Critique(s)/Commentaire(s) de D.W. GRAPHITE

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  • DOUBLE JEU (1989)
    Sondra Locke a peut-être réussi là où auparavant avait échoué sa collègue réalisatrice Kathryn Bigelow ("Blue Steel") : faire un polar au féminin. "Un double jeu" à cet égard, détonne parmi la panoplie des films du genre : sentimental (trop), hésitant tant, il dévoile le volontiers ses étatsd'âme, ses incertitudes, ses apories. En ce sens, c'est une curiosité. Malheureusement, le scénario est trop prévisible, il manque d'intérêt dramaturgique et n'est guère rehaussée par le peu de charisme des acteurs, engloutis dans l'eau de rose.
  • DAMES GALANTES (1990)
    Les histoires de Don Juan brillent par leur énergie et leur insolence. Rien de tout cela, ici : c'est mou comme ce n'est pas permis. Tacchella est passé complètement à côté de son sujet, peut-être tétanisé qu'il était par le brio de certaines réalisations récentes ("Les liaisons dangereuses"). A la tiédeur inoffensive du propos émergent heureusement les comédiens, Bohringer (qui fait ce qu'il peut), mais surtout Laura Betti (un régal ! ), Robin Renucci (magistral) et Isabella Rossellini. Dommage pour eux que la réalisation ne suive pas.
  • RETOUR VERS LE FUTUR 3E PARTIE (1989)
    Toujours spectaculaire et entraînant, ce troisième épisode de la grande saga de Zemeckis la clôt cependant en eau de boudin, et c'est bien dommage, car le second épisode (le meilleur des trois, car le plus scénaristiquement délirant) promettait une suite en crescendo. Mais cette fois, les scénaristes se sont perdus dans la surenchère romanesque, noyant l'épopée dans une eau de rose naïve et moralisatrice. Heureusement que leur humour auto-parodique maintient l'entreprise à flot. Les limites du film sont aussi les limites du "système" américain.
  • ERIK LE VIKING (1989)
    Terry Jones et John Cleese faisaient naguère partie de la fameuse équipe des Monty Python. Mais pour "Erik le Viking", ils ont oublié leur punch en cours de route. Lourde machinerie, le film est laborieux et empâté, et manque résolument d'étincelles. Une bien morne traversée, à la férocité ramollie et à la sauvagerie éteinte.
  • CRIMES ET DÉLITS (1989)
    Le cru 89/9O de Woody Allen est étonnant à double titre : d'abord parce que pour la première fois, le cinéaste y montre des aspects noirs insoupçonnés (pour la première fois chez lui il y est question d'un meurtre; noirceur aussi dans la mésaventure qui arrive à la soeur du cinéaste Clifford), ensuite parce que c'est la première fois que Woody Allen y mélange le grave et le comique (ses deux penchants), et l'alliage, très risqué, est ici une totale réussite mais où la gravité prend le dessus. Car toujours la gravité l'emportera.
  • EUROPA EUROPA (1989)
    Les films précédents d'Agnieska Holland (notamment "Récolte amère") avaient démontré qu'elle savait allier sujets forts et mise en scène efficace, ce nouveau film vient le confirmer. Là Où le bât blesse, c'est lorsque la réalisatrice veut trop en faire, coté efficacité de la mise en scène. La force simple et pure de son sujet (le déchirement d'identité d'un jeune juif, obligé de faire le choix obscène, insupportable, de se faire nazi pour survivre) est noyé par un traitement épique à la Hollywood. Ah, quand on en fait trop.
  • MONSIEUR HIRE (1989)
    Un Michel Blanc fantômatique (le masque même de l'impassibilité (douloureuse) et une Sandrine Bonnaire radoucie (mais qu'est-ce qu'elle cache bien son jeu. ) traversent ce film plastiquement très beau, d'une grande limpidité. Dans cette épure mélancolique, tout repose sur les regards. A ce jeu, le film de Leconte est une grande réussite, qui culmine avec la séquence finale, lorsque Michel Blanc et Sandrine Bonnaire se croisent une dernière fois (et dans quelles conditions !).
