Longtemps, je me souviendrai de cette cafetière bouillante balancée en deux temps à la face, et d'un seul côté... Il s'insinue comme une ironie terrible mélangée au coeur de ce polar, des moments d'attendrissement et une violence par à-coups, brève et d'une efficacité à la limite de déclencher un rire nerveux. Sans trop saisir la portée du coup de feu initial, on doute de cette bonne femme pincée et on raffole tout de suite du chargé de l'enquête. Ce Sergent Bannion qui, en rentrant du boulot dans son coin douillet, lave plats et casseroles en toute complicité avec sa jolie et jeune épouse, ils causent ensemble de son business en tirant les plats du four, et elle boit dans son verre... Une nouvelle fois, Fritz Lang vénère les époux comblés, pères très présents physiquement à leur enfant, l'air de nous dire "on n'a pas fait mieux"... Années cinquante d'Hollywood, une incroyable légèreté de moeurs semblerait côtoyer les joies du foyer (incroyables avances de la jeune fille délurée qui offre un verre au héros du bar, le poursuit dans la rue et finit par l'accompagner dans sa chambre d'hôtel)... L'invincibilité du policier très droit est présente, un peu ambiance "Les Incorruptibles", mais avec beaucoup plus de nuances, je pense à ce laïus sur l'épouse après les derniers affrontements... V.O. obligatoire, les dialogues sont sublimes de bout en bout, la diction aussi, rien n'est laissé au hasard, en plus du son nickel. Bref, très bien boutiqué tout ça, je dirais même "jouissif" !