histoire de visions et d'ambiguité ou le brûlant cotoie le glacial ... "Matador" est sans doute un des films les plus originaux du moment, fer de lance du cinéma le plus innovateur du moment ...
  • MORT D'UN COMMIS-VOYAGEUR (1985)
    Pièce d'Arthur Miller, le film de Schloendorff est du "théâtre filmé" pur style, qui paraîtra rébarbatif aux détracteurs du genre. Quant aux autres, ils ne sortiront pas intacts de cette fin de parcours terrible, de cette confrontation bouleversante entre un père et son fils. Dustin Hoffman s'y confirme un géant du cinéma actuel et John Malkovich se révèle, dans un rôle poignant, un des espoirs les plus surs pour le cinéma de demain.
  • STELLA (1982)
    Encore une fois, le cinéma hollywoodien s'emploie à restaurer l'état de la famille américaine, cette fois avec Bette Midler dans le rôle de la Mère Courage. Plutôt convaincante, d'ailleurs. Quant au film, on aurait pu craindre les pires débordements du mélodrame "de bonnes femmes". Il n'en est rien, heureusement, et "Stella", sans vouloir trop lui en demander, s'en tire bien.
  • LE RENDEZ-VOUS DES QUAIS (1955)
    Il est finalement bien gentillet, ce film de Paul Carpita. Même vu à trente-cinq ans de distance. Car la censure de l'époque l'avait jugé suffisamment dangereux pour le mettre hors d'état de "nuire", et pour longtemps. On redécouvre enfin ce film longtemps condamné à l'oubli. Il a la grâce et la chaleur d'un Pagnol ou d'un Renoir de la première époque, et les maladresses aussi. Et s'il a été interdit d'actualité, le film de Carpita est sauvé par le Temps, car il reste un bien sympathique document d'époque.