  • BREVE HISTOIRE D'AMOUR (1988)
    "Comment vivre ? " question nodale du projet de Krzysztof Kieslowski, les "Dix Commandements" en autant de films. Et Kieslowski ne propose pas de réponse, mais apporte un constat, net, tranchant, fulgurant : dans l'impasse de vie, l'amour reste le dernier rayon de lumière. Sans eau de rose, ni lyrisme de pacotille. Et ce constat-là restera sans doute l'un des plus marquants de l'année.
  • MAMAN (1989)
    Un éloge des hors-la-loi, ces "ratés" de la société, sympathique et plein de tendresse. Ce petit film sans prétention et sans autre objet que son amour pour ses personnages échappe à tous les clichés obligés. C'est un peu, lui aussi, un hors-la-loi du cinéma. L'attaque de la banque CNC (! ) est, à cet égard, un morceau savoureux. "Maman", bien sûr, doit beaucoup à Anémone, généreuse et exubérante. Et Anémone est certainement la comédienne française la plus adéquate pour ce personnage : libre et culottée.
  • PEAUX DE VACHES (1989)
    Flamboyant, tel un western, rigoureux, superbement interprété par un trio formidable (Sandrine Bonnaire, Jean-François Stevenin, Jacques Spiesser), voici un premier film parfaitement maîtrisé et particulièrement convaincant. Montage syncopé, alternant entre rythme hallucinant (notamment l'incendie d'ouverture) et lenteur mélancolique, cadrage, prises de vues, direction d'acteurs tout dénote d'un grand talent de cinéaste. On attend impatiemment le prochain film de Patricia Mazuy.
  • OUBLIER PALERME (1989)
    Le candidat-maire est un peu mou et l'argument du film (la jalousie) introduit de façon un peu téléscopé, mais le thème tient la route, même s'il est abordé de façon plutôt légère. Car c'est bien là le problème du film de Francesco Rosi : il est trop "américain", trop peu "sicilien". Comme son personnage, il a un problème de racines et d'âme, et comme son personnage il reste à la surface des choses. Et le regard de Vittorio Gassman, en vieux prince enfermé, pèse comme un reproche.
  • SAUF VOTRE RESPECT (1989)
    Un polar de pacotille, qui ne dépasse jamais le niveau d'un sous-produit télé. Plat pour l'intrigue, tiedasse pour l'atmosphère, mous pour les acteurs, désinvolte pour la mise en scène -c'est du cinéma jetable, qu'il vaut mieux jeter, avant même de le consommer.
  • NÉ UN 4 JUILLET (1989)
    Après moult détournements et autres "lèse-Vietnam" (cf. "Outrages"), voilà enfin le film qui touche l'Amérique en son point douloureux. Dans "Platoon", Stone était encore un brin légitimiste, dans "Né un 4 juillet" il s'est enfin débarrassé de toute retenue pour balancer au public américain (et dans un style grandiose) sa vérité en face, Tom "Top Gun" Cruise dévirilisé, une génération sacrifiée, et une société hypocrite qui ferme les yeux. "Né un 4 juillet" est l'un des films les plus indispensables sur le Vietnam.
  • GÉNIAL MES PARENTS DIVORCENT (1990)
    Ce titre calamiteux devrait d'emblée sonner le glas de la carrière d'un film qui mériterait pourtant de rencontrer son public : les moins de quinze ans. Comédie charmante, qui pétille de rires enfantins, le film de Patrick Braoudé semble une nouvelle version modernisée de "La guerre des boutons". Finalement, le propos du film est bien moins dangereux, bien moins anti-famille que ne l'indique son titre. Bien mieux que "Maman, j'ai raté l'avion" ou "Chérie, j'ai rétréci les gosses", ce film devrait plaire à nos plus petits. Parents, osez donc le pas !
