"Elle sera mon héroïne jusqu'à la fin des temps et son nom sera Viola".
Deux êtres jeunes et dynamiques, otages d'un monde aux destinées préétablies, vont s'aimer dans un temps imparti, en offrant au théâtre ses plus belles pages, dans un potentiel poétique presque transcendant. Cette fusion temporaire permet d'insérer dans un contexte féminin convoité, un libre arbitre fougueux et créatif. Un sommet amoureux entre une femme promise, désirant ressentir avant de se soumettre et un poète en manque d'inspiration, ayant besoin de l'apport d'une égérie. Il faut être enthousiaste, lyrique et poignant dans deux tranches de vies minutées, permettant à deux esprits en pleine construction, de côtoyer l'extase et le bonheur dans une époque à l'image d'une reine au teint d'une pâleur cadavérique. Se réaliser par les sens, dans un contexte appartenant au sacrifice, en se consumant d'amour, loin d'un nouveau monde se rapprochant de plus en plus. Pour cela il faut s'adonner au texte et surtout le ressentir intensément en sachant que l’éthique et le rang le réduiront en cendres. Tout en étant parfois un peu inégal, "Shakespeare in love" atteint quelques sommets de sensibilité, dans un traitement un peu trop spectaculaire, mais ne masquant pas une réelle émotion ressentie devant quelques intimités. En se dirigeant vers la virginie et la nuit des rois, deux esprits ayant tout partagés, le temps d'une rencontre, pourront mieux supporter l'ennui et les contraintes de l'inspiration. Un très beau film.