Trois jours, c’est le temps que "Los olvidados" est resté à l’affiche à sa sortie. Son propos sombre et sans concession en est évidemment la cause principale. Il faut attendre l’année suivante, et le prix de la mise en scène attribué à Buñuel au Festival de Cannes, pour que les autorités consentent à le ressortir. "Los olvidados" est à ranger dans la veine du néo-réalisme italien. Filmé avec une précision quasi-documentaire, ce métrage s’impose comme l’une des manifestations les plus désenchantées jamais filmées des bas-fonds. Ici, la ville de Mexico s’apparente à une jungle dont chaque coin de rue est un danger potentiel, une épreuve que les gosses devront affronter. Notons aussi deux ou trois scènes à caractère surréaliste (Julian mort sous le lit de Pedro, la fin d’el Jaibo). Pessimiste jusqu’au bout, Buñuel, bien qu’il annonce en début de film que seules les forces du progrès pourront mettre fin à cette misère, semble nous dire que la mort est peut-être l’unique moyen qu’ont ces gamins de fuir leur destin. La fin du film est à cet égard d’une exceptionnelle intensité.