Adapté d'une nouvelle et somptueusement mis en scène. Le Japon rural, avec cette nonchalance entre occupations terre-à-terre aux côtés d'une épouse et la pêche réservée aux hommes, de jour ou de nuit, rite immuable. L'eau toujours toute proche agirait-elle en purificatrice ?... Ce jeune égaré tue sa femme par coup de sang et se livre tout de suite après aux autorités (en fredonnant sur le trajet !) dans une logique qu'on doit payer pour ses bêtises, en porter le poids afin de renaître en s'aidant comme on peut, au besoin d'une anguille, comme un estropié d'une béquille. Tout au long du voyage - on s'évade très loin avec ce virtuose de la caméra - la question demeure : qui donc a écrit la lettre anonyme qui fit tout basculer ?... C'est POETIQUE (le symbole du poisson dans l'eau, celui d'un enfant à naître), COMIQUE (pas de l'oie des prisonniers, flamenco en territoire japonais, cérémonial du casse-croûte salué par un crapaud espiègle, tandis que le bonze avec son visage d'otarie affiche une bonhomie désopilante). C'est ESTHETIQUE, je pense au petit seau rose fluo assorti aux fleurettes, à la jeune suicidaire allongée dans l'herbe verte de verte, à ses pieds quand elle bondit de sa bicyclette, ou encore à l'ambiance du salon avec le petit garçon qui s'éclate...). Il y a aussi de la profondeur : l'indice PSYCHOLOGIQUE (mère dérangée) justifie bien le désespoir qui peut s'insinuer dans une jeune tête... Avec tout ça, c'est TERRIFIANT : la colère contre lui-même de cet incorrigible impulsif, et puis ces déchaînements de violence physique, celle du début, et les autres, collectives ! Atmosphère pittoresque dans cette reconversion de coiffeur assisté, et une forme d'oxygène inattendue sur la fin ! Déroutant mais délicieux.