Finalement "Le grand Bazar" ne vieillit pas si mal. Être la vingtaine pratiquement terminée, encore chez ses parents avec pour les plus chanceux un boulot terne et bruyant à deux heures de chez soi, retrace parfaitement en ce début des années soixante dix le déclin des trente glorieuses testé moralement comme bien souvent par une certaine jeunesse sans bagages, en vrille, camouflant son mal de vivre dans un délire permanent.Un seul équilibre pour une génération presque perdue, se réaliser quotidiennement et sans retenue dans un état second, en se servant de ses décalages les plus fous dont les extrêmes ne sont qu'un cri, une bouteille à la mer destinée à bousculer ses contemporains sous l'emprise du costume trois pièces, congelés par les contraintes de l'apparence.La soif d'aujourd'hui contre l'appât du gain, le boutiquier contre la grande surface, le contact humain contre la froideur de l'enseigne.S'éclater sur les quelques terrains vagues encore restants pendant que le grossiste compte la recette du jour sur fond de transports blindés et de constructions précaires reflète correctement le fumet de cet opus post soixante-huitard désincarnant ses sujets les plus naturels.En les nommant exclus ou robotisés, le seule remède pour survivre entre la peste et le choléra étant de se promener dans la vie comme dans un supermarché, en glanant ça et là sa pitance festive quotidienne.