Est-ce l'effet Dogme ? Est-ce pour faire jeune et branché ? Toujours est-il que la première chose qui frappe dans Fucking Åmål, c'est la laideur de la photographie, rappelant celle des films en 16mm gonflés que l'on voyait il y a une trentaine d'années. On pourra également dire que Lukas Moodysson a voulu ainsi rendre la morosité et l'ennui d'une petite ville de province suédoise. C'est un choix qui me paraît fort contestable. Pour le reste, le réalisateur y a été avec ses gros sabots. La différence entre les deux familles tient tout à la fois du ridicule et du systématisme. Fallait-il vraiment que l'appartement où Elin et Jessica vivent avec leur mère soit aussi sordide, sale, mal rangé ? Fallait-il vraiment, en opposition, que celui d'Agnès respire autant un confort bourgeois aseptisé ? Fallait-il que la mère de Jessica et d'Elin ait aussi peu d'autorité sur ses filles ? Fallait-il que les parents d'Agnès soient aussi maladroits dans leurs relations avec leur fille ? Fallait-il que les garçons soient aussi ridiculement présentés, uniquement branchés alcool et sexe ? Tout cela fait beaucoup. Tout comme la scène finale où Elin et Agnès sortent main dans la main des toilettes du lycée devant tous les élèves soucieux de voir avec quel garçon Agnès était enfermée, Elin lançant à la cantonade un "On part baiser" qui suscite peut-être l'hilarité - il faut bien sûr toujours mettre les rieurs de son côté ! -, mais qui donne à la scène et au film un aspect épouvantablement racoleur. Racolage efficace puisque le film a fait un carton en Suède. Il y avait sans doute mieux à faire et on le sent bien ici ou là quand Lukas Moodysson se fait plus attentif aux sentiments diffus d'Elin et d'Agnès à la découverte de leur sexualité et qui cherchent à comprendre ce qui leur arrive.