Martin Scorsese en cette année 1977 est devenu très important. Après des courts-métrages et des premiers longs où s'affirmaient un style personnel, surtout avec "Mean Streets", il est consacré avec ce pur chef-d'oeuvre qu'est "Taxi Driver"... On peut voir dans ces films-ci, ainsi que les précédents, un style naissant, contenant très subtilement une incroyable cinéphilie, noyée dans une vision autonome d'un cinéma convulsif, instinctif, formel, dépressif...Après sa Palme d'Or très justement donnée, Scorsese assoit un peu plus son statut et peut légitimement avoir plus de liberté, il continue sur sa lancée pour mettre en scène ce qui est à la base une commande, comme "Taxi Driver" d'ailleurs... En regardant le pitch de "New York, New York", on pourrait légitimement craindre ou douter qu'un cinéaste aussi "urbain" que Scorsese réussisse un mélodrame un tantinet musical, sur fond de reconstitution et du travail le plus "artificiel" en studio...Et pourtant, avec l'ensemble de sa filmographie présentée aujourd'hui, "New York, New York" apparaît comme un autre visage du cinéaste, mais dont il serait faux de vouloir différencier de ses oeuvres précédentes (et suivantes d'ailleurs)... Car si le cinéaste, à cette époque, pouvait surprendre dans ce genre (le mélodrame "musical"), c'est qu'on a vite oublié qu'il avait signé un autre mélo, influencé par Douglas Sirk, Stahl (entre autres), le très intéressant "Alice doesn't live here anymore" et que ce film est un moyen pour rendre hommage à ses maîtres tout en se posant dans le cinéma contemporain des années 70...Si le cinéaste arrive à filmer remarquablement les numéros musicaux, il parvient également à signer une histoire d'amour à la fois euphorisante et cruelle, où les séquences de dispute participent activement à sa direction d'acteurs particulière. Ainsi on a droit à un mélange singulier de personnages habillés dans des costumes hollywoodiens somptueux, dans des décors de studio, mais avec un jeu moderne, frontale, instinctif (surtout De Niro). Le qualificatif que j'entends le plus avec ce film est "malade"... Pour ma part, ce terme vient de ce mélange pas si courant... Mais la grâce de la mise en scène, la puissance des sentiments, le tandem fabuleux (Liza Minnelli n'a absolument pas à rougir face à son bouillant et inspiré partenaire) me fait considérer ce film comme une oeuvre majeure du cinéaste, digne des oeuvres dont ils s'inspirent et profondément nostalgique...