Mais si Johnny n'a pas la chance de voir Paris, il n'a pas non plus celle de se faire proprement trouer la peau. Il ne reste de lui après explosion d'une bombe qu'un morceau de chair sans membres. Le visage lui aussi est amputé de ses fonctions fondamentales, ces fonctions qui permettent le contact avec les autres, la communication. Johnny se retrouve seul dans sa détresse. Il n'y a plus de repos, ni de soulagement pour un calvaire qui s'éternise bientôt : un an, plus ? Dans sa tête, dernier organe vivant, celui où sont cachés tous les souvenirs, où grandissent souffrances et détresse, revit sans cesse le passé. Et tout se teinte de symbolisme cruel, atroce et inacceptable : les mots de celle qui l'aimait lui suppliant de fuir, ceux de son père affirmant que tout homme devrait donner jusqu'à son fils unique pour la Démocratie. Puis tout perd sens, les fantasmes se mêlent aux souvenirs : on l'a oublié, ceux qui sont heureux disent regretter les autres que la loi de la Démocratie a emportés, même Jésus, dernier recours selon sa mère, se trouve désemparé devant sa détresse. Rien ne semble donc plus pouvoir soulager cette souffrance sans nom qu'endure un esprit emprisonné dans un corps que des médecins-bouchers ont décidé de maintenir en vie, tout en légitimant par l'affirmation que toute activité cérébrale a cessé .... Ce film, extrêmement fort peut être vu à différents niveaux : la détresse de la l'impossible communication, le véritable amour de l'euthanasie, la torture qu'imposent ceux qui devraient soulager la souffrance en refusant la mort à un corps qui n'a plus rien d'humain. Qui n'a vu ce film n'est pas habilité à parler de la détresse humaine et de l'euthanasie.