  • NIKITA (1990)
    Luc Besson se positionne résolument comme un cinéaste "mode". Plus proche de "Subway" et même du "Dernier combat" (par le sujet et le rythme), "Nikita" a cependant en commun avec "Le grand bleu" (mais surtout, à nouveau, avec "Subway") le design, que Besson porte ici vers de nouvelles limites, avec un sens aigu du tape-à-l'oeil. Speedé, violent (ah, les grands bleus !), plus BD que clip vidéo quant à l'esthétique, "Nikita" a une façon originale de présenter son personnage vedette (auquel Anne Parillaud confère charme et allure) Ca vaut le déplacement.
  • ALEXANDRIE ENCORE ET TOUJOURS (1990)
    Chef d'oeuvre de narcissisme, le nouveau film de Youssef Chahine annonce que son auteur, le plus grand cinéaste arabe, garde la meilleure forme. Insolent comme jamais, à la fois parodique et sérieux, "Alexandrie encore et toujours" est remarquable de fraîcheur, de cabotinage jubilatoire, mais surtout de lucidité. Car dans le fond, Chahine aborde un problème majeur : avant de critiquer la dictature, chercher en soi-même le tyran masqué. Chahine aborde la question avec courage et avec culot. Sera-t-il compris ? Sera-t-il entendu ?
  • CHIMERE (1988)
    On ne peut qu'être navré (sinon irrité) devant une telle platitude. Ce film est à l'image de ses personnages, sans épaisseur, à l'image de ses dialogues, inepte. Le scénario pédale dans le mou, en une succession de scènes bouche-trou, du moins n'en voit-on pas une autre justification. Chimère : vaine imagination (Petit Robert). Le film de Claire Devers correspond exactement à la définition.
  • SUIVEZ CET AVION (1989)
    Le cinéma reprend des couleurs et du pétillant avec cette pimpante comédie clin d'oeil, nourrie aux vitamines Capra, MacCarey et autres Wilder. En émule de Capra, Patrice Ambard a fait un premier film qui brille de mille feux, remarquablement balancés. En Cary Grant, Lambert Wilson s'amuse comme un fou et en étonnera plus d'un. Et en Claudette Colbert, Isabelle Gélinas, épatante, est LA révélation du film. Assurément, un avion à suivre résolument.
  • WITHNAIL ET MOI (1986)
    Deux jeunes bourgeois déjantés, annonciateurs de la génération punk, velléitaires et lâches, pataugent dans le fatras en fusion que charrie une civilisation en décomposition. Dans un décor étonnant, expression d'une apocalypse culturelle et mentale, avec un duo à la Laurel et Hardy psychédélique (et une foule d'autres personnages tout aussi "pittoresques") aux dialogues magnifiques d'humour et de causticité, voici illustré le mal de vivre d'un Empire qui ne rêve plus de grandeur. Un must !
  • LA BARBARE (1988)
    Et voilà qu'on nous ressert, une fois de plus, de l'homme mou, flasque et lâche, de l'épouse humiliée et digne, et de la jeune Carmen en furie. Sur fond de désert (ou, accessoirement, de couloirs de clinique), on nous accommode tout cela à la sauce Sigmund, tendance "recherche du père", et à nous les réjouissances ! Une accumulation de poncifs qui, les dialogues aidant, forme une litanie mièvre, grotesque même. Assurément, Mireille Darc ferait bien de rester de l'autre côté de la caméra.
  • MUSIC BOX (1989)
    Jessica Lange et Armin Mueller Stahl, interprètes formidables, confèrent au film une grande intensité dramatique, montée par un scénario très solide et canalisée par une mise en scène fluide. Au-delà de "l'anecdote" du film (contrairement à certains, suivez mon regard, nous ne confondons pas les "détails"), le thème du film aborde nos "secrets" ordinaires : que savons-nous du passé de nos parents, du nôtre, en somme ?
