J'aime beaucoup ce film. Beaucoup. Je ne suis pas objective, et justement. Cette histoire est à certains égards autobiographique. Ma conclusion première était la suivante : on ne transige pas avec la médiocrité. Il n'est pas stupide, mais inutile de vouloir aimer et pardonner à certains représentants d'un certain milieu social bouffés par la "vermine et les cloportes". Le personnage de Marie-Christine Barrault (admirable) veut les aider malgré eux comme s'il n'étaient en fait qu'accidentellement dans l'erreur et qu'il suffirait qu'ils se "réveillent" pour se réconcilier avec la réalité... Et puis un jour, on ouvre soi-même les yeux. On comprend que vouloir aimer des personnes aigries et noires de rancoeur contre le monde, est stérile, une simple et définitive perte de temps. Comme le superbe arbre fruitier qu'Adriaan décide d'abattre ; cet homme encore jeune a jugé qu'il n'avait plus de futur. Il préfère son monde de rancoeur et de haine plutôt que celui de l'amour et la disponibilité à la vie que lui propose patiemment sa jeune épouse. En fait, je n'avais pas appréhendé le fait qu'elle ne rejoignait pas le beau résistant, François, intellectuel devenu un politicien désillusionné, quand elle claque la porte du foyer, à la fin du film. Et dès lors le titre prend tout son sens et le film, par cette deuxième lecture devient d'autant plus intéressant. "Femme entre chien et loup", genre humain refusant manichéisme simplificateur et faux. Comme si la vie pouvait se résumer en un modèle et son opposé. Comme si on n'avait que le choix entre la vérité et l'erreur, la clarté ou la nuit. Non. Marie-Christine Barrault tente d'aimer les deux côtés, choisit simplement la vie : bon sens, action, tendresse, tolérance. Il n'y a point de modèle. Elle prend douze ans à comprendre, à atteindre la maturité, à prendre une décision des plus courageuses au coeur des années cinquante. Un film admirable.