La dernière séquence du film en résume bien l'esprit : on oscille perpétuellement entre le sérieux et la comédie, plus ou moins réussie, mais sans jamais trouver un véritable ton, un véritable rythme. Certes le début du film peut faire illusion, avec sans doute des effets déjà un peu gros et un jeu un peu outré des acteurs. Mais enfin, il y a des gags assez drôles, comme celui où, sur le ferry, Peter cherche à se débarrasser du chien qui en veut à la saucisse qu'il essaie de manger. Ne parvenant pas à éloigner l'animal, il balance sa saucisse par-dessus le bastingage et, à sa grande surprise, voit le chien se précipiter pour suivre l'objet de ses aspirations et disparaître dans les flots. Mais tout se gâte avec l'arrivée en Suède, et la folle cavale vers le nord n'a vraiment rien à voir avec celle narrée par Jan Troell dans Il Capitano. Vinterberg n'arrive pas à trouver un ton entre le dramatique (vol d'arme, meurtre) et le comique qui se fait de plus en plus lourd (scène où Peter et Karsten montés sur le toit de la voiture en marche urinent durant une séquence qui n'en finit pas). Le scénario se fait également des plus lâches : ils sont retrouvés bien facilement par Allan, par exemple. La lourdeur de l'humour, ou de ce qu'on veut nous faire passer pour de l'humour, devient d'une pesanteur à dégoûter le spectateur le mieux disposé envers le film. Quand on leur demande, à l'hôtel, leur identité, ils disent s'appeler respectivement Ingemar Stenmark et Helmuth Schmidt ! Ce qui finit quand même par sembler suspect au personnel dudit hôtel. Un peu auparavant, Peter, payant avec une carte bancaire volée à un Allemand, avait déjà prétendu s'appeler Helmuth… Kohl, cette fois. Comme on le voit, il y a un sérieux renouvellement dans le comique de ce film. Je passe sur certaines scènes ou propos louchant du côté de la scatologie, avec un petit côté branché (pédés, brouter, masturbation)… Le mauvais goût réussit même à se glisser dans les quelques scènes de bonheur autour du chalet où ils retrouvent Pernille et Eva. Il fallait le faire ! Après un court métrage des plus réussis, en 1994, Le garçon qui marchait à reculons, histoire toute en délicatesse et en émotion contenue d'un gamin de neuf ans qui ne se remettait pas de la mort accidentelle de son frère et décidait de marcher à reculons, pour essayer de remonter le temps, comme on remonte une cassette dans un magnétoscope, et une Fête de famille qui lui a valu un certain succès, on attendra avec attention le prochain film de Thomas Vinterberg.