  • BIENVENUE A BORD ! (1990)
    Le principe du film est un dialogue ininterrompu (malgré des velléités) entre un "pauvre type" et un "emmerdeur" variante du fameux tandem ... Ce principe eut été heureux si le dialogue avait été plus inspiré. Hélas, il ne l'est pas et on est à souhaiter la désaffection rapide de l'un des deux interlocuteurs, le défaut de combattants (verbaux) mettant alors fin au combat ... Cela ne se réalise qu'au bout d'une heure trente. Une heure trente de bavardage incessant avec bien moins de hauts que de bas .
  • MYSTIC PIZZA (1988)
    "Je ne passerai pas ma vie à servir des pizzas" lance le personnage interprété par Julia Roberts. Paroles prémonitoires, puisque depuis, la belle a fait bien mieux : le trottoir, comme on sait, et le box-office. C'est justement à ce trottoir rutilant que l'on doit la sortie tardive de ce film antérieur, qui n'aurait rien perdu à rester dans les oubliettes. Les pizzas sont portugaises (rigoureusement sic ! ), et la mélo-comédie une niaiserie pour teenagers de la sombre province yankee. Plouc.
  • CRY-BABY (1990)
    Persiflant allègrement l'Amérique kitsch et bon chic bon genre, John Waters continue invariablement son oeuvre américanophage. Moins trépidant que "Hairspray", (mais toujours avec ces personnages hauts en couleurs qui méritent à eux seuls le déplacement), "Cry Baby" est un "Roméo et Juliette" revu et corrigé, pas sérieux pour un sou. De quoi verser une chaude larme.
  • LA GUERRE DES ROSE (1989)
    Danny DeVito détourne le couple doré du cinéma américain beat de triomphalisme (Michael Douglas, Kathleen Turner) pour, via un affrontement baroque, nous donner une caricature aussi féroce que pertinente de la société "yuppie", dont les valeurs et les gouts ont ici des allures d'anamorphoses grimaçantes. Fort logiquement (et heureusement), le vitriol n'empêche pas la rédemption. Pour cela, il faut un choc violent. Facile pour les personnages d'un film, mais que faudrait-il pour une rédemption sociale ?
  • TROIS ANNÉES (1989)
    Du pur Tchekhov, qui ravira les inconditionnels du grand maître des sentiments humains. On pourrait tout juste reprocher à Fabrice Cazeneuve de filmer son adaptation de manière trop sage, trop tranquille, et dans un style de film télé haut-de-gamme, façon "mieux-disant culturel". Mais la fidélité de l'adaptation ainsi que le jeu remarquable de Sabine Azéma et de Jacques Villeret transcendent la lenteur du mouvement et emportent notre adhésion fervente.
  • GREAT BALLS OF FIRE (1989)
    Jerry Lee Lewis n'en faisait qu'à sa tête, et ainsi Dennis Quaid, qui cabotine comme ce n'est plus permis, mais tout cela passe très bien, le film a la pèche et nous aussi. Festival de rythmes, de mouvements et de couleurs, le film dévale le long de la carrière abrupte (because vie privée) du rocker speedé, avec au passage un pied-de nez au bien sage Elvis. Sur un ton léger, mais où perce la gravité, "Great balls of fire" tire la langue à la morale qui l'a bien mérité.
  • CAMILLE CLAUDEL (1988)
    Un film solide mais sans grandes surprises, bien fait (notamment un superbe travail de lumière) mais d'une facture très classique. Isabelle met toute sa conviction dans son rôle, qu'elle façonne comme Camille sa glaise. Face à elle, Gérard Depardieu (tiens, c'est encore lui ! ) ne passe pas inaperçu, gabarit oblige. Somme toute, un bon moment que l'on revivra bien, à l'occasion TV, en soirée unique ou en feuilleton.
  • GREMLINS 2 (1990)
    Le numéro 2 est un cran plus musclé que le numéro 1, normal : comment sinon justifier l'entreprise ? Cette logique du sequel vaut d'ailleurs autant pour les Gremlins que pour Robocop ou pour "48 heures". Le cas des Gremlins est juste légèrement différent. Y sont en effet en jeu à la fois l'humour et l'horreur. Eh bien, Joe Dante écrase ici deux mouches d'un seul coup. Férocité des situations, multiplication des références parodiques, certes souvent faciles mais toujours joyeuses. Et surtout toujours illustration parfaite du bon mauvais goût d'outre-Atlantique.
