Le film de Karin Julsrud s'inscrit dans toute une série d'œuvres qui présentent l'extrême nord ou les campagnes reculées de la Scandinavie comme des régions peuplées de rustres barbares brutaux qui y font régner leur propre loi. Vous l'aurez compris, Bloody Angels est plus proche des Chasseurs de Kjell Sundwall ou du Village muet de Kari Väänänen que de La maison des anges de Colin Nutley. On peut, bien évidemment, s'interroger sur le bien fondé d'une telle attitude, sur ces shérifs citadins malmenés par les hors-la-loi locaux, sur ces groupes ou communautés qui imposent leurs idées par la violence et avec une rare cruauté. On peut, par contre, lutter contre cet aspect des choses, ce que faisait Erik dans le film de Kjell Sundwall. Le message de Karin Julsrud est beaucoup plus ambigu. Car, finalement, elle donne raison à la vengeance populaire qui s'est exercée sur une famille un peu marginale alors que rien ne prouvait la culpabilité des fils Hartmann, si ce n'est que leur fuite pouvait passer pour un aveu. Comme si, forcément, quand on ne vit pas comme les autres, on ne pouvait générer que des monstres, des violeurs de fillettes (de plus ici une jeune trisomique) et des meurtriers. Et cela, la sagesse populaire le savait et n'avait pas besoin de preuves pour exercer une vengeance quasi divine. Le pasteur du coin n'est d'ailleurs pas le moindre opposant au policier venu de la capitale. Comme si Oslo pouvait juger de ce qui se passe à Høtten ! L'ambiguïté du film devient encore plus flagrante quand Ramm, ayant appris la vérité, rejoint en quelque sorte les villageois, en abattant le coupable. Dans Bloody angels, le spectateur ne trouve finalement qu'un seul personnage sympathique : le jeune Niklas Hartmann, gamin sans cesse agressé et victime de la fureur des adultes, certes, mais également des autres enfants du village. C'est assez peu pour se raccrocher au film.