"Quai des brumes", œuvre pathétique de fin de parcours, regroupe dans un microcosme grisaillant toute la tautologie du défaitisme. Du verbe résigné à la pause statique, une faune locale, comprimée par une mer infranchissable, s'entretient par le rhum, le mal de vivre, la lâcheté, la convoitise et l'envie d'un ailleurs, sous la voute d'un soleil absent, perpétuellement recouvert d'une mer de nuages.Les connexions sont méprisantes, acerbes, violentes, désabusées. Les conversations sont courtes, les poings s'activent après quelques phrases. Ces esprits rongés par la démotivation et la haine se provoquent sur une terre lugubre émiettée par une noirceur tenace.Cette ouvre pénible, pessimiste, est d'un esthétisme douloureux, extrêmement travaillé dans son amertume envers la scoumoune, privant quelques marginaux des saveurs d'un monde équilibré.Son message s'avère néanmoins dangereux, sur l'impact négatif qu'elle transporte à travers les âges.Le contenu volontairement désagrégé, d'un environnement en miettes, se répand en lamentations et révoltes incessantes, faisant de ses composants une meute effondrée et revancharde en alternance.Toute cette gâche humaine nauséabonde, regroupée en bord de mer, marquée par le destin, envahit la toile de ses tourments, dans des situations presque fantomatiques, faisant de l'homme une machine à ruer ou à geindre.A voir plus comme un exercice de style, en ignorant impérativement son aspect n'incitant qu'à en finir.Le cinéma de Marcel Carné n'incite pas des personnages auto-suicidaires à sortir de leurs gonds devant l'adversité, mais plutôt d'entretenir par une prose adéquate leurs lentes descentes vers le néant.