  • SEXE MENSONGES ET VIDÉO (1988)
    On l'attendait au tournant, ce film de jeune prodige, palme d'or à Cannes, à 26 ans et à son premier film. Le risque, au bout de cette attente, est de mettre la barre un peu haut. Car Soderbergh n'est pas Welles. Sexe, mensonges et video, incursion dans les hantises du yuppie moyen dans l'Amérique profonde, n'en est pas moins un film fort, filmé avec énergie et virtuosité par un cinéaste dont on attend désormais encore plus impatiemment la suite.
  • ITINERAIRE D'UN ENFANT GÂTÉ (1988)
    Le visage de Belmondo est à lui seul une épopée. Une épopée sentitimentale et un itinéraire magnifique. Et un immense acteur, à la fois humble et majestueux. Lelouch a peaufiné son style et son rythme, avec la complicité d'une brochette de superbes acteurs (Belmondo bien sûr, mais aussi Anconina-la-grâce, Marie-Sophie Lelouch-l'émotion, Lio et Daniel Gelin) servis par des gros-plans opportuns. Un Lelouch triomphal, un film heureux.
  • L'AMOUR EST UNE GRANDE AVENTURE (1988)
    "Blague" Edwards pose ici un regard narquois sur la condition de l'homme américain. Les tribulations amoureuses d'un "ex-mari" sont ici prétexte à un marivaudage, ma foi, pas désagréable, mais qui ne casse pas la baraque à moins d'apprécier un certain humour américain (écrivain à succès, barman, confident, "parties", beuveries, psychanalyste-REconfident, etc. ). Les séquences des préservatifs fluorescents sont particulièrement loufoques. Ce sont celles qui resteront de ce film finalement bien gentillet.
  • S'EN FOUT LA MORT (1990)
    Après "Chocolat", Claire Denis se confirme ici comme un des auteurs les plus sensibles du cinéma actuel. "S'en fout la mort" est un film superbe. Noir et sordide, certes, triste et désabusé, mais superbe répétons-le, véritable petit chef-d'oeuvre nocturne. Dans un style documentaire, caméra à l'épaule et montage elliptique à l'appui, Claire Denis nous parle moins des combats de coqs (déjà en soi une curiosité) que de l'amitié et de l'exil. Fastueux de sobriété, remarquablement éclairé et interprété, ce film va droit au coeur.
  • BAL POUSSIERE (1988)
    Chronique candide d'un village d'Afrique, chronique aussi d'un petit harem (aux odalisques plantureuses et toujours prêtes à se chamailler comme à se rabibocher), "Bal poussière" est une comédie bon enfant et nonchalante, très africaine. Le film n'échappe pas à un certain folklorisme, mais sans s'y apesantir. Jouant avec les réalités sociales (polygamie, oppositions tradition-modernité et ville campagne, etc. ) et se jouant d'eux, une comédie qui a beaucoup de charme.
  • ILS VONT TOUS BIEN (1990)
    Décidément, les Italiens (Scola, encore récemment) sont bien mélancoliques. Et leur vision de l'Italie d'aujourd'hui et des relations entre les pères et leur progéniture est bien grise et amère (voire acide, pour ce qui est de la société). Le nouveau film de Giuseppe Tornatore (bien plus intéressant que "Cinéma Paradiso") est, en cela, exemplaire. Il pèche quelque peu par sentimentalisme et par maniérisme, mais gagne beaucoup par l'interprétation remarquable du grandissime Marcello Mastroianni. Quant à la morale du film, on vous laissera juges.
