Vincent Cassel n’est-il pas, sans le savoir, dans "Sheitan", une réincarnation tatouée et ébouriffée, beaucoup plus agressive, du père Jules, incarné par Michel Simon, dans "l’Atalante" de Jean Vigo. Ce grand guignol, au fil du rasoir ou à la manière des chimpanzés, tout peut déraper en une fraction de seconde, n’est pas déplaisant si l’on accepte le concept évolutif auquel le cinéma doit faire face.Les images sont délirantes, stéréotypées, parfois drôles. Ce quart-monde sans directives transpire dans un contexte primitif.Il est impératif de garder sa lucidité devant toutes ces extravagances, amusons-nous de ce troupeau au cérébral désarticulé, évoluant dans un sous-monde élémentaire, à la frontière du ridicule.L’homme descend bien du singe, il le prouve ici par une foire du geste vociférant entre mâles, afin de s’approprier les femelles en chaleur.Cette jeunesse entartrée n’obéit qu’à une seule règle, la défonce sanglante, un petit clin d’œil malsain à "Scream" qui déjà donnait naissance à de nouvelles règles de vie à des adolescents refusant une ligne de conduite exemplaire, ne rapportant pratiquement plus de lauriers."Sheitan" est l’état des lieux d’un esprit collectif misérabiliste, en pleine déconfiture. Depuis "La haine" premier signal d’alarme, la régression s’est encore accentuée. C'est la décomposition de l'intellect par le bas.La bête dévore l’homme est en fait un concept de survie instinctive, privé de raison, la parole s’estompe et devient de plus en plus inaudible.Le visage de Joseph n’est plus qu’un loup aux crocs menaçants.