  • UNE AUTRE FEMME (1988)
    Comment dire l'immense bonheur de voir, de ressentir ce nouveau moment de Woody Allen "Hannah et ses soeurs", "September", à chaque oeuvre de cette lignée bergmano- tchekhovienne encore plus de grâce, de lumière, de sensibilité, de délicatesse, de sérénité dans les tourments. Gena Rowlands, sortie tout droit des films de Cassavetes, est belle, digne, bouleversante. Son regard, l'aura de Mia Farrow, la présence émouvante de John Houseman. Comment dire l'immense bonheur de retrouver Woody Allen ?
  • Y A-T-IL UN FLIC POUR SAUVER LA REINE ? (1988)
    Joyeusement, furieusement, ignominieusement insolent. La bande de "Y a-t-il un pilote dans l'avion ? " a réussi un coup fumeux dans le genre (bien connu dans nos chaumières) des Nuls. Les gags ne sont pas toujours des plus heureux, mais l'ensemble est leste et bien enlevé.
  • LE JOUR DES ROIS (1990)
    Paulette Dubost, Micheline Presle, Danielle Darrieux et Robert Lamoureux autour de la galette des rois, une rencontre délicieuse, avec des comédiens (auxquels il faut ajouter l'ineffable Michel Galabru) qui résonnent encore du grand cinéma français d'antan. Marie-Claude Treilhou, autour d'une situation "minimaliste", a concocté une petite comédie savoureuse, à la tendresse et le sarcasme s'entrechoquent avec le plus bel entrain. Un régal !
  • TANGO ET CASH (1989)
    Embourbé dans une carrière américaine sans issue (d'ici à la fin de son contrat, qui l'oblige à "livrer" un certain nombre de films), Konchalovski s'est perdu dans une histoire "plus débile que ça, tu meurs". Le scénario est tellement affligeant qu'il n'y avait vraiment rien à y sauver. Les amateurs de films musclés pourront se consoler avec un scénario qui pour être creux n'en fait que plus de bruit. Et puis, dans ce polar soldé, ils ont Stallone et Russell ensemble. Plus les lunettes de Stallone, cela fait trois.
  • LA TRIBU (1990)
    Un thriller mauvais, bête et inutile, bref : "A la Boisset". On pourrait d'ailleurs consacrer cette expression, tellement le réalisateur s'efforce depuis quelque temps de rater lamentablement ses (de plus en plus) besogneuses productions. Yves Boisset est l'exemple type, et navrant, du cinéaste qui a perdu toute crédibilité. "La tribu" vient en apporter une nouvelle illustration dont on se serait bien passée. Faut-il diagnostiquer un coma profond ou espérer encore une improbable rémission ?
  • RAIN MAN (1988)
    Un road-movie initiatique à la (bonne) manière d'Hollywood, que Hoffman traverse superbement, avec une composition inoubliable d'acuité et de candeur. En face de lui, Tom Cruise, honnête tâcheron de la génération yuppie et Valeria Golino, mignonne transalpine en virée US, sont comme tétanisés par le formidable Dustin. Du bon cinéma, bien ficelé qui sent l'Oscar (multiple) à bout de nez.
  • LE PARRAIN 3 (1990)
    Digne conclusion à la saga du Parrain (malgré quelques facilités scénaristiques patentes), ce troisième épisode de la série se laisse voir comme un sompteux opéra vis- contien où la mélancolie de Francis Ford Coppola fait des ravages. Les acteurs, comme toujours chez Coppola, sont magnifiques, même si Al Pacino a quelque peu tendance à théâtraliser son jeu. Mais Sofia Coppola (superbe révélation) et Andy Garcia (exceptionnellement sobre) le rattrapent avec maestria comme pour assurer la relève.
  • EDWARD AUX MAINS D'ARGENT (1991)
    Par le réalisateur de Batman et de Beatlejuice, voici certainement le film le plus mignon de l'année, une féerie baroco-moderne. A conseiller (vivement) aux plus jeunes comme aux autres. A la fois portrait malicieux d'une Amérique profonde, conformiste et médiocre (voilà pour les amateurs de cinéma sérieux), Edward est surtout un merveilleux hymne à la différence et à la tolérance, dont Edward-le-personnage (ravissant Johnny Depp) devient la figure emblématique. A voir de toute urgence.
  • L'ANNONCE FAITE A MARIE (1991)
    Filmée à l'ascèse (on pense volontiers au cinéma de Straub et Huillet), "L'annonce" de Cuny est au plus près du texte immense de Paul Claudel. Alain Cuny se conçoit comme le serviteur du texte qu'il filme, rien de plus. Tout est là pour souligner l'humilité du metteur en scène. A l'école de Bresson, assurément. A l'école de la vérité.
  • SUSIE ET LES BAKER BOYS (1989)
    Ce premier film de Steve Kloves est un des meilleurs scénarii de l'année, qui s'appuie sur un solide sens de l'observation ainsi que sur des dialogues particulièrement bien "torchés" soit deux caractéristiques aujourd'hui rares. Sur un tel canevas, Michelle Pfeiffer comme les frères Bridges composent des personnages superbes. Une mention spéciale pour la somptueuse Michele Pfeiffer, ici plus belle encore, et quelle voix ! Vive Pfeiffer et les Bridges Boys, et on attend impatiemment la confirmation d'un cinéaste prometteur.
  • POUR SACHA (1991)
    Alexandre Arcady était assurément plus à l'aise en milieu pied noir. Mais il n'a pu s'empêcher de faire le voyage en Israël, et il y marche visiblement sur des oeufs (minés), tant il s'efforce à la fois de prendre parti (kibboutz story) et de ménager quand même, maladroitement (mauvaise conscience ? ), les voisins gênants (Palestine aspirine). Le couple romantique Richard Berry - Sophie Marceau est alors un instrument efficace pour faire la différence comme pour donner le change. Mais tout cela ne fait pas très sérieux.
  • LA SALLE DE BAIN (1988)
    Le roman de J. PH Toussaint était effectivement du sur-mesure pour Tom Novembre. Il y est donc, fort logiquement, parfait, on ne peut mieux faire, dans le genre ahuri, absent. L'adaptation à l'écran du livre est très réussie, pour la lettre comme pour l'esprit. Avec en prime le charme ironique de Gunilla Karlzen (ole!!), dont le jeu va comme un gant à l'interprétation globuleuse de l'autre hurluberlu. Dans la forme comme dans le propos, un exercice de style réussi.
  • BUNKER PALACE HOTEL (1989)
    L'univers glauque et inquiétant des B. D. de Bilal transposé sur grand écran. C'est encore mieux que les dessins (les voix et le son en plus), une grande réussite. Le décor, la lumière, la texture de la pellicule, les personnages, la musique, les bruits tout est d'une maîtrise parfaite au service de l'univers graphique et fantasmagorique bien particulier d'Enki Bilal. Assurément, le film le plus "différent" de l'année, avec des acteurs superbement "bilalisés".
  • L'ANNÉE DE L'ÉVEIL (1990)
    Bourré de bonnes intentions (dont la moindre n'est certainement pas celle de ne PAS vouloir forcément à faire une adaptation figée du récit de Charles Juliet), L'année de l'éveil s'avère être une jolie petite réussite, malgré une mise en scène académique (ce n'est pas forcément un défaut) et quelques maladresses (les dernières scènes ! ). La générosité de l'oeuvre, son histoire initiatique et romanesque et l'interprétation de ses acteurs (et autant de jeunes talents révélés) ont de quoi emporter adhésion et enthousiasme, voire ferveur.
  • ARACHNOPHOBIE (1990)
    On ne considère pas communément l'araignée comme un insecte particulièrement sympathique ce serait même plutôt le contraire. A la façon d'un Jack Arnold ou d'un Roger Corman des années cinquante, le film capitalise sur notre terreur des araignées pour nous terrifier davantage encore. Sans cascades d'hémoglobine ni effets grandiloquents, mais avec des arguments plus "hitchcockiens", "Arachnophobie" est un film d'horreur remarquablement maîtrisés qui prouve qu'on peut bien se passer du gore sans que notre chair de poule n'en pâtisse. Brr !